Catalyseurs d’hydrotraitement à base de Mo supporté sur alumine

La pollution liée aux carburants automobiles constitue une problématique majeure pour les populations des pays industrialisés ce qui incite les gouvernements à mettre en place différentes normes visant à limiter ces émissions. Ainsi, par exemple, la teneur réglementaire en soufre, poison pour les catalyseurs des pots catalytiques et des raffineries, mais aussi responsable des pluies acides à été réduite par 50 en 13 ans (norme Euro 5)[1] passant de 500 ppm en 1996 à 1 ppm en 2 9 pour les essences et gasoils commercialisés dans l’Union Européenne.

Afin de répondre aux spécifications sur les carburants, différents hétéroélements (soufre, oxygène, azote, organométalliques) sont donc éliminés lors du raffinage des produits pétroliers au cours des étapes d’hydrotraitement HDT).[1,3] La teneur en soufre est réduite lors du procédé d’hydrodésulfuration HDS grâce à des catalyseurs, qui sont principalement des sulfures de molybdène MoS2, ou de tungstène WS2, promus par des métaux du groupe VIII, tels que le cobalt ou le nickel et déposés sur un support oxyde de type alumine ou silicealumine.[4–6] La réponse aux nouvelles normes environnementales passe donc par une amélioration de ces catalyseurs, ce qui implique, en plus d’une meilleure description de la morphologie de la phase active à la surface de l’oxyde, une caractérisation plus précise des interactions entre le support et le métal déposé lors des différentes étapes de synthèse (imprégnation, séchage, calcination, sulfuration).[7] En effet, les descripteurs macroscopiques utilisés jusqu’à présent texture et nature cristalline du support ne suffisent plus pour comprendre ce qui se passe réellement à l’interface support-précurseur et peu d’études mentionnent les interactions du précurseur avec des faces cristallines privilégiées du support, si ce n’est via des simulations théoriques ou en utilisant des films minces de structure mal définie.[8] L’optimisation de ces catalyseurs passe donc aujourd’hui par une compréhension fondamentale du système à une échelle moléculaire, notamment concernant l’effet des différentes faces cristallines du support oxyde sur la phase active.

La mise en place d’une approche science des surfaces,[10] où l’analyse se fait via la décomposition en éléments plus simples (surfaces modèles notamment[11]), permet de relever les défis mentionnés ci-dessus en utilisant des outils de caractérisation microscopiques (modélisation moléculaire, caractérisations physico-chimiques) et donc en appréhendant plus précisément : i) la nature de la surface du support en fonction des faces cristallines exposées, ii) les interactions support-précurseur et iii) la morphologie de la phase active en fonction des faces cristallographiques. Ces surfaces modèles monocristaux d’alumine α,[12] ou bien d’oxyde de titane[13] par exemple sont d’autant plus intéressantes qu’elles permettent de modéliser les supports industriels constitués d’agrégats de particules nanométriques présentant individuellement plusieurs types de faces cristallines.

Une des premières approche de ce type a ainsi été introduite au début du siècle dernier par Langmuir[14] (1922): « Most finely divided catalysts must have structure of great complexity. In order to simplify our theoretical consideration of reactions at surfaces, let us confine our attention to reactions on plane surfaces. If the principle in this case is well understood, it should then be possible to extend the theory to the case of porous bodies…». L’optimisation des outils de caractérisation avec l’appui de la modélisation moléculaire permet aujourd’hui de tirer pleinement partie de ce type d’approche.

Description de la phase active 

Catalyseurs non promus de type MoS2/γ-Al2O3

Les particules de disulfure de molybdène (MoS2) à structure lamellaire constituent la phase active des catalyseurs d’hydrotraitement à base de molybdène. Les particules sont constituées de couches S-Mo-S formant un feuillet constitué de deux couches d’atomes de soufre orientées selon le plan 1 et d’une couche intermédiaire d’atomes de molybdène, qui sont liés à six atomes de soufre voisins dans une géométrie prismatique trigonale. Des structures lamellaires généralement de quelques nanomètres (3-4 nm sont formées par l’empilement de plusieurs feuillets de MoS2, généralement un à cinq, maintenus entre eux par des interactions faibles de type van der Waals .

Ces particules de MoS2 présentent deux types de bords correspondant à deux plans cristallographiques distincts : le plan 1 1 pour les bords dits « S-edge » (bord soufré) et le plan 1 1 pour les bords dits « M-edge » (bord molybdène, notés aussi Mo-edge) dont les stabilités respectives dictent la morphologie des particules depuis un triangle vers un hexagone tronqué (Figure 2).[4,5] Dans un cluster, il y a alternance entre un bord S-edge et Medge, de sorte que le bord S-edge d’une couche soit directement au-dessus du bord Mo-edge de la couche au dessous et vice versa .

