Descripteurs physico-chimiques de la biomasse lignocellulosique en hydrolyse enzymatique

La situation énergétique actuelle pose de nombreux défis à relever en termes de pollution, de gestion des ressources renouvelables et non renouvelables ainsi que d’économie d’énergie, en prenant aussi en compte des critères socio-environnementaux ou géopolitiques souvent critiques. Pour franchir le gouffre qui nous sépare d’une situation viable, vivable et équitable, plusieurs stratégies fortes doivent être mises en place, d’ordre politique, technologique, et bien sûr, concernant les modes de consommation.

Différents domaines de l’énergie sont concernés par ces programmes, avec parmi eux, la thématique des carburants qui doivent par définition contenir une densité énergétique conséquente, être transportables, stables et immédiatement disponibles. La loi sur la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 fixe des objectifs en termes de consommation d’énergies renouvelables, notamment de biocarburants, pour limiter nos consommations d’énergie fossile et contribuer au respect de l’Accord de Paris (objectif de maintien du réchauffement climatique en dessous de 2 °C). A partir des années 70 et suite au premier choc pétrolier, l’intérêt naissant pour les biocarburants dits de première génération, ou agrocarburants,  constituait une première démarche pour s’émanciper de la dépendance au pétrole, par l’utilisation de ces carburants un peu plus responsables. Ceux-ci peuvent être issus des plantes sucrières (betterave, canne à sucre), amylacées (maïs, blé), ou bien oléagineuses (colza, palmier à huile). Cependant, par leur concurrence d’un point de vue alimentaire, mais aussi par leur implication dans la dégradation des sols et dans la déforestation (canne à sucre au Brésil, maïs aux Etats-Unis d’Amérique, palmier à huile en Indonésie, colza et betterave sucrière en Europe), leur utilisation ne peut satisfaire les bénéfices écologiques et climatiques attendus face au désastre à venir. Au cours des années 2000, le présage d’une deuxième génération de biocarburants (appelés aussi biocarburants avancés), suscita beaucoup d’attentes. En effet, ils consistent en l’utilisation de substrats dits lignocellulosiques pour créer, via des procédés spécifiques, les carburants souhaités. Ces matières premières peuvent être selon le cas, des résidus de l’industrie agricole et forestière ou encore produites à partir de cultures dédiées. Les trois fractions majoritaires de ces substrats sont la cellulose, les hémicelluloses, et la lignine. L’utilisation de substrats avec une moindre empreinte carbone, et sans usage alimentaire, ni implication directe dans la déforestation, représentaient une alternative crédible aux carburants réguliers (d’origine fossile) et agrocarburants (première génération). Cependant, et pour des raisons de coût de production, la première génération de carburants bio sourcés constitue toujours la principale source renouvelable des carburants utilisés pour les transports à l’heure actuelle. En 2015, une directive (2015/1513) confirmait l’objectif d’incorporation de 10 % d’énergies renouvelables dans les transports en 2020 avec un plafond de 7 % pour les biocarburants en concurrence alimentaire et un objectif indicatif de 0,5 % en 2020 pour les biocarburants avancés. De ce fait, l’optimisation des procédés de production des biocarburants de seconde génération est primordiale pour espérer un déploiement significatif et supérieur à l’objectif déjà peu ambitieux de la directive.

Les procédés de conversion de la biomasse lignocellulosique en biocarburant

Les substrats

Les substrats de biomasse lignocellulosique peuvent provenir globalement de trois sources, à savoir les résidus agricoles ou forestiers, les cultures dédiées et les déchets verts. Dans le cas des cultures dédiées, une étape supplémentaire (la culture, et donc avec un coût potentiel additionnel) est présente. Des voies de recherche existent d’ores et déjà, afin d’optimiser le coût de la ressource. Par exemple, compte tenu du caractère réfractaire connu de la biomasse envers la digestibilité enzymatique, des équipes travaillent sur l’optimisation des cultivars en termes, par exemple, de croissance, de résistance au stress hydrique, de taux et type de lignine, ou encore de rusticité. L’optimisation globale des facteurs qui concernent la matière première est particulièrement importante de par le coût important de la biomasse, qui peut représenter jusqu’à 25 % du coût du procédé [12].

