Cas des systèmes MX / N / NCS / CN•••X dans les complexes de coordination

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Nature et Caractéristiques de la liaison halogène

Nature de la liaison halogène

Si la liaison halogène a acquis aujourd’hui une vraie reconnaissance qui se traduit par sa mise en œuvre dans de nombreux domaines, sa véritable nature suscite toujours des discussions très animées entre théoriciens. On verra par la suite que ces différences d’analyse sont avant tout liées aux différences entre systèmes, certains avec des liaisons halogène faibles ou normales, d’autres avec des liaisons dites « halogène » mais qui prennent un caractère covalent considérable [7]. L’une des principales sources d’attraction dans une liaison halogène R─X•••B est une interaction électrostatique qui se produit entre le trou σ, une région de potentiel positif (déficit en électrons), située le long de l’extension de la liaison R─X et une base de Lewis électronégative (B). En raison de la grande taille et de la polarisabilité des halogènes, la dispersion joue également un rôle important dans la stabilisation des liaisons halogène. Le trou σ est responsable de la directionnalité des liaisons halogène, bien que la nature de cette directionnalité ne soit pas aussi simple qu’on pourrait le supposer [13].
L’analyse des interactions intermoléculaires existant dans les structures cristallines répertoriées dans la Cambridge Crystallographic Structural Database (CSD) fournit une bonne estimation des géométries adoptées mais seulement des indications qualitatives concernant la force relative et la nature à priori électrostatique et attractive des interactions.
Dans le but d’étudier plus en détail la nature et la géométrie de cette liaison, il est nécessaire de s’intéresser à la distribution de la densité électronique autour de l’atome d’halogène. Des études théoriques et expérimentales ont montré que la densité électronique est distribuée de façon anisotropique autour des atomes d’halogène liés de façon covalente. Ainsi, le rayon atomique de l’atome est plus petit selon l’axe polaire de la liaison C─X (Rmin) que dans la direction perpendiculaire à cet axe (Rmax). Ceci s’explique par l’implication dans la liaison C─X, de l’orbitale p de l’halogène, co-axiale à la liaison et de la non implication des orbitales perpendiculaires à cet axe. Il en résulte l’existence d’une région de potentiel électrostatique positif le long de la liaison covalente appelé «-hole » (Schéma. 1). Ce potentiel positif augmente avec la polarisabilité de l’atome d’halogène, autrement selon l’ordre suivant : F < Cl < Br < I. Le fluor est un cas particulier puisque le potentiel électrostatique autour de cet atome est négatif. Dans les trois autres cas, la région positive est entourée d’un anneau neutre électroniquement puis d’une zone chargée négativement (Fig. 3).
Le caractère anisotrope de l’enveloppe électrostatique de l’halogène lié de façon covalente est qualifié d’aplatissement polaire (ou polar flattening) et est à l’origine de l’interaction entre le pole+ de l’halogène et les électrons ou n du groupement accepteur de liaison halogène [8]. La liaison halogène est donc une interaction attractive de nature majoritairement électrostatique avec une contribution faible du transfert de charges, de la dispersion et de la polarisation. La distribution anisotrope de la densité électronique autour de l’atome d’halogène joue un rôle essentiel dans la nature de la liaison halogène ainsi que dans le caractère directionnel de celle-ci [14], l’un des principales caractéristiques de cette liaison.

