Des usages définis par la nature, le contexte et la liberté d’appropriation des vides

Formulation de la problématique par l’image

M’intéressant aux vides urbains, il s’imposait à moi lors de la conception de l’image de la problématique de faire apparaitre l’espace construit de la ville. Pour cela j’ai volontairement choisi une image de ville très dense et verticale, tirée du film Métropolis, afin que le contraste entre vide et plein soit plus fort. Au centre de cette image de la ville, volontairement mis en symétrie, se détache un bâtiment en cours de démolition, qui déjà fait apparaître le vide que sa destruction va produire. Au pied de ce bâtiment figure un tag, faisant la séparation entre ce vide en création et la rue. Sa présence témoigne de la simultanéité entre l’apparition de ces vides et leur appropriation. De plus, j’ai choisi de déformer ce tag et de l’étendre sur la surface de la rue afin d’évoquer l’incidence et la perception de ce type d’espace à l’échelle de la rue. J’ai par la suite tenté de reposer cette question de la perception et de l’impact des friches urbaines, cette fois à l’échelle de la ville, en utilisant un contraste entre le noir et blanc et la couleur. En fond j’ai utilisé un tableau de George Seurat (Seascape) que j’ai découpé de sorte que seules certaines parties soient en couleur. Le bâtiment en cours de démolition se détache sur une partie du fond en couleur afin qu’appa-raisse le lien que j’ai voulu mettre en place entre couleur et vides. Ce choix était pour moi une manière de signifier que ces espaces qui pourraient sembler délaissés, inactifs, ne le sont en réalité pas. Si la bande de couleur s’étend sur toute la hauteur de l’image, au-dessus des toits de tous ces grands bâtiments, c’est finalement pour indiquer que ces vides urbains ont un impact à l’échelle de la ville et la construisent. J’ai ensuite reproduit ce système de colorisation du fond de part et d’autre du vide central en faisant dispa-raitre certains bâtiments dont l’absence peut être identifiée par la symétrie de l’image. A gauche de l’image apparaît un observateur, tiré du tableau « Office in a small city » d’Edward Hopper. Ce spectateur est le témoin de toute la scène précédemment décrite. On pourra comprendre qu’il se prend à rêver de l’évolution de ce vide naissant (identifiable par le tag) en y projetant des usages. En résumé, j’ai tenté d’évoquer par le biais de cette image la genèse des vides urbains, leurs usages et leur impact sur la ville, ce qui correspond à mon questionnement sur le sujet. Ce dernier pourrait être syn-thétisé par les questions suivantes : Quelle est la nature des vides urbains? Quels sont leurs usages ? Quel est leur rôle à l’échelle de la ville et quelle est leur perception?Mon questionnement sur le sujet part d’un constat : la présence d’un grand nombre d’espaces délaissés en milieu urbain. Par délaissés je veux parler d’espaces vides, que ce soit en terme de bâti ou d’usages. Cette présence de vides me paraît contradictoire dans la logique de densification qui accompagne au-jourd’hui le développement de nos villes. De plus j’ai été confronté récemment à des réutilisations de ce type d’endroit de manière temporaire que j’ai trouvé valorisantes à la fois pour le lieu et pour son contexte. Ainsi mon premier questionnement sur les vides urbains portait sur leur utilisation temporaire. Puis cette vision qui était très focalisée sur un type d’usage spécifique s’est finalement élargie aux autres usages que pouvaient recueillir les espaces délaissés, qui peut être sont moins visibles. Une autre question est apparue en parallèle de cela, celle de la création de ces lieux car elle me paraît désormais indispensable à leur appréhension et donc préalable à toute recherche sur le sujet. Enfin en interrogeant les usages, j’en suis venu à me demander ce que cela impliquait sur la perception de ces lieux et leur rôle dans la ville.

