Circulation atmosphérique de surface

Circulation atmosphérique de surface

Le vent joue un rôle primordial dans la circulation grande échelle de l’océan Austral. Le régime de vent grande échelle, loin du continent antarctique, est dominé par des vents d’ouest, associés au rail des dépressions, caractéristique de la circulation atmosphérique des moyennes latitudes. Près des côtes antarctiques, la circulation atmosphérique zonale change de signe, avec un régime de vents d’est. Ils sont directement liés à la circulation atmosphérique sur le continent antarctique. Ce sont les masses d’air froides provenant du continent qui sont déviés vers l’ouest sous l’effet de l’accélération de Coriolis à grande échelle.

Le principal mode de variabilité atmosphérique dans cette région du monde est le mode annulaire austral (SAM) (Thompson and Wallace, 2000). En période de SAM positif, le passage des dépressions de moyennes latitudes est localisé plus au sud, vers le continent antarctique. Les vents d’est le long du continent antarctique sont également impactés. Il existe en effet un lien important entre la circulation atmosphérique grande échelle australe et les vents antarctiques côtiers appelés vents catabatiques (définis et détaillés dans le paragraphe II.4) (Parish and Bromwich, 1991; Yasunari and Kodama, 1993; Van den Broeke et al., 2002). Ces vents côtiers ont une grande importance dans le processus de formation d’eau dense à la côte (voir section II) Une tendance positive du SAM a été observée ces dernières décennies (Marshall, 2003; Fogt et al., 2009), avec de nombreux impacts sur la couverture de glace, sur la circulation océanique australe, en particulier sur le plateau antarctique (Schmidtko et al., 2014; Spence et al., 2014; Campagne et al., 2015; Stewart and Thompson, 2015). Les changements de SAM semblent associés à un réchauffement des eaux de subsurface et des eaux de fond particulièrement important sur le plateau de l’Antarctique de l’Ouest (mer de Bellingshausen et d’Amundsen). Ces changements semblent aussi impacter les échanges d’Eau Circumpolaire Profonde (Circumpolar Deep Water, CDW) entre le plateau et le large et donc également le transport méridien de chaleur.

Circulation océanique péri-antarctique

Courant circumpolaire Antarctique (ACC) : l’ACC circule d’ouest en est autour du continent Antarctique (Figure 1.1) sur une distance d’environ 20000 km, transportant approximativement 141Sv ± 2.7 (1Sv = 10⁶m3/s) (Koenig et al., 2016). L’ACC isole les eaux stratifiées de la thermocline subtropicale au nord des eaux polaires plus homogènes au sud. La structure circumpolaire de l’océan Austral en fait une pièce maîtresse de la circulation thermohaline globale. Au large de la Terre-Adélie, à 140˚E, on identifie le front sud de l’ACC entre 62˚S et 64˚S, à environ 100 km au nord de l’isobathe 1000 m du talus continental qui se situe à 65.5˚S à cette longitude. Les vents d’ouest créent une dérive d’Ekman vers le nord tandis que les vents d’est créent une dérive vers le sud. Cette divergence des courants de surface, divergence antarctique, va induire un pompage d’Ekman à l’origine de la remontée de la CDW le long du talus continental Antarctique.

Courant de talus et front antarctique de talus : Le transport d’Ekman vers le continent antarctique, dû au vent d’est soufflant au sud de la divergence antarctique, est à l’origine d’une accumulation des eaux de surface au sud qui va s’ajuster géostrophiquement pour former un courant vers l’ouest : c’est le courant du talus antarctique (Antarctic Slope Curent, ASC) et sur le plateau le courant côtier antarctique. Gyre du bassin Australo-Antactique : la dérive d’ouest (ACC) et la dérive d’est (ASC) sont connectées dans les gyres de Weddell, de Ross et du bassin Australo-Antarctique (Figure 1.1). Dans ce dernier bassin, l’ASC semble en effet faire partie d’un gyre grande échelle de faible intensité compris entre 80˚et 150˚E (Bindoff et al., 2000a). À 140˚E, cette circulation de gyre est moins marquée et laisse place à des tourbillons cycloniques de grande dimension horizontale (diamètre de 130 à 150 km) (Hirawake et al., 2003; Aoki et al., 2007, 2010). Ces tourbillons semblent jouer un rôle important dans les échanges entre la côte et le large.

