Effets du climat et des relations trophiques sur les oiseaux de l’arctique

EFFETS DES VARIATIONS CLIMATIQUES ET DES RELATIONS TROPHIQUES SUR LES POPULATIONS

La propagation des effets du climat à l’intérieur d’un écosystème peut se faire par l’ intermédiaire des interactions trophiques. Les variations du climat peuvent en effet affecter les plantes ou les animaux directement (réchauffement ou refroidissement directs, coûts de thennorégulation ou de locomotion; Post & al., 1999; Klanderud, 2005; Le Roux & al. , 2005; Figure 1.1) ou alors, d’importance équivalente, indirectement en affectant la relation entre l’individu et d’autres organismes (prédation, herbivorie, compétition; Forchhammer & Post, 2004; Figure 1.1). Par exemple, la température hivernale moyenne ou la quantité de neige peuvent influencer directement la survie des individus d’une espèce d’oiseau ou de mammifère et affecter en conséquence la dynamique de la population via des effets sur les dépenses énergétiques (Saether & al., 2000; Humphries & al., 2004). Les effets directs du climat sont généralement plus faciles à détecter et à étudier. En effet, leur impact sur les organismes est plus apparent, ils surviennent souvent sans délai dans le temps et ils impliquent les organismes eux-mêmes. Bien que les effets indirects soient très importants, ils sont beaucoup plus difficiles à documenter puisqu’ils impliquent habituellement des interactions entre plusieurs niveaux trophiques et peuvent même survenir avec un délai dans le temps (Forchhammer & al., 1998; Durant & al., 2003; Schmitz, 2004).

Par exemple, un couvert de neige plus important durant 1′ hiver en lien avec les fluctuations de 1′ ONA peut contribuer à réduire la capacité de se nourrir d’un herbivore et à augmenter le succès de chasse d’un prédateur (en affectant la mobilité de la proie) influençant ainsi négativement cette population d’herbivores l’année suivante. Les plantes subiront alors une pression de broutement moins importante et pourront augmenter leur productivité deux ans plus tard (Forchhammer & al., 1998; Post & al., 1999; Post & Stenseth, 1999). Globalement, il apparaît essentiel de considérer les effets indirects dans la formulation d ‘hypothèses traitant des principaux mécanismes causaux qui lient les organismes aux paramètres climatiques. La réponse des organismes face à des variations climatiques interannuelles est complexe. Elle comprend entre autres des modifications dans l’abondance et la distribution spatiale des espèces, des changements dans la synchronisation de la reproduction avec les autres espèces de l’écosystème et des modifications sur le plan des relations interspécifiques (Post & Stenseth, 1998, , 1999; Mysterud & al., 2001; Ottersen & al., 2001). La réponse de différentes espèces d’un même niveau trophique face aux événements environnementaux peut différer largement et peut être fortement influencée par les interactions avec les autres espèces de l’écosystème (Holmgren & al. , 2006). De plus, dépendamment des conditions climatiques, un système dominé par les relations descendantes peut devenir majoritairement régi par les relations ascendantes (Holmgren & al., 2006) En ce sens, les effets du climat peuvent s’étendre à l’ensemble de la chaîne trophique d’un écosystème si les perturbations climatiques influencent la dynamique des populations végétales (Oksanen & al., 1981).

EFFETS DU CLIMAT ET DES RELATIONS TROPHIQUES SUR LES OISEAUX DE L’ARCTIQUE

La dynamique de plusieurs populations d’oiseaux nichant dans l’Arctique ou dans les régions sub-arctiques semble être fortement influencée par les conditions climatiques (Sheaffer & Malecki, 1996; Skinner & al., 1998; Ward & al., 2005; Madsen & al., 2007; Morrissette, 2008) et les interactions trophiques indirectes entre proies, via des prédateurs communs (Summers & af., 1998; Blomqvist & al., 2002; Brook & al., 2005). Les oiseaux se reproduisant dans l’Arctique doivent rapidement initier leur cycle reproducteur en vue de produire des jeunes avant la fin du court été arctique (Lepage & al., 1998; Lepage & al., 2000; Reed & al. , 2003b). Les conditions qui prévalent au printemps sont souvent déterminantes pour la productivité de ces espèces puisqu ‘elles vont influencer l’ accès à la nourriture et aux sites de nidification (Sheaffer & Malecki, 1996; Skinner & al. , 1998; Reed & al., 2004; Madsen & al., 2007; Dickey & al., 2008). Un retard trop important dans l’initiation de la reproduction peut empêcher les oiseaux de se reproduire, mener à l’abandon des nids et entraîner la mort des jeunes à l’arrivée de l’automne alors qu’une nidification amorcée tôt va améliorer le taux de croissance, la survie et les chances de recrutement des jeunes dans la population (Lepage & al., 1998; Lepage & al., 2000; Reed & al., 2003b; Menu & al., 2005).

