CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT POLARISÉS

CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT POLARISÉS

Phénomène contemporain au centre des débats politiques, économiques, sociaux, culturels et écologiques, la mondialisation désigne l’interdépendance et l’interconnectivité croissantes du monde moderne. Ces processus se caractérisent par l’intensification des échanges commerciaux transfrontaliers, l’intégration croissante des systèmes financiers locaux des pays au marché mondial et aux organisations internationales. L’essor des nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’expansion et la forte mobilité des ressources humaines, la forte présence sur la scène internationale des entreprises multinationales, les pressions sur les territoires locaux urbains et ruraux en sont également les caractéristiques (Ocampo et Martin, 2005).

Bien que la mondialisation soit un phénomène universel, son ancrage territorial varie en fonction des échelles territoriales (continents, régions, pays et collectivités locales). En effet, si certains pays comme les pays émergents asiatiques ont su tirer parti de la mondialisation grâce à des stratégies nationales et régionales (Etats développeurs, clusters, territoires apprenants, territoires innovants, diversification économique…) bien articulées, les performances de l’Afrique démontrent qu’une grande partie du berceau de l’humanité reste à l’écart des courants dominants. Selon Hugon (2006, 2010)1 , avec 12 % de la population mondiale, l’Afrique représente 1,5 % du produit intérieur brut mondial, 2 % du commerce mondial et 2 à 3 % des investissements directs étrangers. En matière de progression, la part de l’Afrique dans le commerce international est passée de près de 6 % en 1970 à 3 % en 2010, ce qui constitue une régression en quarante ans et une part insignifiante du continent africain dans la balance commerciale mondiale.

Si les performances du continent africain dans la production mondiale et le commerce international sont inquiétantes, celles de certains pays sont encore plus préoccupantes. C’est le cas du Gabon, qui demeure l’un des pays de la sous-région de l’Afrique centrale dont la dépendance économique aux ressources naturelles (hydrocarbures et mines principalement) perdure depuis la fin de la décennie soixante-dix. Cette thèse, qui porte sur le Gabon, a pour intérêt de mieux comprendre les enjeux de développement du pays relatifs au défi de la diversification de l’économie dans le but de l’émanciper de la dépendance vis-à-vis de l’or noir. Motivé par cette quête, nous subdivisons cette introduction générale en quatre sections. La première section fait la mise en contexte de l’étude au centre de cette thèse. La deuxième section aborde la problématique de la recherche. La troisième expose les questions, objectifs et la pertinence de la recherche pour mieux situer le lecteur d’entrée de jeu. La quatrième et dernière section définit brièvement les concepts clés de la recherche avant d’annoncer la structure du présent document.

Contexte de l’étude : « Spécialisation appauvrissante » :

La littérature scientifique identifie des facteurs à la fois endogènes et exogènes pour expliquer les faibles performances du continent africain dans la mondialisation. Parmi les facteurs exogènes, on note principalement l’hypocrisie des pays industrialisés (Stiglitz, 1999), qui se traduit par des déclarations officielles pour une ouverture de leur marché aux exportations des pays en développement, mais par une volonté manifeste de retarder les négociations et la mise en œuvre de leurs engagements en matière d’allégements des droits de douane comme en témoignent le cycle de négociation de l’Uruguay Round et le démantèlement de l’accord multifibres (1994-2005). À titre d’exemple, en 1997, les droits de douane appliqués par les pays de l’Union européenne s’élevaient à environ 15 % sur les importations de produits agricoles non transformés et à 25 % sur les produits agricoles transformés, contre 4 % pour les autres biens (à l’exclusion des textiles) (Sharer, 1999).

Les études empiriques et théoriques identifient un certain nombre de facteurs endogènes parmi lesquels on retrouve la médiocrité des infrastructures, les marchés rudimentaires, les secteurs industriels à peine ébauchés, la faiblesse de l’environnement institutionnel, la mauvaise gestion des secteurs publics et privés, les moyens financiers insuffisants pour investir dans une industrie de transformation innovante, le climat incertain des affaires et la capacité technologique déficiente (Humphrey et coll., 2007). En dépit de ces facteurs exogènes et endogènes, la communauté scientifique internationale s’entend pour dire que la perte de compétitivité de l’Afrique dans le commerce international est principalement liée à sa spécialisation internationale dans l’exploitation et l’exportation des produits de base (matières premières, produits agricoles, ressources naturelles) caractérisées par une faible élasticité des prix et des revenus, la loi des rendements décroissants et une détérioration des termes de change (Ben Hammouda et coll., 2004, 2005; ECA, 2004; Mold, 2005; Karingi et coll., 2005; Gros et coll., 2002). Hugon (2010) qualifie d’ailleurs cette situation de « spécialisation appauvrissante ».