Le 1er modèle géométrique portant sur la morphologie 2D des nano-particules de MoS2 a été proposé par Kazstelan et al.

Catalyseurs promus de type CoMoS/γ-Al2O3

Parmi le grand nombre de métaux de transition étudiés dans la littérature, il a été montré que les systèmes Co(Ni)MoS et NiWS constituaient les catalyseurs les plus viables économiquement pour l’HDS.[14] Dans cette partie, seuls les catalyseurs à base de Mo promus par du Co (i.e. CoMoS) seront traités afin de limiter la discussion.

La structure de la phase active des catalyseurs promus a été sujette à de nombreuses controverses surtout quant à la position du cobalt dans le réseau. Ainsi, le modèle d’intercalation[15] a été l’un des premiers à prédire la localisation du cobalt entre deux feuillets de MoS2, mais aussi au niveau des bords des feuillets. Deux autres modèles ont été suggérés un peu plus tard. Dans le premier, une monocouche de sulfoxyde de molybdène serait stabilisée par le cobalt à la surface de l’alumine modèle de la monocouche).[16] Dans le second, le cobalt ferait partie d’une phase sulfurée Co9S8) en contact avec le sulfure de molybdène.

L’augmentation de l’activité du catalyseur serait due à la rétrodonation d’hydrogène adsorbé sur le sulfure de cobalt vers le sulfure de molybdène (modèle de synergie de contact).[17]

Aujourd’hui, le modèle dit « CoMoS » établi par l’équipe de Henrik Topsøe[18–20] au début des années 80, est admis comme étant le modèle structural de référence pour les catalyseurs sulfurés promus. Cette phase mixte est constituée de cristallites de MoS2 sur lesquelles le cobalt vient se placer en décoration sur les bords des feuillets. Le cobalt peut néanmoins se trouver engagé dans d’autres phases telles qu’une phase sulfure de cobalt Co9S8 et une phase spinelle de type CoAl2O4 où le cobalt est incorporé à l’alumine Figure 5).

Il a par ailleurs été montré dans la littérature que les propriétés de la phase CoMoS pouvaient être fortement influencées par la force de l’interaction avec le support. Candia et al., [22] ont ainsi observé qu’une augmentation de la température de sulfuration de 673 à 873 K conduisait à la formation d’une phase CoMoS, qualifiée de Type II, dont l’activité catalytique intrinsèque était supérieure à celle de phases CoMoS formées pour des températures plus basses, qualifiées alors de Type I. Il a été suggéré que l’activité plus faible du Type I serait due à la présence de liaisons fortes Mo-O-Al avec le support et donc à une sulfuration moins importante.

En effet, le molybdène à une forte tendance à interagir avec les hydroxyles de l’alumine lors de la préparation du catalyseur pour former des monocouches très dispersées pour lesquelles la sulfuration et la réduction du molybdène sont difficiles. Les données XPS ont confirmé la présence d’espèces oxysulfure Mo5+) en lien avec le support après la sulfuration du catalyseur à 673 K (Type I).[23] Dans le cas d’une phase de type II, la sulfuration serait plus importante et l’interaction plus faible avec le support serait due uniquement à des liaisons faibles de type van der Waals. L’empilement des feuillets (2 à 5) serait alors favorisé contrairement au type I.[24] La diminution du rapport d’intensité Co/Al en XPS dans ce cas type II converge vers une exposition moins importante du cobalt, car en partie masqué par l’empilement des différents feuillets. Une étude DFT menée par l’équipe de Nørskov a permis de préciser les caractéristiques des phases de type I et de type II.[25] Ces calculs ont tout d’abord montré que les liaisons fortes avec le support (Mo-O-Al) sont concentrées sur les bords S 1 1 , gênant l’incorporation du cobalt qui est généralement localisé sur ces mêmes bords.[13,26–28] Ainsi, sur les bords S-edge il y a compétition entre la formation de liaisons avec le support et l’incorporation de cobalt. Dans le cas où ces bords seraient saturés en cobalt, la formation de nouvelles liaisons avec le support ne sera donc pas possible. La température de sulfuration pour passer du Type I au Type II en sera donc plus basse puisqu’il n’y aura que très peu de liaisons fortes à rompre entre le support et la phase active. Au sein des feuillets de phase active les lacunes de soufre (Coordinatively Unsatured Sites) seraient à l’origine des sites actifs.[4,29–32] Hinnemann et al. [25] ont montré que l’énergie nécessaire à la formation de ces lacunes est plus élevée près des liaisons oxygénées qui se forment entre la phase active et le support (liaisons principalement présentes pour le Type I). Ce coût énergétique pourrait expliquer la plus grande réactivité du Type II où les liaisons oxygénées sont rares ce qui favorise la formation de lacunes au contraire du Type I où ces liaisons sont majoritaires gênant la formation de lacunes. Comme pour le système non promu, les morphologies à l’équilibre des particules CoMoS ont pu être déterminées par modélisation moléculaire grâce au calcul de l’énergie des bords et aux équations de Gibbs-Curie-Wulff.[13] La proportion des bords S-edge et M-edge varie avec les conditions de sulfuration .

