Caractérisation par diffusion de second harmonique de nanocristaux pour l’imagerie biomédicale

Depuis plusieurs années, les avancées médicales et technologiques réalisées dans le cadre de la recherche contre le cancer ont nettement augmenté les chances de survie et de guérison face à cette maladie. Cependant, elle reste l’une des premières causes de mortalité en Europe avec environ 1,7 millions de décès chaque année  et des progrès restent à accomplir en termes de prévention, de diagnostic précoce et de prise en charge. Dans ce contexte, les avancées récentes en synthèse, stabilisation et fonctionnalisation de nanomatériaux ont permis de développer des marqueurs de taille nanométrique compatibles avec les milieux biologiques, permettant ainsi d’envisager des avancées majeures pour le diagnostic précoce et le suivi du traitement de telles maladies .

Par ailleurs, les récents progrès dans le domaine de l’imagerie optique sont importants et ouvrent de nombreuses possibilités en termes d’applications pour la biologie et la médecine. En effet, la large diffusion de techniques telles que la microscopie confocale et la microscopie multiphotonique couplée au développement de marqueurs fluorescents est à l’origine de progrès significatifs en imagerie biomédicale. Cependant, l’utilisation de ces techniques basées principalement sur la fluorescence présente certaines limitations. L’autofluorescence des tissus a tendance à réduire le contraste optique, le temps d’observation est souvent restreint à des durées de l’ordre de quelques dizaines de minutes en raison du photoblanchiment des marqueurs organiques et des inconvénients tels que le clignotement de la fluorescence peuvent apparaître avec l’utilisation de nanocristaux semi-conducteurs, appelés Quantum Dots (ou boîtes quantiques). Ces derniers présentent également une toxicité élevée qui peut les exclure de certaines applications biologiques, en particulier in vivo. Enfin, pour les marqueurs organiques, la toxicité générée par des effets de photodégradation chimique peut être également problématique .

Face à ces limitations, une nouvelle génération de sondes optiques à propriétés optiques non linéaires est en cours de développement. Il s’agit de nanocristaux de structure cristalline non-centrosymétrique qui ont la particularité de générer un rayonnement à la fréquence double lorsqu’ils sont soumis à un flux incident intense. En microscopie multiphotonique, l’exploitation de ce processus, appelé génération de second harmonique (GSH), offre de nouvelles possibilités en termes de suivi sur de longues durées et de profondeur de pénétration dans les tissus biologiques . En effet, la génération de second harmonique est un phénomène non résonant, limitant ainsi la photodégradation des marqueurs et permettant leur suivi sur de longues durées. De plus, ce processus optique est relativement indépendant de la longueur d’onde d’excitation, ce qui permet de travailler dans le proche infrarouge. Dans cette gamme spectrale les tissus biologiques absorbent peu. On augmente ainsi la profondeur d’imagerie tout en diminuant l’énergie lumineuse déposée dans l’échantillon.

Optique Non Linéaire et Génération de Second Harmonique

L’Optique Non Linéaire (ONL) correspond à l’étude de la réponse optique des matériaux lorsqu’ils sont soumis à une lumière très intense. L’ONL est un domaine qui est apparu peu après l’invention du laser et la première observation de Génération de Second Harmonique (GSH) par Franken et al. date de 1961 [Franken 61]. Dans un premier temps, nous présenterons une courte description des phénomènes ONL, nous permettant d’introduire les formalismes que nous utiliserons par la suite. Ensuite, nous décrirons de manière plus précise les propriétés ONL de second ordre, qui sont à l’origine de la Génération de Second Harmonique. Enfin, nous nous intéresserons en particulier à la GSH au niveau microscopique, ce qui permettra de mieux saisir les enjeux des études propres aux nanocristaux.

Introduction à l’optique non linéaire 

➤ Interaction lumière-matière
Les phénomènes optiques non linéaires sont dus aux interactions lumière-matière lorsque le champ électromagnétique incident est intense. Un matériau soumis à une onde lumineuse correspond à un ensemble de charges qui oscillent sous l’effet d’un champ incident. Ce champ va entraîner l’apparition de dipôles électriques, créant ainsi une polarisation macroscopique dans le matériau. Chacun de ces dipôles en vibration émet à son tour un rayonnement. A l’échelle macroscopique, la somme de ces rayonnements est à l’origine d’une nouvelle onde électromagnétique qui s’ajoute à l’onde incidente.

