Contrôle du champ acoustique en milieu réverbérant et applications à la communication

Le travail présenté dans ce manuscrit trouve son origine dans l’ensemble des recherches menées au laboratoire ondes et acoustique sur la technique du retournement temporel dans le cadre de l’acoustique ultrasonore. C’est dans le but d’appliquer cette technique à la gamme des fréquences audibles que j’ai tout d’abord effectué un stage de DEA, puis ma thèse, sous la direction de Mathias Fink. Une des principales propriétés du retournement temporel est de permettre d’obtenir une focalisation de bonne qualité même lorsque le milieu est complexe, comme cela est le cas par exemple lorsque la propagation est perturbée par un grand nombre de réflexions. Pour cette raison, la première motivation de ces travaux était de concevoir un système capable d’émettre des messages sonores, de parole ou de musique, focalisés spatialement. Ce genre de système aurait par exemple permis d’envoyer des messages dans des langues différentes à différents endroits, serait capable de fonctionner dans des pièces réverbérantes, comme peuvent l’être la plupart des lieux de conférence ou de travail. Malheureusement, les caractéristiques physiques des signaux rencontrés dans le monde de l’audio, qu’il s’agisse de parole ou de musique, rendent délicate, voire impossible, l’utilisation d’un tel système, comme nous pourrons le voir au cours des deux premiers chapitres. Cette observation nous a inspiré deux réflexions : tout d’abord, quelles applications pratiques peuton trouver à une technique de focalisation en acoustique audible ; ensuite, ces techniques principalement étudiées à des fins d’imagerie dans le domaine ultrasonore, et pas du tout dans le but de transmettre de l’information. Notre deuxième réflexion sera alors de tenter de mesurer la capacité d’une technique de focalisation à transmettre de l’information, y compris dans un milieu complexe du point de vue de la propagation.

Focalisation par retournement temporel

Depuis la création du laboratoire ondes et acoustique, la possibilité de focaliser l’énergie acoustique à la fois temporellement et spatialement a toujours constitué un sujet d’étude important. En particulier, l’efficacité des techniques de retournement temporel a pu être démontrée dans un certain nombre d’applications traditionnelles de l’acoustique ultrasonore : Les premières expériences concernaient le contrôle non destructif, en particulier la détection d’inclusions dans des pièces métalliques ; depuis, les possibilités de ces techniques ont été ( et sont toujours) largement étudiées dans les domaines de la thérapie et de l’imagerie médicale, ou dans le cadre de l’acoustique sous-marine. Un des objectifs initiaux de la thèse était donc de vérifier la faisabilité de l’application de la technique de retournement temporel dans le domaine de l’acoustique audible d’une façon générale, en insistant en particulier sur les possibilités offertes en acoustique des salles et en transmission de la parole ou de signaux musicaux. Bien que le retournement temporel ait largement fait ses preuves dans le domaine ultrasonore, le passage à l’acoustique audible est moins évident qu’il n’y paraît :
• Tout d’abord, du fait du domaine fréquentiel considéré, la bande passante relative à prendre en compte est beaucoup plus grande que dans le cas de la focalisation ultrasonore : En imagerie médicale ou en Contrôle non-destructif, les bande passantes à –6 dB sont de l’ordre de 50 à 80%. Dans notre cas, le domaine audible de 20 Hz à 20 kHz donne une bande de fréquences s’étendant sur quatre décades.
• Du fait des transducteurs utilisés et de la largeur fréquentielle à prendre en considération, la densité spectrale de puissance émise par nos éléments d’antenne ne peut pas être considérée comme constante avec la fréquence, et ne suit pas non plus une évolution de type gaussienne.
• L’environnement de propagation est de son côté très différent de ce qu’on rencontre en acoustique médicale ou en contrôle non destructif. En effet, dans une pièce donnée, la vitesse de propagation du son pourra être considérée comme uniforme. Ceci est différent du cas par exemple de l’acoustique médicale, où une des principales causes de distorsion de la focalisation est la différence de vitesse de propagation existant entre les différents tissus. Par contre, les principaux phénomènes gênants la focalisation sont les réflexions multiples des ondes acoustiques sur les parois, et le mobilier présent dans la pièce. Ce problème n’est pas prépondérant en acoustique médicale ou en contrôle non-destructif. Il apparaît par contre en acoustique sous-marine, dans le cas de propagation sonore dans de faibles hauteurs d’eau (environnement petits fonds) ou lorsque les variations de température de la colonne d’eau sont telles qu’il existe un « chenal » concentrant l’énergie acoustique.
• Enfin, contrairement à un grand nombre de cas en acoustique ultrasonore, le milieu de propagation considéré en acoustique des salles peut varier assez fortement au cours du temps. Une des principales raisons de cette possible évolution est qu’une salle est un milieu réel, même lorsqu’elle est située dans un laboratoire de recherche: des personnes peuvent y travailler, éventuellement déplacer des objets ou être en plus ou moins grand nombre suivant les moments. Un des points importants de notre étude sera d’étudier la robustesse des systèmes de focalisation proposés, de façon à vérifier leur adaptation à une situation réelle.

