Electrodes à base d’aérogels de SnO2, résistantes à la corrosion

LA MEMBRANE

   La membrane, qui joue le rôle d’électrolyte, a pour rôle de permettre le transport des protons, formés à l’anode, jusqu’à la cathode. En plus d’une conductivité protonique élevée, limitant les chutes de tension dues aux résistances internes, la membrane doit présenter certaines propriétés telles que :
– une conductivité électronique nulle
– une bonne tenue chimique et thermique en milieu acide
– une faible perméabilité aux gaz, ie à l’hydrogène, à l’oxygène et à l’azote
– des propriétés mécaniques alliant résistance et souplesse.
Depuis les années quatre-vingt, les membranes très largement utilisées sont en Nafion, produit par la société DuPont de Nemours [18]. Ce polymère est composé d’un squelette de è tétrafluoroéthylène (Téflon) auquel ont été greffés des groupes perfluorovinyl (–O-CF2-CF-OCF2 CF2-) avec une terminaison sulfonique –SO3-H+, voir Figure 8. Lorsque la membrane est hautement hydratée, les protons se lient à l’eau et se déplacent jusqu’à la cathode par l’intermédiaire des groupements sulfoniques. Ceci est favorisé par la possible réorientation de ces groupements par rotation [19]. Dans ce cas, la conductivité protonique du Nafion peut ainsi atteindre des valeurs de 0.2 S.cm-1 à la température de fonctionnement des PEMFCs (80°C) [20]. Cependant, lorsque la teneur en eau au sein de la membrane est très faible, il a été montré que le transport des protons est beaucoup plus lent et sa mobilité est uniquement régit par le champ électrique [19]. L’épaisseur de membrane, entre 15 µm et 150 µm, résulte d’un compromis entre la conductivité protonique, la perméabilité aux gaz, les propriétés mécaniques et les coûts. En 2015, son prix était supérieur à 120 $/m² pour des commandes de grande quantité [21] et constitue donc un élément clef du coût de la pile. L’utilisation de Nafion engendre aussi des problématiques de limitation des températures de fonctionnement des PEMFCs, qui ne doivent pas excéder 95°C. La vaporisation de l’eau, se produisant à ces températures, va provoquer un assèchement du matériau et va avoir des conséquences directes sur ses propriétés mécaniques et sa conductivité protonique [19, 22]. Afin d’évacuer la chaleur produite lors du fonctionnement des PEMFCs, l’utilisation du système de refroidissement externe est alors nécessaire. De nombreuses études se sont portées sur l’utilisation de membranes alternatives au Nafion avec pour objectifs de diminuer les coûts, d’accroitre la tenue mécanique et d’augmenter la température de fonctionnement des PEMFCs. L’approche la plus étudiée consiste à greffer des groupements d’acide sulfonique sur divers polymères aromatiques. Parmi ces membranes alternatives on peut notamment citer les poly (aryl éther cétone) sulfonés (SPARK) [23], les poly (aryl éther sulfone) sulfonés (SPACES) [24], polyimide sulfoné (SPI) [25] ou les poly(ether ether ketone) sulfonés (SPEEK) [26]. Pour renforcer les membranes et ainsi améliorer leurs propriétés mécaniques, certaines membranes composites à base de Nafion et d’un autre polymère tel que le PTFE, ont été élaborées [27]. Cependant, ces membranes alternatives n’ont pas encore dépassé les polymères perfluorosulfoniques en terme de performance / coût.

LE CATALYSEUR, LE PLATIN E

   Le platine est un métal de transition du bloc d du tableau périodique. Le système cristallin du platine étant cubique à faces centrées, la forme d’équilibre thermodynamiquement stable pour une nanoparticule est un octaèdre tronqué. Cela implique des orientations cristallines (111), (100) et éventuellement (110), voir Figure 9. Plus le diamètre de la nanoparticule diminue, plus les orientations (100) et (111) deviennent majoritaires au détriment de l’orientation (110) [29]. Or Tanaka et al. ont montré que pour la réaction ORR, l’activité catalytique du platine est supérieure selon la séquence d’orientation (110) > (100) > (111) [30]. De plus la structure électronique des nanoparticules de Pt semble aussi être influencée par leur taille. Ceci s’explique par les énergies de surface. En effet, pour des nanoparticules, le rapport surface sur volume est non négligeable et le nombre d’atome de platine de surface à faible nombre de coordination devient plus grand [31]. Autrement dit, les interactions entre l’oxygène adsorbé et le platine seront d’autant plus fortes que les nanoparticules seront petites, ce qui conduit à une diminution de l’activité catalytique spécifique, comme observées par plusieurs études [30, 32, 33].