Échanges côte large en Antarctique de l’Est

En certains endroits autour de l’Antarctique, l’Eau Circumpolaire Profonde plus chaude et plus salée que l’Eau Antarctique de Surface (AntArctic Surface Water, AASW), entre directement sur le plateau continental. Elle transporte ainsi de la chaleur et du sel sur le plateau, et parfois jusqu’aux plateformes de glace continentale, contribuant de façon plus ou moins importante à la fonte de cette glace. L’ASC agit comme une barrière dynamique, Nøst et al. (2011) et Stewart and Thompson (2015) (pour un talus idéalisé sans indentations) montrent un lien direct entre l’intensité de la tension de vent parallèle au talus et le transport de CDW sur le plateau : pour des tensions de vent d’est trop élevées, il n’y a plus d’échange de CDW à travers le talus. Les échanges côte large dépendent de nombreux autres facteurs dont notamment : la présence ou non de formation d’eau dense, la présence ou non d’un seuil qui creuse le talus à l’entrée du plateau et la profondeur de la MCDW au large (Dinniman and Klinck, 2004; Dinniman et al., 2011; Wåhlin et al., 2012; St-Laurent et al., 2013). Contrairement aux mers d’Amundsen et de Bellingshausen, les mers de Ross, Weddell et le plateau Est-Antarctique au large de la Terre-Adélie comportent le long du talus continental un front antarctique de talus (Antarctic Slope Front, ASF) associé à l’ASC. En Antarctique de l’Est, le plateau continental est relativement étroit et la branche sud du Front Polaire Antarctique (59˚et 60˚S) est proche du plateau antarctique (Sokolov and Rintoul, 2002). Les traces d’intrusions directes d’Eau Circumpolaire Profonde Modifiée (Modified Circumpolar Deep Water, MCDW) sur le plateau sont assez rares par rapport à l’Ouest de la péninsule antarctique où la CDW est relativement omniprésente (Hofmann and Klinck, 1998). Il y a donc un fort contraste de température entre les masses d’eau du plateau de la partie ouest de la péninsule antarctique et le reste du plateau antarctique (Pritchard et al., 2012; Schmidtko et al., 2014). Ce contraste est également associée à une fonte basale des plateformes glaciaires plus importante en Antarctique de l’Ouest (péninsule antarctique) qu’en Antarctique de l’Est. En Antarctique de l’Est, le gradient de température de surface côte-large est beaucoup plus prononcé du fait de la subduction (downwelling) côtière induite par les vents d’est, des pertes de chaleur vers l’atmosphère ou la glace de mer, et également des forts vents catabatiques qui contribuent au maintien d’un front de température (∆θ >1.75˚C) séparant la CDW chaude du large, des eaux côtières proches du point de congélation.

Circulation méridienne de retournement 

La circulation horizontale annulaire de l’ACC est associée à une circulation verticale méridienne complexe qui est très largement forcée en surface par les flux air-mer (Figure 1.2). Les vents de surface et les transports d’Ekman associés provoquent des divergences et convergences de surface, forçant la plongée ou la remontée des eaux (Speer et al., 2000; Marshall and Speer, 2012). Tandis qu’à proximité du contient antarctique, la production et la fonte de glace de mer sont associées à d’importants flux de flottabilité (Rintoul et al., 2001). La circulation méridienne de retournement contribue à la remontée et au renouvellement des eaux profondes des océans. Schématiquement, les eaux profondes Nord Atlantique (NADW) remontent vers la surface au sud de l’ACC sous la forme de CDW. La circulation méridienne de retournement comporte deux boucles (Figures 1.3 et 1.4). Une boucle profonde dont la branche supérieure est composée de CDW qui remonte vers la surface en se rapprochant du continent Antarctique où elle est transformée en eaux antarctique de fond (AABW) venant alimenter la branche inférieure qui tapisse les pleines abyssales. La transformation de la CDW en AABW s’opère sur le plateau Antarctique sous l’effet des pertes de chaleur au contact de l’atmosphère. La boucle supérieure est composée de CDW en profondeur qui, en remontant est transformée en eau Antarctique Intermédiaire (AAIW) et eaux Modales Subantarctiques formant la branche supérieure de cette seconde boucle (Speer et al., 2000).

Il existe plusieurs zones privilégiées de formation d’eau dense de plateau sur le pourtour du continent antarctique (Figure 1.5). Historiquement ont été mis en évidence comme source d’AABW : la mer de Weddell, la mer de Ross, la polynie du Mertz au large de la Terre-Adélie et la baie de Prydz (Meredith, 2013). La formation d’eau dense dans ces différentes régions du plateau est modulée par la présence plus ou moins importante d’Eau Circumpolaire Profonde sur le plateau, par la couverture de glace et par les interactions éventuelles avec les glaciers. Bien que la formation et la transformation de masses d’eau dans l’océan Austral soient importantes pour la circulation thermohaline à l’échelle planétaire et pour le renouvellement des eaux des océans du globe (Figures 1.2 et 1.3) et que l’océan Austral soit reconnu à l’heure actuelle comme l’une des principales sources d’incertitudes des modèles climatiques, les observations sur le plateau Antarctique sont plutôt rares. Si avec l’avènement du réseau ARGO et des mesures satellitaires, les changements larges échelles dans l’océan ouvert sont de mieux en mieux compris, la connaissance de la dynamique océanique sur le plateau antarctique reste très lacunaire du fait du manque de données et de simulations numériques réalistes. Hors, ce sont les processus sur le plateau qui sont à l’origine du renouvellement des masses d’eau océaniques tapissant les plaines abyssales.

