Caractérisation polyphasique de la zone de transition dans un réservoir pétrolier carbonaté

La mouillabilité et ses généralités

Il a longtemps été considéré que les réservoirs d’hydrocarbures étaient d’une mouillabilité franche à l’eau et qu’elle n’était pas altérée avec le temps. L’influence de la mouillabilité dans l’évaluation de la récupération d’hydrocarbures des réservoirs pétroliers a donc longtemps été négligée, tandis que cette dernière semble y jouer un rôle très important, notamment sur les valeurs de saturations résiduelles, de perméabilités relatives et de pression capillaire et donc sur l’estimation du potentiel de récupération comme le montrent des études de la littérature(Morrow et al., 1986; Donaldson et al., 1971). Faute de données expérimentales, de nombreux modèles de simulation des propriétés d’écoulements existants n’intègrent pas encore très bien ce phénomène. On se limitera dans cette étude qu’aux systèmes diphasiques.
On peut définir la mouillabilité de deux manières en fonction de l’échelle d’observation, selon si l’on s’intéresse à l’échelle du pore (surface) ou du milieu poreux (carotte). Pour une surface solide, la mouillabilité représente la tendance qu’a une phase fluide, à s’étaler ou adhérer à cette surface. Elle est mesurée dans ce cas par l’intermédiaire de l’angle de mouillage formé par le fluide sur ladite surface. A l’échelle du milieu poreux, elle est mesurée différemment par l’intermédiaire des volumes déplacés pendant l’écoulement.
On distingue pour les deux échelles :
Mouillabilité franche à une phase (à l’eau ou à l’huile) : C’est la forte préférence d’attraction d’une phase sur les surfaces solides en dépit des autres phases. Les roches de réservoirs sont considérées de mouillabilité franche à l’eau avant la migration d’hydrocarbures. Toutes les parois sont dès lors tapissées de films d’eau.
Une goutte d’eau déposée sur une surface solide de mouillabilité franche à l’eau présente un angle de contact faible avec la surface solide différemment d’une goutte d’huile qui présentera un angle de contact élevé avec la même surface solide .
Mouillabilité intermédiaire (à l’échelle de la paroi solide): C’est le cas où l’attraction des phases en présence est relativement identique pour la surface solide. Elle correspond à des angles de contact proches de 90° entre les fluides et la surface solide.
Mouillabilité mixte (à l’échelle du milieu poreux) : Se dit d’un milieu poreux dont les différentes parties du milieu ont des mouillabilités surfaciques relativement différentes (mouillabilité soit à l’eau ou soit à l’huile). Les réservoirs pétroliers sont généralement de mouillabilité mixte (Cuiec, 2001). A une très petite échelle, au niveau de l’interface entre le fluide et la surface, les facteurs influençant la mouillabilité sont: la nature des surfaces solides, la composition des différentes phases en contact et les conditions de température et de pression. Quand l’écoulement a lieu dans un milieu poreux, la mouillabilité est définie à l’échelle du milieu poreux et évaluée par des mesures spécifiques.

Piégeages des phases en milieu poreux

Définition du piégeage des phases

Étant donné la géométrie complexe des milieux poreux naturels, il se produit durant l’écoulement une immobilisation d’une certaine fraction des phases présentes. Cette immobilisation est caractérisée par la saturation irréductible et la saturation résiduelle qui sont définies ci-dessous : La saturation irréductible représente la saturation minimale de la phase mouillante qu’un milieu poreux (de perméabilité et porosité définies) peut retenir durant l’écoulement de la phase non mouillante. Lors de la migration des hydrocarbures, cette eau irréductible se met en place et est maintenue sous l’effet des forces capillaires. A l’échelle du pore, elle se retrouve sous forme de films d’eau sur les parois des pores.
La saturation résiduelle est la saturation minimale de la phase non mouillante obtenue après imbibition forcée de la phase mouillante dans le milieu poreux. La conception du piégeage de cette phase est différente de celle de la phase mouillante. Étant non mouillante, elle est repoussée par la surface des parois. Les mécanismes de piégeage des phases non mouillantes qui interviennent sont à l’origine des hystérésis observées sur les propriétés d’écoulement.

