But de la transition 1 et attentes du monde professionnel

Introduction – Problématique

Ce travail de recherche s’inscrit dans le contexte de la transition 1 du canton de Vaud, qui fait le lien entre l’école obligatoire et le monde professionnel. A l’heure où l’OPTI1 tente de prendre un nouveau tournant avec un remaniement de son règlement par une nouvelle Direction, cherchant à uniformiser les différents sites, il faut se questionner sur les apports d’une telle structure. Enseignant depuis 4 ans à l’OPTI de Bussigny, je m’intéresse particulièrement à cette thématique. Cet organisme tend à prendre de plus en plus d’importance dans le canton de Vaud et traduit d’une réalité des jeunes au sortir de la scolarité obligatoire qui ne trouvent pas de solution de formation.
C’est une situation qui a pris une proportion importante depuis les années 90 en Suisse et qui a vu évoluer la diversité des offres transitoires selon les attentes et les besoins des parties concernées.
La construction d’un projet professionnel est complexe et dépend de différents paramètres, dont certains sont indépendants du jeune. Le facteur scolaire doit se conjuguer avec l’identité propre de l’élève, mais aussi selon la conjoncture économique et sociale du moment. Tous ces éléments doivent s’harmoniser, mais l’évidence de cet état de fait n’est pas le même pour tous les adolescents.
L’OPTI, depuis 10 ans, tente de répondre à ces besoins en proposant notamment des secteurs préprofessionnels, afin de s’insérer dans une formation certifiante du secondaire II. D’ailleurs un des enjeux de l’OPTI, qui n’est d’ailleurs que trop peu mis en avant, est la construction d’un projet réaliste et pérenne permettant aux élèves de se distancier des systèmes de transition. Le fonctionnement de cette mesure cantonale a été éprouvée et reconnue tant par les instances politiques que scolaires. Il s’agit donc de donner ici la parole aux anciens élèves, afin de mieux sonder les facteurs qui ont influencé leur avenir professionnel. J’ai alors choisi de me pencher sur trois périodes : avant, pendant et après l’OPTI. Cette mesure de transition 1, devant permettre aux élèves de s’insérer dans une formation certifiante, interroge le fait même de la sectorisation de l’OPTI. Cette dernière permet-elle ou non la construction de projets professionnels durables ?
Je vais traiter de cette question selon les spécificités de la transition 1. Il conviendra ensuite de présenter des facteurs nécessaires à la construction d’un projet professionnel.
Pour ce faire, il sera question de présenter deux secteurs de l’OPTI qui diffèrent dans leurs prestations ; GV et T. Finalement, l’intérêt de ce projet se perçoit par l’analyse des influences de l’enseignement sectoriel de l’OPTI sur la construction des projets professionnels des élèves, et ce dans la durée.

La transition 1 dans le canton de Vaud

L’histoire de la transition 1

Selon la définition du dictionnaire en ligne Larousse, le mot transition signifie « le passage d’un état à un autre, le passage graduel d’une idée ou d’un développement à un autre »2. La transition 1 est donc une période définie pour un jeune sortant de l’école obligatoire, précédant le moment où il s’insère dans le monde professionnel (Bachmann, 2008). Autrement dit, c’est une période charnière qui doit permettre l’accès à une formation certifiante du secondaire II3. Cet événement qui devrait se faire directement au sortir de la scolarité n’est malheureusement pas l’évidence pour tous les élèves.
En Suisse, depuis la fin des années 90, il a été constaté que la proportion des jeunes n’y arrivant pas augmentait sensiblement (Bachmann, 2012). Dans les années huitante, 50% des jeunes débutaient un apprentissage à la sortie de l’école obligatoire alors qu’aujourd’hui seuls 25% d’entre eux y parviennent, voire 5% dans les grandes villes comme Lausanne (Guex, 2015). Ces élèves se retrouvent donc entre l’école obligatoire et la formation professionnelle, souvent sans projet concret, et doivent par conséquent être pris en charge afin de s’insérer dans la vie active. Le but est alors de leur éviter la rupture sociale et de leur permettre le perfectionnement scolairement.
Ce constat s’est traduit au niveau législatif. En effet, dès 1985, le Grand Conseil du canton de Vaud a décrété une loi sur l’enseignement secondaire supérieur (LESS) qui pose les jalons du perfectionnement; de la transition 1 et de l’insertion. Elle précise notamment qu’il faut développer les compétences scolaires, personnelles et sociales en accompagnant la construction du projet de manière durable4. Puis en 1997, le règlement de l’École de perfectionnement (REP) définit quatre types de perfectionnement avec des orientations précises.
Ces solutions, assemblées dans ce qui a été appelée la « 10ème année », avaient pour principes le perfectionnement des élèves. Dès 2004, cette école a laissé sa place à l’OPTI, la mesure de transition 1, qui accueille environ 1000 élèves par année6. La situation actuelle reflète donc une réalité connue depuis déjà plus d’une dizaine d’années. A la différence qu’aujourd’hui, le phénomène tend à être plus soutenu en terme d’offres.

