Déplacement d’un objet solide immergé dans un fluide à seuil

Déplacement d’un objet solide immergé dans un fluide à seuil

Contexte & Problématique

Lorsqu’un objet solide se déplace à travers un fluide quelconque, il génère autour de lui un écoulement. La question à se poser dans ce cas concerne l’étendue de la perturbation autour de l’objet en fonction de la géométrie de l’objet et des propriétés rhéologiques du matériau.

L’écoulement d’un fluide à seuil autour d’un objet est particulièrement complexe et il pose un sérieux problème théorique. Dans des géométries simples (couette, conduite,…), la répartition des contraintes est donnée, l’interface solide-liquide est fixée après un certain temps d’écoulement, et la distribution des zones solides et liquides du matériau ne change plus pendant l’écoulement. Pour le déplacement d’un objet, la situation est différente. Au fur et à mesure que l’objet progresse à travers le fluide, de nouvelles régions solides sont constamment atteintes et liquéfiées au moins pendant quelques instants. Cela signifie que de nouvelles déformations du matériau dans le régime solide se produisent continuellement autour de l’objet et pourrait jouer un rôle important dans le processus.

Ce problème a, jusqu’ici, été principalement étudié dans le cas d’un objet compact. Le déplacement d’une sphère ou un cylindre à travers un fluide à seuil a été étudiée d’une manière approfondie par la théorie et les simulations .

Les relations donnant la force en fonction de la vitesse ont été déduites et en partie confirmées expérimentalement .

Seuls quelques travaux visant à mesurer directement le champ d’écoulement autour de l’objet ont été réalisés. Atapattu et al.[22] étaient les premiers à mesurer les profils de vitesse tangentielle autour d’une sphère. Gueslin et al. [25] ont fourni une étude approfondie du champ de vitesse, mais cela concernait un matériau thixotrope pour lequel il peut y avoir des effets additionnels sur le cisaillement à proximité de la surface de l’objet. Enfin, Putz et al. [26] (pour les sphères) et Tokpavi et al. [27] (pour les cylindres) ont fourni de nouvelles données détaillées concernant le champ de vitesse autour d’un objet se déplaçant à travers un fluide à seuil. Ils ont constaté un écart important du champ de vitesse par rapport à celui obtenu à partir de simulations. En particulier, ils ont remarqué une asymétrie, l’étendue de la zone cisaillée à l’avant de l’objet est apparemment plus grande que prévue par la théorie. Notons que dans ces travaux, toutes les déformations observées ont été associées à des écoulements dans le régime liquide. Or, comme nous allons le voir dans cette étude, le champ de vitesse apparent pourrait inclure à la fois l’écoulement dans le régime liquide et les déformations dans le régime solide. Ces désaccords entre les prédictions théoriques et le peu d’observations expérimentales montrent qu’il manque une validation expérimentale du champ de vitesse autour de la sphère.

Dans cette étude, nous nous concentrons sur le cas d’un long objet droit (plaque fine ou cylindre) se déplaçant le long de son axe principal à travers un fluide macroscopiquement au repos. C’est une alternative intéressante à un objet compact dans le sens ou cela nous laisse plus de temps pour observer les caractéristiques locales de l’écoulement : ici, la région solide ne peut pas se fermer après le passage de la pointe de la plaque. Nous nous attendons donc à être en mesure de bien distinguer les régions solides et liquides.

Cette situation présente une certaine analogie avec le problème de la couche limite classique en mécanique des fluides : un écoulement de fluide autour d’un objet long statique. Ce problème a des solutions relativement simples pour des fluides newtoniens à grand nombre de Reynolds : l’écoulement est localisé le long de l’objet dans une couche mince d’une épaisseur augmentant avec la distance de la pointe de l’objet [28]. Pour de faible nombre de Reynolds, il n’existe pas de solution analytique [29], mais nous savons au moins que l’écoulement est perturbé loin de l’objet, typiquement à une distance de l’ordre de la longueur de l’objet.

