Conceptions theoriques de l’entrepreneuriat et genese de l’intention entrepreneuriale

Lorsqu’on veut parler de création d’entreprise, il faut d’abord essayer de cerner précisément ce qu’est l’entrepreneuriat et ce qu’est l’entrepreneur. La difficulté vient pour l’essentiel de la graphie du terme entrepreneuriat et des multiples disciplines qui constituent son cadre de développement. La logique suivie pour la présentation de ce chapitre est celle qui consiste premièrement à comprendre le phénomène entrepreneurial. Cette compréhension passe par la définition du terme, l’historique de l’évolution des recherches dans ce domaine, la présentation de quelques modèles qui ont élaboré des cadres visant à analyser et à comprendre le processus ainsi que le comportement entrepreneurial. Les références théoriques que nous avons pointées ici participent à l’explication du processus d’émergence entrepreneuriale et justifient la centralité du concept de volition pour donner sens au comportement de création d’entreprise. Nous avons particulièrement insisté sur l’approche processuelle pour au moins deux raisons : d’abord parce qu’elle offre une modélisation plus intégrée des aspects personnel, social, économique et culturel (Battistelli, 2001 ; Shane, 2003) ; de plus nous avons mené une étude qui tient compte de toutes ces dimensions pour expliquer la dynamique personnelle favorisant la structuration, la maturation et la réalisation d’un projet de création d’entreprise.

Qu’est-ce-que l’entrepreneuriat ? 

L’entrepreneuriat, dont la création d’entreprise est l’expression la plus courante, est considéré comme un élément clef pour le développement économique national, régional et local. En dépit du regain d’intérêt de réflexions théoriques sur l’entrepreneuriat, au cours de ces dernières années et, les effets positifs qu’on lui reconnait, le concept reste difficile à définir puisqu’un flou entoure à la fois la graphie du mot et la délimitation des activités qu’il recouvre (Fayolle, 2005). S’agit-il d’ «entrepreneuriat » ? D’« entrepreneriat » ? Ou d’«entreprenariat » ? La réponse reste non trouvée. Il se peut que le problème soit celui de la langue. La langue française semble n’avoir pas de terme approprié pour désigner le signifié du mot anglais « entrepreneurship ». Par contre du coté anglo-saxon, le problème ne se pose pas puisque le terme unique utilisé et très répandu est « entrepreneurship ».

Dans la grande majorité des travaux, la graphie la plus utilisée est « entrepreneuriat», terme proposé par l’Office Québécois de la Langue Française en 1984. Le grand dictionnaire terminologique le définit comme : la « fonction d’une personne qui mobilise et gère des ressources humaines et matérielles pour créer, développer et implanter des entreprises ». L’entrepreneuriat est considéré ici, avant tout, comme une fonction dont la visée est la création, le développement et l’implantation d’une entreprise. Pour Fayolle et Filion (2006) il s’agit d’un phénomène multidimensionnel qui peut être étudié sous différents angles, en mobilisant de nombreuses disciplines et une grande diversité d’approches méthodologiques. Ces auteurs identifient deux manières d’aborder l’entrepreneuriat :

L’entrepreneuriat comme identification d’opportunité d’affaires, par des individus ou des organisations. Ces derniers poursuivent et concrétisent, l’opportunité identifiée, indépendamment des ressources directement contrôlées. Cette conception centrée sur l’identification d’opportunité rejoint celle de Shane et Venkataraman (2000). En effet, lorsque Fayolle et Filion (2006) parlent d’opportunité d’affaire et de sa concrétisation, ils introduisent la capacité de l’individu à identifier et exploiter l’opportunité. Plus précisément, la capacité entrepreneuriale devient la capacité de l’individu, inscrit dans la démarche, à savoir identifier l’opportunité c’est-à-dire la situation propice, et à la mettre en valeur en utilisant les ressources disponibles. L’entrepreneuriat comme processus susceptible de prendre place dans différents environnements et sous différentes configurations. Dans cette conception, l’entrepreneuriat induit des changements dans le système économique, à travers l’innovation qu’apportent les individus ou les organisations. Ces changements, selon Bruyat (1993), se produisent non seulement dans le système économique, avec la création de valeur mais également au niveau de l’acteur. Peut-on dans ce cas dire que toute action entrepreneuriale abouti nécessairement à la création, au développement et à l’implantation d’une entreprise ? Selon Loué et Laviolette (2006), le terme entrepreneuriat renvoie à des situations tellement hétérogènes qu’il est vain de se limiter à une seule définition. Shane et Venkataraman (2000) quant à eux précisent que l’entrepreneuriat ne requiert pas systématiquement la création d’entreprise. C’est dans cette optique que Julien et Schmitt (2008) proposent de considérer l’entrepreneuriat non plus sous l’angle de l’activité mais de processus. À l’instar de ces auteurs, Hernandez (2001), en définissant l’entrepreneur comme l’initiateur d’un processus complexe explicite les attributs de l’entrepreneuriat. Dans cette conception, l’attribut de processus concerne l’importance accordée au temps et au caractère organisé des phénomènes en jeu. La notion de complexité appliquée à l’entrepreneuriat dévoile la multiplicité d’activités à considérer et les liens d’interdépendance entre ces activités. Et enfin, sous le terme entrepreneuriat se regroupent : l’intrapreneuriat (le développement de nouveaux produits au sein d’une organisation existante, la conquête de nouveaux marchés), les entreprises ou coopératives sociales, le travail autonome ou indépendant, la reprise d’entreprise et la création d’organisation (associations, actions humanitaires : compagnons d’Emmaüs ou les Restaurants du cœur par exemple).