Système actuel de transition 1

Le choix des mesures de transition 1 actuelles peut paraître complexe aux yeux des élèves et de leurs parents. Chaque mesure a pour objet de cibler les besoins particuliers des élèves et d’en combler des lacunes scolaires et pratiques. Le choix d’orientation va se faire au travers des guichets régionaux de la transition 1, qui suivent personnellement chaque cas, de manière à guider les élèves grâce à l’introduction en 2006 du case management pour la formation professionnelle (Giroud, 2010).

But de la transition 1 et attentes du monde professionnel

Si le but évident de la transition 1 est l’insertion professionnelle, ou du moins l’accession à une formation du secondaire II, il est clair que depuis l’adoption de la LESS8, l’accent est mis sur la notion de durabilité de l’insertion dans la vie active. Cela montre une volonté de pérennité face au choix de formation afin d’éviter tout retour d’un élève en transition 1 ou en transition 29.

Système actuel de transition 1

Le choix des mesures de transition 1 actuelles peut paraître complexe aux yeux des élèves et de leurs parents. Chaque mesure a pour objet de cibler les besoins particuliers des élèves et d’en combler des lacunes scolaires et pratiques. Le choix d’orientation va se faire au travers des guichets régionaux de la transition 1, qui suivent personnellement chaque cas, de manière à guider les élèves grâce à l’introduction en 2006 du case management pour la formation professionnelle (Giroud, 2010).

But de la transition 1 et attentes du monde professionnel

Si le but évident de la transition 1 est l’insertion professionnelle, ou du moins l’accession à une formation du secondaire II, il est clair que depuis l’adoption de la LESS8, l’accent est mis sur la notion de durabilité de l’insertion dans la vie active. Cela montre une volonté de pérennité face au choix de formation afin d’éviter tout retour d’un élève en transition 1 ou en transition 29.
Aussi, les exigences du monde professionnel nécessitent l’acquisition de compétences scolaires ; le savoir, de compétences pratiques ; le savoir-faire et de compétences relationnelles ; le savoir-être (Masdonati, 2007a). Dans cette idée Masdonati (2007) propose de travailler sur des compétences pratiques qui seraient « un atout facilitant les premiers pas dans le monde du travail » (p.80), et des compétences relationnelles pour que « l’intégration sociale et la reconnaissance au sein de l’entreprise soient favorisés » (p.80). De plus, la littérature soulève le fait que, pour beaucoup, les années d’école ont été vécues comme une expérience douloureuse (Masdonati, 2007b) car les élèves en ont « assez » d’être stigmatisés comme mauvais (Perret-Clermont & Zittoun, 2002). La rupture scolaire, ou du moins la perte de motivation à être sur un banc d’école, trouve souvent son origine dans le rapport aux savoirs qu’entretient le jeune (Bautier, Charlot, & Rochex, 2000). L’enjeu n’est donc pas purement scolaire mais également identitaire, social et motivationnel. Ce point de vue a été relevé d’ailleurs par Zittoun (2006) qui dit que « l’enjeu d’un dispositif d’insertion est d’offrir une structure canalisant chacun des processus de changements impliqués par la transition. » (p.15). Elle précise que cela doit « accompagner des processus de repositionnement social, de transformation identitaire, de construction de signification » (p.15). De plus, selon une étude menée au CPLN10 par le SSRE11 (2002), un dispositif de préapprentissage permet d’élaborer une signification personnelle à un projet d’apprentissage car une telle structure drille les savoirs, familiarise au monde du travail et, à son rythme, explicite des connaissances sociales implicites. Elle instaure également un climat de confiance et de partage, tout autant que donne du sens à l’activité (Perret-Clermont & Zittoun, 2002).