➤ De l’optique linéaire à l’optique non linéaire
En optique linéaire, la polarisation macroscopique P du matériau générée par un champ E est proportionnelle à ce champ.

➤ Conventions, notations, unités
Nous introduisons ici une autre notation caractérisant les propriétés ONL de second ordre, qui sera utilisée préférentiellement dans ce manuscrit : le coefficient non linéaire d ou sa notation tensorielle dijk. Celle-ci est généralement utilisée dans les conditions de Kleinman et est reliée au tenseur χ (2) par un facteur qui varie selon la convention. Les conventions utilisées dans la littérature pour décrire les processus optiques non linéaires peuvent varier d’un groupe à l’autre.

Applications en biologie : marquage et imagerie

La seconde partie de ce chapitre est destinée à présenter l’intérêt et les enjeux de l’utilisation de nanoparticules GSH en imagerie biomédicale, afin de mieux appréhender les motivations de ce travail de recherche. Nous nous intéresserons dans un premier temps à la microscopie multiphotonique qui est une technique novatrice pour imager les milieux biologiques. Après en avoir exposé le principe et les enjeux, quelques exemples d’applications seront présentés de manière à illustrer la portée de cette technique, puis l’utilisation de marqueurs pour l’imagerie optique sera abordée. La seconde partie portera sur le marquage biologique par des nanoparticules GSH en faisant état des avantages de ces marqueurs dans ce contexte, des technologies utilisées, des types de nanoparticules et enfin des résultats obtenus à ce jour. Nous terminerons par une présentation succincte d’autres types de marqueurs qui, bien que non étudiés dans le cadre de ce travail, nous semblent pertinents pour le développement de l’imagerie biomédicale.

Microscopie multiphotonique

Principe et enjeux en imagerie biomédicale

En biologie, la microscopie optique classique est habituellement confrontée à des difficultés telles que l’endommagement des échantillons par photo-dégradation, la difficulté à imager en profondeur ou encore la résolution spatiale. La microscopie confocale [Shotton 89] a permis de contourner certains obstacles. En particulier, la résolution spatiale est améliorée au moyen de trous confocaux, dont l’un permet de limiter l’angle d’excitation et l’autre, utilisé pour la détection, laisse passer uniquement la lumière issue d’un point précis de l’échantillon. Couplée à un système de balayage, la microscopie confocale permet alors de reconstruire une image de l’échantillon en trois dimensions avec une résolution élevée. Plus récemment, une nouvelle technique de microscopie est apparue suite aux travaux de [Denk 90] : la microscopie multiphotonique. Cette technique offre de nouvelles possibilités en terme d’imagerie, grâce notamment à l’utilisation de différents processus optiques tels que la fluorescence à deux-photons (2PF, pour « 2-Photon Fluorescence ») et à 3 photons (3PF), les phénomènes optiques non linéaires comme la GSH, la génération de troisième harmonique (GTH) ou le mélange quatre ondes (FWM, pour « four wave mixing »), et la diffusion Raman, qu’elle soit cohérente (CARS, pour « Coherent Anti Stokes Raman Scattering ») ou stimulée (SRS, pour « Stimulated Raman Scattering ») [Zipfel 03]. Comme décrit ci-après, la microscopie multiphotonique est très prometteuse dans le domaine des applications biomédicales.

➤ Principe
Une manière assez simple de décrire le principe de la microscopie multi-photonique consiste à se baser sur la comparaison des phénomènes de fluorescence et de fluorescence à deux-photons. La fluorescence est un phénomène optique de type luminescent. Elle est émise par des matériaux ou molécules dans lesquelles certaines transitions entre deux états électroniques peuvent s’effectuer par absorption ou émission de photons.

Dans un premier temps, l’absorption d’un photon entraîne la transition de l’état électronique fondamental ou initial à l’état excité. Un phénomène de relaxation vibrationnelle, de type non radiatif, peut se produire de manière à atteindre le niveau le plus bas de l’état électronique excité. Enfin, une dernière transition est nécessaire pour retrouver l’état de plus faible énergie. Lorsque cette désexcitation s’effectue par l’émission d’un photon, c’est ce que l’on appelle l’émission de fluorescence. L’énergie de ce photon est prédéfinie puisqu’elle est déterminée par la transition énergétique entre les deux états mis en jeu.