Dans une perspective régionale, l’Afrique centrale est la sous-région la plus spécialisée dans les produits de base selon Ben Hammouda et coll. (2006). En fait, au cours de la période 2000-2005, les exportations des produits de base en proportion des exportations totales s’élevaient à 85 % dans la région de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) contre 65 % pour l’ensemble de l’Afrique (CEA2 , 2008). Alors qu’au cours des cinquante dernières années, certaines sous-régions africaines ont réalisé plus ou moins de gains en matière de diversification des structures productives et des exportations (SADC3 , COMESA4 et Afrique du Nord), le niveau de dépendance de l’Afrique centrale vis-à-vis de l’exploitation et de l’exportation des ressources naturelles
est demeuré très élevé et même en légère progression dans certains pays de cette sousrégion (Ben Hammouda et coll., 2006). Les quelques rares pays, comme l’île Maurice, le Botswana, la Tunisie et le Maroc, constituent des exemples de pays qui ont progressivement échappé à cette « spécialisation appauvrissante »

Le Gabon est un pays faiblement peuple (1 300 000 habitants selon le recensement général de 2005) et très riche en ressources naturelles aussi bien renouvelables que non renouvelables. La première richesse naturelle du Gabon est la forêt, qui couvre 85 % du territoire national. La forêt gabonaise, qui a plus de 22 millions d’hectares, fait partie du deuxième massif forestier au monde après l’Amazonie et elle offre un exceptionnel écosystème (680 espèces d’oiseaux, 98 espèces d’amphibiens, de 95 à 160 espèces de reptiles, de 6 000 à 10 000 espèces de plantes et 198 espèces différentes de mammifères). La carte 1 présente le riche patrimoine naturel du Gabon dont une partie a été sanctuarisée en 13 parcs nationaux (11 % du territoire national, soit 29 400 km2 ) lors du Sommet de la Terre de Johannesburg en 2002.

Problématique de la recherche : « Le paradoxe gabonais »

Cette seconde section a pour but d’exposer la problématique de recherche de cette thèse de doctorat en développement régional. Pour mieux comprendre « Le paradoxe gabonais », symbole de cette problématique, nous retraçons, dans un premier temps, la trajectoire économique du Gabon de son indépendance à nos jours. Dans un deuxième temps, nous décrivons la structure économique du Gabon à la fin du XXe siècle. Eu égard à ce qui sera dit dans la première et la seconde sous-section, nous identifions, dans un troisième temps, les enjeux de développement du Gabon au XXIe siècle.

Trajectoire économique : « Le libéralisme dirigé et planifié »
La trajectoire économique du Gabon couvre une période de 50 ans allant de 1960 à 2010. La description de la trajectoire de l’économie gabonaise permettra de présenter les faits saillants qui ont marqué l’économie gabonaise durant les cinq décennies de son histoire. La décennie des années soixante se caractérise sur le plan économique par la mise en exploitation des ressources naturelles du pays au profit de l’économie nationale par opposition à leur exploitation avant l’indépendance au bénéfice de la France, la puissance coloniale. Le 21 février 1958, le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et un groupement de sociétés minières françaises créent la Compagnie des Mines d’Uranium de Franceville (COMUF) pour mettre en exploitation le gisement d’uranium de Mounana dont les premiers indices avaient été mis en évidence en 1956. Créée en 1957, la Compagnie minière de l’Ogooué (COMILOG) met en exploitation le gisement de manganèse de Moanda cinq ans après sa création, c’est-à-dire en 1962. La COMILOG est une filiale du groupe français Eramet qui y détient 61 % des participations depuis 1997. L’année 1963 est caractérisée non seulement par la création de la Société d’eau et d’électricité du Gabon (SEEG) pour la production d’électricité et la fourniture d’eau potable, mais également par la mise en exploitation du gisement de pétrole de Gamba, laquelle exploitation va placer le pays dans le concert des pays pétroliers du monde. Dans
cet élan, le gouvernement crée l’Office des postes et télécommunications (OPT) en 1964, la Société gabonaise de raffinage (SOGARA) pour développer une industrie de raffinage locale en 1968 et la Société meunière et avicole du Gabon (SMAG) pour la production de farine, l’alimentation animale et l’élevage avicole en 1969.

