Déchets liquides fermentescibles et agriculture

Déchets liquides fermentescibles et agriculture

Déchets liquides fermentescibles et agriculture : contextes environnemental et agronomique

La loi française du 13 juillet 1992, avec l’interdiction progressive du stockage des déchets non ultimes, a abouti à la systématisation des pratiques de valorisation et à l’intégration des déchets comme produits à part entière de l’industrie, de l’agriculture et des communautés urbaines. Plus récemment, la réglementation européenne du 1er juillet 2002 en matière de protection de l’environnement a stipulé l’obligation de ne mettre en décharge que des déchets ultimes (déchets qui ne sont plus susceptibles d’être traités dans les conditions techniques et économiques du moment). L’épandage est ainsi communément utilisé pour la valorisation des déchets liquides provenant de l’industrie alimentaire, tels que la production d’huile d’olive (Zenjary et Nejmeddine, 2001), les distilleries de vin ou de rhum (Gemtos et al., 1999), les brasseries (EC, 2001), et les laiteries (Shi et al., 1999). L’épandage de ces effluents combine un apport riche en matières organiques et en éléments nutritifs (EC, 2001). Toutefois, selon la circulaire du 17 décembre 1998, l’épandage de ces déchets ne peut être pratiqué que sur des sols de pente inférieure à 7 % (ce chiffre peut quelque peu différer selon la nature du sol et la végétation).

Du fait de la nature liquide et organique de ces déchets, les risques d’anaérobiose sont transitoirement accrus (Renault et Sierra, 1994) en raison d’une consommation accrue d’O2 dont la diffusion est réduite en parallèle. Si l’anaérobiose a des effets positifs sur l’élimination de NO3 – (Parry et al., 1999), des pesticides chlorés (Liu et al., 1991) et des composés phénoliques (Lovley, 1991), elle est aussi susceptible de provoquer (i) un accroissement des émissions de gaz à effet de serre – N2O et CH4 – (Conrad, 1996), (ii) une production et/ou une accumulation de composés toxiques dans le sol dont NO2 – (Roy et Conrad, 1999) et certains acides organiques (Zehnder et Stumm, 1988), et (iii) la mobilisation d’éléments métalliques (Quantin et al., 2001). De telles conditions peuvent alors conduire au transfert de ces derniers éléments vers les eaux souterraines. Les éléments Fe, Mn et d’autres ETM peuvent être naturellement abondants dans certains sols (Tableau 1) ou apportés avec les épandages (Speir Tableau 2 : Effets du pH et du potentiel redox sur la mobilité des ETM (Förstner, 1985).

Certains éléments métalliques, tels que Fe et Mn sont essentiels aux processus biologiques des microorganismes et des plantes. Pour parer à la faible solubilité des oxydes du sol, les plantes (Hisinger, 1998) et les microorganismes (Ams et al., 2002) peuvent sécréter des sidérophores permettant de mobiliser et complexer les métaux, afin de les assimiler ultérieurement. Toutefois, une mobilisation excessive des éléments métalliques (suite à un épisode anaérobie par exemple pour Fe et Mn) engendre des risques de pollution des sols, des eaux de surface et souterraines. On peut alors parler de risques écotoxicologiques pour l’homme (Doran et al., 2000), la macro- et la micro-faune du sol (Rajapaksha et al., 2004), les plantes (Ponnamperuma, 1972; Seaker, 1991), et les microorganismes (Adams et Ghiorse, 1995). Pour l’homme, les textes législatifs de janvier 1989 fixent les seuils critiques de Fe et Mn dans l’eau à 0.2 mg.L-1 et 50 μg.L-1.

A titre d’exemples pour les microorganismes, un arrêt de la croissance en Saccharomyces cerevisiae est observée pour des teneurs en manganèse supérieures à 0.5 mM de MnII dans la solution du sol (Blackwell et al., 1998), tandis que pour une concentration supérieure à 55 μM dans l’environnement, MnII inhibe la croissance et le développement des cellules de L. discophora SS-1 (Adams et Ghiorse, 1995). La production de canne à sucre est la principale activité de l’île de La Réunion. La canne est transformée par deux sucreries et les mélasses résultant de leur transformation sont distillées pour la production du rhum. En 2000, la Réunion produisait ainsi 119 000 hL d’alcool pur, engendrant la production de 150 000 t an-1 de vinasse. La valorisation agronomique de l’eau et des nutriments contenus dans cet effluent (Tableau 3) apparaît d’autant plus appropriée que les pratiques actuelles de rejet en mer ou d’injection dans le soussol  pourraient avoir des effets néfastes (Martial et al., 2002).