PHENOMENES DE DEGRADATION DES MATERIAUX

   Lors du fonctionnement d’une PEMFC, les différents matériaux constituant l’AME (membrane, support de catalyseur et catalyseur) sont soumis à un environnement pouvant provoquer des détériorations et des modifications de type structural ou morphologique. Pour les applications de transport, les piles doivent en plus répondre à des demandes de puissance variées, ce qui implique des variations de potentiels pouvant parfois être brutales mais aussi des humidités relatives localement anormales. Les démarrages et arrêts répétés induisent des courants dits « inverses », provoquant une élévation brutale du potentiel avec des valeurs pouvant aller jusqu’à 1.4 V (bien supérieure à la tension à l’OCV). Dans leur rapport pour le département de l’énergie américain (Department of Energy, DoE) en 2005, Borup et al. ont montré qu’après 3500 h de fonctionnement « normal » à potentiel constant de 0.6 V les particules de platine présentes à la cathode de leurs AMEs grossissent et passent d’un diamètre de 1.9 nm à 3.1 nm [72, 73]. Par ailleurs les auteurs ont aussi montré que le taux de croissance de la taille des particules de Pt augmente avec l’augmentation de la température et de l’humidité relative. Des tests de vieillissement accéléré, AST pour Accelerated Stress Testing, ont alors été mis au point et normalisés par le département de l’énergie américain. Ces tests ont pour objectif double d’accélérer le vieillissement des PEMFCs, dont certains phénomènes ne se font ressentir qu’après quelques années en fonctionnement normal, et d’isoler les effets et les modes de défaillance pour étudier et comprendre les différents mécanismes mis en jeu. Toujours lors de l’étude menée par Borup et al. il est alors apparu qu’après des cycles de potentiels en triangle, le ratio Pt/carbone ainsi que la taille des particules augmentaient, et ce d’autant plus rapidement que la limite haute du potentiel appliqué est élevée. Le premier objectif des tests AST venait d’être en partie accompli. Le DoE a élaboré divers protocoles de tests de vieillissement accéléré qui ont été améliorés au fil des années. A titre d’exemple, en 2007 le test AST spécifique à la durabilité du support de catalyseur consistait à appliquer une tension constante de 1.2 V pendant 24 h [74]. Depuis 2013, celui-ci consiste à appliquer des cycles de potentiels en triangle. Un cycle consiste à passer de 1 V à 1.5 V puis à retourner à 1 V à une vitesse de 500 mV/s [75],