L’intérêt pour l’entrepreneuriat comme champ de recherche et d’intervention provient de plusieurs disciplines telles que la sociologie, l’économie, l’anthropologie et la psychologie. Au-delà de leurs contributions réciproques à la définition du terme et à la compréhension du phénomène, des divergences apparaissent au sein de ces disciplines tant sur les observations que sur sa description. Les travaux de ces disciplines abordent l’entrepreneuriat selon les principes propres à chacune d’elle, d’où les divergences observées et la description fragmentaire et souvent contradictoire de celui-ci. Il en résulte donc une compréhension limitée au point de vue disciplinaire. Si, l’entrepreneuriat est un phénomène dont les facettes sont la complexité et la temporalité : l’entrepreneur est vu comme un acteur principal qui, par son action contrôle le processus (Saporta, 2003), il convient donc de l’étudier d’un point de vue global (multidisciplinaire) et non plus parcellaire. Tout comme ceux qui nous ont précédés, nous optons pour la graphie usitée : « entrepreneuriat ». Après avoir levé le voile sur la graphie du terme nous pouvons alors tenter de comprendre ce que renferme ce concept, en dépit de son caractère complexe, à partir d’un ensemble d’approches développées par un grand nombre d’auteurs : Gartner, 1990 ; Bruyat, 1993 ; Shane et Venkataraman, 2000 ; Bernard, 2008. Les travaux qui ont traité de ce sujet en fournissent des définitions orientées vers des perspectives différentes : opportunités d’affaires, processus d’émergence organisationnelle, création de valeur, innovation et processus de transformation interne (Fayolle, 2005).

Les différents mouvements de recherche entrepreneuriale: apports et limites

Dans l’évolution historique du concept d’entrepreneuriat, Cunningham et Lischeron (1991) distinguent six écoles de pensée en entrepreneuriat. La conception de ces auteurs repose sur la combinaison des philosophies des différentes écoles de pensée à propos de l’entrepreneur. L’objectif de chacune d’elle est d’apporter une vision nouvelle dans la description des caractéristiques de l’entrepreneur et de ses compétences. Quoi qu’il en soit, il s’avère important de jeter un regard sur les compétences de l’entrepreneur comme élément central du processus.

L’école des « grands hommes »
La première des écoles part de l’idée selon laquelle les entrepreneurs sont des êtres dotés de capacités exceptionnelles. Pour cette école, l’accent est mis sur les structures biologiques de l’individu en ce sens qu’il existe des caractéristiques propres aux entrepreneurs. Ce sont ces caractéristiques qui les différencieraient des autres (non entrepreneurs). On peut conclure qu’il existe pour les défenseurs de cette école, une personnalité « entrepreneur inné » qui émerge en dépit d’un environnement ou d’une culture non propice au développement de l’esprit d’entreprise.

L’école des caractéristiques psychologiques
Elle a été pendant un certain nombre d’années l’école de référence en la matière. Elle met l’accent sur les caractéristiques personnelles et les valeurs propres aux entrepreneurs. A la différence de l’école des grands hommes, cette école articule son originalité autour des caractéristiques psychologiques de l’entrepreneur telles que les attitudes, les besoins. Les défenseurs de cette école croient que certains besoins et valeurs individuelles sont les conditions préliminaires nécessaires à l’entrepreneuriat.

L’école classique
L’entrepreneur est considéré comme quelqu’un de créatif, un innovateur. De ce fait, contrairement à ce que les précédentes écoles ont avancé, c’est l’individu lui même qui crée ses opportunités grâce aux fruits de ses recherches.