Même s’il y a un certain boom minier et pétrolier au Gabon dans la décennie soixante, l’économie gabonaise est avant tout une économie forestière durant cette décennie. En effet, les recettes forestières directes et indirectes, engrangées grâce à l’exploitation des bois tropicaux, alimentent les trois quarts du budget de l’État en 1963.

La décennie des années soixante-dix se caractérise par le « Libéralisme dirigé et planifié », puisque le pays va entrer dans l’ère des grands travaux afin de construire l’infrastructure nécessaire pour accompagner le développement du pays. En 1970, c’est l’ouverture de l’Université nationale du Gabon. Pour mieux réguler le marché de l’offre des bois tropicaux, l’État crée en 1971 la Société nationale des bois du Gabon (SNBG) et y détient 51 % des participations. Deux ans plus tard, c’est le démarrage des travaux complexes du Transgabonais, la construction d’un chemin de fer devant relier Libreville à Franceville sur 650 km pour acheminer le bois et le manganèse vers la capitale. L’année 1973 est aussi caractérisée par l’inauguration du barrage hydroélectrique de Kinguélé  après quatre années de dur labeur dans des conditions difficiles dues à la rigueur de la forêt tropicale profonde. Le gouvernement met en service le Port en eau profonde d’Owendo, en banlieue de Libreville, en créant l’Office des ports et rades du Gabon (OPRAG). Il procède à la construction de certains axes routiers du pays en 1974. Dans le secteur de l’hydroélectricité, la centrale de Poubara est mise en service en 1975. Cette année correspond aussi à l’inauguration du port môle de Port-Gentil, qui se métamorphosera en un port en eau profonde en 1980. Le secteur agroalimentaire n’est pas en reste dans le « libéralisme dirigé et planifié » du gouvernement, puisque la Société sucrière du Haut-Ogooué (SOSUHO) est née dans l’euphorie pétrolière en 1975, de même que la compagnie Agrogabon pour le développement de l’agriculture et l’élevage en 1977. Cette année a également été marquée par la construction du stade omnisport, puisque le Gabon accueille les jeux de l’Afrique centrale. En vue de l’accueil du Sommet de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en 1977, une série de grands travaux est lancée à Libreville cette année-là; la compagnie nationale Air Gabon est également créée. La réalisation de tous ces chantiers a été rendue possible grâce aux deux booms pétroliers de 1973 et 1979 qui ont permis à l’économie gabonaise de migrer petit à petit vers la dépendance à l’or noir.

Dans la décennie des années quatre-vingt, l’œuvre constructrice et volontariste entamée durant les deux dernières décennies s’est poursuivie avec l’inauguration d’Africa N°l (radio panafricaine) en 1981, du complexe Hévégab (culture de l’hévéa) en 1981, de l’Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM) en 1986, du système de télécommunication Equasat (réseau domestique gabonais par satellite) en 1987, du port minéralier d’Owendo en 1988. Toutefois, des contraintes aussi bien endogènes qu’exogènes vont conduire les dirigeants gabonais à recourir à l’endettement pour financer à la fois ces projets d’aménagement des infrastructures et la balance de paiement déficitaire du pays. Les contraintes endogènes proviennent de l’explosion des dépenses publiques causées par un recrutement massif dans la fonction publique pour assurer le fonctionnement des services de l’État ainsi que de la flambée des prix qui se situent à la source d’une inflation galopante dans le pays. Ces facteurs endogènes obligent les autorités gabonaises à signer un premier accord avec le Fonds monétaire international (FMI) en juin 1978. À la fin de 1984, la dette extérieure du pays représente déjà 38 % de la production nationale. La principale contrainte exogène est la récession économique dans les pays développés les obligeant à réduire les importations des matières premières en provenance des pays en développement. Ne pouvant plus rembourser ses dettes, le Mexique est au bord de la faillite. C’est alors le début de la crise de la dette 1982 et elle aura pour conséquence la baisse du prix du baril de pétrole et du dollar américain. La baisse du baril de pétrole combinée à l’épuisement temporel des réserves pétrolières gabonaises va obliger une fois de plus les autorités gabonaises à signer un accord avec le FMI en décembre 1986. Contrairement au premier accord, le second est assujetti à un Programme d’ajustement structurel (PAS) que le pays devra exécuter. Somme toute, en dépit de l’endettement de plus en plus prononcé de l’économie gabonaise vis-à-vis de bailleurs de fonds extérieurs, la découverte du gigantesque champ pétrolier de Rabi-Kounga en 1987 par Shell Gabon (700 millions de barils de réserves exploitables et récupérables) et sa mise en exploitation en 1989 vont donner une bouffée d’oxygène à l’Etat gabonais, qui va accroître, une fois de plus, sa dépendance vis-à-vis de l’or noir.