Détermination des choix professionnels

Les causes des élèves se trouvant en transition 1 sont évidemment variables, mais découlent toutes du fait que, au sortir de la scolarité, ils n’aient pas obtenu d’entrée en formation certifiante (gymnasiale ou en apprentissage). Et ce malgré que dès la 7 ème, des cours d’approche du monde professionnel (AMP) soient introduits pour «accompagner [l’élève] dans l’élaboration, la conduite et la réalisation d’un projet de formation à visée scolaire et/ou professionnelle. »13. Des aspects socio-psychologiques ont été mis en avant comme le fait de choisir un métier selon de mauvaises représentations (Behrens, 2007a, p.71) ou par le fait de se désintéresser de tout projet d’avenir professionnel (Marcia, 1966, cité dans Behrens, 2007b, p.75). Marcia définit l’état de diffusion identitaire où l’adolescent trouve inutile d’envisager son avenir et se centre sur le moment présent. L’état de forclusion fait quant à lui apparaître une sorte de dépendance à autrui, dans le sens où il s’en remet complètement aux autres, c’est-à-dire à ses parents, ses enseignants ou même ses amis (Behrens, 2007). Ce type d’élève est appelé « à risques ». Un élément essentiel caractérisant cette période est donc la nécessité d’un travail de redéfinition de soi décrit par l’acquisition de nouvelles compétences cognitives et sociales, par des remaniements identitaires et la construction d’une signification personnelle de la situation (Perret-Clermont & Zittoun, 2002).

Les étapes nécessaires au choix professionnel

Nous avons vu que la construction identitaire joue un rôle important dans l’implication du jeune pour l’élaboration de son projet. Une méthodologie québécoise a été élaborée dans les années 70 appelée l’Activation du Développement Vocationnel et Personnel (ADVP) définissant 4 étapes nécessaires dans l’élaboration d’un projet professionnel: l’exploration, la cristallisation, la spécification et la réalisation (Guy, 2009). D’un point de vue macro, il s’agit d’inventorier les métiers possibles, d’affiner ses choix selon ses compétences, puis de finaliser son choix par divers moyens afin de le concrétiser. Cet outil nécessite une formation et est parfois utilisé par nos conseillers en orientation.
Dans le canton de Vaud, l’outil de référence pour les jeunes cherchant une place d’apprentissage est le site internet orientation.ch. Il répertorie une grande partie des places disponibles et offre également des outils permettant de construire son projet de formation. On peut ainsi y trouver des descriptions de toutes les formations professionnelles ou encore un guide simplifié de l’ADVP qui cherche à atteindre les mêmes objectifs et découpe en 7 phases le processus de recherche14. Ce dernier est notamment utilisé sur certain site de l’OPTI pour déterminer l’état d’avancement du projet des élèves.

Soutien à disposition du jeune

Des outils sont donc à disposition mais Boutinet (1993) (cité par Guy, 2009, p. 14) relève que « désormais l’élève est acteur de sa destinée de s’orienter, quitte à s’aider d’un conseiller». Cela implique qu’il est également nécessaire d’obtenir un soutien soit professionnel; des conseillers en orientation, soit social ; provenant du cercle familial, des amis ou camarades de classe.

L’OPTI

Cet organisme, né en 2004 et remplaçant l’École de perfectionnement, est présent dans tout le canton (Aigle, Bussigny, Morges, Payerne, Vevey et Yverdon). Il est scindé en trois parties : les SAS, l’accueil et les secteurs.
L’OPTI est soumis au règlement de l’Office de perfectionnement scolaire, de transition et d’insertion professionnelle (ROPTI) qui définit notamment que les programmes et les moyens d’enseignement sont adaptés aux besoins des élèves et aux objectifs à atteindre. Ils visent subsidiairement à préparer les élèves motivés et compétents qui souhaitent compléter leurs connaissances en vue d’accéder en maturité professionnelle ou au gymnase16. Il précise aussi que l’enseignement vise17 :
a. le développement des connaissances et compétences scolaires, personnelles et sociales;
b. l’accompagnement des élèves dans la construction de leur projet et leur insertion professionnelle;
c. au besoin la préparation aux concours des associations professionnelles ou aux examens des écoles subséquentes

