Définitions d’une agriculture durable

Définitions d’une agriculture durable

L’AGRICULTURE : UNE ACTIVITE MULTIFONCTIONNELLE INTIMEMENT LIEE A SON ENVIRONNEMENT

L’agriculture est en interaction forte avec l’environnement dans lequel elle s’inscrit. Ces interactions generent des fonctions de l’agriculture qui lui procurent une dimension publique par le biais d’attentes societales a des echelles spatiales variees (Allaire and Dupeuble 2004). L’agriculture est tout d’abord en interaction avec son environnement economique. Les conditions de realisation de l’activite agricole et ses performances dependent ainsi des prix et de la structure de marches globaux et locaux. A l’inverse, l’agriculture peut contribuer a d’autres activites economiques locales, comme l’activite touristique. Basee sur l’utilisation de l’espace et de ressources naturelles, l’agriculture est aussi conditionnee par son environnement biophysique (par exemple en etant dependante du climat ou de la presence de pollinisateurs). Elle influence reciproquement cet environnement biophysique a l’echelle locale (par exemple en fournissant des habitats pour la faune sauvage) ou globale (par exemple via le stockage de carbone atmospherique ou l’emission de gaz a effet de serre).

Enfin, l’agriculture cohabite avec les espaces de vie des populations locales. Elle permet parfois la dynamisation des milieux ruraux et la transmission d’un patrimoine culturel specifique et entre en synergie ou en competition avec certaines dynamiques liees a ces espaces de vie, comme l’urbanisation (Pierre et al. 2008). Elle s’inscrit aussi dans des problematiques de sante publique, notamment en lien avec la qualite sanitaire des productions agricoles et l’usage des produits phytosanitaire (Allaire and Dupeuble 2004; Tafani 2011). L’agriculture fait face a une multitude d’opportunites, problemes et enjeux1, lies en partie a ses interactions avec son environnement economique, biophysique et social. L’emergence d’une agriculture durable est par consequence devenue un enjeu majeur pour la societe et pour la recherche agronomique.

DEFINITIONS D’UNE AGRICULTURE DURABLE

Reprenant la definition de Harwood (1990), je definis une agriculture durable comme « une agriculture qui evolue indefiniment vers une utilite humaine plus grande, une utilisation plus efficace des ressources, tout en respectant un equilibre avec l’environnement, qui soit favorable aux hommes comme aux autres especes ». Dans la litterature, les definitions de l’agriculture durable sont cependant multiples (Zahm et al. 2015). Certaines de ces definitions se veulent normatives : elles mettent l’accent sur une combinaison d’objectifs divers que doit poursuivre l’agriculture, et reposent sur des ideaux et valeurs en rupture avec l’agriculture productiviste et agro-industrielle. La durabilite de l’agriculture peut aussi etre consideree sous l’angle d’une combinaison de strategies et pratiques d’ordre technique liees a la gestion des ressources et des intrants (minimiser l’utilisation de produits phytosanitaires par exemple).

On peut aussi distinguer une durabilite restreinte, centree sur l’activite agricole, d’une durabilite elargie, qui considere les contributions et impacts de l’agriculture par rapport a son environnement proche (le local) et lointain (le global). Selon l’approche de la durabilite restreinte, une agriculture durable est une agriculture capable de perpetuer ses systemes de culture et d’elevage, par la reproduction de ses facteurs de production, de ses ressources naturelles, et des structures economiques et sociales qui la conditionnent (Desffontaines 2001). A l’inverse, l’approche de la durabilite elargie est centree sur les consequences (positives ou negatives) de l’agriculture sur son environnement social, environnemental, et economique (Terrier et al. 2010; Zahm et al. 2015). Ces definitions d’une agriculture durable s’accordent sur la necessite de considerer l’agriculture et son environnement comme un systeme. Un systeme est un ensemble defini d’elements en interaction les uns avec les autres qui ne peut pas etre reduit a la somme de ses elements. Le passage d’un sous-systeme a un systeme plus large n’est pas le fruit d’une simple addition mais le resultat d’interactions spatiales, de complementarites et d’antagonismes (Allaire 2004). Selon cette approche, la durabilite de l’agriculture peut etre abordee a differents niveaux, depuis l’echelle spatiale de la parcelle jusqu’a l’echelle mondiale.