SNO2 COMME SUPPORT DE CATALYSEUR CATHODIQUE POUR PEMFC

   Comme nous venons de le voir, les calculs thermodynamiques issus des diagrammes potentiel-pH de Pourbaix, montrent que le dioxyde d’étain, semi-conducteur de type n (Eg =3,6 eV), devrait être très stable dans les conditions d’exploitation des PEMFC [121]. Du fait de sa résistance à la corrosion, certains auteurs ont montré que l’utilisation de SnO2 pur comme support de catalyseur cathodique peut effectivement améliorer de façon très significative la durabilité des PEMFC [129-131]. Ce composé permet également une meilleure tolérance au CO que les composés Pt/C [132-134]. Ceci peut s’expliquer par la possible réaction d’oxydation du CO adsorbé à la surface du Pt par les groupes hydroxyles présents à la surface de SnO2 [135]. De plus, lors de la réaction de réduction de l’oxygène, SnO2 favorise un mécanisme à 4 électrons et donc la formation d’eau plutôt que de peroxyde d’hydrogène, avec pour conséquence d’atténuer les phénomènes de dégradation de la membrane Nafion® [136]. Cependant dû aux faibles conductivités électriques et/ou des faibles surfaces spécifiques des composés SnO2 par rapport à celles du noir de carbone, les caractéristiques électrochimiques telles que la surface électrochimique active, les activités massiques et spécifiques de l’ORR de l’électrocatalyseur à base de SnO2 pur sont faibles comparées à celles de Pt/C. De récentes études ont montré le potentiel bénéfique du dopage de SnO2 avec Nb5+ [137-139] ou avec Sb5+ [137, 138, 140-145]. En plus d’augmenter la conductivité électronique, le dopage permet de modifier la morphologie du matériau [146, 147]. Doper a ainsi permis d’améliorer les caractéristiques électrochimiques par rapport aux électrocatalyseurs composés de SnO2 purs. Les performances restent tout de même plus faibles par rapport à celles des électrocatlyseurs Pt/C, et ce particulièrement pour les activités catalytiques massiques. Dans certains cas, selon les caractéristiques physico-chimiques du matériau, l’activité catalytique spécifique est grandement améliorée et devient même supérieure à celle des éléctrocatalyseurs Pt/C. Récemment Kakinuma et al. ont réussi à déposer des nanoparticules de platine de diamètre de 3.0 nm distribuées sur deux types de support ; support SnO2: Sb (chargement en platine de 12.3 %mass.) et SnO2: Nb (chargement en platine de 10 %m.). Les supports ont été préparés par décomposition par flamme d’un précurseur organométallique (flame oxidesynthesis) et sont composés de nanoparticules agrégées [138, 140]. Selon leurs mesures sur électrode à disque tournant, l’activité catalytique massique pour la réaction de réduction de l’oxygène et la stabilité de leurs électrocatalyseurs sont supérieures à celles de la référence Pt/C. Des chercheurs du même groupe ont aussi synthétisé un support SnO2: Ta possédant une surface spécifique de 45 m²/g. Selon leurs mesures sur électrode à disque tournant, les électrocatalyseurs Pt/SnO2: Ta résultants (chargement en platine de 15.8 %mass.) possèdent une activité catalytique massique pour la réaction de réduction de l’oxygène et une stabilité supérieure à Pt/C [148]. De plus les courbes de polarisation, enregistrées pour les AMEs, montrent aussi des performances supérieures à l’AME de référence à base de noir de carbone. Les activités catalytiques massiques plus élevées reportées dans le cas d’électrocatalyseurs Pt/SnO2 dopé comparées aux électrocatalyseurs Pt/C ont été attribuées aux fortes interactions entre le Platine et le SnO2 (phénomène SMSI, « Strong Metal-Support Interaction »). Kamiuchi et al. ont proposé que ces fortes interactions chimiques entre SnO2 et Pt peuvent modifier la structure électronique du Pt et ainsi diminuer l’énergie d’activation de dissociation de l’oxygène [149]. Cependant une étude récente a montré que ces fortes interactions chimiques sont plus vraisemblablement l’œuvre de contraintes dues à des effets stériques [150]. Ainsi des résultats très prometteurs concernant les performances et la durabilité d’électrocatalyseurs à base de dioxyde d’étain dopé ont été obtenus. Malgré des surfaces spécifiques relativement faibles, 45 m²/g pour le SnO2: Ta de Senoo et al. [148], l’activité catalytique massique de l’électrocatalyseur résultant s’est avérée être supérieure à celle de l’électrocatalyseur Pt/C de référence.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 : Bibliographie
I. Les piles à combustibles à membrane échangeuse de proton (PEMFCs) 
I.1. Fonctionnement des PEMFCs
I.1.1. La tension en circuit ouvert
I.1.2. Les surtensions apparaissant durant le fonctionnement des PEMFCs
I.2. Mécanismes mis en jeu durant le fonctionnement des PEMFCs
I.2.1. A l’anode, la réaction d’oxydation de l’hydrogene (HOR Hydrogen Oxidation Reaction)