Résultats après une année

En 2007, une étude de Bachmann dirigée par Behrens, a été menée pour connaître les résultats d’insertion des jeunes de l’OPTI après une année. Il a été montré que pour plus de 80% des élèves, la mesure d’insertion T1 débouchait sur une solution d’apprentissage ou autre. Cependant, la littérature manque de données sur le long terme, ne pouvant déterminer si les solutions sont pérennes ou non. Il est également à souligner dans ce rapport que l’engagement avec « certitude dans un projet professionnel ne constitue pas nécessairement un avantage pour l’accès à la formation au terme de l’année à l’OPTI. Tout comme le fait que « les jeunes qui étaient à « risques » à la sortie de la scolarité obligatoire continuent à l’être à la fin de l’OPTI ».
Ainsi, le taux d’insertion après l’OPTI n’est pas à remettre en cause en tant que finalité du système de mesure. Par contre, il est primordial de comprendre que la certitude d’un projet de formation n’assure pas l’obtention finale d’une place d’apprentissage aux élèves, tout comme le fait que le taux d’insertion à 80% de l’OPTI n’assure pas une entrée en formation à la fin de l’OPTI. A l’inverse, les élèves à risque ne sont pas assurés de parvenir à une fin pérenne de formation, quand bien même la mesure de transition 1 est disposée en ce sens. Dès lors qu’est-ce qui influence la construction d’un projet professionnel durable chez élèves de l’OPTI ?

Questions de recherche

A la lumière de ces réalités et des sources littéraires, il est alors possible de formuler les questions suivantes :
1. L’OPTI-secteur assure-t-il la vérification de chaque étape du processus de construction du choix professionnel des élèves ?
2. L’OPTI-secteur permet-il la construction d’un projet professionnel durable par les cours professionnels, les stages et les ateliers suivis durant l’année ?
3. L’OPTI-secteur offre-t-il les mêmes possibilités de construction de projet professionnel à tous les élèves?
Des entretiens semi-directifs d’anciens élèves seront produits et analysés pour donner des éléments de réponse à ces questions générales. Pour ce faire, il y a lieu d’exposer le cadre méthodologique de cette recherche et le profil des élèves interrogés.

Cadre méthodologique

Cette recherche a débuté par une interview de M. Raphaël Bugnon, ancien chargé de direction de l’OPTI-centre durant 10 ans. Ses propos m’ont ouvert l’esprit sur la complexité qu’engendre l’élaboration d’une mesure de transition scolaire telles que celles de la transition 1. Un nombre non négligeable de questions, en vue de répondre à des besoins existants, se sont posées à la création de l’OPTI dont la littérature fait état.
Ainsi, après dix ans d’existence, la Direction Générale de l’Enseignement Postobligatoire (DGEP) cherche encore et toujours à améliorer les prestations proposées pour répondre aux attentes de la transition 1 et aux exigences du monde professionnel.

Objectif de la recherche

En soutien à la recherche, il m’a alors paru important de donner cette fois la parole à d’anciens élèves actuellement en formation. L’idée est de permettre à ces apprenants la critique des prestations offertes et leurs implications quant à la construction de leur projet professionnel. J’ai donc décidé d’effectuer une recherche qualitative en contactant d’anciens élèves de l’OPTI de Bussigny des secteurs GV (Gestion-Vente) et T (Technique et Industrie). Ces deux secteurs m’ont paru intéressants car, malgré un tronc commun de branches scolaires, ils ont chacun des branches spécifiques liées aux métiers qu’ils visent18. Les élèves de T disposent également d’un atelier technique hebdomadaire en plus de la possibilité d’effectuer des stages. J’ai donc voulu observer premièrement l’influence que ces cours spécifiques ou ces ateliers apportent à la construction d’un projet durable. Et deuxièmement, j’ai souhaité comprendre avec quelles représentations les jeunes arrivent à l’OPTI et dans quelles mesures ces dernières influencent ou non la qualité du futur projet professionnel. Pour ce faire, la méthode d’entretiens semi-directifs m’a paru la plus efficace. Ceci parce qu’elle permet d’ouvrir la discussion sur un thème et de laisser les réponses venir du sujet en l’incitant à prendre conscience de ses actions, décisions ou ressentis, sans faire remonter pour autant de faux souvenirs (Blanchet & Gotman, 2010).