LE TERRITOIRE : UNE ECHELLE POUR ABORDER LA DURABILITE D’UN SYSTEME AGRICOLE

Je definis un système agricole comme la maniere dont un ensemble d’entites a vocation de production et de developpement agricole sont structurees, interagissent et se coordonnent pour produire des biens et services. Parce que je prends peu en compte les dimensions socio-culturelles et historiques du systeme considere, ma definition de systeme agricole se distingue de celle de systeme agraire2 (Mazoyer and Roudart 1997). Le territoire, que je definis ici a l’echelle de la petite region agricole, est generalement considere comme une echelle pertinente pour aborder la durabilite d’un systeme agricole (Zahm et al. 2015). En m’inspirant de Benoit et al. (2006) et de Lardon (2012), je definis un territoire comme un espace delimite au sein duquel se structurent les activites economiques et sociales de plusieurs acteurs en interaction. Le territoire peut etre vu comme un triptyque de trois sous-systemes (Benoit et al. 2006).

Le premier est un systeme d’acteurs. Les acteurs ont envers le territoire un sentiment d’appartenance plus ou moins prononce et en ont une perception qui leur est propre ; le territoire est donc socialement construit (Lardon 2012). Au sein d’un territoire, les acteurs entretiennent aussi des relations specifiques. Les territoires peuvent etre, par exemple, le lieu d’existence de structures communautaires et sociales fortes determinant le comportement des acteurs (Roussel 2008). Un second sous-systeme est le systeme d’activites generees par ces acteurs. Ces activites sont en partie structurees a l’echelle du territoire, comme certaines filieres economiques locales (Hochedez 2008), ou formes d’actions collectives et de coordination (Falies 2008). Enfin, un troisieme sous-systeme concerne les agencements, dynamiques, et interactions spatiales au sein de ce territoire. Le systeme agricole est dit ≪ ancre ≫ dans ce territoire (a des degres divers) dans la mesure ou il utilise ses ressources (par exemple son espace, ses ressources naturelles ou son organisation sociale) (Le Gall and Beriot 2014). C’est donc a cette echelle que se definissent generalement de nombreux enjeux, aussi bien centres sur l’activite agricole que sur la relation de celle-ci avec son environnement (Renting et al. 2009). A l’echelle d’un territoire, il est donc possible d’aborder le systeme agricole a travers une approche interdisciplinaire prenant en compte les interactions entre les activites agricoles (production et commercialisation), les processus environnementaux, les dynamiques territoriales et les acteurs en situation (Lardon 2012). Houdart (2005) a par exemple construit une approche permettant d’analyser les pollutions aux pesticides d’un bassin versant en croisant les pratiques agricoles, le fonctionnement spatial des exploitations agricoles et les politiques de gestion du foncier a l’echelle territoriale.

UNE MULTITUDE D’ACTEURS CONCERNES PAR LE SYSTEME AGRICOLE

A travers ses interactions avec son environnement a differentes echelles spatiales, un systeme agricole implique une grande diversite d’acteurs. Le terme ≪ acteur ≫ a deux traductions en anglais. La premiere, ≪ stakeholder ≫, se refere a un individu ou a un groupe d’individus concernes de maniere specifique, directement ou indirectement, par un enjeu ou un probleme (Grimble and Wellard 1997). Cette definition ne fait pas explicitement reference aux actions de cet acteur. La seconde, ≪ actor ≫, se refere a l’inverse a un individu ou a un groupe d’individus capable de prise de decision de maniere relativement autonome (Pahl-Wostl 2003). Dans cette these, je definis un acteur comme un individu concerne par le systeme agricole, qu’il l’influence et/ou en depende. Cet acteur n’est donc jamais un groupe, bien qu’il soit influence par le(s) groupe(s) au(x)quel(s) il appartient (Grimble and Wellard 1997).

Ces relations d’influence et/ou de dependance d’un acteur vis-a-vis du systeme agricole peuvent varier selon le probleme ou l’enjeu considere (Grimble and Wellard 1997). La plupart de ces acteurs ont une diversite de missions et d’activites en partie liees a leurs institutions de rattachement. Certains acteurs appartiennent par exemple a des institutions dont l’objectif est de favoriser le developpement agricole selon des approches technico-économiques. D’autres institutions ont des missions territoriales et n’abordent le systeme agricole qu’a travers ses interactions avec les autres composantes du territoire (par exemple un Parc Naturel Regional). Les echelles d’action des acteurs, c’est-a-dire les echelles auxquelles et pour lesquelles ils prennent leurs decisions, peuvent varier depuis l’exploitation agricole jusqu’a la nation voire au-dela (Pahl-Wostl 2003). Les relations que les acteurs entretiennent conditionnent aussi leurs actions, decisions, et impacts sur le systeme agricole (Newig et al. 2010). Chaque acteur, fort des experiences liees a ses missions et activites, possede des connaissances et points de vue qui lui sont propres sur le systeme agricole et les autres acteurs. Ces connaissances et points de vue representent une richesse dont la science, dans un renouvellement de ses rapports avec la societe, tente de tirer le meilleur parti avec l’essor des recherches participatives (Houllier 2016).

