Développement d’un autoquestionnaire pour le diagnostic des algies pelviennes aigües

ALGIES PELVIENNES AIGUES

Ce chapitre est une mise à jour de l’article:
Algies pelviennes aigues de la femme : orientation diagnostique et conduite à tenir. Huchon C, Estrade-Huchon S, Popowski T, Toret F, Chapron C, Fauconnier A. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Gynécologie, 162-A-15, 2010.

Les algies pelviennes aigues (APA) chez la femme constituent le motif le plus fréquent de consultation d’urgence en gynécologie (1, 2). Dans cette situation clinique, les étiologies sont nombreuses et n’incluent pas que des affections gynécologiques (Tableau 1). Certaines de ces affections peuvent, en l’absence de diagnostic précoce et de traitement adapté avoir de graves conséquences et engager le pronostic vital. La prise en charge diagnostique et thérapeutique des algies pelviennes aigues constitue donc un problème majeur de santé publique. La diversité des étiologies responsables d’algies pelviennes aigues et leurs implications thérapeutiques particulières justifient une recherche la plus exacte possible du diagnostic incriminé. L’utilisation hiérarchique des différents outils à notre disposition: interrogatoire, examen clinique, examens biologiques, morphologiques et invasifs est primordiale à l’élaboration diagnostique. De même, une bonne utilisation de ces outils est importante afin d’éviter des laparoscopies inutiles, si le traitement de l’affection en cause peut être médical. Cette démarche repose sur une connaissance de l’épidémiologie, de la physiopathologie, et une utilisation judicieuse des examens complémentaires non invasifs, en particulier du diagnostic biologique de grossesse et de l’échographie.

Tableau 1. Principales affections responsables de douleurs pelviennes aiguës retrouvées dans la littérature (1, 3-9) 

Etiologies secondaires à une grossesse:
Grossesse extra-utérine
Fausse couche spontanée
Rétention post fausse couche
Endométrite du post partum ou post abortum
Complications de corps jaune gestationnel: corps jaune hémorragique, kyste du corps jaune et ses complications

Etiologies infectieuses:
Infection génitale haute: salpingite, pelvipéritonite, abcès tubo-ovarien, endométrite
Appendicite
Pyélonéphrite aigue, infection urinaire

Etiologies annexielles:
Torsion d’annexe
Complications de kystes ovariens: hémorragie intra-kystique, rupture kystique, torsion d’annexe
Dysovulation

Etiologies secondaires à la présence de fibromes:
Nécrobiose aigue de fibrome
Torsion d’un myome sous séreux pédiculé
Accouchement d’un myome sous muqueux par le col utérin

Etiologies urologiques:
Colique néphrétique
Pyélonéphrite aigue
Infection urinaire

Causes rares :
Sacro-iléite bactérienne
Ostéite
Anévrysme de l’artère iliaque
Infection d’un kyste de l’ouraque

Définition

Les algies pelviennes aigues sont définies comme une douleur pelvienne, c’est-à-dire intéressant l’hypogastre et/ou la fosse iliaque droite et/ou la fosse iliaque gauche depuis moins d’un mois (7). Cet intervalle de durée est discuté et la terminologie d’algie pelvienne aigue est utilisée par certains auteurs en cas de douleur évoluant depuis moins d’une semaine (10) ou encore moins de six semaines (9). La distinction entre le caractère aigu ou chronique d’une douleur pelvienne est parfois difficile, surtout dans le cadre de douleurs cycliques. On considère qu’une douleur entrainant une consultation d’urgence est une douleur aiguë .

Epidémiologie

La prévalence des différentes affections responsables d’APA est difficilement estimable du fait du faible nombre d’études recueillant de manière prospective systématique les diagnostics de patientes consultant aux urgences pour ce symptôme (Tableau 2). L’appendicite, la grossesse extra-utérine (GEU) et les douleurs pelviennes sans cause organique retrouvée constituent les principales causes. Les complications kystiques ovariennes (incluant le groupe nosologique des torsions d’annexe) et les infections génitales hautes (IGH) viennent ensuite. L’ensemble des affections gynécologiques constitue 10 à 55 % des étiologies responsables d’APA.

