Description multi-échelle de la mousse hors milieu poreux

Description multi-échelle de la mousse hors milieu poreux

Définition de la mousse

La mousse liquide est un système colloïdal composé d’une phase liquide contenant des molécules de tensioactifs et d’une phase gazeuse. La phase liquide est continue tandis que la phase gazeuse est dispersée sous forme de bulles dans la phase liquide. La mousse d’apparence fragile, arrive à créer un grand ensemble d’interfaces liquides/gaz stabilisées par les tensioactifs . Ceci confère à la mousse des propriétés physicochimiques intéressantes utilisées dans des domaines industriels très variés  : produit détergent en cosmétique, fluides extincteurs pour les incendies ou agent isolant dans le traitement de surface, etc.

Structure de la mousse à différentes échelles

La mousse est aussi un système métastable, qui évolue dans le temps et dans l’espace en fonction des contraintes physico-chimiques appliquées (température, pH, pesanteur, adhésion aux parois, etc.). Cette évolution affecte les éléments qui forment sa structure, qui s’étale sur plusieurs échelles du nanomètre au micromètre [12], voire au millimètre. A l’échelle nanométrique on trouve les tensioactifs. Ce sont des molécules nécessaires pour stabiliser les films liquides (appelés aussi « lamelles») entourant les bulles [13]. Les tensioactifs s’organisent souvent sous forme de monocouches avec la tête hydrophile dans la phase liquide et la queue hydrophobe dans la phase gazeuse. Les propriétés d’élasticité de surface et de viscosité des films liquides sont influencées par la nature, l’organisation et la concentration des tensioactifs. A L’échelle micrométrique, la mousse est décrite par les « bords de Plateau » en référence au physicien et mathématicien belge Joseph Plateau (XIXème siècle). Il s’agit de canaux liquides épais se situant entre les bulles et formés par l’intersection de trois films liquides. Ils peuvent facilement être vus à l’œil-nu. Ces bords de Plateau se rejoignent quatre par quatre au sommet d’une bulle pour former un nœud ou un vertex (cf. Figure 6). Les bulles quant à elles, s’étalent généralement de quelques centaines de micromètre à quelques millimètres.

La structure statique de la mousse Bulk est totalement contrôlée par la minimisation d’énergie à travers la minimisation des aires interfaciales liquide/gaz. Néanmoins, il existe différents phénomènes physiques qui déstabilisent la mousse [14], à savoir :
– Le murissement : Diffusion du gaz à travers les films liquides par différence de pression de Laplace entre les bulles. Les petites bulles disparaissent au profit des grandes bulles.
– Le drainage liquide : Écoulement liquide des films vers les bords de Plateau à cause de la différence de courbure entre les deux. A l’échelle de la mousse le drainage liquide se fait via les bords de Plateau à cause de la gravité.
– La succion capillaire : Rupture du film liquide séparant deux bulles sous l’effet de la pression capillaire. Ce phénomène est responsable de la coalescence des mousses et est décrit en détails dans le cas des mousses en milieux poreux (cf. paragraphe (II.D.2)).

Écoulement des mousses en milieux poreux (Aspects microscopiques)

Définition de la mousse en milieu poreux 

Dans un milieu poreux, une mousse est représentée schématiquement par une dispersion de phase gazeuse dans une phase liquide continue et stabilisée par des tensioactifs aux interfaces liquide/gaz. La phase gazeuse peut être totalement ou partiellement discontinue, la discontinuité étant assurée par des lamelles liquides [15] (cf. Figure 7). La phase liquide forme aussi des films de mouillage liquide sur les parois des grains, connectés aux lamelles. La mousse ne représente pas une phase en soi. Dans une mousse en milieu poreux, le liquide se divise en une fraction qui remplira les lamelles et les bords de Plateau et une fraction qui se logera dans les petits interstices du milieu poreux. Tandis que le gaz se divise en une fraction de gaz en écoulement et une autre fraction immobile, piégée dans le réseau poreux [16].

Les méthodes d’injection

Il existe différentes méthodes pour injecter ou former la mousse in situ dans un milieu poreux [7, 17, 18]:
– Co-injection de gaz et de liquide : la solution de tensioactifs et le gaz sont co-injectés à l’entrée du milieu poreux [6, 7].
– Pré-génération de la mousse : la mousse est générée à l’aide d’un générateur de mousse en dehors du milieu poreux avant de s’écouler dans le milieu poreux à balayer [19].
– Injection alternée de tensioactif et de gaz (Surfactant Alternate Gas ou SAG) [8]: le liquide contenant le tensioactif et le gaz sont injectés de manière alternée sous forme de bouchons « Slugs » et la mousse est alors générée in situ dans le milieu poreux. Durant le procédé SAG, la solution de tensioactifs est drainée par la phase gazeuse.

La pré-génération de la mousse permet de pallier principalement aux problèmes de puits faiblement productifs dans des réservoirs à faible pression, tandis que la co injection et le procédé SAG seraient plus utiles pour améliorer l’efficacité du balayage [20].

