Définition du transport aérien commercial de passager et de l’indiscipline

Définition du transport aérien commercial de passager et de l’indiscipline

Le phénomène de l’indiscipline s’étudie dans le cadre du transport aérien commercial de personnes, que ce transport ait un caractère national ou international. Il s’agit du transport aérien de personnes effectué par aéronef contre rémunération, dont les points de départ et de destination sont situés sur le territoire d’un seul État, ou sur le territoire de deux États. Ont été exclus des propos de ce mémoire le transport aérien militaire et de services, le transport aérien relevant de l’aviation générale, et le transport aérien de marchandises, dans la mesure où leur activité n’a pas été confrontée à une libéralisation, conduisant à une croissance du nombre de passagers et du phénomène d’indiscipline en leur sein, a contrario du transport aérien commercial de personnes. Dans les développements suivants, l’expression « transport aérien » renverra au transport aérien commercial de personnes, national et international.

Le passager indiscipliné, ou plus généralement la personne indisciplinée, est un individu « qui ne [respecte] pas les règles de conduite à bord des aéronefs ou qui ne [suit] pas les instructions des membres de l’équipage, et qui [perturbe] ainsi l’ordre et la discipline à bord. » . Cette définition générale est complétée par un ensemble de textes  venant la préciser dans la mesure où celle-ci définit un individu en fonction de ses actes, or quels actes sont concernés ? La réponse n’est pas simple puisque chaque État va venir, dans son ordre juridique pénal interne, préciser les infractions visées par cette définition. Il n’existe pas d’harmonisation du régime de sanction de l’indiscipline à l’échelle internationale. Cela pose un certain nombre de difficultés dans la mise en œuvre de la sanction, d’autant plus que l’incident survient dans un contexte international. Face à la croissance du nombre d’incidents depuis les années 1990, il est apparu urgent ces dernières années, pour les organisations internationales comme pour le législateur français, de proposer une modernisation du régime de sanction de l’indiscipline. Selon les données issues de l’International Air Transport Association (IATA), il survient un cas d’indiscipline pour 1 289 vols. Ce chiffre est considérable ; pour donner un ordre d’idée, l’aéroport Roissy- Charles de Gaulle gère environ 2 000 vols par jours.

Le contexte dans lequel s’inscrit le phénomène d’indiscipline 

La libéralisation du transport aérien 

Le transport aérien a connu une libéralisation de son activité, à partir de 1978 aux Etats-Unis , puis de 1987 dans l’Union européenne . Le but recherché de la libéralisation est  de permettre aux compagnies aériennes d’améliorer leur productivité et leur rentabilité, et aux passagers d’obtenir une meilleure qualité des services offerts à bord et une réduction du prix du titre de transport. La libéralisation du marché du transport aérien de passagers a entraîné une croissance économique de l’activité depuis les années 1970 jusqu’aujourd’hui, à travers l’augmentation des biens et services proposés par les compagnies aériennes. Cette libéralisation conduit à ce que le marché soit structuré en deux axes : le marché domestique, qui est accaparé par les compagnies à bas-coût (low cost), et le marché international, qui s’est structuré autour de grands groupes tels qu’Air France-KLM ou Lufthansa. La croissance économique est un facteur de la libéralisation, c’est un indicateur de la richesse. On peut observer que le marché du transport aérien connaît une croissance économique calquée sur la croissance du produit intérieur brut (PIB). Cela signifie que les personnes ont de plus en plus de moyens et utilisent de plus en plus le transport aérien. En se basant sur les prévisions de croissance du PIB, les études ont prévu un doublement de la croissance du transport aérien tous les quinze ans. Par ailleurs, la croissance démographique joue un rôle dans la croissance que connait le marché du transport de passagers. On peut ainsi remarquer que les foyers de populations les plus importants, comme la Chine, l’Inde, le Brésil, sont ceux qui connaissent une plus grande prévision de croissance de l’activité. Au sein des marchés plus matures, comme en Europe, de nouveaux modes de consommation émergent, moins focalisés sur la qualité du service que sur le prix compétitif. Cette tendance explique l’avènement des compagnies low-cost, qui exercent une compétitivité -prix, représentée par la capacité de proposer sur le marché des produits à des prix inférieurs à ceux de la concurrence, en réduisant les coûts de production. Des personnes qui n’étaient pas habituées à voyager vont alors constituer une nouvelle demande.

Ces facteurs de croissance ont conduit à une hausse très significative de 1970 à 2017 du nombre de passagers transportés, le rapport serait d’une multiplication par dix du nombre de passagers. La demande finale en transport aérien est amenée à continuer à croître. Or cette hausse du nombre de passagers transportés conduit à une hausse du phénomène des actes d’indiscipline.

