Comportement thermomécanique d’un béton réfractaire

Les fibres sont employées depuis des siècles pour renforcer les matrices fragiles, comme la paille et le crin mélangés à l’argile pour former des briques. Depuis cette époque, le concept de fibres dispersées dans les matériaux à base cimentaire s’est considérablement développé et trouve des applications dans le bâtiment et le génie civil. L’ajout de fibres dans un béton peut ainsi modifier de manière importante son comportement mécanique. Les modifications engendrées dépendent notamment de la géométrie et de la nature des fibres introduites (polymères, métalliques, verres, carbone…), de leur fraction volumique et de leur vieillissement dans le béton.

Le béton est un matériau endommageable, au comportement non linéaire de type fragile ou quasi-fragile, dont les propriétés en traction sont les plus faibles. Le renforcement par des fibres a pour objectif majeur d’améliorer ce comportement en traction afin de retarder, de limiter ou d’éviter la rupture quasi-fragile. Les fibres sont en particulier introduites dans le béton afin de modifier leurs comportements non linéaires et d’obtenir tout ou partie des effets bénéfiques suivants : retarder la localisation de l’endommagement, augmenter la capacité de déformation du matériau, augmenter le niveau de contrainte au pic et observer une reprise de charge après fissuration.

Pour des sollicitations aussi bien statiques que dynamiques, les performances des bétons du génie civil renforcés de fibres se sont améliorées, provoquant un accroissement d’intérêt à leur égard. Depuis quarante ans, les études menées sur les bétons renforcés ont permis d’approfondir, de connaître pleinement et d’améliorer les propriétés mécaniques de tels matériaux. Ainsi, le renforcement de bétons par des fibres a trouvé de nombreuses applications comme le revêtement des tunnels ou la réalisation de pièces de structures. Les bétons renforcés de fibres peuvent également servir de matériaux de réparation pour la réhabilitation et le renforcement de structures en béton existantes. De plus, les recherches ont également mis en évidence que différents types de fibres induisent divers types de performances.

Les bétons réfractaires

Généralités

Selon la définition de la norme AFNOR (NF B 40-001) « tout matériau (autre que métaux et alliages) est considéré comme réfractaire dès l’instant où sa résistance pyroscopique est équivalente à 1 500°C minimum ». En d’autres termes, le matériau doit conserver ses propriétés physiques et ne doit ni se ramollir, ni s’affaisser sous son propre poids avant la température de 1 500°C [1].

Les matériaux réfractaires peuvent être divisés en deux grandes familles :
– Les matériaux façonnés qui sont livrés sous forme de briques, tuiles et pièces de forme. Leur consolidation a lieu par frittage (ou cuisson), par réaction chimique ou par solidification chimique.
– Les matériaux non façonnés (ou monolithiques) qui sont livrés en vrac pour être moulés ou appliqués sur place comme les bétons réfractaires.

Les matériaux réfractaires, façonnés ou non, sont essentiellement utilisés dans les «industries du feu » : fonderie, fabrication des métaux non-ferreux, du ciment, du verre et des céramiques. Ils sont également présents dans des domaines comme la pétrochimie, la chimie, l’industrie de l’incinération des déchets et la production d’énergie [1]. La Figure 1.1 présente les principaux domaines d’utilisation des produits réfractaires et leur consommation en Europe de l’ouest en 2002. L’amélioration des performances des réfractaires est un enjeu considérable compte tenu du nombre élevé d’industries les utilisant. À titre d’exemple, le coût direct de la consommation des réfractaires est très élevé et représente 10% des coûts de transformation d’une aciérie. La majeure partie d’une usine de production sidérurgique est composée de matériaux réfractaires. Ces matériaux ont des propriétés fonctionnelles relatives au traitement de l’acier et de la fonte, contrairement à l’acier qui les entoure qui n’a qu’une fonction secondaire de tenue mécanique.

La durabilié des matériaux réfractaires est en particulier gouvernée par des phénomènes de corrosion. La connaissance de la microstructure et des mécanismes de corrosion de tels matériaux est donc primordiale. Pour les pièces soumises aux hautes températures, la connaissance des propriétés thermomécaniques est également essentielle. Les matériaux réfractaires ont pour principale fonction d’assurer la protection physique du personnel et des installations entre l’extérieur et la matière chaude qui peut être liquide (acier, fonte, verre…), solide (charbons, minerais à l’entrée des fours…) ou gazeuse (air chauffé dans les cowpers…). Les réfractaires ont aussi pour rôle de réduire les pertes calorifiques en tant qu’isolants thermiques dans des équipements comme les fours industriels, les fours de laboratoires ou les foyers de certaines centrales thermiques [3]. Dans certains cas, des pièces réfractaires ont également à remplir des fonctions structurales. Peuvent notamment être citées les utilisations des bétons réfractaires dans des applications en tant qu’outillages de mise en forme de métaux dans des procédés à haute température [4, 5] ou en tant que supports de traitement thermique.

