Du code de l’urbanisme aux echelles territoriales des politiques d’urbanisme

Le droit des sols : une récente compétence locale

Avant de définir notre objet de recherche, définissons un certain nombre de termes et de contextes.

Définitions préalables

Droits des sols : Le droit des sols sera défini comme l’ensemble des droits dont jouit un propriétaire pour bâtir son terrain, l’aménager lui ou les bâtis sur la parcelle, au regard de la législation nationale, des règlements locaux d’urbanisme réglementaire. Application du droit des sols : L’application du droit des sols est l’ensemble des processus conduisant à la délivrance ou non d’autorisations d’urbanisme au regard du droits des sols. Celleci est appliquée par les services de l’Etat ou d’une collectivité. Autorisations d’urbanisme : Les autorisations d’urbanisme sont l’ensemble des documents délivrés par les autorités compétentes autorisant le propriétaire à réaliser son projet au regard de l’application du droits des sols.

Les compétences en termes d’urbanisme et de droit des sols sont longtemps restés des compétences étatiques en France. Il faut attendre les lois dites « de décentralisation » de 82 et 83 pour libérer, en partie, l’action locale d’urbanisme de la tutelle de l’Etat. La loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat vise à rendre les communes responsables de la planification, ainsi que de l’instruction des autorisations s’y rapportant. Depuis, plusieurs lois sont venues compléter les possibilités de planification à l’échelon communal et l’articuler avec les documents stratégiques de planification et de programmation à un échelon territorial supérieur. La loi SRU du 13 décembre 2000 redéfinit la planification territoriale et l’articulation des différents documents (PLU, SCoT, …). La création et la redéfinition des intercommunalités, notamment par la loi de 1999 dite Chevènement, confèrent des compétences intimement liées au droit des sols aux communautés urbaines, de communes ou d’agglomération, telles l’aménagement de l’espace, la politique du logement ou l’équilibre social de l’habitat. Si les compétences en termes d’aménagement et d’urbanisme sont de fait partagées par différentes collectivités ou structures intercommunales, le droit des sols reste compétence exclusive des communes, en dehors du cas des communautés urbaines. Depuis 1983, les communes ont la possibilité d’instruire elles-mêmes les autorisations prises en leur nom exclusivement. Les autorisations prises au nom de l’Etat restent instruites par les services déconcentrés de ce dernier. Pour les autorisations instruites par les services de l’Etat délivrées au nom de la commune, le Maire, signataire de l’autorisation, en est tenu juridiquement responsable. Dans les faits, la majorité des communes, notamment contrainte par des incitations telles les règles de constructibilité limitée, est pourvue d’un document d’urbanisme : plan local d’urbanisme ou document en tenant lieu. En revanche parmi les communes disposant d’un document d’urbanisme et délivrant les autorisations d’urbanisme, peu instruisent en interne les demandes. L’application du droit des sols, en France s’effectue donc à l’échelle locale sous l’autorité de la commune. Cette compétence s’applique au respect du Code de l’urbanisme et des documents d’urbanisme locaux. L’application de ce droit, à travers la délivrance d’autorisation d’urbanisme se fait après instruction des demandes, en interne ou par mise à disposition des services de l’Etat. L’article 145 de la loi 2004-809 dite relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004 énonce la possibilité pour les communes de déléguer à un EPCI, suivant une convention, l’instruction des autorisations d’urbanisme. Cependant, l’instruction des autorisations d’urbanisme en tant qu’acte technique renvoie nécessairement au contenu des autorisations qui appelle une ingénierie adaptée, soit une ressource technique de mise en œuvre de la compétence, et aux conditions d’instruction, notamment en termes de délais d’instruction. Instruire une autorisation, c’est étudier, au regard de documents d’urbanisme locaux, un contenu déterminé par la loi, et dans un temps déterminé.

Nous comprenons donc que pour interroger aujourd’hui l’échelle d’exercice de cette compétence, qui renvoie à la question des ressources à mobiliser, il nous faut replacer l’acte d’instruction dans le contexte législatif récent de réformes du Code de l’urbanisme, et en particulier la réforme dite « des autorisations d’urbanisme », de l’ordonnance du 8 décembre 2005, mise en application le 1er octobre 2007.

Le contexte législatif récent de réforme du Code de l’urbanisme 

Les nouvelles dispositions entrées en vigueur le 1er octobre 2007 trouvent leur origine, au-delà des souhaits depuis bien longtemps exprimés par certains acteurs de la construction (promoteurs, opérateurs publics ou privés, …), dans une lettre de mission du Ministère de l’Equipement, des Transports, de l’Aménagement du territoire, du Tourisme et de la Mer, et du Ministère de la Justice du 29 juin 2004, à Monsieur Philippe Pelletier, avocat au Barreau de Paris, Président de l’ANAH (Agence Nationale pour l’Amélioration de l’Habitat), chargé par un travail de concertation élargie, d’émettre des propositions quant à une amélioration du Code de l’urbanisme. Par cette lettre de mission, le Gouvernement affiche sa décision de « procéder à une réforme en profondeur des autorisations d’urbanisme avec pour objectifs principaux la simplification des procédures et une meilleure prise en compte de la qualité » . Les propositions demandées se doivent d’apporter des réponses à un constat édicté : « le droit de l’urbanisme fait l’objet de nombreuses critiques en raison des difficultés contentieuses que rencontrent de plus en plus fréquemment de nombreux aménageurs ou constructeurs ».