L’école du management
Pour cette école les entrepreneurs sont des organisateurs de processus de création de richesses économiques (Cachot, Servais et Copin, 2005). Ils poursuivent des opportunités et s’efforcent de les concrétiser en utilisant des techniques appropriées de gestion et de management (Fayolle 1999). Elle fonde son postulat sur l’idée que le statut d’entrepreneur peut se développer même chez des individus qui ne sont pas nés avec les caractéristiques spécifiques de l’entrepreneur : en revanche, ces dernières peuvent s’acquérir à travers la formation. Pour cette école, l’entrepreneuriat est une série d’activités apprises se centrant sur les fonctions principales de l’entreprise.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Observations
Problème
Objectif
CHAPITRE I CONCEPTIONS THEORIQUES DE L’ENTREPRENEURIAT ET GENESE DE L’INTENTION ENTREPRENEURIALE
I QU’EST-CE-QUE L’ENTREPRENEURIAT ?
I-1 Les différents mouvements de recherche entrepreneuriale: apports et limites
L’école des caractéristiques psychologiques
L’école classique
L’école du management
L’école du leadership
L’école de l’intrapreneurship
Synthèse
I-1-1 L’approche fonctionnelle ou approche économique
I-1-1-1 Portée générale
I-1-1-2 Le paradigme de l’opportunité d’affaires
I-1-1-3 Le paradigme de l’innovation
I-1-1-4 Le paradigme de la création de valeur
Synthèse
I-1-2 L’approche centrée sur les individus
I-1-2-1 Portée générale
I-1-2-2 Les caractéristiques personnelles couramment étudiées
I-1-2-2-1 Les opinions et les attitudes
II-1-2-2-2 L’initiative personnelle
I-1-2-3 Les modèles centrés sur les raisons de s’engager dans une activité
I-1-2-3-1 Le sentiment de compétence et l’intention entrepreneuriale
I-1-2-3-2 La motivation à entreprendre
I-1-2-4 Elargissement du modèle
I-1-2-4-1 La représentation
I-1-2-4-2 Les préoccupations d’avenir et l’intention entrepreneuriale
Synthèse
I-1-3 L’approche processuelle ou interactionniste
I-1-3-1 Portée générale
I-1-3-1-1 Le paradigme d’émergence organisationnelle
I-1-3-1-2 Les modèles prédictifs : l’intention
I-1-3-1-2-1 La Théorie de l’action raisonnée
I-1-3-1-2-2 Théorie du comportement planifié
I-1-3-1-2-3 Analyse de quelques travaux
Synthèse
Conclusion
I-2 Description du processus entrepreneurial
I-2-1 Les principales phases du processus
I-2-1-1 Phase de déclenchement
I-2-1-2 Phase d’engagement total
I-2-1-3 Phase de survie et de développement
Conclusion
II CONSTRUCTION DU CHOIX PROFESSIONNEL ENTREPRENEURIAL
II-1 La genèse des préférences entrepreneuriales
II-1-1 La famille et la socialisation entrepreneuriale
II-1-2 Le contexte de formation
II-1-3 Les premières expériences professionnelles
II.1.5 L’environnement social et l’entrepreneuriat
II-2 La structuration du projet
II-2-1 Comment se construit-il ?
Conclusion
CHAPITRE II LE COMPORTEMENT ENTREPRENEURIAL : DE L’INTENTION A L’ACTION
I L’INTENTION
I-1 Le statut psychologique de l’intention
I-2 L’intention : construit motivationnel ou construit volitionnel ?
II L’ACTION
II-1 Le modèle des phases de l’action
II-1-1 La phase pré-décisionnelle
II-1-2 La prise de décision et la phase pré-actionnelle
II-1-3 L’initiation de l’action ou phase actionnelle
II-1-4 L’atteinte des objectifs ou phase postactionnelle
III LA PSYCHOLOGIE DE LA VOLITION
III-1 Motivation et volition : facettes d’une même réalité ?
III-2 La théorie du contrôle de l’action
IV LA PROCRASTINATION OU ECHEC DE L’INTENTION ?
PROBLÉMATIQUE
CHAPITRE III METHODOLOGIE
I OBJECTIF DE LA RECHERCHE ET HYPOTHESES
I-1 L’objectif général
Les objectifs spécifiques
I-2 Les hypothèses
I-3 Procédure de recueil des données
II OPERATIONNALISATION DE L’ETUDE
II-1 Les variables indépendantes
II-2 Les variables dépendantes
III LE TERRAIN DE RECHERCHE
III-1 Comparaison du profil des établissements
III-1-1 L’Ecole Supérieure de Commerce d’Amiens Le dispositif de pilotage de projet création d’entreprise (PCE)
III-1-2 L’Institut d’Administration des Entreprises (IAE) de Grenoble
III-1-3 L’Ecole Supérieure d’Ingénieurs en Electrotechnique et Electronique (ESIEE)
III-1-4 L’Université de Lille 3
III-1-5 L’Université de Montpellier 3
III-2 La boutique de gestion (BGE)
III-3 L’échantillon
III-3-1 Description de la population estudiantine
III-3-2 Description de la population des entrepreneurs
III-4 Les mesures des variables
III-4-1 Perception des opportunités de contexte régional et universitaire
III-4-2 Les aspirations professionnelles
III-4-3 Les opinions
III-4-4 Les préoccupations liée à l’avenir
III-4-5 L’intention entrepreneuriale
La désirabilité ou attitude envers l’entrepreneuriat
La norme subjective
Le contrôle comportemental
L’intention proprement dite
III-4-6 Le sentiment de compétences entrepreneuriales
III-4-7 La motivation
III-4-8 Les capacités volitionnelles
III-4-9 Les stratégies comportementales ou implémentation de l’intention
III-4-10 La procrastination
III-4-11 Les variables socio-biographiques
CONCLUSION GENERALE

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