Conception de systèmes intégrés pour la vision infrarouge

Objectif et démarche de la thèse

   L’objectif de cette thèse est d’identifier de nouvelles briques de conception optique adaptées à ces rétines infrarouges pour des applications d’imagerie. Pour cela, la démarche que j’ai suivie est calquée sur celle suivie depuis quelques années par des équipes de recherche du monde entier (Allemagne, Japon et Etats-Unis notamment) dans le domaine de la miniaturisation des caméras fonctionnant dans le domaine visible [400−800nm]. J’ai d’abord mené une étude bibliographique présentée au chapitre 2 page 11. Cette étude m’a permis d’explorer différents domaines pouvant apporter des solutions en rupture avec la conception optique classique pour les thématiques de la miniaturisation et de la simplification des systèmes optiques. Trois domaines principaux ont retenu mon attention : le domaine de l’innovation technologique, le domaine du biomimétisme et le domaine du traitement d’images. L’innovation technologique s’appuie sur les progrès apportées dans la fabrication des détecteurs et des optiques. Ces progrès contribuent à augmenter la complexité des optiques et les performances des détecteurs. Ils tendent à améliorer les performances des systèmes optiques et à augmenter la diversité des fonctions optiques intégrables dans ces systèmes. Le domaine du traitement d’images nous amène quant à lui à réfléchir sur la nature de l’information recherchée dans une scène et propose d’adapter le système optique à l’extraction optimale de cette information. Cette démarche de co-conception avec l’architecture optique permet de concevoir des systèmes répondant au mieux à l’application recherchée sans pour cela viser les performances ultimes du système optique. Le domaine du bio-mimétisme permet de nous inspirer des systèmes visuels les plus compacts existant dans la nature. Tous ces systèmes ont survécu à une sélection naturelle de plusieurs millions d’années et constituent ainsi une solution optimale pour son hôte. A partir de cette phase d’étude bibliographique, j’ai cherché à transposer ces approches innovantes à la conception de caméras infrarouges miniaturisées. Afin de lever les premiers points durs de mes micro-systèmes infrarouges, j’ai préféré dans un premier temps me concentrer sur les détecteurs quantiques. Leur grande sensibilité facilite en effet l’étude de composants optiques possédant des propriétés intéressantes mais disposant de performances radiométriques moins favorables que les optiques classiques. Je me suis alors intéressé aux blocs de détection du type de ceux commercialisés par la société française Sofradir [7]. Cette société commercialise toute une gamme de rétines infrarouges de la filière quantique (HgCdTe ou AlGaAs) dont les performances sont à l’état de l’art mondial (rétines de format 320 × 256 minimum, conditionnées dans un cryostat optimisé dit « opérationnel » et refroidies par une machine).