Texture et qualité de la mousse

Le nombre de lamelles par unité de volume de gaz [21] définit la texture de la mousse 𝑛𝑓. Ce paramètre est d’une importance fondamentale car il est relié aux caractéristiques physiques intrinsèques à l’écoulement des mousses dans les milieux poreux, incluant la viscosité, la perméabilité relative et l’interaction entre les fluides. Hirasaki et al., [21] montre que le nombre de lamelles par unité de volume est inversement proportionnel à la taille moyenne des bulles qui s’écoulent dans un tube capillaire. D’autres auteurs utilisent cette notion de densité de lamelles pour décrire la texture de la mouse en relation notamment avec la viscosité du gaz moussant [22–24]. Certains auteurs se réfèrent à la distribution en taille des bulles pour parler de texture de la mousse en milieux poreux [25]. En l’absence de tensioactifs, une co-injection gaz-eau dans un milieu poreux aboutira nécessairement à des chemins préférentiels pour le gaz (généralement dans les canaux les plus larges) et le gaz aura tendance à migrer vers le haut par ségrégation gravitaire (cf. Figure 8.a). On appelle alors « mousse faible », une mousse qui développe généralement une faible différence de pression, avec une densité faible de lamelles et des bulles de grande taille (cf. Figure 8.b). A l’inverse, lorsqu’il existe un grand nombre de lamelles en l’absence de tout chemin de percolation de gaz, la mousse développe une grande résistance à l’écoulement du gaz et des bulles très fines sont présentes, on obtient alors ce qu’on appelle une « mousse forte » (cf. Figure 8.c). Les concepts de « mousse forte » et de « mousse faible » sont généralement qualitatifs et sont mieux appréciés à l’aide des mesures des différences de pressions lors de l’écoulement, en comparaison avec des écoulements monophasique (liquide seul) ou diphasiques (gaz et eau sans tensioactifs).

Localement, la texture de la mousse est le résultat de la compétition de phénomènes complexes de création, de piégeage, de mobilisation et de destruction des lamelles. La plupart des études qui s’intéressent à la texture de la mousse dans un milieu poreux réel, mesurent la distribution ou la taille moyenne des bulles en sortie du milieux poreux dans des cellules de visualisation [25, 26]. La structure réelle de la mousse au sein du réseau poreux n’a jamais été observée. Ceci pose la question fondamentale de l’existence de la mousse sous forme de trains de bulles, qui est le modèle souvent mis en avant, et la possible existence d’une structure de mousse bulk au sein même du réseau poreux. Marsden et al., [25] affirment simplement que les bulles ont une distribution en taille du même ordre de grandeur que la distribution en taille des pores. D’autres auteurs confirment ces observations, même dans le cas de mousses faibles [24, 27].

Mécanismes de formation et de déstabilisation de la mousse

A très petite échelle, la mousse en milieux poreux présente une dynamique particulière qui caractérise l’évolution de l’arrangement spatial de ses constituants : les bulles de gaz et la phase liquide (bords de Plateau et les lamelles). Différents auteurs se sont intéressés à décrire cette dynamique pour en tirer des mécanismes de formation et de destruction de la mousse lors de son écoulement. Dans le paragraphe qui suit, nous présentons les principaux mécanismes de génération et de destruction de la mousse en milieux poreux cités dans la littérature.

Mécanismes de génération de la mousse

Il existe principalement quatre mécanismes fondamentaux de formation de la mousse en milieux poreux [27]: le « snap-off », la division lamellaire, le « leave-behind » et le « pinch-off ».

Snap-off
Le Snap-off est un processus mécanique qui décrit la formation des bulles lorsque le gaz pousse une interface gaz/liquide à travers un seuil d’un pore (cf. Figure 9). Au moment où la bulle traverse le seuil, il se crée un gradient de pression capillaire; dans lequel la pression capillaire diminue en amont de la bulle pendant l’expansion de cette dernière à travers la constriction. Un apport de liquide se crée pour aboutir à la formation d’un col liquide au milieu du seuil de pore. En fonction du rapport de taille entre le rayon de courbure de la bulle et le rayon du seuil de pore, et en fonction de la géométrie des grains (plus ou moins pointus), le col liquide se transforme en lamelle ou pas. Généralement, le col liquide se forme dans des seuils exigus et y stagne [29]. Le Snap-off crée des bulles de gaz de tailles à peu-près identiques à la taille des seuils de pores du milieu poreux et crée souvent un réseau de gaz discontinu abaissant la mobilité du gaz de plusieurs ordres de grandeurs. Ce mécanisme est reconnu comme étant le premier responsable de la formation des mousses fortes, et notamment dans le cas de co-injection gaz-tensioactifs [29] et de mousses relativement humides [30].

