Culture nationale et comportement budgétaire

Depuis une vingtaine d’années, les entreprises développent des processus d’internationalisation à travers des opérations de fusions, d’acquisitions, de partenariats ou d’alliances. Ces processus augmentent les pratiques de collaboration interculturelle qui évoquent autant d’occasions de rencontres des cultures (Chevrier, 2013). Ainsi, les managers réputés universels ont à faire face à différents types de situations où les cultures nationales sont susceptibles de produire des tensions, latentes ou explicites (Löning, 2000). Le problème est donc de mettre le modèle généraliste de l’organisation des entreprises dans sa vocation à uniformiser les pratiques de gestion et , par extension, celles des organisations vues comme des entités devant se gouverner par référence aux outils développés dans les entreprises et les pratiques sociales relative à l’existence des contextes culturels différents suivant les pays (Pesqueux, 2000).Si les malentendus semblent parfois petits, ils menacent souvent la performance des entreprises concernées et conduisent ainsi, dans les situations les plus graves, à l’échec complet de projets prometteurs (Chevrier, 2013). Nombre d’entreprises perçoivent donc l’inefficacité d’une politique qui ignore les différences culturelles ou tente de les effacer par l’imposition d’un modèle dominant réputé à vocation universelle. En effet, de nombreuses situations de rachats ou de fusions de sociétés se transforment en cauchemars et / ou échecs pour des raisons culturelles (Löning, 2000). Ainsi, les gestionnaires doivent prendre en considération la diversité culturelle et avoir une bonne connaissance des différences et des similitudes entre les cultures qui peuvent entraver ou faciliter le transfert de leurs pratiques de gestion à un autre pays (Chow et al. 1996; Miroshnik 2002 ; Kanan, 2010).

Le contrôleur de gestion, en particulier, rencontre d’autres cultures dans deux cas courants : lorsqu’il s’agit de gérer et de contrôler des filiales ou des activités à l’étranger, et lorsqu’il cherche à l’issue d’une saine démarche de benchmarking à implanter dans son propre contexte : des outils, des démarches, des best practices en réalité issues d’une autre culture, le plus souvent liée à un pays économiquement dominant (Etats-Unis, Japon….) (Löning , 2000). Plusieurs recherches se sont penchées sur le rôle de la culture dans la conception, l’usage ou le choix des pratiques de contrôle de gestion (Brownell, 1982a; Brownell et Hirst, 1986; Daley et al, 1985; Chow et al,1991; Frucot et Shearon,1991; Harrisson,1992,1993; Lau et al.,1995; O’Connor, 1995; Otley, 1978; Van Der Stede, 2003). Ces recherches s’attachent à montrer que les personnes provenant de cultures différentes ont des comportements différents face à des systèmes de contrôle de gestion similaires.

De nombreux chercheurs de différentes disciplines ont tenté de trouver une définition complète et universelle de la culture. Cependant, à ce jour, nous ne disposons pas d’une définition claire qui peut être universellement acceptée. Par ailleurs, dans la littérature de gestion, quelques auteurs se sont penchés sur la culture, notamment par le truchement de l’apparition de la culture d’entreprise et de sa prise en compte dans les stratégies en vogue depuis les années 1980. Un des faits marquants de cette période est la recherche de Geert Hofstede (1980) qui constitue à nos jours le fondement le plus utilisé dans une recherche portant sur la culture (Lu et al., 1999 ; Robertson, 2000). Selon Hofstede (1980, 1994, 2010), la culture est une sorte de programmation mentale, c’est-à-dire que chacun d’entre nous porte en soi des modes de pensées, de sentiments et d’actions éventuelles qui sont le résultat d’un apprentissage continu. Son livre Culture’s Consequences présente les résultats d’une vaste enquête quantitative menée auprès d’une cinquantaine de filiales de IBM à travers le monde. Son modèle comparatif se porte sur le classement des pays en fonction des cinq dimensions culturelles (soit la distance hiérarchique, le contrôle de l’incertitude, le degré d’individualisme / collectivisme, la masculinité / féminité et le dynamisme confucianiste).

