Comportements autodestructeurs:

Comportements autodestructeurs:

Le contexte théorique est divisé en trois sections afin d’expliciter la problématique soulevée dans cette étude. La première partie présente la population ciblée. Les différents  concepts reliés aux comportements autodestructeurs sont ensuite clarifiés, en plus d’établir la distinction fondamentale entre les tentatives de suicide et l’automutilation. La troisième partie présente, quant à elle, les études scientifiques faisant référence aux troubles des axes 1 et II ayant été sélectionnés.

Population ciblée: Les hommes et les femmes sous responsabilité légale

Jusqu’à maintenant, plusieurs études se sont intéressées aux comportements autodestructeurs en milieu carcéral (Bland, Newman, Dyck, & Orn, 1990; Bogue & Power, 1995; Daigle & Côté, 2001; Fanner, Felthous, & Holzer, 1996; Franklin, 1988; Green, Kendall, Andre, Looman, & Polvi, 1993), cependant peu de recherches concernant ce phénomène ciblent particulièrement la population médico-légale. Comme les résultats habituellement retrouvés au niveau des échantillons médico-légaux sont fortement comparables aux taux de suicide identifiés chez une population psychiatrique (Haycock, 1993), nous ferons souvent appel à cette population afin de mieux documenter l’échantillon à l’étude. La population sous responsabilité médico-légale bien que sous représentée dans les écrits scientifiques demeure une population à risque.

Les personnes incarcérées représentent un groupe affichant un taux de suicide plus élevé que dans la population en général (Daigle & Côté, 2002; OMS, 2007). Bien que l’on ait estimé, dans les établissements correctionnels, que le taux de suicide soit quatre fois plus grand que dans la communauté (Laishes, 1997), McKee (1998) suggère plutôt un taux de Il à 14 fois plus élevé que dans la population générale. Quant au suivi des patients psychiatriques, McKee (1998) indique que ces derniers sont aussi plus à risque de se suicider. En fait, leur probabilité de mourir de cette cause s’avère cinq à 20 fois plus élevée que celle retrouvée dans la population générale (Tanney, 1992). Une étude suédoise s’intéressant plus spécifiquement à une population médico-légale a d’ailleurs démontré que le taux de mortalité par suicide était 12 fois plus élevé que celui retrouvé dans la population générale (Kullgren, Tengstrom, & Grann, 1998). Quant aux études recensées aux États-Unis, le taux de suicide dans cette population est aussi très élevé, variant entre 90 et 91 par 100 000 (Haycock, 1993; Haynes & Marques, 1984), par rapport à 12 par 100 000 dans la population générale (Monk, 1987).

Les recherches démontrent l’existence d’un lien étroit entre des problèmes psychiatriques antérieurs et les comportements autodestructeurs, indépendamment du milieu et de la population examinés (Anno, 1985; Backett, 1987; Bogue & Power, 1995; Bonner, 1992; Burtch & Ericson, .1979; Dooley, 1990; Jones, 1986; White & Schimmel, 1995). Ce lien et les taux de troubles mentaux, qui sont généralement plus élevés parmi les délinquants sous responsabilité carcérale que parmi les membres de la société en général (Motiuk & Porporino, 1991), semblent indiquer que la surreprésentation du comportement suicidaire en milieu carcéral serait associée en partie aux antécédents psychiatriques. Nombreuses sont aussi les études qui démontrent une association entre les troubles de la personnalité (principalement ceux du groupe B) et le niveau de risque élevé lorsque l’on parle d’idéation suicidaire, de tentative de suicide, de suicide complété et d’automutilation (Black, Blum, Pfohl, & Hale, 2004; Lieb, Zanarini, Schmahl, Linehan, & Bohus, 2004; Linehan, Rizvi, Welch, & Page, 2000; Pompili, Ruberto, Girardi, & Tatarelli, 2004).

Devant de tels résultats, il semble nécessaire d’investiguer les différents diagnostics pouvant contribuer à ces importants taux de mortalité. Cependant, il faut tout d’abord comprendre qui sont ces individus à risque de poser ce genre de comportements.