Caractéristiques de la liaison halogène

Parmi les interactions intermoléculaires non-covalentes, celles qui ont lieu suivant des directions préférentielles présentent un intérêt fondamental dans le domaine de l’ingénierie cristalline, puisqu’elles conduisent à un agencement moléculaire particulier bien défini et permettent d’établir la relation entre les motifs moléculaires et la structure supramoléculaire cristalline [15]. Parmi les différents types d’interactions intermoléculaires, la liaison halogène est l’une des plus directionnelles qui existent. Elle est aussi efficace que la liaison hydrogène pour guider l’assemblage moléculaire, ce qui est mis à profit dans les domaines de l’ingénierie cristalline et de la chimie supramoléculaire, car l’orientation des molécules à l’état solide peut se prédire raisonnablement [16].
Le terme « interaction halogène » est en général utilisé pour nommer les contacts intermoléculaires entre un atome halogène et un atome X, qui peut être un autre atome halogène ou bien une base de Lewis (typiquement un atome électronégatif possédant une paire d’électrons disponible ou un anion). L’interaction halogène (Fig. 4) se caractérise par :
(i) Une distance Hal•••X plus courte que la somme des rayons de Van der Waals (dHal•••X < rvdw(Hal) + rvdw(X)),
(ii) Une linéarité très remarquable pour les interactions C─Hal•••X (X = base de Lewis),
(iii) Une force d’interaction qui augmente selon la série des halogènes Cl < Br < I [15].
La présence d’un pôle+ et- confère à l’halogène un caractère amphotère du point de vue de la liaison halogène, autrement dit une liaison halogène peut également s’établir entre deux atomes d’halogène, l’un jouant le rôle de base de Lewis et le second celui d’acide de Lewis. Les travaux de G. Jeffrey et coll., [17] ont montré que deux géométries pouvaient alors être rencontrées puis le groupe de G. Desiraju [18] les a classées en géométrie de type I ou de type II. Selon cette définition, dans le cas d’une géométrie de type I, l’angle1, défini par l’axe de la liaison C─X et celui de la liaison halogène est égal ou très proche de l’angle2 défini par l’axe de la seconde liaison C─X et la liaison halogène. Dans le cas de la géométrie de type II, l’angle1 est proche de 90 ° et l’angle2 de 180 ° (Schéma. 2) [19].
Les contacts de type I, moins forts que les contacts de type II, sont généralement considérés comme une conséquence de la symétrie cristalline, les atomes d’halogène étant situés de part et d’autre du centre d’inversion. Les contacts de type II renvoient à la définition première de la liaison halogène où les deux atomes d’halogène ont des rôles distincts, l’un jouant le rôle de base de Lewis (perpendiculaire à la liaison halogène) et le second celui d’acide de Lewis. Il existe également des contacts intermédiaires dits de quasi-type I, intermédiaire à la géométrie de type I, où1-2 < 20 °. On retrouve ce type de géométrie dans le cas d’interactions Cl•••Cl et plus rarement dans le cas d’interactions Br•••Br. Les contacts I•••I sont quant à eux exclusivement de type I ou II. Ceci s’explique par le fait que les effets de polarisation sont plus importants dans les contacts I•••I tandis que les contacts Cl•••Cl sont d’origine anisotropique. Les contacts Cl•••Cl ont d’ailleurs longtemps été source de débats [19].

Étude de cas

Cas des composés aromatiques

Bien que la liaison halogène soit connue depuis le XIXème siècle et qu’elle ait été étudiée depuis plusieurs décennies, les recherches réalisées à ce jour n’ont pas encore permis d’acquérir une compréhension approfondie de l’interaction. Afin d’étudier cette interaction, trois composés chlorés à savoir: l’hexachlorobenzène C6Cl6, le tétrachlorodinitrobenzène C6Cl4N2O4 et le triphénylechlorométhane C19H15Cl ont été choisis. Deux raisons principales expliquent pourquoi ces molécules ont été sélectionnées:
(i) La caractérisation expérimentale de la liaison halogène est plus facilement mise en œuvre avec des halogènes de petite taille, ce qui permet de dégager plus aisément leur comportement dans l’interaction.
(ii) Les structures cristallines des trois composés présentent une bonne variété de liaisons halogène, à savoir des interactions Hal•••Hal (Cl•••Cl), des interactions Hal•••B (Cl•••O), ainsi que des interactions avec des atomes d’hydrogène (Cl•••H) et des interactions avec des électrons π (Cl•••π) [16].

L’hexachlorobenzène : C6Cl6

L’hexachlorobenzène est un composé chimique de formule brute C6Cl6. Il s’agit d’un composé organique aromatique dérivant du benzène C6H6 par substitution des six atomes d’hydrogène par six atomes de chlore. A l’état cristallin, comme il a été montré dans cette étude, la cohésion moléculaire est assurée principalement par des interactions π•••π et Hal•••Hal (Fig. 5). L’objectif principal de ce travail est de caractériser ces interactions [20].