D’autre part, quand une plaque est poussée à travers un matériau solide simple, elle provoque d’abord des déformations élastiques qui peuvent s’étendre loin de l’objet [14]. Puis, elle commence à pénétrer dans le matériau au-delà de la limite élastique et des déformations plastiques apparaissent. Dans certains cas, la déformation induite est fortement localisée le long de la plaque et entraîne la séparation du matériau en deux parties comme dans du beurre. A notre connaissance, il n’existe pas de théorie décrivant ces processus dans le domaine des matériaux solides.

Dans le cas des fluides à seuil, nous pouvons nous attendre à ce que la couche limite emprunte certaines caractéristiques, à la couche limite des solides simples et à celle des liquides simples. Elle devrait donc mutuellement inclure la déformation des zones solides loin de l’objet et la tendance à s’écouler comme un liquide près de l’objet.

Ce sujet n’a été exploré que d’un point de vue théorique. En 1947 Oldroyd [31] a développé la théorie de la couche limite viscoplastique dans laquelle le matériau devient rigide partout sauf dans une fine couche où les effets visqueux et plastiques sont tous les deux importants. Ensuite, Piau [32] et Piau et al [30] ont réexaminé et corrigé cette théorie d’Oldroyd. La théorie de Piau a l’avantage de prendre en compte certains aspects de l’impact de la déformation de la région solide sur les caractéristiques de l’écoulement dans la région liquide. Elle prédit une couche limite en forme de lentille  et d’épaisseur maximale qui augmente avec la longueur et la vitesse de la plaque, et avec l’inverse de la contrainte seuil. En particulier, cette théorie prédit que cette épaisseur tend vers zéro lorsque la vitesse s’approche de zéro.

Écoulement autour d’une plaque : théories existences

Comme nous venons de l’évoquer ci-dessus, les seules travaux consacrés à l’étude de l’écoulement d’un fluide à seuil autour d’une plaque solide sont purement théoriques. Les approches développées lors de ces travaux ne sont donc pas forcément appropriées, puisqu’elles n’ont jamais été validées par des expériences ou confrontées à des travaux numériques ou autres. Dans cette partie, nous exposons le problème à la lumière de ces théories et nous présentons les solutions qu’elles prédisent. Puis, plus loin dans ce manuscrit , nous comparons ces solutions à nos résultats expérimentaux.

Bases

Le problème que nous considérons ici est le déplacement d’un volume à deux dimensions infinies d’un fluide à seuil, le long de la direction x autour d’une plaque solide mince située à x > 0 et y = 0 (l’épaisseur de la plaque est supposée négligeable). En pratique, nous pouvons supposer que, loin de la plaque (x → −∞), le matériau est poussé à une vitesse uniforme V . Au moins à son arrivée autour de la plaque, il est légèrement dévié et cisaillé autour de la plaque. Dans le régime solide, nous supposons un comportement élastique. La transition solide-liquide est obtenue lorsque le second invariant de la partie déviateur du tenseur de contrainte (TII ) vérifie la relation suivante :

√TII = τc,

où τc est la contrainte seuil. Notons qu’avec un tel comportement le régime liquide est atteint à une déformation critique qui dépend néanmoins de l’état initial exact du matériau.

Notons que les fluides à seuil tels que les solutions de carbopol peuvent présenter quelques effets visco-élastique et en particulier peuvent conserver, dans le régime liquide, une partie de l’énergie élastique stockée dans le régime solide. Les données expérimentales montrant précisément l’impact des effets élastiques sur le comportement rhéologique sont rares et de toute façon difficiles à interpréter autour de la transition solide-liquide.

Ici, pour la simplicité de la présentation, nous allons considérer l’écoulement uniquement le long du côté y > 0, puisque l’écoulement est symétrique des deux cotés. Loin de la plaque la vitesse du matériau est uniforme, le matériau est donc dans son régime solide. Nous pouvons supposer qu’il n’y a pas de glissement le long de la plaque. Ceci implique que pour x > 0, la vitesse diminue à partir de zéro en y = 0 à V quand y → ∞. Les éléments du matériau en contact avec la plaque sont en permanence cisaillés, donc nécessairement ils deviennent liquide après un certain temps d’écoulement. En revanche, loin de la plaque le matériau est très faiblement déformée. En conséquence, pour un écoulement stationnaire il existe une zone de liquide autour de la plaque, tandis que le reste du matériau reste solide.