Les cultures énergétiques dédiées (herbacées, plantes fourragères annuelles ou vivaces) 

De nombreux candidats pour la conversion de biomasse lignocellulosique en bioéthanol sont souvent cités, dont le panic érigé (Panicum virgatum), le miscanthus (Miscanthus x giganteus), l’alpiste des Canaries, (Phalaris canariensis), la canne de Provence (Arundo donax), la canne à sucre sauvage (Saccharum spontaneum), l’herbe à éléphant (Pennisetum purpureum), et la quenouille (Typha Latifolia), essentiellement pour leur grande efficacité photosynthétique ou leur grande abondance et leur caractère invasif. Ainsi, dans des conditions pédoclimatiques favorables, certaines de ces plantes sont dotées d’un mécanisme photosynthétique spécifique (dit en C4) qui permet une même concentration en CO2, de synthétiser une plus grande quantité de matière organique carbonée, comparativement aux plantes utilisant le mécanisme photosynthétique “classique”, dit en C3 [13], pour lequel la concentration en CO2 est souvent le facteur limitant de leur croissance (la présence de dioxygène diminue l’efficacité de l’enzyme RuBisCo qui catalyse la réduction du CO2).

Les sources forestières 

Le bois, mais également les copeaux et autres résidus d’exploitations forestières (écorce par exemple), sont également des sources cellulosiques potentielles pour une conversion biochimique en éthanol. Ces sources peuvent provenir de forêts mais également de zones de plantations spécifiques d’arbres. Dans ce dernier cas, les stratégies proposées évoquent souvent des cultures d’essences à forte croissance et récoltées par courtes rotations (peuplier et saule figurent parmi les essences les plus populaires), ce qui les rapproche plutôt des cultures énergétiques de la partie précédente. Il s’agit alors de choisir les espèces les moins demandeuses en eau et en intrants, les plus résistantes aux agents pathogènes, présentant un bon compromis entre densité structurale et récalcitrance en hydrolyse enzymatique, avec une croissance économiquement viable. Parmi les deux grandes typologies d’arbres qui peuvent être récoltés, plusieurs essences pertinentes se dégagent : pin, cèdre, épicéa, cyprès, sapin, et pruche de l’Ouest pour ce qui est des conifères, et peupliers, saule, certains chênes, et bouleau pour ce qui est des feuillus, en notant que les peupliers et plus encore les saules ont des besoins en eau conséquents. Enfin, les essences sont à adapter dépendamment du climat et du biotope local.

Les résidus agricoles 

Les cultures agricoles génèrent, en plus de la ressource alimentaire, une grande quantité de composés lignocellulosiques sous forme de résidus agricoles, qui peuvent provenir du maïs (rafles, feuilles et tiges), du blé, du riz, et de manière générale des cultures céréalières (paille), ou encore de la canne à sucre (bagasse). Ces produits étaient jusqu’à présent mis à terre, brûlés (par exemple la culture de canne à sucre sur brûlis), récupérés pour le paillage, la construction, le compostage, la méthanisation ou encore pour la fabrication de fibres textiles. L’utilisation pour une production de biocarburants est particulièrement pertinente dans les zones où cette matière n’était jusqu’à présent pas valorisée. Cependant, il convient de faire remarquer que pour maintenir la productivité et la santé des sols, il est conseillé de ne pas trop prélever, pour rapporter à la terre suffisamment de matière carbonée stable, ceci contribuant au maintien et renouvellement de l’humus, à la rétention d’eau, à la vie du sol et à sa productivité.

Les technologies de conversion

Les voies thermochimiques indirectes 

Ce premier mode de conversion désigné sous l’acronyme BtL (Biomass to Liquids) consiste à créer un biocarburant par conversion thermochimique. Plusieurs variantes sont possibles. L’une d’elles, basée sur une approche indirecte (déconstruction de la matière puis reconstruction) comprend trois étapes principales :
➤ La torréfaction, qui a lieu entre 200 °C et 300 °C en milieu anaérobie, a pour but de densifier le contenu énergétique de la biomasse en vue de sa conversion. La matière est partiellement désoxygénée. Elle est plus friable et demande moins d’énergie pour être broyée sous forme de poudre, facilitant ainsi l’étape suivante.
➤ La gazéification s’opère à des températures comprises entre 700 et 1400 °C, en présence d’oxygène. Elle casse les molécules et macromolécules de la biomasse torréfiée en une fraction gazeuse constituée majoritairement de dihydrogène et de monoxyde de carbone (plus des impuretés telles que CO2, H2S, COS, HCN, etc…).
➤ La synthèse Fischer-Tropsch permet, une fois les gaz nettoyés et rectifiés, de recombiner le mélange CO + H2 sous la forme de paraffines linéaires utilisables par la technologie Diesel.