Les bétons réfractaires appartiennent à la classe des matériaux non-façonnés et sont principalement issus d’un mélange de granulats réfractaires et d’une matrice cimentaire (ciment, additifs et ultrafines). Les granulats sont en général constitués par un ou plusieurs minéraux, essentiellement des oxydes, qui confèrent son caractère principal (caractère réfractaire et propriétés complémentaires) au produit fini. La matrice cimentaire est un agent de liaison qui permet d’assurer en permanence la cohésion de l’ensemble des constituants. La nature du liant permet de distinguer deux principales familles de bétons réfractaires :
– Les bétons à liants chimiques : c’est le cas des bétons constitués d’un liant à base de phosphore, utilisés pour de bonnes résistances mécaniques à haute température surtout dans le cas de produits d’alumine pure, ou des bétons constitués d’un liant à base de chrome.
– Les bétons à liants hydrauliques : soit à base de ciment alumineux, de type ciment fondu (teneur en Al2O3 comprise entre 40% massique et 42%massique), soit à base de ciment réfractaire alumineux (teneur en Al2O3 supérieure à 60% massique) qui, après cuisson, se comportent comme un matériau réfractaire façonné cuit.

Cette dernière famille constitue la majorité des bétons réfractaires monolithiques dont les mécanismes de prise sont basés sur l’hydratation d’un ciment. Les ciments les plus couramment utilisés dans l’industrie réfractaire sont des ciments silico-alumineux-calciques à haute teneur en alumine [6, 7]. Dans le diagramme ternaire CaO-Al2O3-SiO2 (C-A-S) [8] présenté en Figure 1.2, trois grandes catégories de ciments hydrauliques, réparties suivants quatre domaines, sont identifiables :

– les ciments Portland sont très utilisés en génie civil,
– les ciments fondus sont une alternative intermédiaire entre les ciments Portland et les ciments réfractaires,
– les ciments alumineux forment le groupe des ciments réfractaires et correspondent à une zone assez étendue du diagramme ternaire.

Les bétons réfractaires peuvent également se différencier par leur teneur en ciment :
a. les bétons classiques ont une teneur en ciment comprise entre 15 et 25%massique,
b. les bétons à basse teneur en ciment contiennent de 4 à 10% massique de ciment,
c. les bétons à ultra-basse teneur en ciment ont un taux de ciment inférieur à 2% massique.

Evolution microstructurale

La conversion est un phénomène relativement lent et irréversible qui se produit lors de la première chauffe et qui n’opère complètement que si le chauffage est progressif. De nombreux travaux ont étudié ce processus [9, 10, 12, 13]. La Figure 1.3 représente les modes de conversion de l’aluminate de calcium en fonction de la température. La description de ce phénomène peut être décomposée en plusieurs étapes :
– Hydratation : La phase anhydre CA, sous forme de poudre, est hydratée par ajout d’eau. Elle se dissout pour former des aluminates de calcium hydratés et des hydrates d’aluminium. Ces derniers se trouvent sous forme de gel d’alumine amorphe ou bien de gibbsite cristalline. Lors de l’hydratation du CA, trois sortes d’hydrates peuvent se former. Cependant, seul l’hydrate C3AH6 est stable à température ambiante. Les deux autres, CAH10 et C2AH8, sont métastables et tendent à se transformer en C3AH6. La cinétique de transformation est intimement liée à la température. En effet, lors d’un étuvage à 110°C pendant 24 heures, les phases hydratées présentes sont C3AH6 et AH3.
– Déshydratation : Au-delà de 110°C, l’eau combinée avec les aluminates de calcium va s’évaporer. Ensuite entre 200°C et 400°C, l’eau de constitution commence à disparaître, conduisant à la formation du C12A7, de l’alumine amorphe et de la chaux hydratée.
– Recristallisation : A partir de 440°C, la chaux hydratée va se transformer en chaux libre et réagir avec l’alumine libre pour former de nouveau du C12A7. Vers 900°C, les particules de C12A7 vont se combiner avec l’alumine restante pour donner le monoaluminate de calcium (CA). Celuici va réagir à son tour avec l’alumine aux alentours de 1 000°C pour former du CA2. Pour des températures proche de 1 400°C, le CA2 va réagir avec l’alumine libre pour former du CA6.

Les évolutions de la microstructure qui ont lieu pendant la déshydratation de la phase cimentaire sont notamment mises en évidence par dilatométrie. En effet, les changements de phase entraînent le plus souvent des variations du comportement dilatométrique. Ces études sont menées directement sur des éprouvettes de béton ou sur des éprouvettes de matrice, mélange de béton sec tamisé et coupé à une granulométrie donnée (par exemple 200!m). La matrice cimentaire est le lieu privilégié des phénomènes de conversion, car elle est composée des constituants les plus réactifs. Ainsi, au cours de la première chauffe, l’élévation de température entraîne le déroulement des phénomènes de conversion.