En l’attente de conclusions et propositions du groupe de travail présidé par Philippe Pelletier, la loi du 6 décembre 2004 (loi n° 2004-1343), dite loi de simplification du droit, autorise le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance sur la réforme du régime du permis de construire  des autorisations d’urbanisme.

L’origine de la réforme : le rapport Pelletier

Le rapport, dit rapport Pelletier, s’intitulant Propositions pour une meilleure sécurité juridique des autorisations d’urbanisme, est remis en janvier 2005 aux Ministres l’ayant sollicité. Le groupe de travail constitué d’un ensemble de juristes, de six représentants des aménageurs, promoteurs, investisseurs, architectes, élus locaux, associations protectrices de l’environnement, et d’universitaires, a organisé le rapport de la manière suivante : Un constat, Des objectifs, 34 propositions concernant : La qualité juridique et la simplification des autorisations d’urbanisme, La remise en cause des autorisations, L’amélioration du traitement des recours juridictionnels, Le sort des constructions achevées.

Le constat détaille 5 grands points :
La qualité insuffisante des documents d’urbanisme participant à l’insécurité des autorisations d’urbanisme qui en découlent, La complexité du droit de l’urbanisme le rendant peu accessible, Le contentieux incompatible avec le temps de l’activité économique de la construction, La création architecturale parfois bridée à l’excès, L’instruction des autorisations particulièrement complexe et responsabilisant pour les collectivités, L’insuffisante anticipation du contentieux en amont.

Les propositions formulées par le groupe de travail, sont largement reprises dans la réforme du Code de l’urbanisme.

Les textes clés de la réforme

L’ordonnance du 8 décembre 2005 relative au permis de construire, aux autorisations d’urbanisme (n° 2005-1527) constitue le texte initial de la réforme, modifiant de façon notable le livre IV du Code de l’urbanisme. L’ordonnance opère le regroupement des 11 autorisations et 4 déclarations en 3 catégories de permis et 1 déclaration. La loi « ENL » du 13 juillet 2006 (n°2006-872) afin de faciliter la réalisation d’opération de logements, entre autres, sécurise les acteurs de la construction en modifiant le régime de retrait des autorisations d’urbanisme, le régime des constructions édifiées irrégulièrement et l’intérêt à agir des associations. Le décret du 5 janvier 2007 (n° 2007-18) applique l’ordonnance du 8 décembre 2005. Il précise le champ d’application des différentes autorisations : permis de construire, permis d’aménager, permis de démolir et autorisation préalable. De plus le décret garantit les délais d’instruction.

L’ordonnance du 8 décembre 2005 : nouvelle donne des autorisations d’urbanisme

Au regard des objectifs initialement formulés par le Gouvernement et aux vues des propositions du rapport Pelletier, la réforme des autorisations d’urbanisme s’articule autour de 3 axes majeurs : Simplifier les autorisations d’urbanisme, Sécuriser l’acte de construction, Garantir la qualité de l’urbanisme.

Simplifier les autorisations d’urbanisme

La première simplification concerne le regroupement de 11 autorisations et 4 déclarations en 3 permis et 1 déclaration comme suit : Permis de construire, Permis d’aménager, Permis de démolir, Déclaration préalable.

Au-delà de la simple redéfinition des autorisations d’urbanisme, la réforme s’attache à en repréciser le champ d’application. Ainsi, certaines opérations et constructions sont dispensées de toute formalité, par exemple les démolitions hors secteurs sauvegardés ou les constructions temporaires de moins de 3 mois. Par rapport à «l’avant réforme », un certain nombre d’actes changent de régime, passant du régime du permis au simple régime déclaratif : par exemple, les constructions de SHOB inférieure à 20m², les travaux intérieurs ou certains changements de destination. Dans deux cas précis, il est désormais possible de fusionner les autorisations d’urbanisme : Permis de construire et permis d’aménager peuvent valoir permis de démolir, Permis d’aménager peut, dans certains cas, valoir permis de construire ou démolir.

Enfin, le nombre de pièces à joindre à chaque dossier est redéfini et restreint par rapport à l’ancien régime d’autorisation. Regroupement des autorisations, reprécisions de leurs champs d’application, limitation du régime du permis au cas impactant le cadre environnant et fusion des autorisations d’urbanisme en une autorisation unique, doivent permettre de simplifier grandement la demande d’autorisation d’urbanisme.