Une grande variété d’architectures optiques

   L’architecture classique des caméras et des appareils photographiques se rapproche de l’architecture de l’œil des vertébrés. Ce sont des systèmes optiques à chambre ayant un seul axe optique sur lequel sont alignés les optiques, la pupille et le détecteur. L’étude de la vision des animaux met cependant en lumière une grande diversité d’yeux [12, 22, 24] se traduisant par une grande variété de tailles et d’architectures. Cette variété est illustrée et classée en huit catégories à la figure 2.6. On peut distinguer deux grandes classes : les systèmes mono-voie caractérisés les mammifères ne possèdent que l’architecture C, toutes les architectures de la figure 2.6 sont représentées par les invertébrés, d’où l’importance d’étudier la vision de cette catégorie d’animaux. Tous ces types d’architectures se sont développés afin de permettre à son hôte de réaliser toutes sortes de tâches visuelles plus ou moins complexes. Land et Nilson [22] ont proposé une classification de ces différentes tâches visuelles que peut réaliser un être vivant. Il les ont classés suivant la complexité à les mettre en œuvre. Plus la tâche est complexe, plus les exigences demandées aux systèmes visuels en terme de performances optiques, de traitement de l’information et de ressources énergétiques seront importantes. La capacité visuelle la plus simple consiste à détecter la direction et l’intensité d’une source de lumière. La seconde capacité consiste à estimer les distances et à se déplacer dans un environnement en s’aidant par exemple du paysage ou des étoiles et en interagissant avec des objets inanimés. Cette interaction leur permet d’éviter des obstacles et de s’orienter vers la zone voulue. La troisième capacité visuelle est l’interaction avec d’autres organismes comme la détection d’une proie, d’un prédateur ou d’un partenaire sexuel. Enfin la dernière capacité visuelle qui est la plus complexe permet de manipuler des objets et d’apprendre des informations visuelles. Il est bon de noter que ces capacités visuelles se rapprochent de celles qu’un concepteur en optique cherche à développer pour ses caméras. Le rapport de l’OTAN [25, 26] classe en effet les capacités visuelles d’une caméra en quatres catégories : détection, reconnaissance, identification et analyse technique, chacune d’elles demandant des performances optiques différentes. La compréhension de l’acquisition et du traitement de l’information visuelle par les différents organismes est le travail mené par les neuro-biologistes. Cette étude est très précieuse pour un concepteur en optique désirant réaliser le plus simplement possible une fonction visuelle. Il ne s’agit pas cependant dans le cadre de cette thèse de faire une description exhaustive de toutes les architectures que l’on peut trouver dans le nature mais de sélectionner quelques exemples remarquables qui peuvent donner des pistes intéressantes pour la miniaturisation et la simplification des systèmes optiques. J’ai ainsi sélectionné quelques espèces illustrées à la figure 2.7 afin d’illustrer l’apport du biomimétisme dans la conception de systèmes compacts et innovants.

Les systèmes multivoies

   L’étude de la vision des invertébrés, qui sont de véritables exemples vivants pour la miniaturisation des systèmes optiques, montre que ces derniers se sont détachés d’une vision monovoie pour développer une vision multivoie, soit en se dotant d’une multitude d’yeux (c’est l’exemple  de l’araignée détaillé précédemment), soit en développant des yeux à facettes. Un œil à facettes est un système constitué d’une multitude de voies optiques orientées suivant différents axes optiques et s’appuyant sur une même rétine. Cette architecture est la plus populaire dans le monde des invertébrés. Les yeux à facettes peuvent être classés en deux catégorie [15, 16, 12, 22, 24] : les yeux à facettes apposées (schéma F de la figure 2.6 page 24) et les yeux à facettes superposées (schémas G et H de la figure 2.6). Les yeux à facettes apposées consistent en une matrice convexe de lentilles, où chaque lentille focalise la lumière sur un petit groupe de photorécepteurs. En général, le nombre de photorécepteurs par voie est de 8, bien que ce nombre puisse varier entre 5 et 17 [29]. Chaque voie optique est isolée des autres voies et constitue un ommatidium. Un œil à facettes apposées typique dispose d’un millier d’ommatidia disposés suivant un arrangement hexagonal non uniforme et illustré au schéma A de la figure 2.10.

Les systèmes spécialisés

   La démarche biomimétique peut être astucieusement menée par le concepteur en optique et pas uniquement par le systémier. Cette démarche permet en effet une économie de temps et de ressources en concevant le plus simplement et efficacement possible l’architecture optique qui répond au mieux à une application donnée. Par exemple, certains poissons des profondeurs ont volontairement réduit les performances de leur vision afin de limiter les fausses alertes et les déplacements inutiles [35]. La vision des très grandes profondeurs est surtout adaptée à la détection de points lumineux issus de la bioluminescence de certains animaux. Cependant, augmenter la pupille des yeux pour pouvoir détecter un point lumineux à une très grande distance n’est pas forcément utile au prédateur car au moment où celui-ci s’approchera de la zone de détection, la proie aura déjà disparu ! Le compromis dû à l’évolution tient donc compte du « bilan de portée » et des yeux disposant d’une pupille plus petite sont plus avantageux dans le domaine des grandes profondeurs car ils seront peu sensibles aux points lumineux se situant à des distances inaccessibles. Cet exemple montre bien que répondre à une application donnée n’équivaut pas nécessairement à obtenir la meilleure performance d’un système optique. La bio-attitude peut être ainsi vue comme une approche système ! Cette démarche peut être particulièrement intéressante pour la conception de senseurs spécialisés dédiés à l’extraction d’une seule information visuelle. Par exemple, la coquille Saint-Jacques (photo A de la figure 2.7 page 26) a choisi pour sa fonction de veille une multitude de petits senseurs simples, de faible résolution (IF OV = 1, 6◦), et répartis sur différents champs d’observation. Ces senseurs sont constitués d’un miroir situé après la rétine et d’une lentille très asphérisée ayant la même fonction que les lames de Schmidt placées au niveau de la pupille d’un télescope à miroir et permettant de corriger les aberrations sphériques. Cette architecture focalise au niveau de la partie supérieure de la rétine. Un schéma anatomique d’un œil de la coquille Saint-Jacques est donné à la figure 2.14.