Des analyses ont, par exemple, été effectuées pour déterminer les comportements dilatométriques de matrices de bétons réfractaires contenant un ciment à haute teneur en alumine [6, 7, 10]. Ainsi, sur la Figure 1.4, dans l’intervalle de température qui s’étend de la température ambiante jusqu’à 1 000°C, deux domaines de température, dans lesquels des phénomènes de retraits se produisent, sont identifiables. Le premier est compris dans un intervalle de température allant de 150°C à 300°C, le second débute à 800°C et termine vers 1 000°C. Ces domaines de température peuvent être mis en regard des valeurs de températures données dans le modèle de conversion de la Figure 1.3. Au-delà de 1 000°C, une phase liquide se développe dans la matrice et l’élévation de la température accroît sa quantité. C’est ainsi que s’activent les mécanismes de frittage en phase liquide. Selon sa composition, la matrice peut alors se densifier et présenter un fort retrait dilatométrique (Figure 1.4, nuance Bau-UBTC). Ou bien elle présente une dilatation régulière qui résulte d’une recombinaison des éléments du système C-A-S à haute température (Figure 1.4, nuance And-BTC). Ainsi, dans le cas du béton réfractaire à  base d’andalousite de la Figure 1.4, la cuisson de la matrice à haute température conduit à la formation de mullite (A3S2) et d’anorthite (CAS2) [7]. Au cours du refroidissement, les courbes dilatométriques sont linéaires. Cette linéarité prouve l’irréversibilité des transformations microstructurales subies par la matrice.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 Étude bibliographique
1.1 Les bétons réfractaires
1.1.1 Généralités
1.1.2 Comportement microstructural
1.1.3 Comportement thermomécanique
1.1.4 Synthèse de la bibliographie issue des recherches sur le comportement thermomécanique des bétons réfractaires
1.2 Le renforcement par fibres des bétons
1.2.1 Les bétons de génie civil et le renforcement par fibres
1.2.2 Les bétons réfractaires et le renforcement par fibres
1.2.3 Synthèse de la bibliographie issue des recherches sur le comportement mécanique des bétons réfractaires renforcés de fibres
1.3 Les fibres minérales
1.3.1 Les fibres de verre
1.3.2 Les fibres céramiques réfractaires (FCR)
1.4 Conclusion
Chapitre 2 Matériaux et méthodes expérimentales
2.1 Matériaux étudiés
2.1.1 Le béton réfractaire
2.1.2 Les fibres minérales utilisées
2.1.3 Procédure de préparation des éprouvettes
2.2 Caractérisation du comportement thermomécanique
2.2.1 Essais de flexion 4 points
2.2.2 Essais de traction directe à température ambiante
2.2.3 Caractérisation microstructurale
2.3 Conclusion
Chapitre 3 Étude du comportement mécanique à température ambiante : influence de la température de cuisson et relations avec la microstructure
3.1 Comportement à température ambiante et après cuisson du béton réfractaire renforcé de fibres céramiques Nextel610® ou Nextel720®
3.1.1 Comportement en flexion 4 points.
3.1.2 Comportement en traction uniaxiale
3.1.3 Analyses microstructurales (faciès de rupture).
3.2 Comportement à température ambiante et après cuisson du béton réfractaire renforcé de fibres de verre AR ou R
3.2.1 Comportement en flexion 4 points.
3.2.2 Comportement en traction uniaxiale
3.2.3 Analyses microstructurales (faciès de rupture)
3.3 Discussion : relations entre microstructure et comportement mécanique à température ambiante, après cuisson.
3.3.1 Compléments bibliographiques
3.3.2 Comportement après cuisson à des températures inférieures ou égales à 900°C
3.3.3 Comportement après cuisson à des températures supérieures ou égales à 900°C
3.4 Conclusion
Chapitre 4 Étude du comportement mécanique à haute température : influence de la température d’essai et relations avec la microstructure
4.1 Comportement à haute température et après cuisson du béton réfractaire renforcé de fibres céramiques Nextel610® ou Nextel 720®
4.1.1 Comportement en flexion 4 points.
4.1.2 Analyses microstructurales (faciès de rupture)
4.2 Comportement à haute température du béton réfractaire renforcé de fibres de verre R et AR
4.2.1 Comportement en flexion 4 points.
4.2.2 Analyses microstructurales (faciès de rupture)
4.3 Discussion : relations entre microstructure et comportement mécanique à haute température, après un cycle de cuisson
4.3.1 Comportement jusqu’à 900°C
4.3.2 Comportement entre 900°C et 1 200°C
4.4 Approche simplifiée de modélisation et de simulation numérique du comportement aux interfaces fibre/béton à haute température
4.4.1 Objectifs et hypothèses de l’approche simplifiée
4.4.2 Identification d’une loi de fluage en flexion 4 points pour le béton réfractaire
4.4.3 Comportement des fibres à haute teneur en alumine
4.4.4 Étude analytique pour un comportement élastique des deux matériaux
4.4.5 Mise en place du modèle pour la simulation numérique
4.4.6 Étude par simulation numérique aux éléments finis du comportement d’un mini-élément de volume, basée sur le modèle de comportement avec fluage
4.5 Conclusion
Conclusion générale

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *