De l’émergence des politiques « climat » à la prise en compte de l’adaptation

De l’émergence des politiques « climat » à la prise en compte de l’adaptation 

Longtemps considérée comme un problème scientifique, la problématique du changement climatique est devenue, depuis la fin du XXe siècle, un objet politique à part entière, à la fois au niveau international et national. Les avancées des connaissances sur l’évolution du climat ont fait émerger un consensus scientifique sur l’hypothèse d’un réchauffement climatique d’origine anthropique, suffisant pour motiver une saisie institutionnelle de la lutte contre le changement climatique. C’est dans ce contexte scientifique que s’inscrit ce mémoire de recherche. Le quatrième rapport du GIEC de 2007 évoque le caractère désormais incontestable du changement climatique : « Le réchauffement du système climatique est sans équivoque. On note déjà, à l’échelle du globe, une hausse des températures moyennes de l’atmosphère et de l’océan, une fonte massive de la neige et de la glace et une élévation du niveau moyen de la mer » (GIEC, 2007). Cette partie n’a pas pour objectif de faire un historique détaillé de la politique climat, mais de remettre dans le contexte l’apparition de la notion d’adaptation et de comprendre sa signification.

L’émergence des politiques contre le changement climatique en France

Le premier rapport du GIEC de 1992 a engendré une mobilisation des gouvernements via la conférence de Rio qui a permis de signer le premier traité international dont le but était de lutter contre le changement climatique. Depuis cette conférence, et devant les preuves scientifiques, des politiques à différentes échelles, du mondial au local, ont été mises en œuvre afin de lutter contre le changement climatique. En France, la Mission Interministérielle de l’Effet de Serre (MIES) a été créée en 1992, suite à la conférence de Rio, afin de coordonner les initiatives de lutte contre le changement climatique. Cependant, l’émergence réelle de la politique climat en France fut dans les années 2000, suite au protocole de Kyoto datant de 1997. Ce protocole, ratifié par les membres de l’Union Européenne, fixait les objectifs de la France à une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre sur la période 1990-2012. En 2000, la MIES publie le « Plan national de lutte contre le changement climatique » afin que la France respecte ses engagements du protocole de Kyoto. L’ONERC, Observatoire National des Effets du Réchauffement Climatique, fut créé en 2001 afin de répondre aux enjeux établis dans le plan national. En 2004, un Plan Climat National est adopté afin de diminuer les émissions de gaz à effet de serre, et ainsi, de respecter les engagements pris lors du protocole de Kyoto. En 2005, la France prend la décision de revoir ses objectifs de diminution des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, et se fixe l’objectif de les diviser par 4 d’ici 2050. Enfin, le Grenelle de l’environnement de 2007 puis sa deuxième version de 2010 visent à trouver un consensus sur des mesures à mettre en place dans la perspective d’un développement durable. L’un des groupes de travail était consacré au changement climatique.

Les politiques de lutte contre le changement climatique sont donc récentes et les enjeux les plus importants restent à venir tant au niveau de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, où les objectifs sont à l’horizon 2050, qu’au niveau de l’adaptation compte tenu du caractère inéluctable des impacts futurs du changement climatique.

L’articulation entre la politique d’atténuation et la politique d’adaptation

La politique d’adaptation a parfois été considérée contraire aux objectifs de la politique d’atténuation par ces mesures qui pouvaient augmenter les émissions de gaz à effet de serre (exemple : climatisation énergivore), et par le signe d’abandon et de relâchement des efforts qu’elle incarnait pour certains. Or, comme le souligne le quatrième rapport du GIEC en 2007 : « Ni l’adaptation ni l’atténuation ne permettront, à elles seules, de prévenir totalement les effets des changements climatiques. Les deux démarches peuvent toutefois se compléter et réduire sensiblement les risques encourus. » Aussi, il est primordial que la lutte contre le changement climatique prenne en compte ces deux actions complémentaires :
➤ L’atténuation : il s’agit de limiter l’impact du territoire sur le climat, en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Elle passe par une meilleure efficacité énergétique ou encore par une augmentation de la part des énergies renouvelables dans la production finale d’énergie ;
➤ L’adaptation : il s’agit de réduire la vulnérabilité du territoire dans un contexte où les impacts du changement climatique sont inéluctables. Cela passe par la prise en compte du changement climatique dans les autres politiques territoriales (urbanisme, transport, infrastructure…) et par l’acceptation de modes de vie différents. Elle relève également de la gestion des risques.