Dans le but de mieux comprendre ces changements, il est important de bien comprendre la circulation et la transformation des masses d’eau sur le plateau antarctique. L’un des objectifs de cette thèse est de mieux comprendre la circulation des masses d’eau sur le plateau antarctique dans une région de formation d’eau dense de plateau située au large de la Terre Adélie.

Contexte régional et objectifs de la thèse

Prologue historique

La Terre-Adélie a attiré de grands explorateurs, comme l’Australien Douglas Mawson (1911-1914) qui observa les conditions météorologiques extrêmes associées à cette région polaire, ou encore le commandant français Charcot qui réalisa le premier profil hydrographique au large de la Terre-Adélie en 1950. Beaucoup plus tard, Gordon and Tchernia (1972)lors de la campagne de l’Eltanin, mettent en évidence pour la première fois l’eau profonde de la TerreAdélie (Adélie Land Bottom Water, ALBW). Ce n’est qu’en 1998 que la Terre-Adélie est reconnue comme étant l’une des principales sources (la 3ème) d’Eau Antarctique de Fond (Rintoul, 1998). La base française de Dumont d’Urville située à quelques centaines de kilomètres de là, est ravitaillée chaque année par le petit brise glace français Astrolabe. Ce navire a été aménagé pour permettre à des équipes scientifiques, dans cette zone d’étude passionnante, d’effectuer des mesures océanographiques. C’est dans ce contexte que le projet ALBION, dans lequel s’inscrit cette thèse a vu le jour et a pu développer et maintenir un programme d’observations à la mer sur la période 2007-2015.

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Table des matières

1 Introduction
État de l’art et motivation
I Cadre large échelle
I.1 Circulation atmosphérique de surface
I.2 Circulation océanique péri-antarctique
I.3 Échanges côte large en Antarctique de l’Est
I.4 Circulation méridienne de retournement
II Contexte régional et objectifs de la thèse
II.1 Prologue historique
II.2 Géographie du plateau de la Terre Adélie
II.3 La Langue Glaciaire du Mertz : polynie et landfast ice
II.4 Régime des vents en Terre Adélie
II.5 La polynie du Mertz
II.6 Importance de la polynie du Mertz et de la circulation horizontale pour
la production biologique
II.7 Conditions hydrologiques sur le plateau Adélie
II.8 Circulation océanique sur le plateau au large de la Terre-Adélie
III Objectifs de la thèse
III.1 Questions scientifiques
III.2 Démarche adoptée
III.3 L’année 2008 dans le contexte de la variabilité climatique
2 Matériel et traitement des données
I Observations du projet ALBION et données complémentaires
I.1 Observations du projet ALBION : période 2008-2010
I.2 Autres données océanographiques
I.3 Forçage atmosphérique de surface
I.4 Concentration de glace de mer et de production de glace
II Traitement des données ALBION
II.1 Qualification des données CTD
II.2 Calibration des microcats à MG
II.3 Traitement des données de courant : ADCP
III Méthodes
III.1 Estimation des contenus en chaleur et en eau douce et leur évolution
III.2 Analyse optimale à multi-paramètres pour l’identification des masses d’eau
III.3 Détection de tourbillons à partir de données de mouillage
3 Variabilité saisonnière sur le plateau Adélie : hydrologie et courants
Caractérisation du courant et des échelles de temps associées
I Évolution saisonnière des propriétés hydrologiques dans la dépression Adélie
I.1 Évolution des propriétés hydrologiques au mouillage MG
I.2 Évolution saisonnière du champ de densité et de la stratification
I.3 Distributions spatiales saisonnières de la salinité dans le sud-est de la dépression Adélie
II Éléments sur la variabilité interannuelle des conditions hydroligiques
III Caractérisation du courant moyen aux trois sites de mouillage
III.1 Courant moyen annuel
III.2 Influence de la topographie sur les courants de fond
III.3 Contraste saisonnier
IV Relation entre les cycles saisonniers aux différents sites de mouillage
V Synthèse et perspectives
4 Cadre formel du modèle inverse
Modèle physique et statistique
I Le modèle physique
I.1 Géostrophie
I.2 Le problème inverse
I.3 Formulation du problème en couches
I.4 Surfaces neutres ou surfaces isopycnales
I.5 Représentation des flux diapycnaux dans le modèle inverse
I.6 Travail en anomalie de traceur
I.7 Discrétisation du problème
II Résoudre un système d’équations sous-déterminées
II.1 Gauss-Markov
II.2 Importance des matrices de covariance du bruit
II.3 Comparaison avec une inversion basée sur la décomposition en vecteur singulier
II.4 Conclusion sur le modèle inverse en boîtes
III Modèle d’erreur et construction de la matrice de covariance a priori du bruit
III.1 Bruit sur la mesure
IV Résumé et conclusion
5 Conclusion

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