Il Étant donné le peu d’espèces qui composent chaque niveau de la courte chaîne trophique en Arctique, les interactions trophiques peuvent avoir une grande importance sur la dynamique des populations aviaires. Il a entre autres été clairement démontré que les fluctuations des populations nordiques de petits mammifères peuvent affecter indirectement l’abondance et le succès reproducteur d’oiseaux herbivores par l’intermédiaire des prédateurs communs (Summers & Underhill, 1987; Summers & al., 1998; Bêty & al., 2002; Krebs & al., 2003; Ims & Fuglei, 2005). En effet, les variations annuelles de la pression de prédation sur une proie alternative, telle que les oiseaux seraient le résultat des réponses fonctionnelle et numérique des prédateurs aux fluctuations d’abondance des rongeurs (Hypothèse des proies alternatives; Bêty & al. , 2001; Lecomte & al., 2008a).

LE CAS DE LA GRANDE OIE DES NEIGES

La grande oie des neiges (Chen caerulescens atlantica) est un herbivore majeur dans la toundra arctique (Gauthier & al., 1995; Gauthier & al., 1996; Gauthier & al., 2004). La taille de la population a connu une augmentation considérable depuis les 40 dernières années, passant d’environ 30 000 individus en 1965 à plus d’un million en 2006 (Menu & al., 2002; Service Canadien de la Faune, données non publiées). Après les 4000 km de migration qui la séparent de son aire d ‘hivernage, elle broute considérablement les plantes disponibles au printemps sur son aire de nidification dans le Haut-Arctique canadien afin d’accumuler de l’énergie qui servira à la ponte (Choinière & Gauthier, 1995). L’île Bylot au Nunavut (73°08 ‘N, 800 00’W) est un sanctuaire d’oiseaux migrateurs où l’on retrouve la principale colonie de grande oie des neiges (> 25 000 couples; Reed & al., 2002). Cette île est composée de toundra mésique, de milieux humides et d’habitats xériques. C’est dans les milieux humides, dominés par des graminoïdes (Carex aquatilis var.stans, Eriophorum scheuchzeri, E. angustifolium, Dupontiafisheri, Pleuropogon sabinei et Arctagrostis latifolia), que les oies se nourrissent principalement (Gauthier & al., 1995; Gauthier & al. , 1996; Massé & al., 2001).

À court tenne, le broutement exercé par la population d’oie des neiges sur les milieux humides ne semble entraîner que peu d’impact sur la productivité générale des plantes vasculaires (ni surcompensation, ni sous-compensation). À plus long tenne par contre, les oies ont un effet négatif puisqu’elles maintiennent la productivité du milieu à un niveau plus faible (Gauthier & al. , 1995; Gauthier & al., 2004). La pression de broutement sur les plantes est extrêmement variable entre les années et atteint en moyenne 40 % de la production annuelle de plantes (Massé & al., 2001). C’est plutôt en juillet, alors que les jeunes nouvellement éclos se joignent aux adultes, que survient la majorité de ce broutement intensif dans les milieux humides. Ce broutement induit de nombreuses modifications dans les communautés végétales, incluant une baisse de la production et une succession dans la composition spécifique (Gauthier & al., 2004). Étant donné que l’oie est très sélective dans sa quête alimentaire, on assiste à une sous représentation des plantes préférées, telles Eriophonlm spp et une autre espèce a tendance à dominer, soit Dupontia fish eri (Gauthier & al., 2004).