La prévalence des GEU est estimée, en France, à 2 % des naissances et son incidence est estimée à 95.3/ 100 000 femmes âgées de 15 à 44 ans en 2002 (14, 15). La GEU est très fréquente puisqu’elle représente un quart des APA ayant eu une cœlioscopie (1, 3, 8, 9, 13, 16). Les erreurs ou les retards diagnostiques peuvent être graves, la GEU pouvant entrainer le décès maternel en cas de saignement actif intrapéritonéal (17, 18). La prévalence réelle de l’IGH est difficile à estimer (19). En effet, de nombreuses formes pauci-symptomatiques ne sont diagnostiquées qu’au stade de séquelles(20). L’IGH est le diagnostic retenu pour 5 à 14 % des patientes consultant pour APA en milieu hospitalier et serait le motif de 1,7% des consultations chez les médecins généralistes britanniques dans une tranche d’âge de 16 à 46 ans (11, 12, 21). L’importance des formes non diagnostiquées constitue, en raison des séquelles à long terme telles qu’infertilité et GEU, un enjeu majeur (20, 22). L’IGH augmente en effet le risque d’infertilité tubaire, de GEU et de douleurs pelviennes chroniques (19, 23, 24). Les femmes jeunes sont les plus touchées et les femmes de plus de 40 ans ont plus volontiers des IGH compliquées d’abcès pelviens (19). Le délai thérapeutique pourrait accroître le risque d’infertilité ultérieure (25). Chez les patientes opérées en urgence pour algies pelviennes aigues, la prévalence des torsions d’annexe serait de l’ordre de 2.5 à 7.4 % selon les séries (3, 6, 16). Rarement, certaines torsions d’annexe ne sont pas diagnostiquées car non opérées (26, 27). Le retard ou la méconnaissance du diagnostic peut entraîner la perte de l’ovaire ou de l’annexe (6, 28, 29) et compromettre la fertilité ultérieure de patientes jeunes. Exceptionnellement ces erreurs diagnostiques peuvent entraîner des péritonites ou thrombophlébites létales (30). L’appendicite aiguë est la plus fréquente des algies aigues de la fosse iliaque droite amenant à consulter aux urgences générales (11) mais n’est retrouvée que dans 2% des APA ayant nécessité une cœlioscopie en milieu gynécologique, ce qui peut être expliqué par un bon aiguillage des urgences et une bonne efficience diagnostique pour une prise en charge en service de chirurgie digestive (1, 3, 7-9, 13). Les retards ou méconnaissances de ce diagnostic sont graves avec la survenue d’une perforation appendiculaire entraînant une péritonite, responsable d’une augmentation de la mortalité (31-33). Le risque de perforation appendiculaire augmenterait de 6% toutes les 24 heures (33). Quatre diagnostics principaux, en cas d’APA, doivent donc être évoqués en priorité, en raison de leur fréquence et de leur gravité potentielle: la GEU; l’IGH; l’appendicite aiguë et la torsion d’annexe.

Physiopathologie 

La proximité anatomique des organes pelviens et leur innervation par des fibres voisines rendent difficile l’interprétation sémiologique d’une algie pelvienne. L’innervation viscérale est représentée par trois principales voies efférentes (34): i) le plexus pelvien, issu du système parasympathique, qui innerve le vagin, le col et l’isthme utérin, les ligaments utérosacrés, le cul-de-sac de Douglas, les bas uretères, le trigone vésical, et enfin le rectosigmoïde; ii) le plexus hypogastrique, issu du système sympathique, qui innerve le corps utérin, le tiers proximal de la trompe, le ligament large et la calotte vésicale; iii) le plexus aortique, issu du système parasympathique, qui innerve les ovaires, la portion distale des trompes et les uretères rétroligamentaires (35, 36). L’analyse sémiologique des sensations douloureuses va donc permettre, dans une certaine mesure, un diagnostic de localisation. En effet, selon le mode principal de l’innervation de l’organe atteint, la topographie de la douleur sera décrite de façon différente. Pour le plexus pelvien, la douleur sera plutôt ressentie dans la région sacrée ou périnéale voire à la face postérieure des membres inférieurs alors que pour le plexus hypogastrique, elle sera ressentie dans l’aire pelvienne de la paroi abdominale antérieure, limitée par le niveau des crêtes iliaques. Pour le plexus aortique, elle sera ressentie au niveau des fosses iliaques, au niveau des flancs et des fosses lombaires. Le caractère latéralisé ou non de la douleur est également très intéressant. Ainsi, plus de 8 fois sur 10 une douleur ovarienne ou tubaire sera ressentie de façon unilatérale (37) à l’inverse des pathologies d’origine utérine où la douleur sera le plus souvent ressentie médialement. L’innervation sensitive de l’ovaire (T10) explique l’irradiation lombaire habituelle des douleurs d’origine ovarienne (30, 36, 38). Il existe cependant des variations anatomiques interindividuelles importantes qui expliquent la disparité de sémiologie pour une même pathologie. Assez rarement, une douleur peut être ressentie du côté opposé à celui de l’affection en cause. Les signes d’irritation péritonéale (douleur de rebond, rigidité musculaire douloureuse, douleur à la percussion) traduisent la mise en jeu des voies d’innervation somatiques par le biais d’un mécanisme réflexe qui survient lorsqu’il existe une diffusion au péritoine de l’affection en cause. Ces signes sont cependant absents lorsque seul le péritoine pelvien est en cause (35). Leur présence en pathologie gynécologique est le plus souvent due à un  épanchement (hémopéritoine; liquide de kyste), plus rarement à la diffusion d’une pelvipéritonite d’origine génitale. L’équivalent pelvien de ces signes est la douleur à la mobilisation utérine qui est à notre sens un signe ayant une bonne valeur diagnostique. Sa positivité traduit la présence d’un épanchement irritant (sang, pus ou liquide de kyste) au niveau du cul-de-sac de Douglas. D’une façon générale, l’existence d’une réaction péritonéale ne reflète pas toujours la gravité de l’affection en cours. Ainsi, dans les ruptures de kystes, l’irritation péritonéale peut-être intense malgré une évolution simple. A l’inverse, un hémopéritoine peut n’entraîner que très peu de signes s’il est de constitution lente (35, 39); la réaction péritonéale est absente dans les GEU non rompues et rare et tardive dans les torsions d’annexe où elle traduit la nécrose (36, 40).

