Caracterisation chimique et biologique des principes antibacteriens

Les maladies infectieuses (peste, syphilis, choléra, tuberculose, variole, diphtérie, grippe, etc…) figurent parmi les premières causes de mortalité humaine dans le monde. Elles sont provoquées par des virus, des bactéries, des parasites ou des champignons. Elles affectent également les animaux et les végétaux. Elles sont responsables de 17 millions de décès par an dans le monde, ce qui représente un tiers de la mortalité. Plus de 90% de ces maladies surviennent dans les pays en développement. Elles représentent 43% des décès dans les pays en voie de développement, contre 1% dans les pays industrialisés (Rapport OMS, 1998). Les facteurs responsables de ces maladies sont surtout la mauvaise hygiène, la malnutrition et l’insuffisance de soins. La plupart (90%) des décès par maladies infectieuses dans le monde sont essentiellement dues à 6 maladies, à savoir les maladies respiratoires aiguës bactériennes et virales, le SIDA, les maladies diarrhéiques, la tuberculose, le paludisme et la rougeole. A Madagascar, par exemple, les maladies diarrhéiques sont la première cause de mortalité infantile. Et elles sont plus fréquentes en milieu rural du fait de l’insuffisance d’infrastructures sanitaires (problème d’hygiène, difficulté d’accès aux soins, coût des médicaments,…). En plus de leur rôle dans l’étiologie de plusieurs maladies humaines et animales, les microorganismes (bactéries, champignons,…) pathogènes ou d’altération, représentent des risques majeurs pour la sécurité des aliments et constituent ainsi un handicap pour le développement du secteur agroalimentaire. Cependant, tous les microorganismes ne sont pas à l’origine de maladies, et ne doivent donc pas être considérés comme des menaces pour les êtres vivants. Au contraire, à plus d’un titre, ils sont très utiles. A titre d’illustration, rappelons que les bactéries jouent des rôles importants dans le traitement des eaux usées, dans les processus fermentaires en agroalimentaire (fabrication de yaourt, de fromage, de diverses boissons tels le vin et la bière etc…) et dans la production industrielle de nombreux composés chimiques comme les médicaments (les bactéries constituent la première source d’antibiotique connue).

Malgré leur utilité, la lutte contre les germes pathogènes et d’altération est devenue impérative à la fois pour la santé et le développement économique compte tenu de leur activité pathogène. Cependant, à cause de leur coût relativement élevé, les antibiotiques restent hors de portée de la grande majorité des populations. Par ailleurs, leur utilisation massive ou abusive a rendu des bactéries de plus en plus résistantes à ces médicaments.

L’homme, pour sa protection, a depuis les temps anciens, recouru à des plantes pour se protéger contre les germes pathogènes. Parmi ces plantes, on peut citer (BOITEAU, 1993) :
– Buddleja madagascariensis Lam. (BUDDLEJACEES – LOGANIACEES), la décoction de la plante servait à préparer de grands bains dans lesquels les personnes qui avaient été en contact avec des varioleux sont plongées, à titre prophylactique. Elle possède des propriétés désinfectantes et antibiotiques.
– Helichrysum gyminocephalum Humbert (ASTERACEES) est utilisée en sirop préparé à partir de feuilles et de sucre pour soigner les aphtes, la gingivite et les ulcères.
– Crinum firmifolium Baker (AMARYLLIDACEES), les bulbes râpés sont utilisés en friction pour détruire les sarcoptes de la gale.
– Pittosporum senacia (PITTOSPORACEES), l’essence du fruit jouit de propriétés antibiotiques.
– Capsicum frutescens Linné (SOLANACEES), l’extrait de piment a une action antibiotique vis-à-vis des levures (inhibition de la fermentation) et de plusieurs bactéries.

