Données générales sur les cancers

Progression tumorale

Données générales sur les cancers

La cancérogenèse est un processus multifactoriel et multiphasique. Elle correspond à une cascade d’évènements qui est le résultat d’un caractère évolutif depuis l’exposition aux premiers carcinogènes jusqu’à l’apparition de la tumeur (Hanahan and Weinberg, 2000). Bien qu’il soit toujours difficile de pouvoir préciser de façon exacte les facteurs responsables de l’altération de la cellule normale et sa transformation en cellule tumorale, Douglas Hanahan et Robert Weinberg définissent cette transformation comme étant la résultante de l’acquisition et de l’accumulation de 10 propriétés caractéristiques (Hanahan and Weinberg, 2011) : un maintien des signaux stimulant la prolifération cellulaire, une évasion aux inhibiteurs de la prolifération, un échappement à la destruction par le système immunitaire, une activation de l’immortalité réplicative, une induction tumorale de l’inflammation, une accumulation d’instabilité et de mutations génomiques, une résistance à l’apoptose, une dérégulation du métabolisme énergétique de la cellule, une induction de l’angiogenèse et une activation de l’invasion et de la formation de métastases ( Figure 1).

Le cancer est donc le résultat d’une accumulation d’altérations génétiques. De plus, à chaque cycle cellulaire une sélection clonale s’impose aux cellules tumorales suite à l’acquisition de compétence particulière, leur permettant ainsi de franchir toutes les barrières de protection de l’organisme pour donner naissance à une tumeur maligne (Evan and Vousden, 2001). Les modèles expérimentaux ont permis d’établir la cancérogénèse comme un processus à 3 étapes : initiation, promotion et progression (Jakobisiak et al., 2003). L’initiation est déclenchée par des dommages de l’ADN spontanés ou activés par des substances cancérigènes qui, en l’absence de réparation, peuvent produire des mutations génétiques. Occasionnellement, certaines de ces mutations, telles que l’activation de proto-oncogènes ou l’inhibition de gènes suppresseurs de tumeurs, créent les conditions favorables pour la prolifération cellulaire et l’inhibition de l’apoptose. La deuxième étape correspond à la promotion au cours de laquelle des clones cellulaires sont générés suite à l’acquisition d’une indépendance vis-à-vis des facteurs de croissance. On parle ainsi à ce stade de lésions précancéreuses. Mais ce n’est qu’à la dernière étape, dite de progression, que ces lésions deviennent malignes et correspondent à l’expression clinique du cancer. Cette dernière phase suppose l’acquisition d’anomalies génétiques irréversibles supplémentaires permettant la progression de la tumeur, son invasion et sa dissémination métastatique. Cependant, la cellule tumorale n’est pas la seule responsable du processus de tumorigenèse, il est aussi largement admis que les cellules stromales et les interactions tumeur-stroma jouent un rôle primordial dans le développement tumoral (van den Hooff, 1988). Ce microenvironnement stromal comprend les cellules épithéliales, les fibroblastes, les myofibroblastes, les cellules endothéliales et les cellules inflammatoires. En effet, des études in vitro et in vivo montrent que les fibroblastes participent à la formation et à la croissance tumorale (Samoszuk et al., 2005). De façon intéressante, il a été aussi montré qu’une forte réaction stromale pouvait être corrélée avec une mauvaise réponse aux traitements chimiothérapeutiques dans le cancer du sein (Farmer et al., 2009). En revanche, l’infiltration des tumeurs par des macrophages augmente leur sensibilité à ces traitements (Andre et al., 2010). L’ensemble de ces résultats montre l’importance des interactions tumeur-stroma dans la survie et la progression tumorale.

Dissémination métastatique 

La progression tumorale vers la formation de métastases est un processus à plusieurs étapes dans lequel les cellules malignes se propagent à partir de la tumeur d’origine pour coloniser des organes éloignés (Gupta and Massague, 2006). Cependant, malgré la similitude des étapes de base de la dissémination métastatique à partir de différents organes, les métastases émergent à un rythme différent, dépendant du contexte, et sont cliniquement soignées de façon différente. De plus, un autre point important à noter est la capacité de chaque type de tumeur à coloniser un organe ou un groupe de tissus préférentiels (Fidler, 2003 ; Nguyen et al., 2009). C’est le cas des métastases des cancers de la prostate et du sein qui sont largement confinées dans l’os. Il en est de même pour les métastases du mélanome oculaire qui apparaissent exclusivement au niveau du foie, alors que les cellules du mélanome de la peau migrent préférentiellement vers les poumons, le cerveau, la peau et le foie.

