Changement climatique et sécheresses extrêmes

Changement climatique et sécheresses extrêmes 

Généralités et prédictions 

Le climat est caractérisé par les données atmosphériques locales, mesurées sur une longue période de temps. Les températures, les précipitations, l’ensoleillement, l’humidité, la vitesse du vent, et la pression atmosphérique sont moyennés à l’échelle mensuelle et annuelle. Les phénomènes exceptionnels (par exemple la mousson) sont également pris en compte (Lamb, 2011). Les variations du climat font partie inhérente de l’histoire climatique de notre planète. Aux échelles régionales et locales, la quantité de radiations solaires reçues, le déplacement des masses aériennes transportant air chaud et masses d’humidité, ainsi que la nature de la surface terrestre (désert, forêt, etc.), conditionnent le climat sur des périodes de temps relativement courtes, allant de quelques heures à plusieurs mois (comme pour le phénomène El Niño). D’autres mécanismes viennent s’ajouter à ceux-là et peuvent provoquer des fluctuations climatiques sur plusieurs millénaires. Ainsi la succession régulière de périodes glaciaires et interglaciaires a été associée aux changements périodiques d’excentricité, d’obliquité et de précession terrestre.

A ces variations naturelles s’est ajouté, depuis la fin du XXème siècle, un réchauffement climatique global : l’anomalie de température observée s’élève, pour l’année 2016, à +1°C par rapport à la moyenne des températures de 1951 à 1980 (NASA). Cette augmentation, attribuée aux émissions anthropiques de gaz à effet de serre (IPCC, 2014), pourrait affecter le climat non seulement à travers des variations de températures mais aussi de précipitations. La plupart des modèles climatiques s’accordent à prédire une augmentation du nombre de sécheresses sévères (Dai, 2011; Sherwood & Fu, 2014), et des vagues de chaleur extrêmes en Europe comme la canicule de 2003 (Schär et al., 2004), dont la probabilité d’occurrence est doublée par les activités anthropiques (Stott et al., 2004). La figure A.1 illustre l’évolution prédite des sécheresses dans le monde au cours du 21ème siècle. Selon les projections, la sécheresse sera principalement causée par la diminution des précipitations et l’augmentation de l’évaporation due aux températures élevées (Sheffield & Wood, 2008), diminuant par conséquent la réserve en eau du sol disponible pour les plantes, y compris pour les espèces cultivées (Wang, 2005). Dans la région méditerranéenne en particulier, on assistera probablement à une diminution annuelle des précipitations en termes de quantité et de fréquence, ainsi qu’à une augmentation des risques de sécheresse estivale extrêmes (Christensen et al., 2007). Ces changements peuvent affecter fortement les écosystèmes en impactant leur diversité et leurs fonctions (Zavaleta et al., 2003; Hoeppner & Dukes, 2012). Dans ce contexte, il est urgent d’améliorer notre compréhension des mécanismes régissant l’adaptation des espèces face aux évènements climatiques extrêmes, afin d’anticiper la réponse des écosystèmes aux changements climatiques, et de proposer des solutions agronomiques durables.

Importance du changement climatique pour les prairies 

Les prairies –y compris les pâturages et les parcours semés- font partie des plus vastes écosystèmes au monde, représentant 70% de la surface agricole totale et 40% de la surface émergée du globe (FAO, European communities 2008). En Europe, les prairies permanentes et temporaires recouvrent 67 millions d’hectares. Cependant, ce chiffre tend à diminuer en raison de la croissance des espaces péri-urbains et de l’augmentation des surfaces boisées (Peyraud et al., 2012). Le terme « prairies » correspond à des surfaces herbacées comportant moins de 10% d’arbres et arbustes et composées majoritairement de graminées (White et al., 1983). Ces écosystèmes particuliers sont maintenus grâce à un régime de perturbations (Woodward et al., 2004) : la fauche, le pâturage et les feux de végétation favorisent les espèces herbacées qui protègent leurs organes de survie (les méristèmes) dans des gaines proches du sol, tandis que ces perturbations impactent fortement la survie des arbres et arbustes. Comme illustré dans la figure A.2, les prairies peuvent se développer sous des gammes de températures et de précipitations plus larges que n’importe quel type d’arbre (feuillus ou conifère), la majorité poussant sous des moyennes annuelles de températures et de précipitations comprises entre respectivement -5 et 20°C, et 600 à 1500mm (Woodward & Lomas, 2004) .

Les prairies, et en particulier les prairies permanentes dont les espèces pérennes restent en place plusieurs années, offrent un large éventail de services écosystémiques. Piliers de l’alimentation animale, elles sont à la base de l’alimentation de plus de 800 millions de personnes dans le monde (FAO). De plus, alors que les terres arables déstockent du carbone au rythme de 0.84 t C/ha/an, les prairies sont capables de stocker 0.5 t C/ha/an (Vleeshouwers & Verhagen, 2002), un atout majeur face au changement climatique. En plus de la production de fourrage et du stockage du carbone (Peeters & Hopkins, 2010), les prairies contribuent à la protection des sols et à la préservation de la biodiversité (Gaujour et al., 2012). Autant de services qui pourraient être largement impactés par les changements climatiques, et notamment des sécheresses plus intenses et plus fréquentes (Tubiello et al., 2007).

Réponses des plantes au stress hydrique : les stratégies adaptives 

La sécheresse, provoquée par un déficit prolongé des précipitations, se traduit au niveau de la végétation par un stress hydrique induit par la baisse des réserves utiles en eau du sol. Ce stress impacte fortement la croissance, la reproduction, et la survie des plantes (Chaves et al., 2002) et est considéré comme le principal facteur climatique associé à la mortalité des plantes (Allen et al., 2010). La réponse des plantes à la déshydratation diffère en fonction des mécanismes adaptatifs exprimés par les plantes, mais également de l’intensité du stress hydrique (Figure B.1) .