Vide urbain

Vide urbain et espace délaissé

Un vide urbain est un espace qui se caractérise par « une sous-utilisation et un délaissement patents », un lieu qui n’a plus de fonction économique ou sociale reconnu. C’est un « rebut provisoire de l’aména-gement urbain ». Cette définition sous-entend une extrême diversité des réalités recouvrant ces termes, et il convient dé-sormais de définir plus précisément l’objet de cette étude par un critère d’échelle spatiale. Au regard de cette échelle, on définira deux catégories de vides urbains : les friches et les délaissés. Le terme de friche désignera plutôt un terrain de dimension conséquente, pouvant aller jusqu’à l’échelle d’un quartier d’une ville. Le délaissé quant à lui sera d’une échelle bien plus réduite et pourra se résumer à « un morceau «d’espace extérieur» à qui personne n’a su donner ni fonction, ni usage, ni sens »3. Et ce sont bien ces derniers qui seront au coeur de cette recherche. La caractéristique spatiale d’un vide urbain n’est pas la seule notion nécessaire à sa définition. L’échelle de temps est elle aussi cruciale puisque cet espace peut être considéré comme une transition, entre un emploi passé et un futur. Ces critères d’échelle (spatiale et temporelle) sont alors à croiser avec des consi-dérations de localisation et de contexte urbain qui en conditionneront les enjeux. Le vide urbain est une typologie complexe, dans l’absolu difficilement catégorisable. Cependant on peut recenser, de manière non exhaustive, sans regard du type de propriété ni du statut juridique des sols :- Les friches économiques, surtout d’origine industrielle: zones minières et sidérurgiques, chantiers navals, usines à gaz, etc. ;- Les installations obsolètes : bases militaires, docks, gares de marchandises ;- Les sites en déshérence : abords d’infrastructures (routes, aéroports, voies ferrées) dont les nuisances ou l’aspect général compromettent l’utilisation ;- Les opérations d’aménagement en difficulté ;- Les franges des grands ensembles, zones commerciales et lotissements pavillonnaires aux limites floues.1.2. Un espace en creux Les délaissés font partie de l’espace en creux urbain qui, en opposition au plein de l’espace construit, « forment le négatif de la ville bâtie »4. Cet espace creux urbain est de fait l’espace du corps, un « espace physique à trois dimensions au sein duquel nous nous déplaçons »5. Il est un espace à la fois artificiel, puisque façonné par les projets de l’homme, et anthropologique. Cette définition du vide urbain comme espace en creux est importante dans le sens où elle induit le corps, qui sera l’outil de la perception. 1.3. Le reflet des mutations de la villeLes vides urbains cristallisent dans leur formation les mutations et bouleversements de la ville contem-poraine, bien que le phénomène des délaissés ne soit pas spécifique de l’époque actuelle. Il semble exister depuis longtemps des périodes de transition pendant lesquelles des territoires ou des édifices sont laissés à l’abandon avant d’être transformés ou réaffectés. Ces transformations, permettant au tissu urbain d’évoluer pour s’adapter au contexte économique et social, se faisaient historiquement sur une temporalité assez courte et n’engendraient pas d’accumulation d’espaces délaissés. Cependant notre 18époque contemporaine se singularise par l’ampleur du phénomène : ces territoires ne parviennent plus à être résorbés par le développement urbain et de fait s’accumulent. Il convient donc de s’intéresser à ces mutations de la ville dont les délaissés se font le reflet, et tout spécialement aux trois plus importantes. Le premier des facteurs à l’origine de la formation de vides urbains est la mutation et les innovations technologiques, notamment dans les secteurs de l’énergie, du transport et du secteur productif. Ces sec-teurs sont devenus de grands consommateurs d’espace, nécessaire à leurs installations. Le secteur des transports, avec les installations routières et ferroviaires, a rendu impossible l’urbanisation de territoires du fait des nuisances et coupures qu’il induit. Dans le cas du secteur productif, ce sont de grands pans de territoires qui peuvent se retrouver vacants, lors d’une cessation d’activité ou d’une délocalisation. La mutation économique post-industrielle est une autre raison de la formation de vides urbains. Les lo-giques de localisation et délocalisation d’activités dans un contexte d’une nouvelle répartition mondiale du travail ont entrainé la vacance d’un certain nombre de terrains. Le mode d’urbanisation extensif développé par les modernes est une autre raison de la création des vides urbains. En favorisant l’étalement périphérique, le recyclage des espaces vacants n’a su être pris en compte dans le développement et leur accumulation s’est accélérée. De plus avec la mise en place du zonage systématique des fonctions, sont apparus des espaces intermédiaires sans usages ou des espaces à usage unique difficilement reconvertibles. Les mutations de la ville contemporaine précédemment citées ne sont cependant pas les seules causes de la formation et l’accumulation de vides urbains et n’ont pas valeur universelle. A ces trois raisons prin-cipales nous pourrions ajouter les récentes crises immobilières qui ont bousculé la rentabilité des terrains, ou encore le désengagement des Etats. Nous verrons plus tard que d’autres facteurs encore existent, plutôt en lien avec un contexte local.