➤ Enjeux
Les enjeux en imagerie biomédicale sont nombreux puisque les avantages de la microscopie biphotonique permettent de repousser les limites actuelles de la microscopie classique. Dans cette partie, nous détaillons ces avantages. On peut citer tout d’abord l’amélioration de la résolution spatiale. En effet, les conditions selon lesquelles deux photons de même énergie doivent arriver en même temps impliquent une plus faible probabilité d’excitation. Cette faible probabilité doit être compensée par une intensité d’excitation élevée, ce qui est fait au moyen d’un faisceau laser focalisé. Le processus optique est alors limité spatialement par l’intensité d’excitation: il reste confiné au point focal. Cette région étant inférieure à la limite de diffraction, la résolution spatiale ainsi obtenue est meilleure que celle obtenue en microscopie confocale. Un système de balayage complémentaire permet, comme en microscopie confocale, d’obtenir une image complète d’un échantillon avec une résolution spatiale très élevée.

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Table des matières

Introduction
1 Génération de Second Harmonique de nanoparticules et applications en imagerie biomédicale
I Optique Non Linéaire et Génération de Second Harmonique
I.1 Introduction à l’optique non linéaire
I.2 Propriétés ONL de second ordre
I.2.a Susceptibilité non linéaire d’ordre 2
I.2.b Symétrie cristalline
I.3 Moment dipolaire induit et polarisabilité moléculaire
II Applications en biologie : marquage et imagerie
II.1 Microscopie multiphotonique
II.1.a Principe et enjeux en imagerie biomédicale
II.1.b Exemples d’applications
II.1.c Marqueurs optiques luminescents
II.2 Marqueurs GSH : état de l’art
II.2.a Intérêts des marqueurs GSH pour l’imagerie biomédicale
II.2.b Microscopie de GSH : technologie
II.2.c Marqueurs : synthèse et fonctionnalisation
II.2.d Applications des marqueurs GSH pour l’imagerie biologique
II.3 Alternatives
II.3.a Nanodiamants fluorescents
II.3.b Upconversion
III Conclusion
2 Diffusion Hyper-Rayleigh ou de second harmonique : principe et configuration expérimentale
Introduction
I Principe de la technique de diffusion Hyper-Rayleigh
I.1 Généralités
I.2 Détermination théorique du signal de diffusion
I.3 Mesures résolues en polarisation
I.4 Méthodes de caractérisation des coefficients ONL
I.4.a Détermination des coefficients moyens < β >
I.4.b Détermination des coefficients indépendants βij
I.5 Conclusion
II Mesures HRS sur des nanocristaux
II.1 Application de la théorie HRS aux nanocristaux
II.1.a Caractérisation HRS de nanocristaux dans la littérature
II.1.b Notion d’hyperpolarisabilité effective d’un nanocristal
II.2 Coefficients moyens <β> et <d> : méthode par référence externe appliquée aux
particules
II.3 Coefficients indépendants dij
II.3.a Méthode du rapport de dépolarisation
III Système expérimental
III.1 Description du banc d’optique
III.2 Système de détection et d’acquisition
III.3 Limite expérimentale de détection
III.3.a Optique et détection
III.3.b Signal HRS de référence
III.3.c Zone sondée par le laser
III.3.d Estimation de la limite de détection pour des suspensions
IV Préparation et caractérisation de suspensions de nanocristaux
IV.1 Préparation de suspensions colloïdales
IV.2 Caractérisations des suspensions
IV.2.a Taille des nanoparticules
IV.2.b Diffraction des Rayons X (DRX)
IV.2.c Forme et aspect des nanoparticules
IV.2.d Concentration des suspensions
IV.2.e Stabilité des suspensions
IV.3 Préparation d’une solution de para-nitroaniline
V Conclusion
3 Efficacités optiques moyennes des nanocristaux
I Présentation des différentes particules
I.1 BaTiO3
I.2 KNbO3
I.3 KTP
I.4 LiNbO3
I.5 ZnO
II Exemple détaillé des nanocristaux de KNbO3
II.1 Préparation des échantillons et mesure de taille
II.2 Détermination de la concentration
II.3 Mesure du signal HRS
II.4 Calcul des coefficients moyens
III Validité du protocole
III.1 Signal HRS
III.1.a Optique
III.1.b Luminescence et signaux parasites
III.1.c Stabilité des échantillons de référence
III.1.d Stabilité des suspensions
III.1.e Agrégation
III.1.f Régime de Rayleigh
III.1.g Absorption et diffusion
III.2 Mesures de taille des nanoparticules
III.2.a Effet de la polydispersité
III.2.b Agrégats
III.2.c Forme des particules
III.3 Mesure de concentration des particules
Conclusion

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