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Table des matières

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION, POSITIONNEMENT SCIENTIFIQUE
1.L’agriculture : une activité multifonctionnelle intimement liée à son environnement ..
2.Définitions d’une agriculture durable
3.Le territoire : une échelle pour aborder la durabilité d’un système agricole
4.Une multitude d’acteurs concernés par le système agricole
5.La nécessité d’impliquer les acteurs dans l’évaluation de la durabilité des systèmes agricoles
6.Modéliser pour évaluer la durabilité des systèmes agricoles
7.La modélisation collaborative : une approche pour partager les représentations et stimuler les apprentissages
8.Problématique de la thèse
9.Contexte de la thèse
9.1. Le projet CLIMATAC
9.2. Le plateau de valensole
10.Plan de la thèse
CHAPITRE 2 : DEMARCHE MISE EN OEUVRE
1.Une conception adaptative de la démarche
2.Objectifs de la démarche
2.1. Partager les représentations des acteurs
2.2. Favoriser les apprentissages pour faire face aux incertitudes propres aux systèmes agricoles
3.Un modèle pour évaluer la durabilité du système agricole
3.1. Une co-construction ex nihilo du modèle
3.2. Un modèle permettant une évaluation multicritère du système agricole
3.3. Un modèle multi-échelle
3.4. Un modèle permettant une approche prospective
3.5. Un modèle de simulation multi-agent
4.Différents rôles des participants à la démarche
4.1. Rôles liés à la co-construction des objets intermédiaires
4.2. Rôles non liés à la co-construction des objets intermédiaires
5.Chercheurs ayant participé à la démarche
5.1. Caractéristiques des chercheurs
5.2. Posture des chercheurs
6.Acteurs participant à la démarche
6.1. Critères de sélection des acteurs participants
6.2. Présentation des types d’acteurs ayant participé à la démarche
7.Grandes phases de la démarche
7.1. Lancement du projet climatac sur le plateau de valensole
7.2. Phase 1 : formulation du problème abordé par la démarche
7.3. Phase 2 : co-construction du modèle informatique d’évaluation du système agricole
7.4. Phase 3 : evaluation des performances du système agricole et exploration de scénarii par le biais du modèle
CHAPITRE 3 : ELICITER LES MODELES MENTAUX DES ACTEURS POUR REALISER UN DIAGNOSTIC PRELIMINAIRE A UNE DEMARCHE DE MODELISATION COLLABORATIVE
1.Introduction
2.Methods
2.1. Study site
2.2. Methodological framework
2.3. Semi-structured interviews among stakeholders (step 1)
2.4. Stakeholder analysis and selection of potential participants (step 2)
2.5. Cognitive mapping (step 3)
2.6. Participants’ feedback through second individual interviews (step 4)
2.7. Analysis of cognitive maps (step 5)
3.Results
3.1. Selection of the participants
3.2. Example of a final cm
3.3. Analysis and comparison of the cms
4.Discussion
4.1. Achievement of a preliminary diagnosis
4.2. Method for cognitive mapping
4.3. Contribution to stakeholder engagement
Conclusion and perspectives
CHAPITRE 4 : FORMULER COLLECTIVEMENT LE PROBLEME ABORDE PAR LA DEMARCHE : DU DIAGNOSTIC PRELIMINAIRE A L’EXPLORATION DE FUTURS POSSIBLES
1.Réalisation du diagnostic préliminaire
1.1. Rappel de la méthode
1.2. Résultats : synthèse des enjeux, problèmes, et opportunité du système agricole selon les acteurs interrogés
2.Construction collective d’une question partagée
2.1. Méthode
2.2. Résultats
3.Co-construction du modèle conceptuel
3.1. Méthode
3.2. Résultats
4.Travail de scénarisation participative
4.1. Méthode
4.2. Résultats
CHAPITRE 5 : CO-CONSTRUIRE UN MODELE INFORMATIQUE AVEC LES ACTEURS
SECTION 1 : PRESENTATION GENERALE DU MODELE INFORMATIQUE
Représentation de la région agricole
Représentation des exploitations-type
Définition et caractérisation des activités culturales
Module climatique
Module de calcul des indicateurs