Les propriétés antimicrobiennes des plantes ont été reconnues empiriquement durant des siècles, mais n’ont été confirmées scientifiquement que relativement récemment. Plusieurs chercheurs, orientés par l’usage populaire des espèces natives, ont étudié les propriétés antimicrobiennes de plantes originaires de diverses régions du monde. Par ailleurs, les microorganismes qui nuisent à la santé humaine et vétérinaire se montrent toujours plus résistants à la majorité des antimicrobiens connus, ce qui a encouragé d’autant plus la recherche d’antimicrobiens d’origine naturelle. Madagascar dispose d’une biodiversité végétale remarquable avec un taux d’endémisme élevé de 80%. Plusieurs plantes malgaches possèdent des propriétés antimicrobiennes. Citons par exemple :

– Ocimum gratissimum, localement appelée romba dont le décocté de feuilles administré par voie orale est un antidiarrhéique (PERNET, 1957).
– Albizia arenicola, présente une activité antimicrobienne remarquable (RANDRIANARIVO, 1996 ; 2003).
– Psorospermum androsaemifolium ou Harongampinihy, possède une activité antibactérienne et antifongique (POUMALE POUMALE et al., 2008).
– Cabucala erythrocarpa, est utilisée contre les maux de ventre (DOUZOUA et al., 1974).
– Tamarindus indica, ou voamadilo, possède des propriétés antibactériennes et antifongiques (ROSS et al., 1980).
– Harungana madagascariensis : les extraits de feuilles ont une activité antibiotique visà-vis de divers germes : sarcines, staphylocoques (MALCOM et SOFOROWA, 1969).

Le laboratoire de Biochimie appliquée aux sciences médicales (LABASM) s’est intéressé à l’étude des plantes malgaches à propriétés antimicrobiennes. Il procède selon deux approches :
– Soit il travaille sur les plantes dont les activités antibactériennes sont déjà exploitées empiriquement par la population.
– Soit il prospecte systématiquement l’activité antibactérienne des plantes toxiques ou médicinales.

Diverses plantes appartenant à différentes familles ont déjà fait l’objet d’études dans ce laboratoire. On peut citer entre autres :
– la famille des BIGNONIACEAE : Phyllarthron madagascariense (IBRAHIM, 2005)
– la famille des CUCURBITACEAE : Xerosicyos danguyi (RAKOTONDRAZANAKA, 1999)
– la famille des EUPHORBIACEAE dont Uapaca thouarsii (RANDRIANANDRASANA, 2004)
– la famille des MORACEAE : Pachytrope dimepate (KANIZA, 2007)
– la famille des FABACEAE : Albizia arenicola (MOUNIDATI, 2009) .

Ainsi, suite à des études préliminaires effectuées au laboratoire, des plantes aux propriétés antibactériennes ont été retenues pour des études plus poussées. Parmi elles figure Dilobeia thouarsii, une Protéacée endémique classée parmi les plantes médicinales de Madagascar. Elle présente une propriété diurétique et vermifuge (RABESA ZAFERA, 1986). Et d’après les enquêtes ethnobotaniques dans la région de Mandraka, zone de récolte de la plante, elle est utilisée par les villageois comme fortifiant et pour soigner les blessures.

Description botanique (BOSSER et RABEVOHITRA, 1991)

La plante est présentée sur la Figure1 (p. 9). C’est un arbre de 8-15m parfois 30 m de hauteur, 0,5-0,8 m de diamètre, à rameaux robustes. Les feuilles sont insérées en hélice, groupées au sommet des rameaux. Elles sont persistantes, à limbe coriace, glabrescent, vert brillant dessus, plus mat dessous, obcordiformes. Les pieds mâles et femelles portent des feuilles légèrement différentes. Les pieds femelles portent des feuilles en forme de cœur, à 2 lobes nettement séparés par une échancrure profonde (d’où le nom scientifique de Dilobeia). Les pieds mâles portent des feuilles à lobes ramifiés symétriquement, en 4 ou 8 lobes. La feuille rappelle la forme de celle du tavolo, plante cultivée pour ses tubercules d’où son nom de tavolohazo (hazo veut dire en malgache : arbre). Les inflorescences mâles sont en épis composés, multiflores tandis que celles des femelles sont en grappes simples. L’écorce est écailleuse, à tranche brun-rouge ponctuée de taches. Les fruits sont drupacés ellipsoïdes, rarement globuleux. Les graines, grosses, à cotylédons inégaux, charnus et huileux; à noyau osseux, lisses, sont peu résistantes.