La Réunion, seulement 22 % (557 km2) de la superficie de l’île correspondent à des sols de pente inférieure à 10 % (Raunet, 1991). Compte tenu que l’urbanisation, les terres réellement utilisables pour l’épandage représentent une faible superficie de l’île. Cette contrainte est amplifiée par la concurrence d’autres déchets, tels que le lisier de porc (240 000 t an-1), les lisiers de bovins (200 000 t an-1), les boues de station d’épuration, les déchets verts, etc. Si l’application de la loi du 13 juillet 1992 n’est pas encore effective, les villes, les industries et les agriculteurs sont d’ores et déjà soumis à « une pression réglementaire » qui induit une forte demande en matière d’expertise, de recherche et de transfert de technologie. Parmi ces différents risques environnementaux suite à la pratique de l’épandage (mobilisation de métaux, lixiviation de NO3 -, polyphénols…, effets sur les propriétés physico-chimique du sol) et vis-à-vis des différents types de déchets susceptible d’être épandus, nous nous focaliserons sur les risques de mobilisation des métaux suite à un apport de vinasses de rhumerie. De plus, ce problème fait intervenir différents volets, tels que la réactivité des minéraux, les activités microbiennes et plus particulièrement la respiration directe des métaux par les réducteurs de FeIII, ainsi que des conséquences d’aération. Nous ne tiendrons pas compte des transferts pour privilégier la réactivité.

Réactivités biologiques et abiotiques des éléments métalliques soumis à des alternances entre conditions réductrices et oxydantes II.2.1 Forme et réactivité de Fe et Mn dans les sols Les sols sont constitués de deux types de minéraux; les minéraux primaires (quartz, feldspaths, micas etc..) et les minéraux secondaires (argiles, oxydes), qui sont le résultat de transformations biogéochimiques de certains minéraux primaires (Duchaufour, 1997). Les phases solides porteuses de Fe ou de Mn incluent des oxydes (Schwertmann, 1985), des hydroxydes, des silicates, des carbonates et des composés soufrés (plus polysulfures que sulfates pour des éléments comme Fe ou Mn) (Stumm et Morgan, 1996; Pankow, 1991). Ils sont couramment sous forme de grains distincts d’hématite, magnétite ou goethite dans une matrice de quartz.

Les principaux oxydes et oxy-hydroxydes du fer (Cornell et Schwertmann, 2003) rencontrés dans les sols sont l’hématite α-Fe2O3; la goethite α-FeOOH ; la maghémite γ-Fe2O3 ; la magnétite Fe3O4 ; la lépidocrocite γ-FeOOH ; la ferroxyhydrite δ’-FeOOH et la ferrihydrite 5FeOOH.2H2O. En aérobiose, les oxydes et silicates métalliques, peu altérables, sont libérés de la roche par érosion physique et/ou chimique et transportés sous forme de particules. Les oxydes présentent une grande variabilité de cristallinité, entre la goethite et l’hématite qui forment des structures bien cristallisées tandis que la ferrihydrite présente des défauts (Schwertmann, 1985). Cependant la réactivité des oxydes est d’autant plus élevée que les minéraux tendent vers une faible cristallinité (Larsen et Postma, 2001). Par ailleurs, les métaux présents dans les roches sous forme de sulfures et de carbonates peuvent être plus facilement altérés chimiquement et dissous dans l’eau.

Les charges négatives dominent généralement le complexe d’échange des sols. On distingue les charges permanentes, indépendantes du pH, dues aux substitutions isomorphiques dans les minéraux argileux et les charges variables, dépendantes du pH, dues en partie à la fixation de protons et en partie aux hydroxyls des oxydes métalliques et en bordure des feuillets argileux. Les métaux, ETMs et Fe, Mn, s’adsorbent sur les oxydes ou le complexe argilo-humique par échange ionique (liaison électrostatique) ou par liaison covalente. De nombreux facteurs peuvent influencer le phénomène d’adsorption des métaux sur les phases solides, tels que le pH, le nombre de sites de liaison, l’encombrement stérique des phases solides. Les métaux peuvent également être (i) incorporés dans la structure des réseaux silicatés, (ii) par substitution du FeIII dans les oxydes par d’autres cations de rayon ionique proche (tels que Al, Cr, Ni, Co), ou (iii) précipité ou coprécipité sous formes minérales (Banfield et Hamers, 1997 ; Webster et al., 1998; Martinez and McBride, 1998), dont les principales formes sont les oxy-hydroxydes de Fe et de Mn, les carbonates et les minéraux argileux.

