Conception de micro-optiques par structuration sub-longueur d’onde

Mes travaux de thèse ont été effectués au sein du consortium MINAO (Micro et NanoOptique) associant des chercheurs du Département d’Optique Théorique et Appliquée de l’ONERA et du Laboratoire de Photonique et de Nanostructures (LPN) du CNRS. Ma thèse a été financée par la Direction Générale de l’Armement (DGA). Ces deux laboratoires mettent en commun leurs compétences pour développer de nouveaux concepts de composants optiques, de détecteurs et de sources infrarouges grâce à l’utilisation des nanotechnologies. Les moyens techniques à disposition du consortium MINAO permettent de maîtriser toutes les étapes du processus de développement allant de l’étude théorique à la caractérisation expérimentale en passant par la fabrication en salle blanche de ces dispositifs. La structuration de la matière à une échelle sub-longueur d’onde (typiquement nanométrique) permet d’en modifier les propriétés électromagnétiques et de créer à l’échelle de la longueur d’onde par exemple un matériau artificiel caractérisé par un indice effectif. Il est alors possible de réaliser des fonctions optiques plus ou moins complexes (filtres, absorbants, lentilles).

Miniaturisation des systèmes optiques

En 1969, George E. Smith et Willard S. Boyle des laboratoires Bell inventent le dispositif à transfert de charge plus connu sous le nom de CCD de l’anglais Charge Coupled Device. Cette invention qui a été récompensée par le Prix Nobel de Physique en 2009, a permis la réalisation des premiers capteurs photographiques capables de convertir un rayonnement électromagnétique (UV, visible ou infrarouge) issu d’une scène en une image numérique, marquant de fait le début de l’ère de l’imagerie numérique (cf. Fig.1.1). Initialement utilisés pour des applications de pointe comme l’imagerie astronomique, les capteurs photographiques sont aujourd’hui omniprésents dans tous les systèmes d’imagerie de la caméra du dernier smartphone à celle, 3D haute résolution des studios de cinéma. La multiplication des applications commerciales d’imagerie numérique ainsi que leur démocratisation entraînent un nouveau besoin pour des capteurs plus compacts pouvant être intégrés dans des systèmes à haute portabilité (mobile, caméra de terrain, lunettes).

La matrice de détection

Le rôle de la matrice de détection est de convertir le rayonnement électromagnétique provenant d’une source en un signal électrique pouvant être ensuite traité par les systèmes de numérisation électroniques classiques. On distingue deux catégories principales de détecteurs dont le choix est déterminé par les performances désirées et le domaine spectral de travail :
• les détecteurs photoélectriques qui transforment les photons lumineux incidents en paires électrons-trous dans un matériau semi-conducteur.
• les détecteurs thermiques utilisant un matériau dont les propriétés électriques dépendent de sa température. Ces détecteurs mesurent alors la variation de ces propriétés consécutive à l’échauffement du matériau dû à l’absorption du rayonnement incident.

Détecteurs photoélectriques 

Les détecteurs photoélectriques reposent sur la conversion du rayonnement électromagnétique en courant électrique par absorption des photons dans un matériau semi-conducteur. Cet effet est obtenu lorsque les photons incidents ont suffisamment d’énergie pour autoriser la transition des électrons d’un état d’énergie liée à un état d’énergie libre, par exemple de la bande de valence vers la bande de conduction du semi-conducteur. Dans ce dernier cas, il faut que l’énergie hν des photons soit supérieure au gap énergétique Eg du semi-conducteur. Le choix du semi-conducteur permet donc de choisir le domaine spectral de sensibilité du détecteur : par exemple le silicium (Si) pour le visible et l’arséniure d’indium-gallium (InGaAs) pour la gamme spectrale [0, 7 − 2, 6]µm

Détecteurs thermiques 

Les détecteurs thermiques intègrent des matériaux avec des propriétés électriques dépendant de leur température et capables d’absorber le rayonnement incident. Cette absorption se traduit par l’échauffement du matériau qui entraîne une modification du signal électrique du détecteur. La mesure de cette variation permet alors de remonter à la puissance lumineuse absorbée. Les bolomètres résistifs sont les détecteurs thermiques les plus répandus. Ils sont constitués d’un matériau absorbant suspendu afin de l’isoler thermiquement du reste du détecteur, et d’un matériau « thermistor » dont la résistivité dépend fortement de la température. La mesure du rapport courant/tension dans le matériau permet d’extraire la valeur de sa résistance et ainsi de remonter à la puissance lumineuse absorbée . Les bolomètres peuvent couvrir l’intégralité du spectre électromagnétique. Cependant, les technologies mises en œuvre diffèrent d’un domaine de longueur d’onde à l’autre. Le thermistor utilisé peut être un métal dont la résistivité augmente avec la température (diffusion des porteurs par les phonons), ou un semi-conducteur dont la résistivité décroît avec la température (effet dû à l’augmentation de la densité des porteurs libres générés thermiquement).