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Table des matières

INTRODUCTION
1 État des connaissances
1.1 Fluides à seuil
1.1.1 Définition
1.1.2 Rhéologie
1.1.2.1 Grandeurs caractéristiques
1.1.2.2 Modèle de Herschel-Bulkley
1.1.2.3 Rhéométrie classique et limitations
1.2 Pénétrométrie
1.3 Déplacement d’un objet solide immergé dans un fluide à seuil
1.3.1 Contexte & Problématique
1.3.2 Écoulement autour d’une plaque : théories existences
1.3.2.1 Bases
1.3.2.2 Écoulement de couche limite uniforme
1.3.2.3 Problème de la couche limite
1.4 Phénomènes d’Interface & Mouillage
1.4.1 Tension de surface
1.4.2 Mouillage statique : généralités
1.4.3 Ménisques et force capillaire
1.4.3.1 Ménisques
1.4.3.2 Force capillaire et méthode de Wilhelmy
1.4.4 Dépôt de fluide
2 Matériel et Méthodes
2.1 Matériaux utilisés
2.1.1 Matériaux modèles
2.1.2 Matériaux réels
2.1.3 Fluides newtoniens
2.1.4 Caractérisation rhéologique
2.1.4.1 Comportement autour du seuil
2.1.4.2 Comportement en régime permanent
2.1.4.3 Relaxation après un fort cisaillement
2.2 Dispositif de la plaque
2.2.1 Machine de force
2.2.2 Installation du montage sur la machine de force
2.2.3 Essais en profondeur
2.2.3.1 Propriétés géométriques et surfaciques des objets solides utilisés
2.2.3.2 Caractéristiques des récipients
2.2.4 Essais de mouillage
2.3 Procédures expérimentales
2.3.1 Mesures en profondeur
2.3.1.1 Protocole de mise en place
2.3.1.2 Mesure de force
2.3.1.3 Mesure par PIV (Particule Image Velocimetry )
2.3.2 Expériences de mouillage
3 Interaction Fluide/Solide : Écoulement en profondeur
3.1 Pénétration d’une plaque solide dans un fluide à seuil : Mesures macroscopiques
3.1.1 Évolution de la force en fonction de la profondeur de pénétration
3.1.1.1 Identification des différents régimes
3.1.1.2 Analyse de l’écoulement le long de la plaque
3.1.2 Contrainte de cisaillement le long de la plaque en mouvement
3.1.2.1 Dépendance des paramètres géométriques du système
3.1.2.2 Impact de l’état de surface de la plaque
3.1.2.3 Impact de la vitesse de la plaque
3.1.2.4 Mesure du seuil d’écoulement
3.1.3 Tests de relaxation
3.1.3.1 Régime III
3.1.3.2 Régime II
3.1.4 Cas d’un objet cylindrique
3.1.4.1 Déplacement à vitesse constante
3.1.4.2 Test de relaxation
3.1.5 Mesures macroscopiques : Conclusion
3.2 Pénétration d’une plaque solide dans un fluide à seuil : Observations qualitatives
3.3 Pénétration d’une plaque solide dans un fluide à seuil : Mesures locales
3.3.1 Champs de vitesse : Résultat typique
3.3.2 Écoulement permanent
3.3.3 Trajectoires
3.3.4 Déformation
3.3.5 Profils de vitesse
3.3.5.1 Évolution le long de la plaque
3.3.5.2 Impact de la vitesse de la plaque
3.3.6 Correspondance mesures locales – mesures macroscopiques
3.3.7 Conclusion
3.4 Retrait d’une plaque solide à partir d’un bain de fluide à seuil
3.4.1 Courbe typique
3.4.2 Méthode d’analyse
3.4.2.1 Régime III
3.4.2.2 Régime II
3.4.3 Résultats et discussion
CONCLUSION

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