Une autre variable importante est l’évolution temporelle des métastases. En effet, les adénocarcinomes de sein et de poumon métastasent dans des organes similaires, y compris les os, les poumons, le foie et le cerveau. Cependant, leur cinétique de progression métastatique diffère. En effet, la rechute des patients, ayant subi une résection d’une tumeur primaire de poumon non à petites cellules, survient quelques mois après la chirurgie, alors qu’à la suite d’une mastectomie radicale, le cancer du sein peut rester dormant des années, voire des décennies avant de réapparaitre (Feld et al., 1984; Karrison et al., 1999). Une simplification du processus métastatique permet d’identifier quatre étapes principales communes à tous les types de cancers : l’intravasation, la survie dans la circulation, l’extravasation et la colonisation (Figure 2).

Intravasation 

Pour coloniser les organes à distance, les cellules tumorales doivent passer de leur site primaire vers le sang ou la lymphe. Ce passage nécessite la dégradation de la matrice extracellulaire (MEC) et la migration cellulaire. Cette dégradation est assurée par différentes protéases, notamment le système formé de l’urokinase (uPA), son récepteur (uPAR) et ses inhibiteurs (PAI) (Leupold et al., 2007). Les métalloprotéinases (MMP) et leurs inhibiteurs (TIMP) jouent également un rôle considérable dans la cascade protéolytique et l’invasion locale (Egeblad and Werb, 2002). Suite à l’activation de la MEC, un certain nombre de facteurs tels que le TGFβ ou le VEGF sont sécrétés pour permettre le tropisme et le chimiotactisme des cellules tumorales (Finak et al., 2009). En effet, le TGFβ augmente l’intravasation des cellules tumorales mammaires à travers la circulation sanguine par augmentation de l’invasion locale et de la migration cellulaire (Ramis-Conde et al., 2009). Ce phénomène de migration nécessite la perte de l’adhésion intercellulaire nécessaire à l’acquisition d’un phénotype motile (Ramis-Conde et al., 2009). La perte de fonction de la E-cadhérine est ainsi par exemple corrélée au potentiel métastatique dans nombreux types de cancers, notamment les cancers colorectaux et mammaires. L’intravasation a été mise en évidence pour la première fois par des études de transplantation des cellules tumorales dans la membrane chorio allantoïdienne d’embryon de poulet (Quigley and Armstrong, 1998), puis par des études de microscopie à fluorescence intravitale en suivant des cellules marquées par un fluorochrome (Condeelis and Segall, 2003; Li et al., 2000). Le mécanisme d’intravasation est très fortement influencé par les propriétés structurales et fonctionnelles de l’angiogenèse associées à la tumeur (Carmeliet and Jain, 2011b). Les mécanismes de l’angiogenèse tumorale seront abordés plus en détail dans le second chapitre de ce manuscrit. Cependant il est important de noter que la structure tortueuse et hyperperméable des vaisseaux tumoraux néoformés facilite l’intravasation des cellules tumorales. A l’appui de cette notion, la capacité de la COX-2, l’épiréguline, la MMP-1 et la MMP-2 de promouvoir l’intravasation est liée à leur capacité à stimuler la néoangiogenèse (Gupta et al., 2007). Néanmoins, la pénétration dans la circulation lymphatique est plus simple que dans la circulation sanguine du fait de la discontinuité de la lame basale et de l’absence de péricytes autour des vaisseaux lymphatiques (Wong and Hynes, 2006). Les métastases ganglionnaires représentent généralement un indicateur pronostic précoce de l’invasion tumorale et de la dissémination métastatique dans différents types de carcinomes et de mélanomes (Alitalo et al., 2005). Cependant, d’autres tumeurs malignes telles que les sarcomes, sont connues pour métastaser dans des organes périphériques sans aucune évidence de propagation locale dans des ganglions lymphatiques régionaux. A l’heure actuelle, il est largement admis que l’accès à tous les organes se fait principalement par voie sanguine.