L’économie gabonaise est caractérisée durant les décennies quatre-vingt-dix et deux mille par la dévaluation du Franc de la Communauté financière africaine (F CFA) et la poursuite de l’application des Programmes d’ajustement structurel. La dévaluation du franc CFA intervient le 11 janvier 1994 et elle vise un triple objectif : le rétablissement de la compétitivité externe des économies de la Zone franc et le redressement des balances commerciales, la réduction des déficits budgétaires et la reprise de la croissance. Dans le cas d’une économie lourdement tributaire des importations comme celle du Gabon, cette dévaluation a eu des répercussions sans précédent : les prix des produits importés, des biens de consommation courante et intermédiaire vont augmenter; les opérateurs économiques voient les coûts de leurs emprunts et de leurs intrants doubler, d’où la perte de leur compétitivité se traduisant par des mises à pied, une hausse du chômage, une perte du pouvoir d’achat des ménages et une paupérisation croissante d’une frange importante de la population, surtout en zone urbaine. Malgré les désagréments sociaux causés par la dévaluation, elle a tout de même permis de relancer la compétitivité de certains secteurs de l’économie comme la filière agricole (cacao, café, hévéaculture) et de la filière bois.

Pour ce qui est de l’application du Programme d’ajustement structurel imposé par les institutions de Bretton Woods, la Banque mondiale et le FMI, le Gabon se lance dans la privatisation d’entreprises publiques, des fleurons de l’économie nationale, financées parfois à coup d’emprunts. La SEEG est privatisée en société anonyme et reprise par le groupe français Veolia Water (Vivendi) en 1997; l’Office des chemins de fer Transgabonais (OCTRA) en 1999, puis en 2003, au profit de la Société d’exploitation du chemin de fer Transgabonais (SETRAG), filiale de la COMILOG; l’OPT est disséquée en deux identités distinctes, « Gabon Poste » et « Gabon Télécom », en 2001 et en 2006. « Gabon Télécom » est privatisée au profit de Maroc Télécom, lui-même filiale à 51 % du groupe fiançais Vivendi; Agrogabon, Hévégab et le ranch Nyanga sont privatisés et leurs actifs appartenant à l’État gabonais sont repris par SI AT, un groupe belge. Parallèlement, la production du pétrole atteint son pic avec 18 millions de tonnes en 1997 et la production de manganèse va crescendo. Mais la crise financière asiatique cause la baisse de 30 % des prix du pétrole de 1997 à 1999 et entraîne la dégradation du solde des transactions courantes de 10 à 25 % du PIB nominal du groupe des pays exportateurs du pétrole dont fait partie le Gabon (Harris, 1999).

Au demeurant, l’économie gabonaise a été marquée durant les cinq dernières décennies par des efforts du gouvernement à développer des infrastructures permettant d’exploiter les nombreuses ressources naturelles du pays. Au lendemain des indépendances, le Gabon avait une économie forestière et minière qui s’est transformée pour devenir une économie pétrolière fortement dépendante de la rente de l’or noir. Cette économie longtemps dominée par des monopoles aussi bien privés que publics, ces derniers ont été peu à peu démantelés par les privatisations (ou cessions d’actifs) sous l’égide des Programmes d’ajustement structurel (PAS) des institutions de Bretton Woods. La description de la trajectoire économique du Gabon conduit à s’interroger sur la structure de l’économie. Comment se caractérise la structure de l’économie gabonaise à la fin des années deux mille?