Guide d’entretien

Afin de récolter mes données, j’ai établi un guide d’entretien que je ne leur ai pas soumis. J’ai simplement pris rendez-vous avec eux, et ai mené mon entretien en leur assurant l’anonymat 19 . Le guide d’entretien a été élaboré en suivant un axe chronologique de parcours scolaire afin de discerner les trois moments de la transition 1: avant, pendant et après l’OPTI. L’avant est représenté par la recherche des implications possibles du contexte personnel sur les choix professionnels de l’élève. Le pendant est analysé sous une interrogation des motivations du choix de mesure et du projet professionnel s’y rattachant. Tandis que l’après OPTI est observé dans sa capacité à permettre des liens avec le monde professionnel. Cinq thèmes généraux, constitués de sous-thèmes, ont servi de guide à la création de mes questions d’entretien. J’ai également imaginé des relances possibles afin de me préparer au mieux à ce type d’interview.

Profils des sujets

Dans une volonté d’objectivité des résultats, j’ai choisi d’interroger des élèves qui m’étaient inconnus. Concernant l’étude de la variation des représentations, il me paraissait encore important de disposer d’un échantillon varié au niveau de la provenance des élèves. C’est-à-dire que j’ai souhaité une sélection d’élèves dont les profils scolaires étaient multiples. Finalement, six élèves ont accepté de témoigner et ont pu participer à cette recherche. Afin de garantir l’anonymat de ses élèves, je vais leur donner des prénoms d’emprunt: Alice, Lily, Vincent, Mehdi, Delphine et Claire.

Alice

Alice a 19 ans et est actuellement en 2ème année d’apprentissage d’employée de commerce CFC voie base, place qu’elle a obtenue durant l’OPTI. C’est la formation qu’elle déclare avoir toujours voulu faire. Elle habite à Cossonay chez ses parents respectivement concierge et technicienne de surface. Sa soeur, qui avait commencé la même formation en Suisse, est aujourd’hui retournée au Portugal en qualité d’enseignante. Alice est passée par le secteur GV il y a deux ans, après un parcours VSO et un RAC I réussi. Sa situation à l’école obligatoire a été compliquée suite à un déménagement, une difficulté d’intégration et des soucis familiaux.

Récolte des données

Les entretiens ont représenté des moments plaisants et particulièrement enrichissants pour mon travail. J’ai tout d’abord demandé à chaque élève s’il était d’accord d’être enregistré, tout en lui assurant l’anonymat. Je leur avais donné rendezvous individuellement dans un lieu publique et calme de leur choix afin qu’ils se sentent à l’aise et n’aient pas l’impression de se retrouver à nouveau face à un enseignant. Après un bref rappel du cadre de ce travail, préalablement fait par téléphone, chaque entretien a duré entre 25 et 45 minutes.
Ce type de récolte de données nécessite de parfaitement connaître son guide d’entretien pour laisser parler le sujet tout en s’assurant que les thèmes soient bel et bien abordés dans la discussion. Des oublis possibles de la part des sujets obligent à la relance ou à la reformulation des questions. Un moment plus délicat selon moi est la gestion de l’émotionnel. Effectivement, ce type d’entretien particulier permet au sujet de se confier sur ses déceptions ou ses attentes vis-à-vis des professionnels de l’enseignement ou de l’orientation. Il faut donc réussir à prendre temporairement de la distance avec la connotation du discours du sujet tout en soutenant une valorisation objective des réponses.
Deux difficultés se sont présentées. Face aux sujets développant très peu leurs réponses, il fallait sans cesse les relancer pour qu’ils donnent des réponses plus larges que « oui » ou « non », tout en en essayant de ne pas influencer leurs réponses. Alors que pour ceux qui partaient dans tous les sens, il s’agissait de les laisser parler tout en rebondissant plus tard sur les éléments qu’ils avaient relevés. Cet exercice de l’entretien semi-directif s’est avéré très intéressant, mais nécessite de la pratique et une bonne préparation du guide d’entretien.
Une fois ces entretiens terminés, je les ai tout d’abord retranscrits. C’est une étape essentielle parce que la transcription doit être « intégrale, même si elle occupe des dizaines de pages, sans quoi des analyses fines sont très difficiles » (Van Campenhoudt & Quivy, 2011, p. 199). Cela permet également d’utiliser une grille d’analyse afin de faire des liens à deux niveaux, entre les éléments d’un entretien mais également de manière transversale entre tous les sujets. Cette grille d’analyse20 permet de voir les cinq thèmes généraux et leurs sous-thèmes selon les sujets. Comme ces derniers ont pu abordé certaines thématiques différentes, cette grille a évolué au cours des analyses et les contenir des éléments vides, soit parce que le sujet n’a pas répondu, soit parce que le thème n’a pas été abordé.