Problématique spécifique

Étant donné l’importance de la production végétale dans les écosystèmes terrestres arctiques et de tous les effets qu’une modification de celle-ci implique, nous proposons de quantifier les effets du climat et des interactions trophiques indirectes sur la pression de broutement que les oies exercent sur la végétation de l’île Bylot. Dans ce système, les relations prédateur-proie et herbivore-plante semblent fortement influencer la dynamique du système (Gauthier & al., 2004). La majorité de la pression de broutement s’exerce durant la période d’élevage des oisons. Le nombre total d’oies alors présentes à l’île Bylot, soit la population locale, dépend surtout de la probabilité de reproduction (qui détennine l’effOli), mais également du succès de reproduction des femelles adultes. L’île Bylot est désertée par la majorité des couples non-reproducteurs ou ceux ayant subi un échec avant l’éclosion (Reed & al., 2003a). Ainsi, la population locale con-espond essentiellement au nombre d’oies adultes reproductrices dont les nids ont éclos avec succès ainsi qu’à l’ensemble des jeunes produits au cours de l’été.

Par ailleurs, la probabilité de reproduction fait référence à la proportion d’oiseaux adultes qui tente de se reproduire (i.e. la ponte d’au moins un oeuf) et elle est fOitement corrélée à la densité de nids (Reed & al., 2004). Elle est le principal déterminant de l’effort de reproduction. La principale cause d’échec à la nidification des oies est la prédation, surtout celle causée par les renards arctiques (Bêty & al., 2001; Lecomte & al., 2008a). La pression de prédation augmente sur les oeufs et les jeunes des oies lorsque la population de lemmings est dans une période de faible abondance (Bêty & al., 2002; Lecomte & al., 2008a). D’autre paIt, la probabilité de reproduction des oies est fortement influencée par les conditions climatiques rencontrées durant la période pré-reproductrice (Reed & al., 2004 ; Dickey & al., 2008). En effet, les conditions printanières sont déterminantes pour la disponibilité de la nourriture et l’accès aux site de nidification, et influencent la date et la taille de ponte via des effets sur la condition corporelle des femelles et la probabilité de nicher (Bêty & al., 2003; Reed & al. , 2004).

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Table des matières

AVANT-PROPOS
R EME RCiEMENTS
RÉSUMÉ
TABLE DES MA TIÈRES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
LISTE DES ANNEXES
CHAPITRE 1 INTRODUCTION GÉNÉRALE
VULNÉRAB ILI TÉ DE L’ÉCOSYSTÉME ARCTIQUE
DYN AM IQUE TROPHIQUE
EFFETS DES VARIATI ONS C LIMATIQUES ET DES RELATIONS TROPHIQUES SUR LES POPULATIONS
EFFETS DU C LIMAT ET DES RELAT IONS TROPH IQUES SUR LES O ISEAUX DE L’ARCT IQUE
L E CAS DE LA GRAND E OIE DES NEIGES
OBJ ECTlFGÉN ÉRAL DE L’ÉTUDE
Problématique spécifique
Objectifs
CHAPITRE 2 CASCADING EFFECTS OF CLIMATE AND INDIRECT TROPHIC
INTERACTIONS ON THE GRAZING IMPACT OF AN ARCTIC HERBIVORE
RÉSUMÉ
ABSTRACT
INTRODUCTION
MA TERIAL AND METHOD
STUDY SySTEM
Breeding cycle of greater Sl/OW geese
D ATA
A I/nuai plal/t production ami biomass grazed
Climatic Data
Lemming abumiallce
Survey of goose population size ami spril/g harvest
STATlSTlCAL ANALySES
RESULTS
I N FLUENCE OF CL/MA TIC CONDITIONS ON ANNUA L PLANT PRODUCTION
CASCADING EFFECTS OF CL/MATE AND TROPHIC INTERACTIONS ON GRAZING INTENSITY
DISCUSSION
RELATIONSHIP BETWEEN NET ANNUAL PLANT PRODUCTION AND CL/MA TIC PARAMETERS
CL/MA TIC CONDITIONS IN FLUENCING GOOSE GRAZING PRESSURE
C ASCADING EFFECTS OF LEMMING CyCLES
C A RRY-O VER EFFECTS OF SPR1NG HAR VEST
CONCLUSION
ACKNOWLEDGMENTS
LITTERA TURE CITED
TABLES AND FIGURES
APPENDIXES
CHAPITRE 3 CONCLUSION GÉNÉRALE
CONTRIBUTIONS
PERSPECTIVES FUTURES
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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