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Table des matières

I.Introduction générale
II.Synthèse bibliographique
II.1. Déchets liquides fermentescibles et agriculture; contextes environnemental et agronomique
II.2. Réactivités biologiques et abiotiques des éléments métalliques soumis à des alternances entre conditions réductrices et oxydantes
II.2.1. Formes et réactivité de Fe et Mn dans les sols
II.2.2. Devenir de Fe et Mn avec la mise en place de conditions réductrices
II.2.2.1. Activités microbiennes anaérobies et évolutions géochimiques
II.2.2.2. La réduction microbienne des métaux
II.2.2.3. Les bactéries réductrices de FeIII et d’autres éléments métalliques
II.2.2.4. Effet des donneurs et des accepteurs d’électrons
II.2.2.5. Complexation et mobilité des métaux en anaérobiose
II.2.3. Evolution ultérieure aérobie
II.3. Synthèse et objectifs de thèse
III. Possibilités d’extension à des apports de composés organiques divers d’un modèle biogéochimique développé pour des apports de cellulose, glucose et nitrate  Relative contribution of dissolved organic compounds supplied with rum vinasse to metal mobilisation in an anaerobic soil slurry
III.1. Introduction
III.2. Materials and Methods
III.2.1. Soil and organic liquid waste
III.2.2. Treatments and measurements
III.2.2.1. Treatment preparation
III.2.2.2. Analytical procedures
III.2.3. Data treatments
III.2.3.1. Representativeness of identified organic compounds
III.2.3.2. Adsorption/desorption of the organic matter
III.2.3.3. Metabolic pathways
III.2.3.4. Metal speciation
III.3. Results
III.3.1. Treatment (C)
III.3.2. Treatment (+S+W)
III.3.3. Treatment (+W)
III.4. Discussion and conclusions
III.4.1. Representativeness of organic pools and identified compounds in these pools
III.4.2. Adsorption/desorption versus absorption/excretion of organic compounds
III.4.3. Metabolic pathways
III.4.4. N balance
III.4.5. Metal speciation
References
Contributions des réducteurs du FeIII à la réduction du FeIII
IV.Mobilisation of Fe and Mn with regard to the dynamics of FeIII reducers in an anaerobic soil slurry supplied with rum vinasse
IV.1. Introduction
IV.2. Materials and Methods
IV.2.1. Soil and organic liquid waste
IV.2.2. Experimental procedures
IV.2.2.1. Treatments and measurements
IV.2.2.2. Analyses on liquid, gaseous and solid phases
IV.2.2.3. Microbial enumeration
IV.2.3. Data treatments
IV.2.3.1. Mass balance calculations
IV.2.3.2. Activity notations
IV.2.3.3. Population dynamics and biomass calculations
IV.2.3.4. Metal speciation
IV.3. Results
IV.3.1. Geochemical evolutions during the initial anaerobic incubations
IV.3.2. Microbial dynamics during the initial anaerobic incubations
IV.3.3. Effect of addition of electron donor and acceptor to V0, V2 and
V.treatments
IV.4. Discussion and conclusions
IV.4.1. Biogeochemical evolution over the 2 incubation periods
IV.4.2. Relationship between FeIII reduction and the dynamic of FeIII reducers
References
Devenir du FeII et du MnII lors d’un passage de l’anaérobiose à l’aérobiose
V.Fate of reduced Fe and Mn in a soil amended with a vinasse and incubated anaerobically after a return to aerobic conditions
V.1. Introduction
V.2. Materials and Methods
V.2.1. Soil and organic liquid waste
V.2.2. Experimental procedures
V.2.2.1. Treatments and measurements
V.2.2.2. Analytical procedures
V.2.3. Data treatments
V.2.3.1. Metal speciation in solution
V.2.3.2. Half life for FeII net immobilisation and a dimensionalisation of FeII concentration
V.2.3.3. Mechanistic model of Fe fate
V.3. Results
V.3.1. Changes during the initial anaerobic periods
V.3.2. Experimental changes after return to aerobic conditions
V.3.2.1. Fe and Mn fates
V.3.2.2. Other geochemical changes in the slurry solution
V.3.2.3. Biodiversity evolution over the anaerobic/aerobic incubation periods
V.3.3. Simulated fate of FeII after a return to aerobic conditions
V.4. Discussion and conclusions
V.4.1. Fates of FeII and MnII after the return to aerobic conditions
V.4.2. Microbial activities and dynamics after the return to aerobic conditions
References
VI.Discussion et conclusion
VI.1. Introduction
VI.2. Acquis de la thèse
VI.2.1. Voies majeures du catabolisme anaérobie
VI.2.2. Réduction et mobilisation des métaux
VI.2.3. oxydation et immobilisation des métaux suite à un retour en aérobiose
VI.3. Discussion sur les acquis de la thèse
VI.3.1. Considérations sur la démarche expérimentale
VI.3.1.1. Expériences en batch
VI.3.1.2. Dénombrements des bactéries par groupes fonctionnels; estimation de la biomasse microbienne
VI.3.2. Considérations sur les résultats expérimentaux
VI.3.2.1. Production et consommation de H2; la place des métaux
VI.3.2.2. Distinction entre adsorptions/désorptions et absorption/excrétions
VI.4. Perspectives
VI.4.1. Compléments directs au travail de thèse
VI.4.2. Extension du travail
Bibliographie

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