Distribution géographique (BOSSER et RABEVOHITRA, 1991)
Dilobeia thouarsii Roem. & Schult pousse dans les forêts humides de Madagascar, (Figure 2). Elle est très abondante au centre et à l’est de l’Ile, et se rencontre aussi dans les régions de Fianarantsoa et Tuléar (région de Fort-Dauphin).

Date et lieu de récolte

La plante a été récoltée dans la forêt de Mandraka au moyen est de Madagascar, située à 70 km d’Antananarivo. La collecte a été effectuée au mois d’Avril 2008, période où la plante est au stade végétatif, au mois de Novembre 2008, période de floraison de la plante et au mois de Mars 2009, période où la plante est au stade végétatif.

Préparation et conservation du matériel végétal 

L’écorce de Dilobeia thouarsii (Proteaceae) a été utilisée comme matériel d’étude. Les morceaux d’écorce sèche sont broyés à l’aide d’un mixer (BLENDER, GT500) jusqu’à l’obtention d’une poudre fine qui constitue le matériel de départ. La poudre est conservée dans une boite fermée hermétiquement et à la température ambiante.

Les produits chimiques

Les produits chimiques utilisés sont essentiellement de marque MERCK, PROLABO ou LABOSI et sont de qualité pure ou « pour analyse ». Les supports utilisés pour la chromatographie sur couche mince sont des plaques de gel de silice 6 0F254 MERCK ; de dimensions : 20 x 20 cm (épaisseur de la couche : 0,2 mm).

Méthodes d’extraction

Extraction solide-liquide

Principe
Le mode d’extraction par épuisements successifs à l’aide de solvants de polarités croissantes permet d’obtenir la quasi-totalité des produits solubles (RAJAONARIVELO, 2006). Le principe est fondé sur l’affinité des produits présents dans la plante à l’égard d’un solvant donné. L’hexane par exemple est utilisé comme solvant pour extraire les matières grasses et les terpénoïdes dans les cellules des plantes (HARBONE, 1983 ; RABEMAHEFA, 1994). Il s’agit d’une extraction à chaud avec différents solvants de polarité croissante au moyen d’un extracteur SOXHLET (Annexe 6). L’appareillage comporte un chauffe-ballon, un ballon de 250 ml dans lequel le solvant est chauffé jusqu’à sa température d’ébullition et vaporisé, un réfrigérant qui condense les vapeurs et un extracteur de 100 ml à l’intérieur duquel est introduit le produit à extraire (la poudre de l’écorce) enveloppé dans une cartouche de papier filtre où retombe le solvant condensé dans le réfrigérant. Un siphon permet de vider périodiquement l’extracteur de la solution obtenue. La solution retombe alors dans le ballon où se concentrent les extraits.