Perception du lieu

La notion de perception prend une valeur toute particulière lorsqu’il s’agit d’appréhender un espace dé-laissé dans le sens où il n’est plus l’expression de la seule conception de l’homme. On s’attachera dans cette partie à appréhender les mécanismes de perception mais aussi à un de ses moyens facilitateurs, le déplacement du corps dans l’espace, la promenade.

Le lieu

Le lieu sera défini ici non pas comme un espace abstrait et objectif mais bien plutôt comme un lieu d’exposition qui imprègne l’homme. Jean-Paul Thibaud définit dans cette vision du lieu, deux types de grandeurs : la « grandeur extensive » et la « grandeur intensive ». Il définit la grandeur extensive comme ce qui est « de l’ordre du nombre et de la sommation ». Ce sont les éléments physiques d’un lieu qu’il est possible de dénombrer et dont l’addition forme une unité. La grandeur intensive est quant à elle « de l’ordre du degré et du différentiel ». Il s’agit là des qualités sensibles du lieu telles la luminosité, la chaleur ou la rugosité qui sont amenées à varier. Selon cette vision, le lieu relève d’une « réalité d’ordre rythmique et énergétique ». Cette conception intensive du lieu fait prévaloir l’expérience sensori-motrice et impliquera une importance toute particulière du déplacement du corps dans l’expérience d’un lieu.

La perception

La perception se définit pour Leslie Ware comme une « opération psychique complexe par laquelle l’es-prit, en organisant les données sensorielles qui lui adviennent, se forme une représentation des objets extérieurs et prend connaissance du réel ». Dans l’expérience immédiate d’un lieu, l’ensemble de nos sens est mobilisé et ils se combinent pour nous permettre d’en créer une représentation mentale sub-jective. Cependant il semblerait qu’un sens tende à dominer les autres dans les sociétés occidentales : la vue. Dans une société caractérisée par la suprématie de l’image, l’hégémonie de la vue « amoindri nos capacités de compassion, d’empathie et de participation au monde ». En complément des cinq sens, le mouvement du corps s’affirme comme une composante essentielle dans l’expérience d’un lieu puisque « l’être dans le monde se manifeste par des gestes ». C’est par le mouvement que le corps habite l’espace et ce mouvement va anticiper les actions permettant de perce-voir. Pour Alain Berthoz, « le mouvement est l’expression de l’acte »%2

Premières hypothèses liées à l’étude de Casablanca

L’analyse urbaine de Casablanca a permis de de comprendre l’évolution de Casablanca à travers le temps et d’appréhender son fonctionnement et ses enjeux. Mais plus que cela, elle m’a poussé à avancer de pre-mières hypothèses en lien avec mon étude sur les vides urbains. Nous allons voir que c’est en particulier sur mon questionnement sur la nature des vides qu’elle s’est révélée enrichissante. Le premier fonctionnement créateur de vides mis en avant par l’analyse urbaine est la planification. Dif-férentes phases de planification qu’a connue la ville ont programmé son développement sous la forme de nouvelles centralités éloignées les unes des autres, qui avec le temps devaient tendre à se rejoindre. Henry Prost fut le premier à penser l’évolution de la ville de cette manière. Dans le contexte de fort déve-loppement urbain lié à un exode rural massif qui a caractérisé l’époque de ses projections, cette méthode s’est révélée relativement efficace. Cependant même à cette période, certaines zones se sont soustraites à cet important développement et sont restées quasiment vides. C’est ce phénomène que Michel Eco-chard critiqua et tenta d’endiguer. Ce dernier ceintura la ville par le tracé de l’autoroute afin de limiter son développement, action qui remplira largement ses objectifs faisant de Casablanca une ville singulièrement dense. Aujourd’hui c’est à nouveau la dédensification qui est recherchée dans les actions planificatrices et le développement de la ville est de nouveau pensé par la création de zones bâties ponctuelles, éloignées les unes des autres. Cependant, la pression démographique étant plus faible qu’à l’époque d’Henry Prost, cet étalement urbain contemporain crée de vastes friches urbaines. La seconde explication de la formation des vides à Casblanca est une conséquence des opérations de planification et du développement accéléré de la ville. Il s’agit des projets actés mais en attente de réali-sation, qui parfois n’arrivera jamais. L’exemple de grande ampleur illustrant ce phénomène se trouve pour moi le long de l’autoroute urbaine. Lors de son élaboration, il fut prévu par Michel Ecochard un retrait de 200m des bâtiments venant la border. Cette zone devait être investie par des espaces verts et de loisirs, mais elle reste aujourd’hui toujours vide. Les vides de Casablanca peuvent aussi s’expliquer par des contraintes liées au caractère religieux de cer-tains bâtiments. La religion musulmane tenant une large place dans la société marocaine, elle régit même en partie l’urbanisme. A Casablanca, c’est notamment une bande conséquente du littoral à proximité de la mosquée Hassan II qui est inconstructible. Enfin la perte de vitesse du port et des industries implantées à proximités, à l’Est, génère aujourd’hui des délaissés. Il semblerait cependant que certains de ces espaces soient exploités de manière temporaire en raison des structures qui y sont présentes. C’est par exemple le cas du marché de volaille qui s’est installé sur un des sites abandonnés le temps que des travaux de rénovations soient accomplis sur celui existant. L’analyse urbaine de Casablanca m’a permis d’avancer des hypothèses concernant la formation des vides dans la métropole. J’ai ainsi pu dégager quatre voies de formation des vides. Cependant cette première réponse à la question de la nature des vides, basée sur une analyse hors site, est très certainement incom-plète et sera enrichie par l’étude insitu.