Lorsqu’elles ont évolué dans des milieux soumis à une contrainte hydrique, les plantes se sont adaptées par la mise en place de stratégies adaptatives au stress favorisant la tolérance et/ou la survie à la sécheresse (Levitt, 1980; Ludlow, 1989; Grubb, 1998; Craine, 2009). Une stratégie se définit, à l’échelle de la plante, comme un ensemble interconnecté d’adaptations, soumis à la sélection naturelle, favorisant la croissance et la reproduction dans un environnement particulier (Craine, 2009). Ces adaptations peuvent s’exprimer dépendamment ou indépendamment des facteurs environnementaux (Kooyers, 2015). Les espèces herbacées ont développé différentes stratégies adaptives face à la sécheresse, favorisant la résistance et/ou la survie, selon l’intensité et la durée du stress (Ludlow, 1989). La résistance à la sécheresse, sous sécheresse modérée, se définit comme le maintien de croissance aérienne et donc la production sous stress. La survie à la sécheresse, sous forte contrainte hydrique, permet aux plantes de reprendre une croissance après le stress mais implique que les plantes doivent « savoir ne pas pousser » (Bielenberg, 2011) pendant la période de sécheresse. Les différentes adaptations retrouvées chez les plantes herbacées qui favorisent la résistance et/ou la survie à la sécheresse ont été classées en trois grandes stratégies (Levitt, 1980; Ludlow, 1989) : (i) l’échappement, (ii) l’évitement, et (iii) la tolérance à la déshydratation (Figure B.2). En outre, certaines herbacées pérennes de la région méditerranéenne présentent une stratégie particulière : la dormance estivale (iv), qui favorise la survie des plantes sous des déficits hydriques sévères (Volaire & Norton, 2006).

Les différentes stratégies des plantes herbacées 

Échapper à la sécheresse

L’échappement (« drought escape ») permet à la plante d’échapper à la sécheresse en réalisant son cycle en dehors des périodes de contrainte hydrique (Bazzaz, 1979; Heschel & Riginos, 2005; Wu et al., 2010). Cette stratégie se retrouve, en particulier, chez les espèces annuelles (May & Milthorpe, 1962). Deux mécanismes peuvent permettre à la plante de synchroniser son cycle de vie avec la disponibilité en eau : soit une phénologie accélérée, soit un développement plastique. Dans le premier cas, la plante optimise le déroulement complet de son cycle, jusqu’à la production de graines, avant le début de la sécheresse. De nombreuses plantes présentent ainsi une floraison plus précoce dans les milieux arides que dans les milieux humides (ex., Eckhart et al. 2004; Franke et al. 2006; Hall and Willis 2006; Petrů et al. 2006). Achever sa floraison avant le début de la sécheresse présente certainement un avantage évolutif : préserver la période de production des graines du stress provoqué par la déshydratation contribue probablement à augmenter la fitness de la plante, c’est-à-dire son succès reproducteur, dans les environnements où la saison de croissance se termine à cause de la sécheresse (Franks et al., 2007). Ce trait peut aussi apparaître dans la descendance de plantes soumises à une période de stress hydrique, ce qui démontre son caractère adaptatif dans les milieux où la contrainte hydrique est saisonnière (Sherrard & Maherali, 2006; Franks, 2011). La floraison précoce est ainsi le trait le plus souvent associé à la stratégie d’échappement (Kooyers, 2015). D’autre part, les plantes peuvent aussi échapper à la sécheresse par un développement plastique. Elles réduisent leur croissance pendant les périodes de déficit hydrique, mais exploitent la ressource en eau dès qu’elle redevient disponible (Jones et al., 1981). Les cycles phénologiques courts sont généralement favorisés par une activité métabolique importante et une croissance rapide (Bazzaz, 1979; McKay et al., 2003). On retrouve notamment chez ces plantes une conductivité stomatique élevée et une forte capacité photosynthétique (Mooney et al., 1976). Ces traits, à large échelle, sont corrélés à des durées de vie plus courtes, et sont souvent caractéristiques des espèces se développant dans des milieux riches en ressources (Reich et al., 1999; Wright et al., 2004). C’est pourquoi le caractère adaptif de cet ensemble de traits dans un environnement soumis à la contrainte hydrique reste discuté (Sherrard & Maherali, 2006).

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1
A. Changement climatique et sécheresses extrêmes
B. Réponses des plantes au stress hydrique : les stratégies adaptives
C. L’approche trait pour étudier les stratégies adaptives à la sécheresse
D. La variabilité intraspécifique : une composante souvent négligée de la diversité fonctionnelle
E. Le cas des espèces domestiquées
F. Objectifs et hypothèses
Chapitre 2
Matériel et méthodes
A. Justification de la démarche
B. Expérimentations
C. Plan de la thèse
Chapitre 3
Variabilité intraspécifique du potentiel de croissance et stabilité des relations entre traits fonctionnels au cours des saisons
Chapitre 4
Relation(s) entre potentiel de croissance et survie au stress hydrique
Chapitre 5
Relation entre les traits fonctionnels racinaires et l’utilisation de l’eau : un compromis entre évitement et tolérance à la déshydratation ?
Chapitre 6
Discussion générale
A. Importance de la variabilité intraspécifique
B. La relation entre potentiel de croissance et survie au stress
C. Différents syndromes de traits fonctionnels
D. Les compromis fonctionnels peuvent-ils expliciter le compromis entre croissance et survie au stress ?
E. Traits fonctionnels et stratégies adaptives à la sécheresse
F. Effet de la domestication : passé et futur
Conclusion générale
Bibliographie
Annexe

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