Sti uctui e de l’économie gabonaise : « Une économie de rente »
Présenter la structure de l’économie gabonaise revient à ressortir la répartition de la valeur ajoutée par différentes branches dans le produit intérieur brut selon la nomenclature des secteurs (primaire, secondaire, tertiaire et services non marchands) utilisée par la Direction générale de la statistique et des études économiques (DGSEE). L’économie gabonaise est dominée par le secteur primaire, qui a participé à la formation du PIB aux prix courants du Gabon à hauteur de 56,1 % du PIB en 2007.

Enjeux de développement : « Le syndrome hollandais »
En dépit des ressources naturelles abondantes et de la manne pétrolière engrangée depuis les dernières décennies, le Gabon reste aux prises avec plusieurs enjeux de développement. Le premier d’entre eux est la détérioration des termes de l’échange des produits de base que le pays exporte (bois, manganèse, pétrole brut, etc.) qui rend l’économie du pays très vulnérable à la fluctuation des cours de ces matières premières sur les marchés mondiaux. L’envolée des cours mondiaux du pétrole brut depuis 2003 a permis au pays d’augmenter substantiellement ses recettes pétrolières. Par contre, lorsque ces cours ont baissé, l’effet inverse s’est produit et le pays a dû recourir à l’endettement. Le deuxième enjeu que l’élite dirigeante doit résoudre est celui de la réduction de la dette publique extérieure et intérieure composée des prêts non concessionnels dont les taux d’intérêt sont élevés. En effet, l’encours de la dette9 à hauteur de 29,2 % du PIB et de 53,6 % des exportations des biens et services en 2007 limite le pouvoir d’investissement du gouvernement dans les secteurs productifs et sociaux.

Le troisième enjeu de développement du Gabon touche la gouvernance financière qui se caractérise actuellement par un niveau élevé des dépenses publiques. Or, devant l’épuisement de la ressource pétrolière qui contribue à plus de la moitié des recettes totales de l’État, mais également devant le fort niveau d’endettement, un assainissement des finances publiques est plus que jamais une exigence des bailleurs de fonds (FMI et club de Paris) auprès de qui le pays a contracté une partie importante de sa dette extérieure. Interconnecté au troisième enjeu, le quatrième concerne la mise en œuvre effective de la politique de décentralisation selon la modification de la loi organique N° 15/96 du 6 juin 1996 qui prévoit le transfert de compétences aux collectivités locales. À travers ce transfert de compétences, le gouvernement entend faire des collectivités locales des acteurs incontournables du développement local et territorial en les responsabilisant dans le choix des investissements prioritaires pour ainsi devenir le bras séculier du gouvernement. Or le transfert des compétences et des moyens y afférant est loin d’être une réalité au Gabon.

Le cinquième enjeu est celui de la dépendance alimentaire du pays vis-à-vis de l’extérieur, puisque 60 % des besoins en la matière sont couverts par les importations, et ce, en dépit du niveau relativement élevé des taux tarifaires (23,7 %) sur les biens en question. Les effets de cette dépendance se sont d’ailleurs fait sentir dans le pays en 2008 lorsqu’une centaine de Gabonais ont manifesté pour dénoncer « la vie chère ». Cette première dans le pays a conduit le gouvernement à suspendre pour six mois les taxes sur des denrées alimentaires de base (lait, farine et riz) dans le but de lutter contre « l’envolée de leur prix »10 . La sécurité alimentaire du Gabon est le corolaire du sixième enjeu de développement, qui touche à la réduction de l’extrême pauvreté et de la faim. Ce défi est le premier objectif que s’est donné le gouvernement gabonais dans l’atteinte des OMD. Le troisième rapport national en la matière montre que selon les tendances observées, le taux de 13,5 %, visé en 2015, ne pourra pas être atteint. Beaucoup d’efforts restent à réaliser (GABON-PNUD,2010).