Mécanismes de piégeage

De nombreuses études ont tenté de mettre en évidence l’influence des propriétés pétrophysiques (porosité et perméabilité) sur les saturations résiduelles. La majorité des expériences d’écoulements effectuées ont utilisé le gaz comme fluide non mouillant. Il en ressort qu’il n’existe pratiquement pas de relations claires liant les perméabilités aux saturations résiduelles mais par contre on observe une certaine tendance avec la porosité.
Pentland (2010) a recensé de nombreux résultats expérimentaux qui ont porté sur l’évaluation de la saturation résiduelle atteinte (après mise en place de la saturation irréductible) en fonction de la porosité. Malgré une large distribution des valeurs de saturations résiduelles, on observe tout de même une tendance qui confirme que plus le milieu est poreux, plus on récupère en production de la phase non mouillante. A l’échelle du pore, le phénomène de piégeage est différent. Dans le cadre de notre étude, on parlera essentiellement du piégeage de la phase huile. Ce piégeage est illustré à l’échelle du pore par deux mécanismes relativement simples : le modèle du doublet et le snap-off.

Définition d’hystérésis

L’hystérésis d’une grandeur physique se traduit par le fait que sa valeur dépend de son historique. Ce phénomène est particulièrement important lors d’écoulements polyphasiques en milieu poreux. Il est dû à plusieurs causes physiques qui interviennent tant à l’échelle du pore (angle de contact) qu’à l’échelle locale (piégeage des phases, mouillabilité, etc.). La conséquence directe de ce phénomène est que les grandeurs physiques telles que les perméabilités relatives et les pressions capillaires peuvent, pour une même valeur de la saturation, prendre plusieurs valeurs, en fonction de leur historique (drainage ou imbibition).
La prise en compte de ce phénomène est très importante pour les écoulements dans les réservoirs et ceci est particulièrement vrai dans la zone de transition où la saturation en eau varie de sa valeur maximale (au FWL) jusqu’à la saturation irréductible Swi. Lors d’un « waterflooding » (injection d’eau secondaire), selon la hauteur à laquelle on se trouve dans la zone de transition, la saturation en huile résiduelle dépendra fortement de la saturation initiale en huile. Si ce phénomène d’hystérésis doit être pris en compte, il doit être aussi couplé à l’évaluation de la mouillabilité de la roche. Cette prise en compte apparait délicate dans la zone de transition où la saturation en huile varie de façon continue. Si on peut admettre que la partie basse du réservoir (où la saturation en huile est nulle) est mouillable à l’eau, il sera plus difficile de faire des hypothèses pour la partie supérieure du réservoir ou le volume d’huile est plus important et varie avec la hauteur.

Hystérésis de perméabilité relative

Influence de la mouillabilité sur les perméabilités relatives

La perméabilité relative est une mesure directe de la capacité du milieu poreux à laisser s’écouler des fluides à travers son réseau de pores. Cette propriété étant contrôlée par la distribution spatiale des phases, la mouillabilité aura donc un effet sur les perméabilités relatives.
De multiples études ont évoqué une même évolution du comportement des perméabilités relatives avec la mouillabilité. Quand on passe d’un milieu de mouillabilité franche à l’eau à un milieu de mouillabilité à l’huile, la perméabilité relative à l’huile décroit pour une même saturation tandis que celle à l’eau augmente, comme l’a schématisé Raza et al.(1968) par une illustration simple de l’effet de la mouillabilité sur l’écoulement à l’échelle du pore (la phase non mouillante se déplace plus facilement au centre des pores et quand elle devient mouillante, son écoulement devient plus difficile) ou encore les résultats expérimentaux de Owens & Archer (1971).