Des mesures d’adaptation peuvent être négatives pour la politique d’atténuation (par exemple, la production de neige artificielle qui augmente la demande d’énergie), mais certaines peuvent également être neutres, voire positives. Il en est de même pour les mesures d’atténuation sur la politique d’adaptation.

Sans une mise en place de l’atténuation, c’est-à-dire une diminution significative des émissions de gaz à effet de serre, l’adaptation peut devenir extrêmement difficile voire impossible. De même, si des efforts d’atténuation sont réalisés, certains effets du changement climatique resteront toutefois observables ce qui rend l’adaptation indispensable (ONERC, 2009). Dans cette perspective, il est nécessaire de trouver une synergie entre l’atténuation et l’adaptation. C’est précisément l’objet du projet de recherche « Adap’Ter » mené au laboratoire CITERES de l’Université de Tours et piloté par François BERTRAND, qui questionne l’intérêt d’une approche intégrée de l’adaptation pour les territoires .

La réussite de ces politiques d’atténuation et d’adaptation repose sur la contribution de tous les échelons territoriaux et sur les comportements individuels. Il sera dès lors intéressant d’observer le rôle des acteurs dans les études de cas du mémoire. La lutte contre le changement climatique nécessite donc ces deux politiques. Cependant, ce mémoire ne va pas s’attarder sur la politique d’atténuation même si l’union de ces politiques entraîne des problématiques qui peuvent être différentes telles que l’échelle, la temporalité ou les acteurs impliqués.

La notion d’adaptation

La montée en puissance du concept d’adaptation

Contrairement à la prise de conscience du réchauffement climatique, la nécessité de s’adapter n’a été mise en exergue que bien des années plus tard. Effectivement, alors que le GIEC est créé en 1988, ce n’est qu’en 2001 qu’il propose dans son troisième rapport une définition de l’adaptation : « L’adaptation aux changements climatiques indique l’ajustement des systèmes naturels ou humains en réponse à des stimuli climatiques présents ou futurs ou à leurs effets, afin d’atténuer les effets néfastes ou d’exploiter les opportunités bénéfiques. »

Cette même année, les accords de Bonn et Marrakech établissent le principe d’un Fonds d’Adaptation en direction des pays en développement. Lors des 10ème et 11ème conférences des Parties à la convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique (Buenos Aires en 2004 et Montréal en 2005), une attention particulière a été portée sur les impacts du changement climatique et l’adaptation. A Bali, l’inscription de la notion d’adaptation est rendue officielle et publique en 2007. L’adaptation devient alors un des quatre piliers de la négociation internationale menée au sein de la convention cadre des Nations Unies.

Au niveau européen, un livre vert élaboré en 2007 et intitulé : « Adaptation au changement climatique en Europe : les possibilités d’action de l’Union Européenne», préfigure des stratégies d’adaptation à toutes les échelles. Ce livre vert définit quatre lignes d’action :
➤ Action précoce afin de développer des stratégies d’adaptation dans les secteurs où le niveau actuel des connaissances est insuffisant ;
➤ Intégration des besoins d’adaptation mondiaux dans les relations extérieures de l’Union Européenne et formation d’une nouvelle alliance avec des partenaires du monde entier ;
➤ Amélioration des connaissances en matière d’adaptation grâce à la recherche au niveau communautaire et à l’échange d’informations ;
➤ Création d’un groupe consultatif européen sur l’adaptation au changement climatique, chargé d’analyser des stratégies et des actions coordonnées.

Un livre blanc, rédigé en 2009, « Adaptation au changement climatique en Europe : vers un cadre d’action européen », complète le livre vert et propose des instruments de politique d’adaptation tels que le plan de relance de l’économie européenne qui contient des propositions concernant l’investissement lié au changement climatique, l’optimisation du recours aux assurances ou encore l’utilisation des fonds générés par le système d’échange du quotas d’émission de gaz à effet de serre à des fins d’adaptation.