Caractéristiques des individus sous responsabilité légale

Certains scientifiques et cliniciens s’entendent pour dire que les personnes ayant des problèmes de santé mentale sont prises de plus en plus, et souvent sans le vouloir, dans l’appareil du système de justice pénale (Roesch & Golding, 1985; Teplin, 1983). Les personnes ayant des problèmes de santé mentale sont plus susceptibles d’être découvertes et arrêtées si elles commettent des actes de nuisance (Robertson, 1988; Teplin, 1984), et d’être placées sous garde pour avoir commis de telles infractions mineures. Elles passent relativement beaucoup plus de temps en détention provisoire à attendre que leur sentence soit prononcée, que les personnes n’ayant pas de problème de santé mentale (Gingell, 1990). Cette réalité contribue à la surreprésentation des personnes souffrant de troubles mentaux dans la population carcérale (Abram, 1990; Hodgins & Côté, 1993; Neighbors et al., 1987). Bénézech (2004) mentionne que les personnes qui souffrent de troubles mentaux graves présentent une augmentation du risque de comportements criminels, plus particulièrement de criminalité violente. Cette .violence, bien qu’elle puisse être dirigée envers autrui, peut également être dirigée envers soi-même. Feinstein et Plutchik (1990) ont d’ailleurs rapporté que 30% des individus violents ont des antécédents de comportements suicidaires et que 10 à 20% des personnes suicidaires ont des antécédents de violence. Face à cette combinaison de facteurs, le suicide est la cause la plus courante de décès en milieu correctionnel (OMS, 2007).

Cependant, avant d’explorer certaines des causes pouvant contribuer à l’augmentation du taux de passage à l’acte, il demeure important de bien définir les comportements autodestructeurs. Encore aujourd’hui, la littérature scientifique éprouve d’importants problèmes à définir concrètement ce que représentent les comportements autodestructeurs. En réalité, le nombre de termes utilisés pour décrire ce phénomène est important et la distinction entre les divers concepts demeure vague, ce qui laisse souvent place à interprétation. La prochaine section est donc consacrée entièrement à la distinction de ces concepts afin de faciliter la compréhension de chacun de ces comportements.

Comportements autodestructeurs: Distinction entre les concepts

La terminologie et la signification des différents termes associés au suicide ne font pas l’unanimité chez les auteurs. Afin de contrer les ambiguïtés, la présente recherche propose donc de définir les différents concepts, en regroupant le suicide, les tentatives de suicide et l’automutilation sous le terme comportements autodestructeurs. En nous appuyant sur la nomenclature proposée par Silverman, Berman, Sanddal, O’Carroll et Joiner (2007a, 2007b), elle-même inspirée de la ‘nomenclature de O’Carroll et al. (1996), nous avons pu faire la distinction entre le suicide et ses comportements connexes (suicide-related behavior) en tenant compte de l’intention de mourir et du résultat (conséquences) de la conduite suicidaire. Les auteurs définissent donc le «suicide» et la «tentative de suicide» comme étant des comportements autodestructeurs pouvant avoir une résultante mortelle ou non, avec une évidence explicite ou implicite que l’individu avait l’intention, à un certain niveau, de mourir. Quant à «l’automutilation», celle-ci s’avère plutôt un comportement autodestructeur pouvant avoir une résultante mortelle ou non, avec une évidence explicite ou implicite que l’individu n’avait pas l’intention de s’enlever la vie par lui-même (c’est-à-dire sans intention de mourir).

Bien que l’intention de mourir apparaisse comme étant le meilleur critère de catégorisation pour les cliniciens (Wagner, Wong, & Jobes, 2002), il est souvent très difficile de reconstruire les pensées des gens qui posent de tels gestes, à moins qu’ils ne parlent clairement de leurs intentions préalablement ou qu’ils laissent une lettre explicite. Se basant presque en totalité sur une analyse rétrospective des événements, l’intentionnalité est confrontée à l’ambivalence ou à la confusion vécue par l’individu face au geste.

Quant à l’évaluation de la gravité du geste, elle s’avère plus facile à réaliser, en envisageant notamment le type de moyens retenus. C’est la voie déjà utilisée avec succès par Smith, Conroy et Ehler (1984) avec la Lethality of Suicide Attempt Rating Scale (LSARS), une échelle à intervalle égal (0 à 10) qui permet de mesurer le degré de µ létalité des comportements autodestructeurs. Cette échelle permet de mesurer le degré de gravité, lequel peut être qualifié de bas à élevé, et ce, à partir de deux évaluations: celle mesurant la gravité actuelle de la méthode utilisée et celle mesurant les circonstances entourant le geste. Cette échelle représente d’ailleurs l’un des deux meilleurs instruments mesurant la gravité; elle possède un large support empirique (Leenaars et al., 1997).

Dear, Thomson et Hills (2000) ont, quant à eux, effectuée une étude qui visait à déterminer si un comportement d’automutilation, jugé par l’équipe comme étant manipulatoire, était automatiquement classé à faibles intentions suicidaires et à faibles risques pour sa vie. Des 74 prisonniers interrogés, seulement 18 ont mentionné s’être infligés des blessures dans le but de manipuler. De ces 18, six déclarèrent ne pas avoir eu véritablement l’intention de mourir. Tandis que trois des 18 prisonniers avaient posé un geste jugé à risque modéré. Ces résultats illustrent donc la difficulté que représente l’évaluation et la classification des gestes autodestructeurs.