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I. Synthèse bibliographique
I.Introduction
II. Description de la phase active
II.1. Catalyseurs non promus de type MoS2/γ-Al2O3
II.2. Catalyseurs promus de type CoMoS/γ-Al2O3
II.3. Morphologie de la phase active : études expérimentales sur substrats plans et poudre
III. Rôle du support sur l’orientation de la phase active
III.1. Effet du support en catalyse d’hydrotraitement
III.2. Orientation de la phase active par rapport au support : études expérimentales
III.3. Orientation de la phase active par rapport au support : études théoriques
III.3.1.Catalyseur de type MoS2/γ-Al2O3
III.3.2.Catalyseur de type CoMo/γ-Al2O3
III.4. A review of surface science approaches for the preparation of aluminasupported hydrotreating catalysts
IV. Conclusion et stratégie expérimentale
Références
Chapitre II. Approche expérimentale
I.Introduction
II. Synthèse de catalyseurs modèles MoS2/-Al2O3
II.1. Matériel
II.2. Procédure de nettoyage
II.3. Dépôt de Mo en excès de solution : adsorption à l’équilibre
II.4. Dépôt de Mo par imprégnation
II.5. Sulfuration des catalyseurs modèles
III. Caractérisation par XPS
III.1. Acquisition et analyse des spectres XPS
III.1.1.Conditions d’acquisition des spectres
III.1.2.Traitement des spectres XPS
III.2. Quantification du dépôt de Mo par spectroscopie XPS
III.2.1.Principe du calcul
III.2.2.Validation de la quantification par XPS
III.3. Analyse de la phase sulfure
III.3.1.Méthodologie
III.3.2.Transfert à l’air des échantillons sulfurés
IV. Spectroscopie d’absorption X : GI-EXAFS
IV.1. Introduction
IV.2. Principe de la spectroscopie EXAFS et GI-EXAFS
IV.3. Polarisation du faisceau X
IV.4. Analyse des catalyseurs modèles
V. Morphologie de la phase active par microscopie
V.1. Microscopie à Force Atomique (AFM)
V.2. Microscopie Electronique en Transmission (MET)
VI. Conclusion
Références
Chapitre III. Catalyseurs modèles de type MoS2/-Al2O3 préparés par adsorption à l’équilibre
Chapitre IV. Catalyseurs modèles de type MoS2/-Al2O3 préparés par imprégnation
I. Introduction
II. Etude de la phase oxyde des systèmes modèles MoOx/Al2O3
II.1. Répartition du Mo : échelle macroscopique
II.1.1.Analyse XPS
II.1.2.Cartographie par fluorescence X
II.2. Dispersion du molybdène : échelle nanométrique
II.2.1.Densité surfacique déterminée par microscopie AFM
II.2.2.Topographie de surface : AFM
II.3. Nature des espèces molybdiques
II.3.1.Degré de condensation : ToF-SIMS
II.3.2.Approche moléculaire de la phase oxyde par GI-EXAFS
II.4. Conclusion sur la phase oxyde des systèmes modèles MoOx/-Al2O3
III. Etude de la phase sulfure des catalyseurs modèles MoS2/-Al2O3
III.1. Effet du support sur la sulfuration : aspects quantitatifs
III.1.1.Suivi de la sulfuration par spectrométrie XPS
III.1.2.Taille et dispersion des feuillets
III.2. XAS : taille et orientation de la phase sulfure
III.2.1.Etude XANES des catalyseurs modèles
III.2.2.Etude EXAFS des catalyseurs modèles
III.2.3.Conclusion
III.3. Conclusion sur la phase sulfure
IV. Influence de la voie de synthèse : adsorption vs imprégnation
IV.1. Influence de la voie de synthèse sur la sulfuration
IV.1.1.Système modèle supporté sur la face A 112
IV.1.2.Système modèle supporté sur la face M 1 1
IV.1.3.Système modèle supporté sur la face R 11 2
IV.2. Complémentarité des deux voies de synthèse
V. Conclusion sur les catalyseurs modèles imprégnés
Références
Conclusion générale

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