SECTION 2 : ACTIVITES AYANT PERMIS LA CO-CONSTRUCTION DU MODELE INFORMATIQUE
Présentation générale
Déroulement et organisation des ateliers
Séances de travail individuelles avec des experts des systèmes de culture .
Séances de travail individuelles avec des agriculteurs
Travail de modélisation au laboratoire
SECTION 3 : PROCESSUS DE CO-CONSTRUCTION DES MODULES
1.Construction du zonage agro-écologique
1.1. Délimitation d’une zone irrigable et d’une zone non irrigable
1.2. Zonage selon l’intensité du dépérissement du lavandin
1.3. Zonage selon les types de sols
1.4. Surfaces agricoles utiles des sous-zones agro-écologiques
2.Représentation des systèmes de culture des exploitations-type
2.1. Allocation du lavandin et de l’irrigation aux parcelles
2.2. Durée d’une plantation de lavandin
2.3. Durée moyenne d’une plantation de lavandin à l’échelle de l’exploitationtype
2.4. Surface relative cultivée en lavandin
2.5. Intervalle séparant deux plantations de lavandin sur une même parcelle
2.6. Espèces complémentaires au blé dur et au lavandin et proportions relatives
2.7. Rotations possibles au sein des exploitations-type
2.8. Surfaces relatives cultivées en blé dur
2.9. Rotations complètes
2.10. Détermination des itinéraires techniques
3.Définition et caractérisation des activités culturales
3.1. Processus général de définition et de caractérisation des activités
3.2. Estimation des rendements du lavandin
4.Module climatique
5.Indicateurs calculés par le modèle
5.1. Indicateurs liés aux aspects économiques
5.2. Indicateurs liés aux aspects environnementaux
5.3. Indicateurs au niveau territorial
CHAPITRE 6 : EVALUATION DU SYSTEME AGRICOLE DANS LA SITUATION DE REFERENCE ET SOUS DEUX SCENARII D’EVOLUTION
1.Evaluation des performances dans la situation de référence
1.1. Comparaison des performances des espèces cultivées dans la situation de référence
1.2. Comparaison des performances des exploitations-type
1.3. Evaluation des performances à l’échelle des sous-zones agro-écologiques et de la région agricole
2.Développement de scénarii d’évolution du système agricole
3.Evaluation des scénarii d’évolution
3.1. Evolution des performances à l’échelle de la parcelle
3.2. Evolution des performances à l’échelle des exploitations-type
3.3. Evolution des performances à l’échelle de la région agricole
4.Discussion des résultats
4.1. Influence du niveau de spécialisation en lavandin des exploitations sur les performances du système agricole
4.2. Influence de l’équipement pour l’irrigation des exploitations sur les performances du système agricole
4.3. Limites dans la description des itinéraires techniques
CHAPITRE 7 : DISCUSSION GENERALE
1.Méthode de suivi-évaluation de la démarche
1.1. Cadre conceptuel de l’évaluation de la démarche
1.2. Procédures de suivi-évaluation de la démarche
2.Evaluation des aspects opérationnels
2.1. Réflexions sur la prospective participative
2.2. Réflexions sur l’évaluation multicritère
2.3. Concilier degré d’abstraction de la représentation spatiale et calcul d’indicateurs à différentes échelles
2.4. Aspects liés à l’ingénierie de co-construction du modèle
3.Analyse du contexte et de ses effets sur la démarche
3.1. Intervenir sur un terrain sans antériorité: comment assurer l’engagement des acteurs ?
3.2. Prendre en compte des enjeux globaux: l’exemple de l’atténuation du changement climatique
4.Analyse du processus participatif
4.1. Evolution de la participation des acteurs
4.2. Articulation de phases individuelles et collectives
4.3. Une démarche sur plusieurs années
5.Effets sur les acteurs
5.1. Apprentissages sur le système agricole
5.2. Autres apprentissages liés au partage des représentations
5.3. Différences d’apprentissages entre acteurs au cours de la démarche
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE

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