Modèles hystérétiques de perméabilité relative

Les modèles empiriques les plus présents dans la littérature sont ceux de : Killough (1976), Carlson (1981) et de Skjaeveland et al. (1999). Nous évoquerons aussi le modèle de simulation de réseau de pores de Spiteri (2005). Dans la suite du document, Krow désignera les perméabilités relatives à l’huile et Krw, les perméabilités relatives à l’eau. Kr sera utilisé pour les perméabilités relatives en général.
Modèle hystérétique de Kr de Carlson (1981) :Le modèle hystérétique de perméabilités relatives de Carlson ne requiert expérimentalement que :
D’une courbe de drainage primaire. De l’historique de la saturation maximale de la phase non mouillante. Le modèle n’est conçu que pour générer les courbes de perméabilité relative en imbibition de la phase non mouillante (huile). En drainage primaire, la phase non mouillante (huile) s’écoule de façon continue. Lors de l’imbibition de la phase mouillante (eau), une fraction de la phase non mouillante reste piégée comme il a été montré précédemment. Tant qu’on a production de l’huile lors de l’imbibition, cette dernière (l’huile) reste donc constituée d’une phase mobile et d’une phase piégée.
Il stipule que, toute saturation en huile (So) choisie sur la courbe d’imbibition à générer, correspond au cumul d’une saturation mobile Sof calculée sur la courbe de drainage primaire (par égalité des perméabilités relatives en imbibition à So et en drainage primaire à Sof) et à une saturation Sot piégée (déterminées par la loi de Land) qui est la différence entre So et Sof.
Modèle hystérétique de Kr de Spiteri (2005) :Ce modèle numérique utilise pratiquement le même principe que celui de Carlson (1981). Les différences résident sur la loi de piégeage utilisée et sur la prise en compte de la mouillabilité par variation des angles de contact.