I.2.2. A la cathode, la réaction de réduction de l’oxygne (ORR Oxygen Reduction Reaction)
I.3. Présentation des constituants principaux d’une PEMFC
I.3.1. La membrane
I.3.2. Les couches catalytiques
I.3.3.1. Le catalyseur, le platine
I.3.3.2. Le support de catalyseur
I.3.3 Les couches de diffusion
I.3.4. Les plaques bipolaires
I.4. le Stack
I.5. Situation économique actuelle des PEMFCs
II. Phénomènes de vieillissement des PEMFCs
II.1. Effet des polluants
II.2. Phénomènes de dégradation des matériaux
II.2.1. La membrane
II.2.2. Les couches catalytiques
II.2.2.1. Dissolution du platine
II.2.2.2. La migration et la coalescence des nanoparticules de platine
II.2.2.3. La corrosion du carbone
II.3. Conclusion
III. Les supports de catalyseurs alternatifs au carbone
III.1. Stabilité thermodynamique des éléments en condition de fonctionnement des PEMFCs
III.2. SnO2 comme support de catalyseur cathodique pour PEMFC
V. Le dioxyde d’etain 
IV.1 Généralités
IV.2. Applications
IV.2.1. Application comme oxyde transparent conducteur
IV.2.2. Application pour les batteries lithium-ion
IV.2.3. Application pour la catalyse hétérogène
IV.2.4. Application comme capteur de gaz
IV.2.5. Conclusion
IV.3. Aérogels de SnO2
IV.3.1. Synthèse de dioxyde d’étain par voie sol-gel [178, 179]
IV.3.1.1. hydrolyse / Condensation / Vieillissement
IV.3.1.2. Influence des paramètres de synthèse
IV.3.1.3. Le séchage des gels
IV.3.2. Propriétés des aérogels / xérogels de SnO2
VI. Conclusion
Chapitre 2 : Matériels et méthodes
I. Caractérisations physico-chimiques
I.1. Structure et Morphologie
I.1.1. Diffraction des rayons X (DRX)
I.1.2. Microscopie électronique à balayage (MEB)
I.1.3. Sorption d’azote
I.1.4. Microscopie électronique en transmission (MET)
I.2. Composition chimique
I.2.1. EDX / XPS
I.2.2. Spectrométrie d’absorption atomique (SAA)
I.3. Conductivité électronique
I.3.1. Spectroscopie d’impédance-Xerogels
I.3.2. Mesure de tension sous courant – Cellule dédiée
II. Mesures des performances des électrocatalyseurs
II.1. Electrode a disque tournant (RDE)
II.1.1. Présentation du montage expérimental
II.1.2. Protocole expérimental
II.1.2.1. Préparation de l’électrode de travail
II.1.2.2. Préparation de la cellule
II.1.2.3. Mesure de la surface électrochimique active (ECSA) – Voltamétries cycliques sous argon
II.1.2.4. Mesure de l’activité catalytique pour la réaction de réduction de l’oxygène -Voltamétries cycliques sous oxygène
II.1.3. Exploitation des résultats
II.1.3.1Calcul de la surface spécifique du platine (SPt)
II.1.3.2. Calcul des activités catalytiques massiques
II.2. Banc de test mono-cellule
Chapitre 3 : Support de catalyseur à base d’aérogel de dioxyde d’étain
I. La Synthèse
II. Caractérisation des propriétés physico-chimiques
II.1. Structure et morphologie
II.2. Composition chimique
II.3. Conductivité électronique
III. Discussion (matériau le plus adapté pour l’application)
IV. Conclusion
Chapitre 4 : Dépôt de nanoparticules de platine sur la surface des aérogels de SnO2 et caractérisation des propriétés physico-chimiques et électrochimiques
I. Dépot de Pt & Caractérisation des propriétés physico-chimiques des électroctalyseurs
I.1. Voie polyol (Méthode EG)
I.2. Méthode imprégnation/réduction (A)
I.2.1. Réduction sous atmosphère réductrice – A1
I.2.2. Réduction sous rayonnement ultra-violet- A2  A4
I.2.3. Irradiation UV suivie de traitements thermiques- A5  A8
I.3. Méthode imprégnation/réduction bis (B)
I.4. Conclusion
II. Mesures sur électrode à disque tournant : performances et durabilité des éléctrocatalyseurs
II.1. Influence de la méthode de dépôt (EG vs A)
II.1.1. Mesure de la surface spécifique du platine
Méthode EG
Méthode A
II.1.2. Mesure de l’activité catalytique pour la réaction de réduction de l’oxygène
Méthode EG
Méthode A
II.2. Durabilité de l’électrocatalyseur Pt/A6SS100 obtenu par la méthode EG
II.3. Influence du dopant
II.3.1. Mesure de la surface spécifique du platine
II.3.2. Mesure de l’activité catalytique pour la réaction de réduction de l’oxygène
III. Conclusion
Chapitre 5 : Tests en Pile, Performances et Durabilité
I. Préparation des AMEs
I.1. Dépôt de la couche catalytique
I.1.1. Présentation du robot spray
I.1.2. Dépôts obtenus
I.2. Préparation des AMEs
II. Tests en pile
II.1. Protocole de test
II.1.1. Le conditionnement
II.1.2. Courbes de polarisation (en galvanodynamique)
II.1.3. Mesure de Résistance
II.1.4. Mesure de la surface spécifique active du platine (SPt) (voltamétrie cyclique)
II.2. Performances en début de vie
II.2.1. Courbes de polarisation
II.2.2. Mesure de Résistance
II.2.3. Surface de platine actif
II.3. Durabilité des AMEs
II.3.1. Courbes de polarisation
II.3.2. Mesure de Résistance
II.4. Discussion sur la durabilité des AMEs à base de SnO2: Sb
II. Conclusion
Conclusions globales et perspectives

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