Tétrachlorodinitrobenzène : C6Cl4N2O4

La molécule de tétrachlorodinitrobenzène (C6Cl4N2O4) dérive de l’hexachlorobenzène par substitution de deux atomes de chlore par des groupements nitro NO2. Dans cette structure cristalline, des interactions intermoléculaires de deux types : halogène•••base de Lewis (Cl•••O) et halogène•••halogène (Cl•••Cl) ont été observées. L’unité asymétrique est formée par un quart de la molécule, le reste de la molécule étant générée par deux éléments de symétrie (un miroir m qui est perpendiculaire au cycle benzénique et qui contient les deux groupements nitro et les deux atomes de carbone C2a, C2c, et un axe 2 qui est perpendiculaire au miroir m, passant par le centre de la molécule). La figure 6 montre une vue ORTEP de la molécule C6Cl4N2O4
Dans cette structure cristalline l’interaction Cl•••O la plus courte s’établit entre les atomes Cl1 et O2 (Fig. 7). Ces atomes se trouvent à une distance de 3,0774 Å (la distance et les angles de contact sont donnés dans le tableau 2). Elle est significativement plus courte que la somme des rayons de Van der Waals (rvdwO + rvdwCl = 3,3 Å)

Cas des systèmes MX / N / NCS / CN•••X dans les complexes de coordination

De simples ligands liés au métal, capables de donner des électrons, peuvent également être utilisés comme accepteurs de XB dans la construction de structures supramoléculaires. Les complexes métalliques sont d’un intérêt particulier en raison des possibilités d’utiliser des liaisons halogène comme outil dans la modification du redox, réactivité magnétique, optique et chimique des complexes métalliques [24].

Liaison halogène dans les complexes de PCPPdX•••I2 (X = Cl, Br ou I)

Les halogénures de complexe de pinceaux de palladium {2,6-bis[(di-t-butylphosphino)méthyl]-phényl}palladium (PCPPd), PCPPdX (X = Cl, Br ou I) ont été étudiés par Johnson et Rissanen sous la forme d’accepteur de XB dans les systèmes avec I2 comme donneur de XB [25]. Toutes les trois structures cristallines ont des caractéristiques de base similaires (Fig. 10) . Cependant, la force de la liaison halogène s’est avérée augmenter dans l’ordre Cl ‹Br‹ I, suggérant que les interactions XB sont principalement électrostatiques comme prévu [25]. Les autres contacts intermoléculaires étaient relativement faibles. Il convient toutefois de mentionner cela dans PCPPdI•••I2, l’interaction Pd•••I─I•••π semble également entraîner la formation d’une structure en forme de chaîne. Cela n’a pas été observé dans les deux autres structures.

Liaison halogène dans la structure cristalline de [RuI2(H2dcbpy)(CO)2]•••I2•••(MeOH)•••I2•••[RuI2(H2dcbpy)(CO)2]

Les préférences de liaison des liaisons halogène et hydrogène peuvent également être retrouvées parmi les assemblages de complexes métalliques. Les co-cristaux de [RuI2(H2dcbpy)(CO)2]•••I2 (H2dcbpy = 4,4′-acide dicarboxylique-2,2′-bipyridine), et de méthanol sont des exemples d’un tel système (Fig. 11). Les deux complexes [RuI2(H2dcbpy)(CO)2] sont fortement liés par les liaisons hydrogène entre les groupes acides carboxyliques. Les ligands iodures liés aux centres du ruthénium ne sont impliqués que dans la liaison halogène, étendant ainsi la structure en une bande de complexes métalliques. Les ligands halogénures sont liés par des liaisons halogène via deux molécules I2. Il convient de noter que les liaisons halogène entre les molécules I2 sont bifurquées et que la molécule de solvant soutient la structure via une liaison hydrogène. L’angle de liaison I─I•••I était presque linéaire (167 °) pour le premier I2, mais, en raison de la nature bifurquée, il ne restait que 137,8 ° pour le second contact I•••I2, qui diffère des angles de liaison XB conventionnels [24].