Toutefois, les travaux issus de ceux de Hofstede analysent invariablement des mêmes milieux culturels nationaux. Le plus souvent les nationalités américaine, française, britannique, canadienne, Japonaise et une moindre mesure chinoise (Harrison et Mckinnon, 1999 ; Joannides, 2011) sont comparées. Par conséquent, rares sont ceux qui s’intéressent aux pays en voie de développement (Joannides, 2011). De plus, à notre connaissance, il n’existe pas d’études qui examinent les différences dans les pratiques du contrôle de gestion entre la France et les pays arabes (y compris les pays du Maghreb). D’après les résultats d’Hofstede, les différences culturelles entre ces deux types de pays sont relativement marquées. Il est, certes à noter qu’Hofstede dans son modèle d’analyse des différences culturelles ne s’est pas intéressé à tous les pays du Maghreb en tant que pays arabes. Ces derniers comprenaient, dans l’étude d’Hofestede, Arabie Saoudite, Egype, Emirats arabes Unis, Irak, Koweit, Liban et la Lybie. Nous nous appuierons cependant sur les scores attribués par Hofstede à ces pays arabes en ce qui concerne les quatre dimensions culturelles, soit la distance hiérarchique, l’individualisme, le contrôle de l’incertitude et la féminité/masunilité, étant donné que les pays du Maghreb sont aussi des pays arabophones. Ces scores nous serviront de base pour expliquer les différences culturelles entre la France et les pays du Maghreb, à savoir le Maroc, l’Algérie et la Tunisie.

Plusieurs auteurs ont montré le rôle majeur que le budget peut jouer dans l’organisation qui, complété et parfois soumis à d’autres outils de planification et de contrôle, reste toujours l’outil le plus couramment utilisé pour la prévision et le contrôle de l’équilibre financier et de la performance comptable de l’entreprise (Ekholm et Wallin, 2000; Hansen et al., 2003; Hansen et Van der Stede, 2004 ; Komarev, 2007 ; Ben Hamadi et al., 2014). D’un point de vue des auteurs français, le budget est considéré comme le principal outil de contrôle de gestion (Komarev, 2007). II peut jouer, à la fois, différents rôles dans la planification, l’évaluation, la prévision, la coordination, la motivation et la communication (Berland, 1999). Il s’agit donc d’un outil capital dans l’ensemble des processus de management de l’entreprise. C’est du moins ce qui ressort de l’enquête menée en 1998 par HEC et la DFCG (Jordan, 1998), où il était montré une utilisation progressive des systèmes intégrés de gestion prévisionnelle et une participation accrue des opérationnels dans leur budget et dans l’analyse de leur suivi mensuel (Berland et al, 2008). On outre, dans les banques multinationales, le contrôle effectué par la maison-mère sur chaque installation à l’étranger est exercé par la préparation et le suivi du budget et à travers l’expatriation des managers (Boubacar, 2010). Cependant, les pratiques budgétaires dépendent des facteurs comportementaux (Douglas et Wier, 2007). Par conséquent, il peut être affecté par les valeurs, la religion, l’éducation, la langue et la culture (Kanan, 2010). Le courant de recherches béhavioristes a mis en évidence les effets pervers de la mauvaise utilisation du budget. Ainsi, le budget ne peut pas être utilisé universellement, il devrait être adapté au contexte. Par exemple, dans les pays francophones, on a déjà rencontré des problèmes liés à l’inadaptation de la culture française aux outils de management d’origine américaine telle que la D.P.O, ou le balanced scorecard (Trépo, 1973 ; Franck, 1973 ; Bourguignon et al., 2002), lorsqu’on les a appliqués comme une recette. Il serait judicieux donc de développer un système qui peut s’adapter à la culture nationale.