Survie dans la circulation sanguine

L’entrée des cellules tumorales dans la lumière des vaisseaux marque le début d’une autre étape brève mais difficile à étudier : la circulation et la survie des cellules tumorales dans le sang. De façon générale, les cellules épithéliales ayant perdu les interactions avec leurs voisines et avec la MEC enclenchent un programme de mort cellulaire appelé anoïkis (Geiger and Peeper, 2009). Néanmoins, les cellules tumorales peuvent résister à cette mort cellulaire. En effet, la tyrosine kinase TrkB a été identifiée comme un suppresseur de l’anoïkis, et son expression est requise pour la progression métastatique des cellules épithéliales intestinales transformées (Geiger and Peeper, 2005). Pour pouvoir survivre, les cellules tumorales circulantes (CTC) doivent aussi être capables de résister aux contraintes physiques dues à la pression sanguine. Il apparait que celles qui sont facilement déformables et qui jouissent d’un petit diamètre et d’une grande élasticité survivent mieux dans la circulation (Mehlen and Puisieux, 2006). De plus, les CTC doivent échapper au système immunitaire. Pour ce faire, elles cooptent des plaquettes sanguines, formant ainsi de larges emboles tumoraux (Nguyen et al., 2009). Depuis plus d’un siècle, il a été montré en clinique que les tumeurs malignes ont tendance à induire une hypercoagulation (Nash et al., 2002). Des analyses histopathologiques humaines de métastases hématogènes au stade précoce révèlent souvent la présence de thrombose associée à un dépôt de fibrine abondante (Ruiter et al., 2001). La détection des CTC a été associée à un mauvais pronostic dans différents types de cancers (Phillips et al., 2012). En effet, même si aucune métastase n’est encore développée, la présence des CTC dans la circulation serait le signe d’un risque de récidive (Pantel and Brakenhoff, 2004). La détection de ces CTC dans le sang est en cours de développement par analyse de marqueurs épithéliaux comme EpCAM ou par un tri par la taille, les cellules tumorales épithéliales étant plus grandes que les cellules sanguines. Une étude a mis en évidence la capacité des CTC à recoloniser la tumeur primitive, ce qui pourrait expliquer la récurrence locale après chirurgie. Ce phénomène également appelé « self-seeding » met en jeu la sécrétion de facteurs tels que les MMP ou l’IL-6 (Kim et al., 2009).

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Table des matières

INTRODUCTION
I PROGRESSION TUMORALE
I.1 Données générales sur les cancers
I.2 Dissémination métastatique
I.2.1 Intravasation
I.2.2 Survie dans la circulation sanguine
I.2.3 Extravasation
I.2.4 Colonisation métastatique
II ANGIOGENESE: ETAPE CLEF DANS LA PROGRESSION TUMORALE
II.1 Définition de l’angiogenèse
II.2 Angiogenèse tumorale
II.2.1 « Switch » angiogénique
II.2.1.1 Activation de facteurs pro-angiogéniques
II.2.1.2 Inhibition de facteurs anti-angiogéniques
II.2.2 Mécanismes de formation des vaisseaux sanguins tumoraux
II.2.2.1 Bourgeonnement (sprouting)
II.2.2.2 Vasculogenèse (vasculogenesis)
II.2.2.3 Cooptation
II.2.2.4 Invagination (intussusception)
II.2.2.5 Imitation de la vasculogenèse (vasculogenic mimicry)
II.2.2.6 Différenciation des cellules souches tumorales en CE
II.2.3 Description des vaisseaux tumoraux
II.3 Thérapie anti-angiogénique
II.3.1 Angiogenèse tumorale : une cible thérapeutique
II.3.2 Développement clinique de la thérapie anti-angiogénique
II.3.3 Défis de la thérapie anti-angiogénique
II.3.3.1 Résistance aux traitements anti-angiogéniques
II.3.3.2 Accélération de l’invasion et de la formation de métastases
III LA THROMBOSPONDINE 1
III.1 Description et structure de la TSP1
III.2 Partenaires de la TSP1
III.2.1 Ligands de la TSP1
III.2.2 Récepteurs de la TSP1
III.2.2.1 Intégrines et IAP/CD47
III.2.2.2 CD36 et récepteurs non-intégrines
III.3 REGULATION DE LA TSP1
III.3.1 Mutations génétiques
III.3.2 Contrôle épigénétique
III.3.3 Facteurs environnementaux et chimiokines
III.4 FONCTIONS DE LA TSP1
III.4.1 TSP1, UNE PROTEINE ANTI-TUMORALE
III.4.2 TSP1, UNE PROTEINE PRO-TUMORALE
OBJECTIFS DE LA THESE
ARTICLE N°1 : ROLE DE LA TSP1 DANS LA PROGRESSION TUMORALE PROSTATIQUE
INTRODUCTION
PRINCIPALES OBSERVATIONS
DISCUSSION
ARTICLE N°2 : ROLE DE LA TSP1 DANS LA PROGRESSION TUMORALE
MAMMAIRE
INTRODUCTION
PRINCIPALES OBSERVATIONS
DISCUSSION
DISCUSSION GENERALE
CONCLUSION
RÉFÉRENCES

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