Choix du terrain d’étude

Un premier choix de site

En réalisant l’analyse urbaine de Casablanca, j’ai pu mettre en avant quatre grandes voies de formations de vides urbains que sont : les vides planifiés, les vides laissés par des projets non réalisés, les vides liés à des contraintes de bâtiments religieux, et les vides engendrés par la perte de vitesse du port et des industries. C’est à partir de ces phénomènes identifiés que j’ai pu réfléchir à un premier terrain d’étude. Mon intérêt pour les espaces délaissés s’est dès le début de ma réflexion orienté vers les vides en milieu urbain dense, conduisant au choix de Casablanca comme lieu d’étude. C’est cette caractéristique que j’ai tenté de retrouver lors de ma recherche de mon terrain d’étude. Ainsi j’ai commencé à m’intéresser aux espaces vides ayant été engendrés par le retrait de 200m des bâtiments planifié par Ecochard lors de la réalisation de l’autoroute urbaine. Cette dernière avait pour but de limiter l’étalement de la ville en définis-sant clairement ses nouvelles limites et devait être bordée par une ceinture verte. L’autoroute est achevée au cours des années 1970, mais ses abords qui étaient amenés à devenir des espaces verts et de loisirs ne seront jamais transformés. De plus la ville s’est développée et à progressivement transgressé cette limite tracée par Ecochard. Aussi la rocade urbaine se retrouve-t-elle aujourd’hui dans le tissu urbain casa-blancais tout en regorgeant d’espaces délaissés. En diminuant d’échelle, je me suis finalement rapproché de la partie est de l’autoroute urbaine. Cette portion semblait tout particulièrement présenter une densité de vides intéressante, me poussant à la choisir comme terrain d’étude.

Un choix remis en question

Cependant ce premier choix de terrain, qui avait été fait hors site, fut remis en question lors de l’arrivée sur Casablanca. Il se trouve que le quartier initialement choisi était un quartier jeune, qui était encore en voie de construction. De fait les vides qui y étaient présents étaient principalement de potentiels terrains de construction, dont la présence était due à la simple spéculation foncière.

Nouveau choix de site et nouveau type de vide urbain

Mon choix de terrain s’est alors tourné vers un vide urbain qui présenterait un caractère suffisamment durable pour pouvoir être un support fiable à mon étude. Ce terrain a été trouvé dans le tissu urbain bien plus ancien du quartier Sour Jdid, proche de la grande mosquée Hassan II. Il s’agit en réalité de deux terrains d’études, deux vides urbains bien distincts mais contigus et présentant des caractéristiques fort différentes.Le premier site (site n°1), aura permis d’identifier un nouveau type de vide urbain : le vide par gestion ins-titutionnelle. Terrain dépendant d’un bâtiment de type institutionnel, son existence en tant que vide urbain est la conséquence de son délaissement par l’institution. Dans cette étude, il s’agit d’un grand espace appartenant initialement à la foire internationale de Casablanca et laissé vacant par une inadaptation entre sa taille et les besoins de l’institution. Le second (site n°2), celui situé le plus au Sud, tire quant à lui son origine d’un projet qui n’a pas encore été réalisé. Il fait donc partie des types de vides qui avaient déjà été identifiés lors de l’étude de Casablanca. Sa persistance est liée à la temporalité de réalisation d’un grand projet : celui d’une large percée qui reliera la mosquée Hassan II à un grand carrefour existant.