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Table des matières

Introduction générale 
Chapitre 1 :Physique de l’écoulement en milieu poreux et introduction à la mouillabilité
1.1. Caractéristiques générales des écoulements en milieu poreux
1.1.1. Notion d’échelle
1.1.2. Ecoulements monophasiques
1.1.3. Ecoulements polyphasiques
1.2. Définition d’interface, de tension interfaciale et de mouillage
1.2.1. Tension Interfaciale
1.2.2. Notion de mouillage
1.3. Pression capillaire (Pc) et généralités 
1.3.1. Définitions
1.3.2. Mesures de pression capillaire
1.3.2.1. Mesure de Pc par injection de mercure (Méthode de Purcell)
1.3.2.2. Mesure de Pc par déplacement air-saumure
1.3.2.3. Mesure de Pc par centrifugation
1.3.3. Modèles empiriques de pression capillaire
1.3.3.1. Modèle de Brooks et Corey (Brooks & Corey, 1964)
1.3.3.2. Modèle de Van Genuchten (Van Genuchten, 1980)
1.4. Perméabilités relatives (Kr) et généralités
1.4.1. Définitions
1.4.2. Méthodes de détermination des perméabilités relatives
1.4.2.1. Méthode de détermination des Kr par déplacement
1.4.2.2. Méthode de détermination des perméabilités relatives par écoulements permanents
1.4.3. Modèles de perméabilités relatives
1.4.3.1. Modèle de Wyllie & Gardner (Wyllie & Gardner, 1958)
1.4.3.2. Modèle de Burdine (Burdine, 1953)37
1.4.3.3. Modèle de Fatt (Fatt et al., 1951)
1.4.3.4. Modèle de Brooks & Corey (Corey, 1994)
1.4.3.5. Modèle L.E.T (Lomeland et al., 2005)
1.5. La mouillabilité et ses généralités 
1.5.1. Définitions
1.5.2. Bibliographie sur l’altération de la mouillabilité
1.5.3. Méthodes de détermination de la mouillabilité
1.5.3.1. Détermination de la mouillabilité par angle de Contact
1.5.3.2. Méthode de mesure USBM (United States Bureau of Mines)
1.5.3.3. Méthode Amott-Harvey et Amott-IFP
1.6. Conclusion partielle
Chapitre 2 :Hystérésis et Influence de la mouillabilité sur les écoulements en milieu poreux
2.1. Piégeages des phases en milieu poreux
2.1.1. Définition du piégeage des phases
2.1.2. Mécanismes de piégeage
2.1.2.1. Mécanisme du doublet (Moore & Slobod, 1956)
2.1.2.2. Mécanisme du snap-off
2.1.3. Modèles empiriques de piégeage
2.2. Hystérésis des propriétés d’écoulement
2.2.1. Définition d’hystérésis
2.2.2. Hystérésis de la pression capillaire
2.2.2.1. Influence de la mouillabilité sur les pressions capillaires
2.2.2.2. Modèles d’hystérésis de pression capillaire
2.2.3. Hystérésis de perméabilité relative
2.2.3.1. Influence de la mouillabilité sur les perméabilités relatives
2.2.3.2. Modèles hystérétiques de perméabilité relative
2.3. Conclusion partielle
Chapitre 3 :Étude et procédure expérimentale
3.1. Projet expérimental
3.1.1. Les milieux poreux
3.1.1.1. Le calcaire de Richemont
3.1.1.2. Le calcaire d’Estaillade
3.1.1.3. Dimensionnement et montage des milieux poreux
3.1.2. Fluides
3.1.3. Dispositifs expérimentaux
3.2. Mesures expérimentales
3.2.1. Mesures de porosité
3.2.2. Mesures de compressibilité des échantillons saturés
3.2.3. Mesures de perméabilités absolues et effectives
3.2.4. Mesures de saturations et production
3.3. Procédure expérimentale
3.3.1. Préparation des échantillons
3.3.2. Expériences d’écoulements monophasiques
3.3.3. Tests Amott-IFP
3.3.4. Écoulements diphasiques
3.3.4.1. Écoulement diphasique avec de l’huile minérale
3.3.4.2. Écoulement diphasique avec de l’huile brute
3.3.5. Procédure et résultats détaillés pour le calcaire de Richemont Ri2
3.3.5.1. Caractérisation du calcaire de Richemont (Ri2)
Dans toutes les procédures de mesure gamma, nous avons effectué pour tous les échantillons, des comptages de 6 min
3.3.5.2. Expérience de co-injection huile-eau sur Ri3
Chapitre 4 :Résultats expérimentaux et numériques, Analyses et discussions
4.1. Ensemble des résultats expérimentaux
4.1.1. Propriétés pétrophysiques des échantillons
4.1.2. Résultats obtenus en mouillabilité franche à l’eau et analyses
4.1.2.1. Calcaire de Richemont (Ri0)
4.1.2.2. Calcaire d’Estaillade (Esta0)
4.1.2.3. Analyses des courbes de perméabilités relatives
4.1.3. Résultats de Tests de mouillabilité avec l’huile brute aux Swi
4.1.4. Résultats expérimentaux en mouillabilité altérée et analyses
4.1.4.1. Résultats expérimentaux des échantillons de Richemont et analyses
4.1.4.2. Résultats expérimentaux des échantillons d’Estaillade et analyses
4.1.4.3. Analyse générale et comparative des résultats, discussions
4.2. Résultats numériques, Analyses et discussions
4.2.1. Résultats numériques du modèle de Carlson et analyses
4.2.2. Résultats numériques du modèle de Killough et analyses
4.2.3. Résultats numériques du modèle de Spiteri et analyses
4.2.4. Résultats numériques du modèle de Skjaeveland et analyses
4.2.5. Analyse globale des résultats numériques
4.2.6. Proposition d’un nouveau modèle d’hystérésis
4.2.6.1. Construction des Krow en zone de transition
4.2.6.2. Construction des Krw en zone de transition
4.2.6.3. Résultats du modèle d’hystérésis
Chapitre 5 :Conclusions et perspectives

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