La croissance des relations commerciales entre la France et les pays du Maghreb, ces dernières années, nécessite une meilleure compréhension des coutumes et des attentes dans les systèmes de budgétisation. En effet, pour des raisons géopolitiques et historiques (Sid Ahmed, 1993), les relations entre la France et le Maghreb sont à la fois très anciennes et très importantes. En raison de l’écart culturel fort entre la France et les pays du Maghreb, les pratiques du contrôle budgétaires sont susceptibles d’être inappropriées pour les entreprises maghrébines. Ainsi, les connaissances sur les différences culturelles entre ces deux types de pays pourraient aider les gestionnaires à participer et à travailler de façon optimale au moment d’entreprendre le processus de budgétisation. L’objectif principal de cette thèse est d’examiner comment la culture nationale affecte les pratiques budgétaires en comparant la culture française et maghrébine. Cependant, cette étude ne vise pas à étudier les différences culturelles dans les modes de préparation des budgets. Nous nous concentrons plutôt à étudier les effets des spécificités culturelles sur le comportement des acteurs dans le budget. Nous nous inscrivons donc dans une approche béhavioriste du budget pour expliquer les effets des différences culturelles sur la réaction des managers face aux pratiques pudgétaires adoptées. Il est nécessaire de noter ici que nous ne cherchons pas à offrir une réflexion à propos des effets de la culture d’entreprise sur le comportement budgétaire. Ainsi, afin de contrôler les effets de la culture organisationnelle, nous choisirons de mener une étude auprès des banques multinationales françaises installées en France et celles installées dans les pays du Maghreb. Ce choix est motivé pour deux raisons. D’abord, l’institution bancaire se doit d’avoir sa propre culture organisationnelle ce qui permet donc d’isoler l’effet de la culture nationale. Nous avons adopté ici la même méthode d’Hofstede (1980) lors de son enquête auprès des filiales d’IBM. Ensuite, il existe une forte présence des banques multinationales françaises dans les pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie). Cela nous permettrait d’avoir une bonne base de données pour faire la comparaison entre ces pays.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1. ÉLEMENTS D’ANALYSE DU CONCEPT DE CULTURE
1. LA CULTURE
1.1. DÉFINITION DE LA CULTURE
1.1. LA CULTURE NATIONALE
2. PRINCIPALES ÉTUDES TRAITANT DE LA GESTION CULTURELLE
2.1. Analyse Comparative de Hofstede
2.2. Approche historique et ethnographique de D’Iribarne
2.3. Le modèle multidimensionnel de Trompenaars
2.4. Approche basée sur un système de communication de Hall
2.5. Analyse critique de l’applicabilité des approches culturelles dans d’autres contextes
2.6. Justification de choix du modèle de Hofstede
3. LA FRANCE ET LES PAYS DU MAGHREB: QUELLES DIFFERENCES CULTURELLES ?
3.1. La distance hiérarchique
3.2. L’individualisme-Collectivisme
3.3. Contrôle de l’incertitude
3.4. Masculinité-féminité
CHAPITRE 2 : CULTURE NATIONALE ET CONTROLE GESTON DANS LES ENTREPRISES MULTINATIONALES : QUELLE PROBLEMATIQUE ?
1. RECHERCHE SUR LES CULTURE NATINALE : QUELS APPORTS POUR LE CONTROLE DE GESTION ET LE MANAGEMENT ?
2. TRAVAUX DE RECHERCHE SUR LA CULTURE NATIONAL ET LE CONTROLE DE GESTION
3. LE MODELE DE LA RECHERCHE
3.1. Importance du rôle du budget pour le management et l’organisation
3.1.1. Définition du budget et du contrôle budgétaire
3.1.2. Les rôles des budgets dans la littérature
3.1.2.1. Approche comportementale: les approches psychosociologique fondées sur l’école des relations humaines
3.1.2.2. L’école de Havard
3.1.2.3. Approche contingente
3.2. Les hypothèses de recherche
3.2.1. La Formalisation du processus budgétaire et la culture nationale
3.2.2. La participation budgétaire et la culture nationale
3.2.3. La pression budgétaire (RAPM) et la culture nationale
3.2.4. La propension au Slack Budgétaire et la culture nationale
3.2.5. Contrôlabilité du budget et la culture nationale
CONCLUSION GENERALE

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