Liaison halogène dans la structure de [Ru(NCS)2(H2dcbpy)2]•••2I2

Tout ligand possédant une paire d’électrons libres peut être considéré comme un accepteur potentiel de liaison halogène. Le thiocyanate lié à N dans le cis -diisothiocyanato-bis(2,2′-bipyridyl-4,4′-dicarboxylato) ruthénium(II) fournit un exemple d’un tel ligand. La structure de l’adduit [Ru(NCS)2(H2dcbpy)2]•••2I2 (Fig. 12) a été obtenue à température ambiante en mélangeant I2 et le complexe dans du méthanol. Dans cette structure, l’atome de soufre d’un des ligands thiocyanate forme des liaisons halogène bifurquées avec deux molécules I2. Selon les distances, ces liaisons bifurquées sont plus faibles que celles non bifurquées [24].

Les cyanométallates comme accepteurs de liaison halogène

Ormond-Prout et coll., ont proposé que les liaisons halogène puissent être utilisées pour prédire et contrôler le processus d’auto-assemblage et pour affiner les propriétés électroniques des cyanométallates [26]. Pour confirmer cette hypothèse, ils ont synthétisé deux types de sels d’hexacyanométallate d’halopyridinium, (3-XpyMe)3[M(CN)6] et (3,5-X2pyMe)3[M(CN)6] (X = I, Br; 3-XpyMe = N -méthyl-3-halogénopyridinium ; 3,5-X2pyMe = N -méthyl-3,5-dihalogénopyridinium; M = Cr, Fe, Co) [26]. Ces auteurs ont récolté un total de douze cristaux, et ont découvert que cinq des six membres de chaque famille de composés étaient isostructuraux. Tandis que les deux autres structures (3-IpyMe)3[Fe(CN)6]∙2MeCN(2∙2MeCN) et (3,5-Br2pyMe)3[Cr(CN)6]∙4H2O(10∙4H2O) étaient les solvates. Les distances de liaison halogène dans ces structures étaient plus courtes que la somme des rayons de van der Waals. Dans le cas de (3,5- Br2pyMe)3[Cr(CN)6]∙4H2O(10∙4H2O), une faible liaison halogène supplémentaire C─Br•••O a été trouvée, ce qui peut être attribué à la compétition entre la liaison halogène et la liaison hydrogène O─H•••N. La géométrie presque linéaire des liaisons halogène CN•••X trouvées dans toutes les structures suggère que ces interactions impliquaient principalement la paire d’électrons libres de l’atome d’azote, mais que ces structures contenaient un autre type de liaison halogène avec un contact CN•••X moins linéaire (CN•••X < 105 °). De tels angles indiquent que la triple liaison entre C et N contribue à l’interaction de liaison halogène conduisant au contact X•••π (Fig. 13). Dans cette série, la force des liaisons halogène dépendait du centre métallique (Cr < Fe < Co). Ceci est un bon exemple de la façon dont le centre métallique peut être utilisé pour la modification des liaisons halogène. Dans cet exemple particulier, la principale raison du comportement différent des différents métaux a été attribuée au don de retour π de cyanure métallique [26].

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Table des matières

INTRODUCTION
I. Définition
II. Nature et Caractéristiques de la liaison halogène
1. Nature de la liaison halogène
2. Caractéristiques de la liaison halogène
III. Étude de cas
1. Cas des composés aromatiques
a. L’hexachlorobenzène : C6Cl6
b. Tétrachlorodinitrobenzène : C6Cl4N2O4
c. Triphénylechlorométhane : C19H15Cl
2. Cas des systèmes MX / N / NCS / CN•••X dans les complexes de coordination
a. Liaison halogène dans les complexes de PCPPdX•••I2 (X = Cl, Br ou I)
b. Liaison halogène dans la structure cristalline de [RuI2(H2dcbpy)(CO)2+•••I2•••(MeOH)•••I2•••*RuI2(H2dcbpy)(CO)2]
c. Liaison halogène dans la structure de [Ru(NCS)2(H2dcbpy)2]•••2I2
d. Les cyanométallates comme accepteurs de liaison halogène
CONCLUSION
Références

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