Résultats et discussion

L’analyse qui suit, présente tout d’abord le profil de chaque sujet. J’ai opté pour une analyse de contenu par la méthode d’analyse de l’évaluation qui porte sur les jugements formulés par le locuteur (Van Campenhoudt & Quivy, 2011, p. 208). Je vais premièrement m’interroger sur l’évolution de la construction de leur projet d’avenir durant l’école obligatoire, puis sur leur modification de parcours et les choix qui s’offraient à eux. La deuxième étape consistera à analyser l’évolution de cette identification professionnelle durant l’OPTI et analyser les facteurs l’influençant. Et finalement, il s’agira de faire le lien avec leur situation actuelle et constater si cette construction correspond à leur réalité de formation. L’ensemble de ses résultats et leur analyse fait référence à la grille d’évaluation annexée.

Après l’OPTI

Mis à part le cas évoqué ci-dessus, les cinq autres élèves en formation à la sortie de l’OPTI disent être convaincus de leur choix et satisfaits de leur formation, tant en entreprise qu’aux cours. Ils estiment également tous retirer des bénéfices des cours professionnels liés à leur secteur. Quatre d’entre eux se projettent déjà dans une formation complémentaire et deux imaginent même, à plus long terme, créer une entreprise.

Observations finales

A la lumière de ces entretiens, je constate que les parcours des élèves passant par l’OPTI ont des points communs qui peuvent être exploités par les enseignants et les conseillers en orientation de l’OPTI. En effet, les élèves disent arriver avec un choix prédéterminé de volonté de formation, mais l’identification personnelle n’est pas une évidence. Elle devrait pourtant traduire des représentations fortes du métier, des motivations explicites et une mise en lien de ses compétences avec les exigences de formation. Ce processus de transformation identitaire (Zittoun, 2006) est souvent long et doit être soutenu. L’acquisition d’expérience pratique est alors primordiale pour élaborer, comparer et affiner les différents choix professionnels, en parallèle des savoirs et du savoir-être.
J’ai pu vérifier, par la confrontation de ses différents parcours, que l’OPTI-secteur permet la construction d’un projet professionnel durable par l’identification. Toutefois cinq des élèves interviewés ont trouvé une place d’apprentissage dans le domaine qu’ils convoitaient et n’ont donc pas (ou peu) cherché d’autres idées de métier. L’OPTIsecteur, selon son rôle, devrait pourtant s’assurer de la vérification des étapes de ce processus car la validation d’un projet n’est pas garantie au sortir de l’école obligatoire.
Même si ces étapes de validation ne sont pas clairement exprimées au travers des témoignages, dans le cas de Lily, ce processus a permis la modification du projet professionnel.
J’ai pu également me rendre compte que les cours professionnels ont une grande importance. En amont, cela permet de rassurer les élèves sur leurs capacités avant l’entrée en apprentissage et, dans un second temps, de les soulager du stress que le changement de rythme provoque lors d’un début de la formation. Les cours théoriques permettent également de favoriser la construction d’un nouveau projet professionnel lorsque l’élève ne se projette pas dans ce domaine. Sur le plan pratique, que ce soit par les stages ou les ateliers, les élèves sont unanimes quant à l’apport des expériences de terrain. Que ce soit pour construire ou déconstruire un projet professionnel, les représentations nécessaires à l’identification personnelle de leur projet se matérialisent par cette pratique. De plus, la confiance en soi et le sens des responsabilités leur fait gagner en maturité, qualité requise pour l’entrée dans le monde professionnel. Ces éléments permettent d’avancer le fait que l’OPTI-secteur participe à la construction d’un projet professionnel durable tant par les aspects pratiques que théoriques de sa structure, tout en assurant une vérification des étapes de cette construction.