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Table des matières

I INTRODUCTION
A/ ALGIES PELVIENNES AIGUES
1/ Définition
2/ Epidémiologie
3/ Physiopathologie
4/ Interrogatoire
5/ Examen clinique
6/ Examens complémentaires
a/ Échographie
b/ Doppler
c/ Examens biologiques
c-1) hCG
c-2) Progestéronémie
c-3) Numération Formule sanguine
c-4) CRP
c-5) Bandelette Urinaire
d/ Examens Bactériologiques
e/ Examen histologique
f/ Coelioscopie
7/ Orientation diagnostique et thérapeutique
a/ Suspicion de torsion d’annexe
b/ Suspicion d’infection génitale haute
c/ Suspicion d’appendicite aigue
d/ Suspicion de grossesse extra-utérine
B/ TRI, PREDICTION ET REGLES DE DECISION CLINIQUE
1/ Dérivation de modèle prédictif
a/ Sélection des variables candidates prédictives
b/ Construction d’un score
c/ Partition récursive
d/ Algorithmes flexibles
e/ Réseaux neuronaux
f/ Règles d’association
2/ Evaluation des performances des modèles de prédiction
a/ Discrimination
b/ Calibration
3/ Validation
a/ Validation externe
b/ Validation interne
b-1) Méthode des 2/3-1/3
b-2) Bootstrap
b-3) Validation croisée (X-fold cross validation)
b-4) Jackknife (Leave one out)
C/ RATIONNEL
D/ OBJECTIFS
II MATERIEL ET METHODES
A/ DEVELOPPEMENT DE L’AUTOQUESTIONNAIRE STANDARDISE POUR L’AIDE AU DIAGNOSTIC DES ALGIES PELVIENNES AIGUES
1/ Axes de recherche des items de l’autoquestionnaire
2/ Construction de l’autoquestionnaire
a/ Critères d’inclusion des patientes pour la construction de l’autoquestionnaire
b/ Méthodologie de développement du questionnaire
c/ Autoquestionnaire AIDDA (Aide au Diagnostic Des Algies pelviennes aigues)
B/ PLAN EXPERIMENTAL ET SOURCE DE DONNEES
1/ Centres participants
2/ Critères d’inclusion et d’exclusion
3/ Recueil de l’autoquestionnaire
4/ Variables d’intérêt
5/ Méthodes diagnostiques de référence
C/ NOMBRE DE SUJETS NECESSAIRES A LA VALIDATION DE L’UTILITE CLINIQUE DU QUESTIONNAIRE
III RESULTATS
A/ PATIENTES INCLUSES
B/ DEMONSTRATION DE L’UTILITE DU QUESTIONNAIRE AIDDA AVEC APPLICATION
A LA RUPTURE TUBAIRE DANS LA GEU
1/ Introduction
2/ Méthodologie utilisée pour le développement d’un modèle de prédiction clinique de rupture tubaire chez les patientes porteuses de grossesse extra-utérine
3/ Résultats
C/ CONSTRUCTION D’UN SCORE DE TORSION D’ANNEXE A PARTIR DES ITEMS DE L’AUTOQUESTIONNAIRE AIDDA
1/ Introduction
2/ Méthodologie utilisée pour le développement d’un modèle de prédiction clinique de torsion d’annexe
3/ Résultats
D/ APPLICATION DE L’AUTOQUESTIONNAIRE AIDDA AU CONCEPT DES URGENCES POTENTIELLEMENTS A RISQUE EN GYNECOLOGIE
1/ Définition du concept des urgences potentiellements à risque en gynécologie
2/ Méthodologie utilisée pour le développement de modèles prédictifs d’UPR
3/ Résultats
E/ VERSION SIMPLIFIEE DU QUESTIONNAIRE
1/ Commentaire
2/ Autoquestionnaire simplifié
a/ Analyse qualitative
b/ Analyse statistique
c/ Autoquestionnaire simplifié
IV DISCUSSION ET PERSPECTIVES
A/ ORIGINALITE DE LA METHODE DE DEVELOPPEMENT DE L’AUTOQUESTIONNAIRE
B/ APPROCHE PHYSIOPATHOLOGIQUE
C/ COMPARAISON AUX OUTILS DIAGNOSTIQUES CONVENTIONNELS
D/ PLACE DANS LA DECISION CLINIQUE ET IMPLICATIONS
E/ LIMITES
F/ PERSPECTIVES
1/ Phase 1 : Modélisation
2/ Phase 2 : Phase exploratoire
3/ Phase 3 : Essai Contrôlé randomisé
4/ Phase 4 : « Pharmacovigilance »
V CONCLUSION
VI REFERENCES

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