Le composant optique

La matrice de détection détecte la lumière incidente sur une gamme spectrale dépendant de la technologie et des matériaux choisis. Néanmoins, les détecteurs seuls ne peuvent pas distinguer les photons provenant de la scène étudiée de ceux provenant de son environnement. Il est donc nécessaire d’ajouter des composants optiques à la matrice de détection comme des filtres , des lentilles ou des polariseurs. Par exemple, les appareils photographiques numériques utilisent des capteurs CCD ou CMOS associés à une matrice de filtres colorés, le filtre de Bayer qui est le plus utilisé dans les applications grand public.

Miniaturisation des systèmes 

La miniaturisation des systèmes optiques suit deux motivations différentes :
• la conception de systèmes d’imagerie moins encombrants et énergivores tout en augmentant leur robustesse et leur intégration dans des applications mobiles.
• la conception de systèmes d’imagerie avec une meilleure résolution des images capturées par une augmentation du nombre de pixels à dimension du capteur constante. Ces deux motivations ne sont pas antagonistes puisque la diminution de la taille des pixels permet à la fois la diminution de la taille des détecteurs à résolution constante et l’augmentation de la résolution pour une taille de détecteur fixée. L’exemple des appareils photographiques est probant (cf. Fig. 1.4), puisque la technologie est passée du MAVICA, premier appareil numérique commercial, présenté en 1981 par Sony avec un capteur de 0,27 Mpx (Mégapixels) et un pas de pixel de 30 µm au Sony Alpha 900 avec un capteur de 25 Mpx avec un pas de pixel de 6 µm. En terme de miniaturisation dans le domaine mobile, on peut prendre l’exemple de la caméra du dernier Iphone 5S composée de 8 Mpx avec un pixel de 1, 5 µm. Ainsi les progrès réalisés dans le domaine de la nanofabrication des composants électroniques ont permis en 25 ans une diminution spectaculaire (facteur 400 en surface) de la taille des pixels. Notons que cette diminution n’a toujours pas atteint ses limites physiques, puisque de récentes études ont démontré la faisabilité théorique de la réalisation de pixels efficaces avec des dimensions sub-longueur d’onde.

Néanmoins cette diminution de la taille des détecteurs n’est utile que s’il est possible de réaliser des composants optiques adaptés. Dans l’exemple de la caméra de l’Iphone 5S (focale de 4, 12 mm pour une ouverture de 0, 5 mm) les filtres de Bayer doivent avoir des dimensions égales au pas de pixel ce qui correspond encore à des dimensions très supérieures aux longueurs d’onde de travail. Mais la miniaturisation homothétique des composants optiques classiques sera limitée dès lors qu’on atteint les dimensions de la longueur d’onde auxquelles les phénomènes de diffraction deviennent prépondérants . Par conséquent, on comprend la nécessité de concevoir et de développer des composants micro-optiques avec des dimensions spatiales de l’ordre de la longueur d’onde et basés sur les principes de l’optique physique.

Depuis l’invention de l’imagerie numérique en 1969, le développement des techniques de nano-fabrication des composants électroniques permet désormais la réalisation de matrices de pixels avec des dimensions de l’ordre de grandeur de la longueur d’onde des ondes électromagnétiques détectées. Néanmoins à cette échelle les phénomènes de diffraction deviennent prépondérants ce qui limite la technique de miniaturisation par homothétie des composants optiques classiques suivie jusqu’à maintenant. Cette miniaturisation requiert désormais le développement de micro-optiques basées sur les concepts de l’optique physique. Dans le cas particulier des applications à la détection infrarouge, l’utilisation de micro-optiques doit permettre la réduction de l’encombrement global, l’augmentation de la robustesse des systèmes et la diminution de leur consommation énergétique.