Mode opératoire
30 g de poudre végétale sont placés dans une cartouche, laquelle est introduite dans l’extracteur. Le ballon est rempli au 2/3 du premier solvant d’extraction puis chauffé à la température d’ébullition du solvant. L’extraction terminée, la solution obtenue est concentrée à l’évaporateur rotatif, puis séchée à la température du laboratoire. Le résidu est pesé et gardé au congélateur jusqu’à la réalisation des tests phytochimiques et biologiques. Le marc issu de cette première extraction est soumis au deuxième solvant. Les mêmes opérations sont répétées avec le troisième solvant.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : ETUDE CHIMIQUE
1. INTRODUCTION
2. MATERIELS ET METHODES
2.1. MATERIELS
2.1.1. Matériel végétal
2 .1.1.1. Position systématique
2 .1.1.2. Description botanique
2 .1.1.3. Distribution géographique
2 .1.1.4. Date et lieu de récolte
2 .1.1.5. Préparation et conservation du matériel végétal
2.1.2. Les produits chimiques
2.2. METHODES
2.2.1. Méthodes d’extraction
2 .2.1.1. Extraction solide – liquide
2.2.1.1.1. Principe
2.2.1.1.2. Mode opératoire
2 .2.1.2. Extraction liquide – liquide
2.2.1.2.1. Principe
2.2.1.2.2. Mode opératoire
2.2.2. Méthode de fractionnement des extraits
2 .2.2.1. Principe
2 .2.2.2. Matériels
2 .2.2.3. Mode opératoire
2.2.3. Méthode de concentration
2.2.4. Méthodes d’analyse
2 .2.4.1. Caractérisation des familles chimiques dans les extraits
2.2.4.1.1. Préparation des extraits à tester
2.2.4.1.2. Caractérisation des saponosides
2.2.4.1.3. Caractérisation des alcaloïdes
2.2.4.1.4. Caractérisation des flavonoïdes et leucoanthocyanes
2.2.4.1.5. Caractérisation des tanins et polyphénols
2.2.4.1.6. Caractérisation des stéroïdes et triterpènes
2.2.4.1.7. Caractérisation des hétérosides
2.2.4.1.8. Caractérisation des anthraquinones
2.2.4.1.9. Caractérisation des désoxyoses
2.2.4.1.10.Caractérisation des irridoïdes
2 .2.4.2. Chromatographie sur couche mince
2.2.4.2.1. Principe
2.2.4.2.2. Mode opératoire
2.2.4.2.2.1.Préparation de la plaque
2.2.4.2.2.2.Développement du chromatogramme
2.2.4.2.2.3.Révélation du chromatogramme
2.2.4.2.2.3.1. Réactions colorées
3. RESULTATS
3.1. Préparation des différents extraits
3.1.1. Extraction solide – liquide
3.1.2. Extraction liquide – liquide
3.2. FRACTIONNEMENT DES DIFFERENTS EXTRAITS
3.3. HOMOGENEITE DES EXTRAITS
3.3.1. Analyse des extraits par CCM
3.3.2. CCM comparative des différentes fractions obtenues après la chromatographie « flash » sur colonne sèche de la fraction A
3.4. CRIBLAGE PHYTOCHIMIQUE DES EXTRAITS
4. DISCUSSION ET CONCLUSION
DEUXIEME PARTIE : ETUDE BIOLOGIQUE
1. INTRODUCTION
2. MATERIELS ET METHODES
2.1. MATERIELS
2.1.1. Les microorganismes
2.1.2. Les milieux de culture
2.1.3. Les disques utilisés pour les tests d’antibiogramme
2.2. METHODES D’ETUDE DES EFFETS SUR LES BACTERIES
2.2.1. Identification des souches bactériennes par coloration GRAM
2 .2.1.1. Principe
2 .2.1.2. Mode opératoire
2.2.1.2.1. Préparation et fixation des souches bactériennes
2.2.1.2.2. Coloration
2.2.2. Méthode de diffusion sur gélose
2 .2.2.1. Principe
2 .2.2.2. Mode opératoire
2.2.2.2.1. Stérilisation
2.2.2.2.2. Inoculum
2.2.2.2.3. Ensemencement
2.2.2.2.4. Dépôt des extraits
2.2.2.2.5. Incubation
2.2.2.2.6. Lecture des résultats
2.2.3. Détermination de la CMI (Concentration Minimale Inhibitrice)
2 .2.3.1. Repiquage de la souche bactérienne
2 .2.3.2. Préparation de l’inoculum
2 .2.3.3. Préparation de la gamme de concentration de l’extrait
2 .2.3.4. Inoculation
2 .2.3.5. Lecture des résultats
3. RESULTATS
3.1. CARACTERES MORPHOLOGIQUES DES SOUCHES BACTERIENNES
3.2. EFFETS ANTIBACTERIENS DES DIFFERENTS EXTRAITS
3.2.1. Effets de l’extrait hexane
3.2.2. Effets de l’extrait acétate d’éthyle
3.2.3. Effets de l’extrait méthanol
3.2.4. Evaluation de l’ activité antibactérienne de l’extrait acétate d’éthyle et des fractions A et B
3 .2.4.1. Evaluation de l’activité antibactérienne de l’extrait acétate d’éthyle sur Vibrio harveyi
3 .2.4.2. Evaluation de l’activité antibactérienne de la fraction A sur Vibrio harveyi
3 .2.4.3. Evaluation de l’activité antibactérienne de la fraction B sur Vibrio harveyi
3.2.5. Evaluation de l’activité antibactérienne des différentes fractions issues de la chromatographie en mode « flash » de la fraction A sur Vibrio harveyi
3.3. DETERMINATION DE LA CMI (Concentration Minimale Inhibitrice)
4. DISCUSSION ET CONCLUSION
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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