Pour poursuivre dans la même veine, le septième enjeu de développement du pays concerne le défi de la réduction des inégalités sociales où les « poches de richesse » côtoient « les poches de pauvreté » au sein des grandes villes du pays. C’est pour cette raison qu’un économiste camerounais qualifie l’étrange paradoxe gabonais en ces termes : « riche Gabon, pauvre Gabonais » (Penda Ekoka, 2009)11 . Cette situation fragilise l’unité nationale du pays et elle pourrait être une source de fracture sociale à long terme. Le huitième enjeu de développement est celui du développement territorial caractérisé par une dévitalisation des milieux ruraux et une urbanisation galopante des milieux citadins
se traduisant par l’émergence des disparités territoriales et spatiales. Les zones où les
grandes industries minières, pétrolières et forestières sont implantées se développent,
alors que celles sans industries se paupérisent. Cette désarticulation du développement
territorial pose un défi de taille au gouvernement et aux collectivités dans la définition
d’une stratégie qui pourrait amoindrir le fossé des disparités territoriales et spatiales.

Le neuvième enjeu de développement du Gabon consiste à améliorer l’environnement des affaires afin de rendre le pays plus attractif en matière d’investissement direct étranger (IDE). En effet, le « syndrome hollandais »12 , présent au Gabon à cause de l’exploitation du pétrole et des différents booms pétroliers que le pays a connus, est à l’origine des coûts élevés des facteurs de production comparativement à d’autres pays subsahariens. Par exemple, dans la zone de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), la main-d’œuvre gabonaise coûte en moyenne 15 à 20 % plus chère que celle du Cameroun, pays limitrophe (BAD, 2008). Qui plus est, la batterie administrative que doivent traverser les entrepreneurs pour accéder au financement et aux agréments d’opération est loin d’être allégée pour encourager l’entrepreneuriat. Ces contraintes entravent le développement du secteur privé et manufacturier en décourageant les investisseurs nationaux et étrangers. Enfin, le dixième enjeu de développement concerne les menaces sur la biodiversité gabonaise. Ces menaces proviennent de plusieurs sources parmi lesquelles on dénombre la surexploitation des ressources naturelles (fauniques, forestières, halieutiques, minières, etc.), la pratique d’une agriculture traditionnelle itinérante sur brûlis, l’exode rural qui cause une pression sur l’écosystème périurbain, le recours au bois de chauffe comme source d’énergie, la pollution des eaux côtières sur la faune marine aux abords des agglomérations urbaines et des zones d’exploitation des hydrocarbures. La façon d’assurer le développement économique du Gabon tout en préservant des ressources pour les générations futures est au cœur de ce dixième enjeu auquel doit répondre la classe dirigeante gabonaise.

CONCLUSION GÉNÉRALE

L’économie du Gabon est une économie rentière qui dépend fortement de la rente pétrolière depuis la fin de la décennie soixante-dix* Elle a connu au début des années quatre-vingt un succès éclair du processus de diversification économique avant de se replonger dans une spirale de spécialisation économique qui perdure jusqu’à maintenant;

Une analyse approfondie de l’évolution de la diversification économique au Gabon au cours des trois dernières décennies a révélé que le cours du change, l’inflation et l’ouverture commerciale en constituent les déterminants les plus significatifs. Mais leur impact sur la diversification du pays a été influencé à la fois par des éléments contextuels endogènes (sociohistorique, géographique, démographique…) et exogènes (crises financières, économiques, alimentaires… ).

 

 