L’inertie du législateur français face aux besoins des opérateurs

La problématique de l’indiscipline dans le transport aérien est ancienne puisqu’elle se pose depuis le début du transport aérien commercial. Depuis les années 1990, ce transport connaît une généralisation de son utilisation, ce qui implique une hausse du nombre de passagers, et en corollaire, une hausse des incidents d’indiscipline. Face au manque de réactivité des instances internationales pour adopter un nouveau texte modernisant le régime mis en place en 1963 par la Convention de Tokyo (Annexe 1), les législateurs nationaux ont eu l’opportunité de se saisir du problème au niveau national ou régional. Un protocole à cette Convention a été adopté dans le cadre de l’OACI, le Protocole de Montréal (Annexe 2) de 2014, cependant celui-ci rencontre des obstacles retardant son entrée en vigueur.

Les gouvernements n’ont pas tous évalué le problème avec le même degré d’urgence. Par exemple, le gouvernement britannique a légiféré dès les années 1990 sur la question de l’indiscipline ; en effet, ont été mis en place des peines de prison allant jusqu’à deux ans,  ou encore l’utilisation de carton jaune comme avertissement à l’adresse du passager concerné. Cette implication du gouvernement britannique s’explique notamment par la survenance de nombreux actes d’indiscipline dus à une consommation excessive d’alcool. Autre exemple, en 2004 la compagnie aérienne russe Aeroflot a reçu l’aval du  gouvernement pour mettre en place une liste noire des personnes interdites de transport sur ses vols suite à un acte d’indiscipline grave. Au contraire, l’État français ne s’est saisi de la problématique que très récemment. Traditionnellement, son action s’est limitée à participer à l’adoption de textes internationaux tels que le Protocole portant amendement de la Convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs de 2014 (Protocole de Montréal). Pourtant, certains sénateurs, sensibilisés à la problématique, ont formulé un certain nombre de questions au ministre en charge du transport aérien afin d’obtenir un régime juridique de  sanction des passagers indisciplinés. En réponse, le ministre répondait que le corpus de texte international était suffisant en la matière, et qu’il n’y avait pas lieu d’adopter un régime juridique national en matière d’indiscipline dans la mesure où la compagnie nationale mettait déjà en œuvre des mesures de prévention en interne.

À partir des années 2010, l’émergence de problématiques liées à la sécurité et à la sûreté ont été l’occasion de mettre la question du passager indiscipliné sur le devant de la scène. La Direction générale de l’aviation civile, autorité administrative en charge de mettre en place ces mesures, et de réglementer le transport aérien de manière générale, a été à l’initiative de la mise en place de groupes de travail dont les conclusions ont été présentées au cours d’un séminaire en février 2017. Ce séminaire a permis de proposer de nombreuses mesures, à mettre en place tant par les professionnels que par le législateur, pour prévenir et sanctionner l’indiscipline. Suite à cette initiative, il a été décidé de maintenir les groupes de travail et de faire un nouveau point en 2018. Par ailleurs, la commission des finances du Sénat a chargé la Cour des Comptes d’une enquête sur le rôle de l’État dans la compétitivité du transport aérien français. Sur le sujet de  l’indiscipline, deux axes de réponse ont été données. Premièrement, la Cour des Comptes appelle l’État à « maîtriser les dépenses de sûreté aéroportuaire et dégager des ressources nouvelles sans pénaliser les compagnies aériennes, dans un contexte de menace terroriste élevée». Il relève des missions de l’État d’édicter des mesures de sûreté, celles-ci sont mises en œuvre par les aéroports, et répercutées sur le prix des billets d’avion par les compagnies aériennes à travers la taxe d’aéroport. La Cour des Comptes constate que cette taxe vient pénaliser les compagnies aériennes dans la mesure où elles n’arriveraient pas à répercuter l’intégralité du montant de la taxe sur la vente des billets aux passagers. Ce constat se confirmerait d’autant plus que le transport aérien de passagers est une activité disposant de « marges d’exploitations structurellement faibles ». Le risque est que les compagnies aériennes augmentent les prix des billets au détriment des consommateurs.

En outre, ces dépenses très lourdes pesant sur les aéroports ne pouvant pas toutes être financées à travers la taxe d’aéroport, ceux-ci peuvent alors être amenés à exercer un arbitrage entre les différentes mesures à mettre en place. Face à la montée de la menace terroriste et à la croissance du trafic de passagers, les aéroports ne peuvent pas financer toutes les mesures. Si un arbitrage doit être fait, on peut supposer que les mesures découlant de la menace terroriste seront privilégiées aux mesures relatives à la prévention ou à la sanction du passager indiscipliné. Deuxièmement, la Cour des Comptes dénonce l’absence d’harmonisation internationale des droits des passagers. La juridiction met en avant la présence d’un cadre défini par l’Union européenne très protecteur des passagers/consommateurs alors qu’il n’existe pas de cadre minimum au rang international. Or ce régime très protecteur du consommateur implique des distorsions de concurrence entre les compagnies aériennes européennes et non européennes.