Les voies thermochimiques directes 

Les voies thermochimiques directes consistent simplement à liquéfier la biomasse lignocellulosique solide pour la rendre plus exploitable (facilité de transport et de stockage, densification énergétique, etc…) en la chauffant à des températures intermédiaires (400 et 600 °C) et sous forte pression, afin d’obtenir une fraction gazeuse (composée majoritairement de CO2, CH4, CO, H2, C2H4, C2H6, C3H6 et C3H8), mais également une bio-huile de pyrolyse rapide, et un solide “char”, semblable à un charbon [14]. La bio-huile, fortement oxygénée, n’a pas les qualités requises pour être utilisée directement comme carburant et nécessite une mise à niveau catalytique (upgrading) pour la rendre utilisable dans le domaine des transports (essences, kérosènes, gazoles).

Les voies hydrothermales 

Une des voies de conversion catalytique de la biomasse lignocellulosique propose de se placer en milieu aqueux, dans un domaine proche du point critique de l’eau (374,1 °C à 22,1 MPa), eau qui présente alors un comportement singulier (on parle de milieu hydrothermal) qui peut être exploité afin de modifier la structure et la composition chimique de la biomasse. Plus précisément, ce milieu peut être considéré comme un milieu catalytique acide et basique par la très forte autoprotolyse de l’eau et est propice à la solubilisation des composés organiques, et. Suivant les conditions opératoires, la biomasse traitée et partiellement solubilisée pourra être hydrolysée par voie enzymatique, hydro-liquéfiée, ou encore gazéifiée.

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Table des matières

I. Introduction
II. Etat de l’art
1. Introduction
a. Contexte
b. Les procédés de conversion de la biomasse lignocellulosique en biocarburant
2. Description multi-échelle de la paille de blé
a. La composition chimique en macromolécules
b. L’échelle des tissus
c. Echelle cellulaire et ultrastructure cellulaire
d. Conclusion sur la structure des biomasses lignocellulosiques
e. Digestibilité spécifique des hétérogénéités
3. L’hydrolyse enzymatique
a. Cocktail industriel d’enzymes produites par Trichoderma reesei
b. Les trois classes d’enzymes cellulolytiques
c. Cas des LPMO et cellulosomes
d. Paramètres clefs de l’hydrolyse enzymatique
4. Les prétraitements de cuisson acide et d’explosion vapeur
a. Cuisson à l’acide dilué
b. Explosion vapeur
c. Conclusion sur les prétraitements
5. Paramètres physico-chimiques des biomasses prétraitées : caractérisation et lien avec la digestibilité enzymatique
a. Taille et morphologie des particules
b. Porosité et surface
c. Cristallinité de la cellulose
d. Composition, structure et propriétés chimiques
e. Gouttes de lignine et pseudo-lignine/humines solides
f. Caractérisation morphologique et chimique combinée
g. Conclusion sur les paramètres physico-chimiques et leur caractérisation
6. Conclusion générale
III. Objectifs et stratégie de la thèse
1. Objectifs de la thèse
2. Choix de la paille de blé et constitution d’un lot d’échantillons cohérents
3. Stratégie de la thèse
IV. Matériels et méthodes
1. Les techniques expérimentales
a. L’hydrolyse enzymatique
b. Caractérisations morphologiques
c. Caractérisation de la porosité : analyse par physisorption d’azote
d. Caractérisations chimiques
e. Imagerie dynamique de dégradation enzymatique par microscopie à fluorescence dans l’UV profond
2. Les échantillons de l’étude
f. La production des échantillons : les prétraitements
g. Echantillons étudiés
V. Impact du prétraitement sur la matrice lignocellulosique
1. Effets du traitement à l’acide dilué
a. Rappel de la composition des substrats et du rendement en glucose dépendamment de la sévérité de prétraitement
b. Propriétés physiques et morphologiques
c. L’état de porosité
d. Physicochimie en microscopie confocale avec marquage spécifique
e. Les modifications des propriétés chimiques
f. Conclusion sur l’impact du prétraitement à l’acide dilué sur les substrats
2. Effets de la détente explosive
a. Rappel de la composition des substrats et du rendement en glucose dépendamment de la sévérité de prétraitement
b. Evolution de la granulométrie
c. Evolutions morphologiques
d. Etat de porosité
e. Physicochimie en microscopie confocale avec marquage spécifique
f. Cristallinité de la cellulose
g. Conclusion sur l’effet de la détente explosive
3. Conclusion
VI. Conclusion

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