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE 
1.1-CONTEXTE DE L’ÉTUDE : « SPÉCIALISATION APPAUVRISSANTE »
1.2-PROBLÉMATIQUE DE LA RECHERCHE : « LE PARADOXE GABONAIS »
1.2.1-TRAJECTOIRE ÉCONOMIQUE : « LE LIBÉRALISME DIRIGÉ ET PLANIFIÉ »
1.2.2-STRUCTURE DE L’ÉCONOMIE GABONAISE : « UNE ÉCONOMIE DE RENTE »
1.2.3-ENJEUX DE DÉVELOPPEMENT : « LE SYNDROME HOLLANDAIS »
1.3-QUESTIONS, OBJECTIFS ET PERTINENCE DE LA RECHERCHE
1.3.1-QUESTIONS ET OBJECTIFS DE LA RECHERCHE
1.3.2-PERTINENCES SOCIALE ET SCIENTIFIQUE DE LA RECHERCHE
1.4-CONCEPTS CENTRAUX DE LA RECHERCHE ET STRUCTURE DE LA THÈSE
1.4.1-CONCEPTS CLÉS DE LA THÈSE
1.4.2-STRUCTUREDELATHÈSE
PREMIÈRE PARTIE : CADRE THÉORIQUE, CONCEPTUEL ET MÉTHODOLOGIQUE 
CHAPITRE II-SCIENCE RÉGIONALE ET DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE 
INTRODUCTION DU CHAPITRE II
2.1-APPROCHES SPATIO-TERRITORIALES DU DÉVELOPPEMENT ET DIVERSIFICATION
2.1.1-CONTEXTE D’ÉMERGENCE, DÉFINITION ET FONDEMENTS DE LA SCIENCE RÉGIONALE
2.1.2-CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT POLARISÉS
2.1.3-DÉVELOPPEMENT ENDOGÈNE
2.1.4-MLLIEUX INNOVATEURS
2.1.5-DÉVELOPPEMENTTERRITORIAL
2.2-FONDEMENTS THÉORIQUES DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE
2.2.1-DÉFINITIONS ET DIMENSIONS DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE
2.2.2-GENÈSE ET ÉVOLUTION DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE
2.2.3-TYPOLOGIES DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE
2.2.4-STRATÉGIES ET EXPÉRIENCES DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE
2.2.5-THÉORIES FONDATRICES DE [A DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE
CONCLUSION DU CHAPITRE II
CHAPITRE Ill-CADRE CONCEPTUEL ET MÉTHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE 
INTRODUCTION DU CHAPITRE III
3.1-UTTÉRATURE EMPIRIQUE SUR LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE
3.1.1-SlTUATION DANS LE MONDE : QUELQUES ENSEIGNEMENTS POUR L’AFRIQUE
3.1.2-SlTUATION PANAFRICAINE : QUELQUES RÉSULTATS ENCOURAGEANTS
3.1.3-SITUATION DE LA CEEAC : BEAUCOUP D’EFFORTS ENCORE À RÉALISER
3.1.4-DlVERSIFICATION ÉCONOMIQUE : DÉFINITION OPÉRATOIRE ET INDICATEURS
3.2-MODÈLE CONCEPTUEL ET HYPOTHÈSES DE LA RECHERCHE
3.2.1-DÉTERMINANTS DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE À VALIDER AU GABON
3.2.2-MODÈLE CONCEPTUEL DES DÉTERMINANTS DE LA DIVERSIFICATION AU GABON
3.2.3-SPÉCIFICATION ÉCONOMÉTRIQUE DU MODÈLE DE RECHERCHE
3.2.4-HYPOTHÈSES DE RECHERCHE ETSIGNES ATTENDUS DES COEFFICIENTS
3.3-CADRE MÉTHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE
3.3.1-STRATÉGIE DE RECHERCHE ET PÉRIODE D’ÉTUDE
3.3.2-DÉMARCHE DE COLLECTE DE DONNÉES
3.3.3-LNSTRUMENTS DE TRAITEMENT ET D’ANALYSE DE DONNÉES :
3.3.4-ASPECTS ÉTHIQUES DE LA RECHERCHE
CONCLUSION DU CHAPITRE III
DEUXIÈME PARTIE-PRÉSENTATION ET INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS 
CHAPITRE IV-ÉVOLUTION ET DÉTERMINANTS DE LA DIVERSIFICATION AU GABON 
INTRODUCTION DU CHAPITRE IV
4.1-ÉVOLUTION DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE DU GABON
4.1.1-DlVERSIFICATION DES EXPORTATIONS : PANORAMA DE 198 0 À 2010
4.1.2-DÉCENNIE QUATRE-VINGT : LÉGÈRE AMÉLIORATION DU PROCESSUS