Analyse du contexte de l’étude

Le terrain d’étude se situe au coeur de la ville, proche de la mer, dans le quartier de Sour Jdid. Le cadrage au 1 : 5000ème, support de l’étude urbaine, englobe quant à lui plusieurs autres quartiers : Bourgogne, Gauthier et celui de l’ancienne Medina.

Quatre tissus urbains

Quatre tissus urbains, dont deux profondément différents, caractérisent le cadrage étudié. Ces deux tissus témoignent de deux époques de développement urbain de Casablanca et présentent chacun des typo-logies bâties caractéristiques.Le premier tissu, facilement identifiable par son extraordinaire concentration bâtie et son aspect orga-nique, se trouve à l’Est et correspond à celui de l’ancienne Medina. Il s’agit de la forme urbaine première de Casablanca, avant son développement accéléré au XXème siècle : un regroupement de petites mai-sons situées à proximité immédiate de l’eau. Car Casablanca était initialement un village côtier vivant des ressources de la mer. Avec le développement rapide et massif qu’a connu la ville au XXème siècle, ce tissu historique s’est densifié verticalement. Initialement ne dépassant pas le R+1, les bâtiments affichent au-jourd’hui des gabarits de l’ordre du R+2 et R+3 et continuent encore de s’élever par des transformations successives réalisées par les habitants. La médina affiche aujourd’hui des bâtiments dégradés affichant les stigmates de leurs transformations successives. La médina est une zone résidentielle : Les bâtiments présents sont de l’ordre de la maison familiale où cohabitent jusqu’à trois ou quatre générations. Leurs habitants sont issus des classes populaires, tirant leurs maigres revenus de différents petits métiers et vivant toujours selon des modes de vie traditionnels. Les vides perçant ce tissu dense sont rares et cor-respondent plutôt à des élargissements de la rue. Les artères les plus larges de la Medina sont le foyer de vie de ce tissu : elles sont le lieu social et de vie du quartier. Ce sont dans ces dernières que sont installés la plupart des commerces, en RDC des bâtiments d’habitation, et les nombreux marchés à ciel ouvert. Ce tissu se caractérise par une omniprésence du minéral et les rares traces de végétation signalent la présence d’une institution. Autour de la Médina, aujourd’hui enserrée dans un mur d’enceinte, s’est développé un tissu urbain aux caractéristiques semblables, visibles à l’Ouest sur le cadrage. Sa principale singularité réside dans le tracé rectiligne de ses rues. Le second tissu urbain caractéristique de la zone étudiée est quant à lui bien plus moderne. Il est le fruit du développement urbain impulsé par le protectorat français. Ce tissu est lui aussi principalement résidentiel. La forme urbaine caractéristique qu’il présente est celle de l’ilot : la limite est bâtie en alignement sur la voirie et le bâtiment s’ouvre sur un coeur d’ilot. Les bâtiments sont principalement de petits immeubles ne dépassant pas le R+4/R+5, à l’exception de ceux implantés le long des grandes avenues qui peuvent aller eux jusqu’au R+7. De nombreux commerces sont installés en RDC de ces immeubles. Le tissu est très aéré, les vides et les espaces verts sont multiples. Enfin le dernier tissu urbain remarquable sur le cadrage étudié se trouve le long du front de mer. Il s’agit de la zone investie la plus tardivement et encore aujourd’hui en développement. On y trouve principalement des bâtiments autonomes, des institutions ou de grandes tours de bureaux et d’habitation. Le cadrage témoigne de cette construction tardive du front de mer puisqu’une large frange est toujours non aména-gée à l’Ouest. Il est intéressant de noter que les deux sites d’étude se trouvent à la rencontre de trois des tissus précé-demment décrits.

 

 

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