Nous avons choisi de concentrer notre attention sur une bande de fréquences relativement étroite par rapport à la totalité du domaine audible : toutes les études présentées dans ce chapitre sont concentrées sur la bande 500 Hz – 4000 Hz. Deux raisons viennent justifier ce choix : tout d’abord il s’agit à peu de chose près de la bande utilisée en téléphonie, et donc de la bande dans laquelle se concentre l’essentiel du signal de parole. Ensuite, les contraintes techniques sont telles qu’il n’a pas été possible d’explorer l’extérieur de ce domaine : la fréquence d’échantillonnage du système électronique utilisé (20 kHz) impose la limite haute de 4000 Hz, et la bande passante des haut-parleurs la limite basse de 500 Hz. Après un bref rappel sur la technique de focalisation « classique » par formation de voies, nous introduirons le retournement temporel d’un point de vue théorique, avant de montrer les performances obtenues dans différents cas pratiques : pièces plus ou moins réverbérantes, focalisation au travers d’une paroi. Ceci nous permettra tout à la fois de voir les qualités de cette technique lorsqu’elle est appliquée au domaine des fréquences audibles, ainsi que ses limites.

Aspects théoriques de la focalisation en environnement réverbérant

Focalisation par loi de retards

La technique la plus classique utilisée pour focaliser une onde sonore ou ultrasonore dans un milieu consiste à simuler de façon électronique le fonctionnement d’une lentille par l’intermédiaire d’une loi de retards, et à émettre le résultat à l’aide d’un réseau de transducteurs. Cette méthode est utilisée systématiquement dans les systèmes d’imagerie médicale, dans les systèmes de contrôle non destructif et dans les antennes de sonars sousmarins.

Principe de la cavité et du miroir à retournement temporel

Bien que l’onde duale puisse avoir une existence physique, le principal problème auquel doit répondre la technique du retournement temporel est de réussir à générer cette onde. En pratique, il est impossible de générer le champ renversé dans tout le volume, puisque cela nécessiterait la présence d’un très grand nombre de transducteurs dans le milieu. Même un échantillonnage spatial de type l/2, qui suffirait à représenter précisément le champ [3], donnerait un nombre de transducteurs immense, impossible à mettre en œuvre pratiquement. Heureusement, il n’est pas nécessaire de connaître le champ pour tous les points du volume considéré. En effet, le principe de Huygens nous fournit une méthode permettant de réduire de manière considérable la quantité d’information nécessaire à la réalisation du retournement temporel : si on connaît le champ sur une surface fermée, ainsi que les conditions initiales à l’intérieur de cette surface, alors le champ est complètement déterminé dans l’ensemble du volume délimité par la surface de contrôle.

Cette idée est à la base du concept de cavité à retournement temporel [6] : on considère que l’ensemble du volume d’étude est entouré par une surface tapissée de transducteurs fonctionnant en émission-réception. Dans une première phase, une source acoustique émet à l’intérieur du volume considéré le champ initial qu’on souhaite retourner. L’onde se propage dans le milieu et finit par traverser la surface constituant les limites de la cavité, où elle est mesurée. Cette étape dure aussi longtemps que nécessaire, c’est-à-dire tant que le champ n’est pas nul à l’intérieur de la surface. Dans un deuxième temps, la source initiale reste passive ; l’ensemble des transducteurs placés à la surface émet le signal reçu auparavant, mais retourné temporellement. Du fait du principe de Huygens, l’onde créée ainsi est effectivement l’onde renversée qui se propage dans le milieu à rebours, pour aller focaliser à la position du point source initial. Ce système permet d’obtenir exactement le champ souhaité, tout au moins lorsque le système est ouvert. Toutefois, même après cette réduction du nombre de transducteurs à utiliser, le dispositif reste difficilement réalisable en pratique : Le nombre de transducteurs nécessaire peut être très grand, et dans un certain nombre de cas (comme en acoustique médicale, ou en contrôle non destructif) , on peut ne pas être capable d’entourer complètement le milieu d’étude. Pour cette raison, les expériences de retournement temporel sont la plupart du temps réalisées avec un miroir à retournement temporel (MRT, voir Figure I-7). Dans ce cas, seule une petite partie de la surface de la cavité décrite précédemment est recouverte par des transducteurs ; et on obtient simplement une approximation du champ acoustique souhaité.