Dans les milieux d’intervention, et plus particulièrement dans les institutions carcérales, on cherche souvent à distinguer tentatives de suicide et automutilations, notamment dans le but d’offrir des soins mieux adaptés et ainsi de prévenir une récidive. Cette distinction n’est cependant pas toujours bien documentée comme nous avons pu le constater précédemment, d’où l’intérêt d’explorer encore plus en profondeur les fondements scientifiques de cette distinction .

Weekes et Morison (1992) ont tenté de différencier «le suicide», «la simulation» et «l’automutilation» en trois phénomènes distincts. Les auteurs ont tout d’abord défini la simulation en se référant au «Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders» (DSM-IIJ-Rt Ils en sont venus à la conclusion que la simulation désigne une classe générale de troubles de fonctionnement qui se manifestent par des symptômes physiques ou psychologiques intentionnellement simulés ou très exagérés. La simulation serait motivée par des facteurs externes et ne semblerait pas avoir, comme véritable objectif, la mort. Selon ces auteurs, l’instinct de conservation demeure l’élément principal qUI motive ce type de comportement et, lorsqu’il y a simulation, les détenus cherchent plutôt à éviter une blessure grave. Concernant l’automutilation, les auteurs s’inspirent plutôt de l’ouvrage de Walsh et Rosen (1988), intitulé Self-mutilation, afin de lui donner la définition suivante : Il s’agit d’une blessure grave ou d’un défigurement délibéré, volontairement infligé par l’individu sur sa personne, mais qui ne suffit pas à entraîner la mort. Van Moffaert (1997) qualifie, quant à elle, l’automutilation comme étant un phénomène de réduction des tensions internes, et la simulation, comme un moyen permettant de soutirer des avantages matériels.

Pour Farmer et al. (1996), une tentative de suicide serait réalisée dans le but de mourir, contrairement à l’automutilation qui serait réalisée dans le but de s’infliger des blessures. mais sans nécessairement vouloir en mourir. Waltz (1994) avance plutôt que les «comportements suicidaires» et les «comportements automutilatoires» font référence à toute agression physique qu’un sujet s’inflige à lui-même intentionnellement et qui entraîne des blessures modérément graves ou mortelles.

À partir de cette hypothèse, certains chercheurs ont avancé l’idée que l’automutilation serait «anti-suicidaire» (Ross & Mckay, 1979) et que nous devrions considérer ce comportement comme un mécanisme d’adaptation actif utilisé pour éviter le suicide (Suyemoto, 1998). Cependant, bien que certains auteurs différencient les comportements automutilatoires des comportements suicidaires, cela ne signifie pas que les automutilateurs ne deviendront jamais suicidaires (Walsh & Rosen, 1988). L’étude de Sakinofsky (2000) démontre que l’automutilation est un comportement fréquemmentµ répété. Cette répétition augmente donc le risque futur d’automutilation (deliberate self harm) (Owens, Dennis, Read, & Davis, 1994; Wilkinson & Smeeton, 1987) et de suicide éventuel (Hawton & Fagg, 1988; Tejedor, Diaz, Castillon, & Pericay, 1999).

Conclusion :

L’objectif de cette recherche visait à établir la, fréquence des comportements autodestructeurs en fonction des différents diagnostics psychiatriques des individus sous responsabilité légale. Pour ce faire, un ensemble de critères diagnostiques ont été analysés dans un premier temps. Dans un deuxième temps, la récurrence des comportements fut évaluée non seulement selon le diagnostic, mais également selon le type de comportement.

Cette recherche a permis de démontrer que les individus aux prises avec un trouble de la personnalité borderline ont tendance à multiplier leurs comportements autodestructeurs. Ainsi, 35,1% des individus présentant ce diagnostic ont réalisé un comportement unique, comparativement à 52,5% qui ont répété leur comportement.

 

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Table des matières

Introduction 
Contexte théorique 
Population ciblée
Comportements autodestructeurs: Distinction entre les concepts
Différentes caractéristiques associées aux comportements autodestructeurs
selon la récurrence
Troubles cliniques de l’axe J
Troubles de la personnalité de l’axe 11
Hypothèses de recherche
Questions exploratoires
Méthode 
Participants
Instruments de mesure
Déroulement
Résultats 
Discussion 
Discussion des résultats
Forces et faiblesses
Retombées de la recherche et orientations futures
Conclusion

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