Division lamellaire
La division lamellaire est le transport par division des lamelles ou des bulles. Ce mécanisme ne peut avoir lieu que si des bulles en mouvement préexistent. La division lamellaire se produit lorsqu’une bulle mobile se divise en deux parties ou plus à un point de branchement, comme illustrée sur la Figure 10. Comme le snap-off, la division lamellaire génère des mousses fortes. Il y a principalement deux prérequis pour ce mécanisme : un gradient de pression assez élevé pour mobiliser les multiples trains de bulles dans les branches et une taille de bulle plus grande que la taille du pore [31].

Leave-behind
Ce mécanisme se produit lorsque le gaz envahit un milieu saturé en liquide. Lorsque deux ménisques de gaz arrivent sur un même pore rempli de liquide et y pénètrent en convergeant par la suite, une lentille liquide stationnaire est formée et est laissée derrière (cf. Figure 11). Cette lentille se transforme en lamelle par la suite sous l’effet du drainage liquide [29]. Les mousses créées uniquement par Leave-behind sont considérées faibles ou inefficaces [32], car les lamelles sont parallèles à la direction d’écoulement de gaz, ce qui génère peu de résistance à l’écoulement [33]. Si ce mécanisme domine alors on obtient une phase gazeuse continue et une faible réduction de la mobilité du gaz [34][35].

Pinch-off
Récemment, Liontas et al., [30] ont découvert deux nouveaux mécanismes de génération de la mousse dans des canaux micro-fluidiques, appelés « Pinch-off » ou « pincement ». Ces mécanismes ont lieu lorsque deux bulles ou plus arrivent au niveau d’une constriction. Dans le cas d’un pincement entre une bulle et la paroi de la constriction le mécanisme se nomme « neighbor-wall pinch-off ». Dans le cas où une bulle est écrasée entre deux bulles voisines pour en générer une nouvelle, le mécanisme est appelé « neighborneighbor pinch-off » (cf. Figure 12). Ces mécanismes ont été observés pour un écoulement stable et pour des canaux larges et droits et où seules les constrictions sont incurvées.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. Motivations industrielles
II. Motivations scientifiques
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LES MOUSSES
I. Description multi-échelle de la mousse hors milieu poreux
A. Définition de la mousse
B. Structure de la mousse à différentes échelles
II. Écoulement des mousses en milieux poreux (Aspects microscopiques)
A. Définition de la mousse en milieu poreux
B. Les méthodes d’injection
C. Texture et qualité de la mousse
D. Mécanismes de formation et de déstabilisation de la mousse
III. Écoulement des mousses en milieux poreux (Aspects macroscopiques)
A. Comportements transitoire et stationnaire
B. Paramètres influençant l’écoulement de la mousse
IV. Réduction de la mobilité du gaz par la mousse
A. Viscosité effective du gaz
B. Perméabilité relative du gaz
V. Conclusion du premier chapitre
CHAPITRE II : CARACTERISATION MACROSCOPIQUE DE L’ECOULEMENT DES MOUSSES EN MILIEU CONSOLIDE PAR TOMOGRAPHIE X
I. Introduction
A. Introduction à la tomographie X
B. Description du Scanner de l’IFPEN
II. Matériels et expériences
A. Caractérisation du système fluide-roche
B. Développement d’un montage d’injection de fluides dans les milieux poreux
C. Expériences d’écoulement de mousses sous Scanner X
III. Caractérisation macroscopique de la mousse en écoulement
A. Écoulement diphasique gaz-saumure
B. Formation de la mousse
C. Rhéologie de la mousse à l’état stationnaire
D. Coalescence de la mousse en milieu poreux
IV. Conclusion du deuxième chapitre
CHAPITRE III : CARACTERISATION DE L’ECOULEMENT DES MOUSSES DANS UN MILIEU GRANULAIRE PAR DIFFUSION DES NEUTRONS AUX PETITS ANGLES
I. Introduction
A. Généralités sur la diffusion des neutrons aux petits angles
B. Caractérisation des mousses « Bulk » par SANS
II. Matériels et méthodes
A. Travail préparatoire
B. Expériences d’écoulement de mousses sous acquisitions SANS
III. Texture de la mousse en écoulement
A. Analyse des spectres de diffusion
B. Influence de la qualité de la mousse sur son écoulement (Expérience LLB)
C. Comportement de la mousse le long du milieu poreux (Expérience ILL)
IV. Relation entre la géométrie du réseau poreux et la structure de la mousse
A. Évolution de la taille de bulle moyenne
B. Densités volumiques des bulles et des lamelles
C. Nombre de lamelles par bulle
V. Conclusion du troisième chapitre
CHAPITRE IV : ÉCOULEMENT DE LA MOUSSE A L’ECHELLE DU PORE EN 3D
I. Introduction
II. Matériels et expérience
A. Présentation de la ligne ID19 de l’ESRF
B. Expérience
C. Acquisition des images
III. Résultats
A. Caractéristiques microscopiques de la mousse
B. Traitement des images
IV. Discussion
V. Conclusion du quatrième chapitre
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES

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