Cette simplification touche toute la chaîne de l’autorisation : le pétitionnaire dépose un dossier, unique, dans un nombre de cas restreint, l’instructeur suit un dossier par opération limité aux éléments structurants du projet. Si les conditions d’instruction normalisées par 3 types d’autorisations sont certainement simplifiées, la réduction du nombre d’autorisations et la présentation de documents simplifiés ne semblent cependant pas répondre entièrement à l’ambition de simplification des autorisations d’urbanisme. En effet, si les autorisations sont désormais au nombre de trois, peu de travaux et aménagements sont dispensés d’autorisations, ils font pour la majorité l’objet d’une des trois nouvelles autorisations.

Sécuriser l’acte de construction 

Pour les opérateurs
Dans la continuité d’un des grands objectifs poursuivis par la loi « ENL », à savoir favoriser la construction, la réforme s’est attachée à sécuriser l’autorisation d’urbanisme. Si les évolutions ci-avant présentées participent, par la limitation des cas nécessitant une autorisation ou un permis, à sécuriser l’acte d’urbanisme, ce n’est pas sur ce point que les opérateurs, notamment les grands groupes de promotion ou les opérateurs publics possédant d’importantes capacités techniques à monter un dossier, trouveront gain de sécurité, mais plutôt sur les conditions d’instruction du dossier.

En amont du dépôt de demande d’autorisation, le certificat d’urbanisme voit son objet inchangé. Les deux certificats, informatif et opérationnel, sont maintenus, et leur durée unifiée à 18 mois. Nouveauté gage de sécurité juridique du titulaire cependant : le certificat d’urbanisme cristallise toutes les prescriptions des documents d’urbanisme, inscrites ou non au certificat, à sa date de délivrance. Le demandeur de permis muni d’un certificat d’urbanisme valide, est donc couvert de toute modification des documents d’urbanisme.

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Table des matières

Introduction
Du code de l’urbanisme aux echelles territoriales des politiques d’urbanisme
1. Le Code de l’urbanisme en réformes
1.1. Le droit des sols : une récente compétence locale
1.2. Le contexte législatif récent de réforme du Code de l’urbanisme
1.3. L’ordonnance du 8 décembre 2005 : nouvelle donne des autorisations d’urbanisme
1.4. La délégation d’instruction et ses conséquences territoriales
2. Contexte théorique de recherche : les réformes d’échelles territoriales
2.1. La délégation d’instruction : objet et prétexte de recherche
2.2. Inscription de la recherche dans le cadre de référence des changements d’échelle territoriale
2.3. Mise en perspective de la recherche avec le cadre théorique de référence des réformes juridiques
3. Problème de recherche et hypothèse
3.1. Problème de recherche
3.2. Postulat et hypothèse
Du territoire à la construction inductive de connaissances sur les changements d’echelles territoriales
1. Méthode de recherche
1.1. Une méthode inductive, qualitative
1.2. Des analyses de contenu
1.3. Des entrevues
2. Outils de mise en œuvre de la méthode
2.1. Matériau de recherche
2.2. Questionnaire d’entrevues
2.3. Grille d’analyse du matériau de recherche
3. Terrains de recherche
3.1. Deux territoires périurbains, de tailles modestes
3.2. Deux terrains de comparaison : une communauté délégataire, l’autre non
3.3. Mise en perspective des résultats : le cas d’une communauté de communes angevine
Lectures multiples d’une realité de changements d’échelles territoriales
1. Une non réforme d’aménagement et d’échelles ?
1.1. Procédures d’instruction comparées
1.2. Une résilience originale dans le champ des politiques publiques locales : le distinguo du politique et du technique
1.3. Un maintien des politiques stratégiques de développement à l’échelle communale
1.4. Une absence de changement de pratiques des autres compétences d’urbanisme
2. Une réforme de régulation institutionnello-technique ?
2.1. Une lecture de régulation des lois de décentralisation
2.2. Une pérennisation de la ressource en ingénierie
2.3. L’assurance d’un meilleur contrôle sur la qualité de l’instruction
2.4. D’une qualité d’instruction politiquement valorisable, à de nouveaux rapports institutionnello-politiques entre communes et intercommunalité
2.5. Une régulation sous incitation étatique
2.6. Une régulation de relative négation des territoires
3. Un mouvement plus profond vers un nouvel urbanisme intercommunal ?
3.1. Une indéniable montée en puissance des compétences et missions intercommunales
3.2. Le développement de l’ingénierie intercommunale en matière d’urbanisme
3.3. L’intercommunalité : une nouvelle légitimité d’intervention en matière d’urbanisme et de planification
3.4. Vers des documents d’urbanisme intercommunaux ?
3.5. Vers une ingénierie des territoires de faible densité de population ?
Conclusion

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