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Table des matières

Chapitre 1 Introduction
1.1 Enjeux et contextes
1.2 Objectif et démarche de la thèse
Chapitre 2 État de l’art : vers une rupture de la conception optique classique
2.1 Définition des différents paramètres d’un système optique
2.2 Problématique liée à l’intégration des systèmes optiques au plus près du détecteur
2.3 Le biomimétisme : l’apport de la vision des invertébrés
2.3.1 Une grande variété d’architectures optiques
2.3.2 Les systèmes s’inspirant des téléobjectifs
2.3.3 Les systèmes multivoies
2.3.4 Les systèmes spécialisés
2.3.5 Les premiers systèmes optiques s’inspirant de la vision des insectes
2.4 Le traitement d’images : vers une approche de co-conception des systèmes optiques
2.4.1 Imagerie combinée
2.4.2 Codage de front d’onde
2.4.3 Imagerie comprimée (compressed sensing)
2.4.4 Imagerie « sans lentille »
2.4.5 Systèmes adaptés à la mesure du flot optique
2.5 Les progrès technologiques : un vecteur d’innovation
2.5.1 Innovations en optique
2.5.2 Innovations en détection
2.6 Description de la méthodologie pour caractériser et comparer les différents microconcepts optiques
2.7 Conclusion
Chapitre 3 Les objets continûment auto-imageants au service d’une simplification des systèmes optiques
3.1 Introduction
3.2 Démonstration de l’intérêt du sténopé pour la vision infrarouge
3.2.1 Aménagement du sténopé dans le cryostat
3.2.2 Etude des performances optiques du sténopé suivant l’axe optique
3.2.3 Etude des performances optiques du sténopé dans le champ d’observation
3.2.4 Règles de conception d’une camera obscura
3.2.5 Conception d’une camera obscura à lentille fish-eye
3.2.6 Etude expérimentale de la camera obscura à lentille fish-eye
3.2.7 Conclusion
3.3 Généralisation aux objets continûment auto-imageants
3.3.1 Propriétés fondamentales des objets continûment auto-imageants
3.3.2 Tolérance angulaire : cas du CSIG
3.3.3 Tolérance angulaire : cas de l’objet J0
3.3.4 Impact de la binarisation des objets continûment auto-imageants
3.3.5 Impact de l’ouverture des objets continûment auto-imageants
3.3.6 Démonstration des propriétés d’imagerie
3.3.7 Conclusion
Chapitre 4 Les systèmes multivoies au service d’une miniaturisation des systèmes optiques
4.1 Introduction
4.2 La chambre obscure à lentille intégrée
4.3 Réflexion sur la conception de systèmes multivoies intégrés au plus près du détecteur
4.3.1 Conception d’un téléobjectif multivoie
4.3.2 Conception d’un système multivoie superrésolu
4.4 Mise en œuvre d’une caméra multivoie appelée MULTICAM
4.4.1 Caractérisation de la caméra MULTICAM
4.4.2 Acquisition d’une image superrésolue à partir de la caméra MULTICAM
4.4.3 Élargissement du champ de la caméra MULTICAM
4.4.4 Etude des images parasites du système MULTICAM
4.4.5 Réalisation d’une caméra MULTICAM multispectrale
4.5 Conclusion
Chapitre 5 Conclusion
5.1 Bilan de la thèse
5.2 Valorisation de la thèse
5.3 Perspectives de la thèse
Annexe A Etude des battements entre les ordres générés par un réseau circulaire
Annexe B Détermination de l’étendue géométrique du réseau circulaire
Bibliographie

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