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Table des matières

INTRODUCTION
I FOCALISATION PAR RETOURNEMENT TEMPOREL
I.A INTRODUCTION
I.B ASPECTS THEORIQUES DE LA FOCALISATION EN ENVIRONNEMENT REVERBERANT
I.A.1 FOCALISATION PAR LOI DE RETARDS
I.B.2 FOCALISATION PAR RETOURNEMENT TEMPOREL
I.C FOCALISATION DANS UNE PIECE REVERBERANTE
I.C.1 CONFIGURATION EXPERIMENTALE
I.C.2 FOCALISATION SPATIALE
I.C.3 COMPRESSION TEMPORELLE ET CONTENU SPECTRAL
I.C.4 ROBUSTESSE DU PROCEDE
I.D FOCALISATION AU TRAVERS D’UN MUR
I.D.1 FOCALISATION SPATIALE
I.D.2 QUALITE TEMPORELLE ET SPECTRALE
I.D.3 AMELIORATION DU RETOURNEMENT TEMPOREL
I.E CONCLUSION
I.F REFERENCES
II FILTRAGE INVERSE
II.A INTRODUCTION
II.B ASPECTS THEORIQUES DU FILTRAGE INVERSE
II.B.1 ETAT DE L’ART – METHODES DE REGULARISATION
II.B.2 FILTRAGE INVERSE PAR SELECTION DES VALEURS SINGULIERES DE L’OPERATEUR DE PROPAGATION
II.B.3 APPORT DES PIECES REVERBERANTES
II.C RESULTATS EXPERIMENTAUX : PROPAGATION DANS UNE PIECE
II.C.1 OPERATEUR DE PROPAGATION
II.C.2 INVERSION DE L’OPERATEUR DE PROPAGATION
II.C.3 QUALITE DE FOCALISATION SPATIALE
II.C.4 PERFORMANCES TEMPORELLES ET SPECTRALES
II.C.5 ROBUSTESSE
II.D PROPAGATION AU TRAVERS D’UN MUR
II.D.1 PERFORMANCES TEMPORELLES
II.D.2 FOCALISATION SPATIALE
II.E CONCLUSION
II.F REFERENCES
III COMMUNICATIONS NUMERIQUES
III.A INTRODUCTION
III.B METHODES UTILISEES
III.C SYSTEMES A ANTENNES MULTIPLES EN EMISSION ET RECEPTION
III.C.1 CAPACITE DE TRANSMISSION
III.C.2 COMMUNICATION EN MILIEU REVERBERANT
III.C.3 ETAT DE L’ART : ANTENNES INTELLIGENTES ET ALGORITHMES DE DETECTION
III.C.4 COMMUNICATION SUR DES CANAUX FOCALISES
III.D CARACTERISATION D’UN CANAL DE RETOURNEMENT TEMPOREL OU DE FILTRE INVERSE
III.D.1 CONFIGURATION EXPERIMENTALE
III.D.2 GRANDEUR MESUREE
III.D.3 RESULTATS
III.E CONCLUSION
III.F BIBLIOGRAPHIE
IV SPATIALISATION SONORE
IV.A INTRODUCTION
IV.B ETAT DE L’ART – RESTITUTION D’UNE SCENE SONORE.
IV.B.1 REPRODUCTION BINAURALE
IV.B.2 HOLOPHONIE (WAVE FIELD SYNTHESIS)
IV.B.3 CONTROLE DU CHAMP SONORE
IV.C UTILISATION DES TECHNIQUES DE CONTROLE DU SON POUR LA CREATION D’UN ENVIRONNEMENT SONORE
IV.C.1 PRESENTATION DU DISPOSITIF
IV.C.2 RESULTATS OBTENUS
IV.D PERSPECTIVES
IV.E BIBLIOGRAPHIE
CONCLUSION
ANNEXES

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