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Table des matières

Remerciements
Introduction
I Introduction à la physique sub-longueur d’onde
1 Miniaturisation des systèmes optiques
1.1 Les systèmes optiques
1.1.1 La matrice de détection
1.1.2 Le composant optique
1.1.3 Miniaturisation des systèmes
1.2 Système optique pour l’infrarouge
1.2.1 L’infrarouge
1.2.2 Applications
1.2.3 Enjeux de la miniaturisation dans l’infrarouge
1.3 Conclusion
2 Conception de micro-optiques
2.1 Physique des composants optiques
2.1.1 Diffusion de Rayleigh
2.1.2 Principe de Huygens-Fresnel
2.1.3 Réalisation d’optiques à base de nanostructures : les métamatériaux
2.2 Réseau de diffraction à contraste d’indice
2.2.1 Gravure du substrat de diélectrique
2.2.2 Dépôt d’une structure métallique
2.3 Systèmes plasmoniques
2.3.1 Guide d’onde métallique
2.3.2 Antennes métalliques
2.4 Conclusion
II Contrôle local de la phase
3 Concept Métal-MultiDiélectrique-Métal
3.1 Guide d’onde métallique plan sub-longueur d’onde
3.1.1 Établissement de la relation de dispersion
3.1.2 Transmission du guide d’onde plan
3.2 Description de la structure MDDM
3.2.1 Détermination de l’indice effectif du mode guidé
3.2.2 Profil du mode fondamental
3.2.3 Modulation complexe de la phase
3.2.4 Bilan de l’influence des paramètres géométriques
3.3 Vers la conception d’un composant micro-optique
3.3.1 Réalisation d’une micro lentille
3.4 Conclusion
3.4.1 Comparaison avec l’état de l’art
3.4.2 Conclusion sur les structures MDDM
4 Les lentilles de Huygens
4.1 Conception d’une lentille de Huygens
4.1.1 Détermination de la largeur D0 de la fente centrale
4.1.2 Position des fentes secondaires
4.1.3 Propriétés générales des lentilles de Huygens
4.1.4 Exemple d’une lentille de Huygens dans le visible
4.2 Influence des fentes secondaires sur les propriétés de focalisation
4.2.1 Influence de la position des fentes
4.2.2 Influence du nombre de fentes
4.2.3 Étude de la dispersion
4.3 Matrice de lentille de Huygens
4.4 Exemples d’applications des lentilles de Huygens
4.4.1 Lentille de Huygens pour la compensation d’angle
4.4.2 Détermination de la FTM de détecteurs infrarouges
4.5 Conclusion
4.5.1 Comparaison avec les lentilles plasmoniques
4.5.2 Étude de la tolérance des lentilles de Huygens
4.5.3 Montage d’un banc optique de caractérisation
4.5.4 Conclusion
III Contrôle local de la polarisation
5 Contrôle de la polarisation à l’aide de nanoantennes
5.1 Propriétés optiques des antennes MIM rectangulaires
5.1.1 Réseau d’antennes MIM : une métasurface
5.1.2 Influence des paramètres géométriques sur le facteur de qualité et la longueur d’onde de résonance
5.1.3 Tolérance angulaire de l’absorption
5.1.4 Conclusion
5.2 La structure MIM bâtonnet : une antenne optique
5.2.1 Modèle de Fabry-Pérot
5.2.2 Modèle d’oscillateur électrique dipolaire
5.2.3 Absorption totale : couplages de résonateurs
5.3 Fabrication et caractérisation de métasurfaces
5.3.1 Méthode de fabrication
5.3.2 Caractérisation optique et simulations
5.4 Manipulation sub-longueur d’onde de la polarisation linéaire
5.4.1 Principe
5.4.2 Influence de L
5.4.3 Influence de w
5.4.4 Conclusion
5.5 Conclusion
6 Convertisseur de polarisation linéaire
6.1 Antennes bâtonnets hybridées pour la conversion de polarisation
6.1.1 Mise en évidence de la conversion de polarisation
6.1.2 Combinaison d’antennes MIM bâtonnet
6.1.3 Tolérance angulaire de la conversion
6.1.4 Influence des dimensions de l’antenne sur la conversion
6.1.5 Pertes du système
6.1.6 Conclusion
6.2 Fabrication et caractérisation d’antennes L
6.3 Réalisation d’un convertisseur de polarisation large bande
6.4 Conclusion
7 Généralisation de la conversion de polarisation à des antennes MIM en forme de V sous incidence azimutale
7.1 Description analytique de la réponse d’une antenne MIM en forme de V sous incidence azimutale
7.1.1 Formalisme de Jones
7.1.2 Matrice de Jones des antennes V
7.1.3 Conclusion
7.2 Validation expérimentale et théorique du modèle
7.2.1 Influence de l’angle azimutal θ
7.2.2 Influence de l’angle β
7.3 Conclusion
Conclusion

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