Au niveau national, le Plan Climat National de 2004 fixe des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et comprend un volet adaptation qui est confié à l’ONERC. Ainsi, l’ONERC publie en 2007 une « Stratégie Nationale d’Adaptation ». Il s’agit d’aborder l’adaptation afin de préparer le territoire aux bouleversements et impacts du changement climatique. Pour cela, le document, à visée indicative, et sans portée juridique, fixe quatre priorités (sécurité et santé publique, aspects sociaux, aspects économiques, patrimoine naturel à préserver) et détermine neuf axes d’application :
♦ Développer les connaissances scientifiques ;
♦ Consolider le dispositif d’observation ;
♦ Informer, former et sensibiliser tous les acteurs ;
♦ Promouvoir une approche adaptée aux territoires ;
♦ Financer les actions d’adaptation ;
♦ Utiliser les instruments législatifs et réglementaires ;
♦ Favoriser les approches volontaires et le dialogue avec les acteurs privés ;
♦ Tenir compte de la spécificité de l’outre-mer ;
♦ Contribuer aux échanges internationaux.

Dernier document clé pour la prise en compte de l’adaptation au niveau national, le Grenelle de l’Environnement 2, adopté en 2010, propose un Plan National d’Adaptation qui devrait être adopté en juin 2011 et fixe un caractère obligatoire à la conception des Plans Climat Territoriaux pour les intercommunalités de plus de 50 000 habitants tout en gardant l’échéance du premier Grenelle. Le Plan Climat local est un document qui doit intégrer l’atténuation et l’adaptation.

Les différentes stratégies d’adaptation

La vulnérabilité au changement climatique est le degré par lequel un système risque d’être affecté négativement par les effets du changement climatique sans pouvoir y faire face (MEEDDM, 2010). A titre d’illustration, en cas de période de forte chaleur (aléa), la vulnérabilité d’un territoire sera fonction :
♦ De son degré d’exposition à l’augmentation des températures ;
♦ De ses caractéristiques socio-économiques, telles que la présence de populations fragiles (personnes âgées par exemple), qui vont conditionner sa sensibilité à l’aléa chaleur ;
♦ De sa capacité d’adaptation (systèmes de prévention en place, accès aux équipements d’urgence, etc.).

Les actions qui permettent de réduire les impacts effectifs ou d’améliorer la capacité d’adaptation pourront être par exemple :
♦ Anticiper et limiter les dégâts éventuels (par intervention sur les facteurs qui  vont déterminer l’ampleur des dégâts : par exemple, l’urbanisation des zones à risques) et profiter des opportunités potentielles ;
♦ Supporter les changements (y compris en termes de variabilité et d’événements extrêmes) ;
♦ Réagir et faire face aux conséquences ou se remettre des dégâts.

A chaque impact dû au changement climatique, il n’existe donc pas une seule attitude possible pour faire face au changement climatique et à ses impacts ni une seule action d’adaptation réalisable. Cela est dû aux vulnérabilités spécifiques à chaque territoire et à la capacité du territoire à s’adapter. Ainsi, plusieurs typologies d’actions d’adaptation sont définies en fonction du degré de spontanéité et du type d’acteurs impliqués.

En fonction du degré de spontanéité, les actions d’adaptation sont :
♦ Adaptation spontanée ou autonome : adaptation à une contrainte climatique par une réponse immédiate et non réfléchie d’un point du vue stratégique (MEEDDM, 2010). Les actions de ce type d’adaptation correspondent à une adaptation réalisée par les acteurs socio-économiques de manière indépendante sans que cela entraîne de changements radicaux. C’est une attitude réactive face à une contrainte du changement climatique.
♦ Adaptation planifiée : adaptation qui résulte de décisions stratégiques délibérées, fondées sur une perception claire des choses qui ont changé, ou qui sont sur le point de changer, et sur les mesures qu’il convient de prendre pour revenir, s’en tenir, ou parvenir à la situation souhaitée (MEEDDM, 2010).

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Table des matières

Introduction
Première partie : Adaptation et prospective territoriale, éléments contextuels et problématisation
1. De l’émergence des politiques « climat » à la prise en compte de l’adaptation
2. L’évolution de la prospective dans les documents territoriaux
3. Spécification de la problématique de recherche
Deuxième partie : Etude de cas sur l’intégration de l’adaptation au changement climatique dans les exercices de prospective territoriale
1. Grand Lyon : un territoire précurseur dans la prise en compte de la problématique climatique au sein des politiques territoriales
2. Bretagne : une auto-saisine pour appréhender les impacts du changement climatique sur les modes de gouvernance
3. L’agglomération tourangelle : une adaptation encore en gestation
Troisième partie : Discussions et perspectives
1. Les modalités d’intégration de l’adaptation au changement climatique dans les exercices de prospective territoriale
2. Les éléments clés de l’intégration de l’adaptation au changement climatique
3. Les conséquences sur l’aménagement du territoire
Conclusion
Liste des personnes interrogées
Bibliographie

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