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Table des matières

Introduction
Paragraphe 1. Définition du transport aérien commercial de passager et de l’indiscipline
Paragraphe 2. Le contexte dans lequel s’inscrit le phénomène d’indiscipline
1. La libéralisation du transport aérien
2. L’inertie du législateur français face aux besoins des opérateurs
Paragraphe 3. La problématique du passager indiscipliné relève de la sûreté et de la sécurité
Paragraphe 4. La difficile mise en place d’un cadre général relatif au passager indiscipliné
Titre 1. La mise en place d’un cadre opérationnel dissuasif face aux passagers indisciplinés
Chapitre 1. Identifier le passager indiscipliné et l’acte d’indiscipline
Paragraphe 1. La définition évolutive du passager indiscipliné
A. Définitions juridiques du passager indiscipliné et de l’acte d’indiscipline
a. La définition de l’acte d’indiscipline et de sa sanction par la Convention de Tokyo et le Protocole de Montréal
b. La définition du passager indiscipliné par les instances internationales
B. L’actualisation de la définition du passager indiscipliné par la pratique
a. Une définition traditionnellement axée sur la personne du passager en voie d’évolution
b. L’inclusion dans la définition des actes d’indiscipline commis au sol
Paragraphe 2. L’occurrence du phénomène dans le transport aérien
A. Éléments statistiques
B. Coûts de la survenance
a. Le coût en terme humain
b. Le coût économique
c. L’impact de l’indiscipline sur l’image
a. Le coût pour les aéroports de mesures de sécurité et de sûreté toujours plus nombreuses
b. La répercussion du coût de l’indiscipline sur le passager indiscipliné
Chapitre 2. Les acteurs du parcours passager responsables de la prévention de l’indiscipline
Paragraphe liminaire. La nécessaire mise en place d’une réponse coordonnée entre les acteurs du transport aérien
Paragraphe 1. La description de la chaîne du parcours passager
A. La mise en parallèle de la chaîne du parcours passager et de la chaîne d’alerte
B. Proposition de mesures correctives
Paragraphe 2. Les réponses opérationnelles préventives apportées par les acteurs
A. Les réponses opérationnelles prises par les acteurs
B. La « liste noire de passagers interdits de transport »
Titre 2. La mise en place d’un cadre juridique coercitif face aux passagers indisciplinés
Chapitre 1. Le droit actuellement applicable à la sanction du phénomène d’indiscipline
Section 1. Le droit pénal international aérien
Paragraphe liminaire. Le contexte d’élaboration du droit pénal international aérien
Paragraphe 1. La Convention de Tokyo
A. L’identité du texte
B. L’objet du texte
a. La définition du cadre dans lequel s’exercent les pouvoirs du commandant de bord
b. Les pouvoirs et les obligations du commandant de bord
C. L’établissement de l’État compétent sur le fondement de la Convention de Tokyo
Paragraphe 2. L’adoption par la France d’une conception extensive de sa compétence sur le fondement de la Convention de Tokyo
A. L’adoption d’une conception extensive de la souveraineté de la France à travers la définition du commandant de bord dans l’ordre interne
B. L’application extensive du droit pénal commun français comme loi du for
Section 2. Le droit interne
Paragraphe 1. Les sources légales
B. Le droit pénal aérien consacré dans le Code des transports
Paragraphe 2. Sources contractuelle et soft law
A. La sanction du comportement d’indiscipline sur la base des dispositions du contrat de transport
B. Les prescriptions non obligatoires ou soft law : la lettre-cadre de la DGAC de 2001
Paragraphe 3. Des régimes spéciaux de police des transports déjà établis en droit français
A. La police administrative en matière d’INAD et de sûreté, compétence du préfet
B. La sanction de l’indiscipline dans les transports en commun français
Chapitre 2. Les projets de réforme des droits relatifs à l’indiscipline
Section 1. La réforme du droit international pénal aérien
Paragraphe 1. La saisine de la problématique par les organisations internationales
Paragraphe 2. Le Protocole de Montréal
A. L’identité du texte
B. L’objet du texte
Section 2. Les projets de réforme du droit français
Paragraphe 1. La formation et l’information des magistrats
Paragraphe 2. La réforme du droit pénal
A. Les facteurs empêchant la mise en œuvre de la réponse pénale
Paragraphe 2. La création d’une police administrative spéciale
A. Complémentarité de ces deux droits par rapport à la mise en oeuvre de la sanction
B. La mise en oeuvre de la sanction par une autorité de police administrative
Conclusion
Bibliographie

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