4.1.3-DÉCENNIE QUATRE-VINGT-DIX : DÉTÉRIORATION DU PROCESSUS
4.1.4-DÉCENNIE DEUX MILLE : STAGNATION DU PROCESSUS
4.2-RÉSULTATS DE L’INFÉRENCE STATISTIQUE DES MODÈLES SPÉCIFIÉS
4.2.1-VÉRIFICATION DES POSTULATS DE LA MC O
4.2.2-PROCÉDURE D’AJUSTEMENT ET D’ESTIMATION DU MODÈLE
4.2.3-SLGNIFICATIVITÉ GLOBALE DES MODÈLES SPÉCIFIÉS
4.3-INTERPRÉTATION ET DISCUSSION DES RÉSULTATS STATISTIQUES
4.3.1-SLGNES DES COEFFICIENTS ETSIGNIFICATIVITÉ DES VARIABLES EXPLICATIVES
4.3.2-VALIDATION DES HYPOTHÈSES ET IMPACT DES VARIABLES EXPLICATIVES
4.3.3-LNTERPRÉTATION DE LA VARIABLE RÉSIDUELLE ET DISCUSSION DES RÉSULTATS
CONCLUSION DU CHAPITRE IV
CHAPITRE V : MÉCANISMES ET CANAUX D’INFLUENCE DES DÉTERMINANTS 
INTRODUCTION DU CHAPITRE V
5.1-INFLATION ET DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE AU GABON
5.1.1-COURS DU BRENT, DÉVALUATION DU FRANC CFA ET INFLATION AU GABON
5.1.2-ANALYSE DESCRIPTIVE DE L’IMPACT DE L’INFLATION SUR LA DIVERSIFICATION
5.1.3-LNFLATION ET DÉVELOPPEMENT ENDOGÈNE : UNE THÉRAPIE DE CHOC AU GABON
5.2-COURS DU CHANGE ET DIVERSIFICATION AU GABON
5.2.1-COURS DU CHANGE DU FRANC CFA GABONAIS : ÉVOLUTION ET DÉTERMINANTS
5.2.2-ANALYSE DESCRIPTIVE DE L’IMPACT DU COURS DU CHANGE SUR LA DIVERSIFICATION
5.3-OUVERTURE COMMERCIALE ET DIVERSIFICATION AU GABON
5.3.1-DEGRÉ D’OUVERTURE DE L’ÉCONOMIE GABONAISE : ÉVOLUTION ET DÉTERMINANTS
5.3.2-IMPACT DE L’OUVERTURE COMMERCIALE SUR LA DIVERSIFICATION AU GABON
CONCLUSION DU CHAPITRE V .
TROISIÈME PARTIE-PERSPECTIVES D’ACTIONS POUR LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE DU GABON 
CHAPITRE VI-STRATÉGIE DE DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE 
INTRODUCTION DU CHAPITRE VI
6.1-PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL DU GABON
6.1.1-PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT AU GABON : BRANCHES À FORT POTENTIEL
6.1.2-BRANCHES À DÉVELOPPER : PERTINENCE ET JUSTIFICATION DE LEUR CHOIX
6.2-STRATÉGIE DE DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE
6.2.1-PlUERS DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE ET LEURS COMPOSANTES
6.2.2-STRATÉGIESETTYPOLOGIES DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE
CONCLUSION DU CHAPITRE VI
CHAPITRE VII-MODAUTÉS ET CONDITIONS DE SUCCÈS DE LA DIVERSIFICATION 
INTRODUCTION DU CHAPITRE VII
7.1-MODUS OPERANDI DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE 291
7.1.1-PARTENARIAT PUBLIC-PRIVÉ AU SERVICE DE LA DIVERSIFICATION AU GABON
7.1.2-LNGÉNIERIE TERRITORIALE AU SERVICE DE LA DIVERSIFICATION AU GABON
7.2-CONDITIONS DU SUCCÈS DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE
7.2.1-PARACHÈVEMENT DE LA REFORME DE LA DÉCENTRALISATION
7.2.2-RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DES PARTIES PRENANTES
7.2.3-DOTATION ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE EN INFRASTRUCTURES
7.3-MISE EN ŒUVRE DES CONDITIONS ET FINANCEMENT DE LA DIVERSIFICATION
7.3.1-EXIGENCES FONDAMENTALES : VOLONTÉ POLITIQUE ET CHANGEMENT DE MENTALITÉS
7.3.2-FlNANCEMENT DE LA DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE
CONCLUSION DU CHAPITRE VII
CONCLUSION GÉNÉRALE

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