Cependant un cas sur les six mérite une attention particulière et ouvre un questionnement sur les élèves à risque. L’interview de Lily met à jour sa difficulté rencontrée à la construction de son projet professionnel. Même si les étapes de construction sont revalidées par le COSP et la maîtresse de classe ou le maître de classe, la rigidité du changement de secteur semble avoir pénalisé sa construction de projet. Alice appuyait d’ailleurs sur le fait que l’implication doit venir de l’élève. Il faut
pourtant nuancer ce propos. En effet, pour sortir d’un état de forclusion, ou simplement quand l’élève rencontre des difficultés de construction, un soutien particulier doit lui être offert en collaboration avec le cercle familial, et pour ce faire il faut, de mon expérience, réussir à créer un déclic chez l’élève. Cela doit passer par une prise de conscience de ses forces et une sincère définition des ses envies et de ses intérêts ; processus long qui peut être soutenu par la découverte de professions auxquelles l’élève ne pensait pas forcément. Il peut y découvrir des activités donnant du sens, de la motivation et une confiance jusqu’ici insoupçonnée. Je crois donc que l’OPTI-secteur doit entamer une réflexion sur cette rigidité de secteur et insister sur la nécessité de découvrir d’autres métiers avant de se lancer dans un seul projet, surtout pour les élèves détectés comme étant à risque.

Conclusion

Dans toute formation, il est bon de prendre un moment de réflexion sur ses croyances préalables, ses acquis et l’évolution de son point de vue. Cette pratique devrait probablement se faire également durant toute une carrière d’enseignant et je constate que ce travail m’a ouvert de nouvelles perspectives de soutien aux élèves, en ma qualité de maître de classe à l’OPTI.
Dans une société professionnelle exigeante, il est nécessaire d’aider les adolescents à se construire une identité forte ; point de départ de leur insertion dans le monde du travail. Le passage du monde de l’enfance à celui de l’adulte ne se fait pas pour tous au même rythme, ni avec le même soutien, et c’est pourquoi aujourd’hui, dans le canton de Vaud, une diversité d’offres transitoires existe. Les compétences scolaires jouent un rôle primordial dans notre société, mais le système ne s’adapte pas toujours aux études des sciences de l’éducation. Il faut donc proposer des alternatives aux élèves en difficulté et les stimuler au développement de leurs compétences, par des apprentissages notamment, afin qu’ils aient la capacité d’évoluer dans le monde professionnel durant toute une carrière. Ces entretiens ont permis de mettre en lumière le fait que les élèves intégrant l’OPTI-secteur n’y viennent souvent pas avec une grande motivation et ne perçoivent pas toujours l’intérêt de apports théoriques qui y sont donnés, mais que la maturité acquise leur permet de conscientiser l’intérêt et l’utilité de cette année.
De mon expérience, nous devrions être convaincus du postulat d’éducabilité de Meirieu ainsi que de la pédagogie de Lev Vygotski prônant le développement par l’apprentissage. Alors en ce sens, l’OPTI-secteur permet l’accession aux savoirs, et la multidisciplinarité du programme est inévitablement bénéfique à moyen terme, même pour un élève désireux de changer de secteur.
Ce travail pose finalement une question sur la structure même des secteurs de l’OPTI face aux élèves à risque. Comment optimiser la sectorisation de l’OPTI pour satisfaire aux attentes de la transition 1? Sans tout remettre en question, la rigidité de changement de secteur en cours d’année ne prétérite-t-elle pas la construction d’un projet professionnel pour les élèves le modifiant ?

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Table des matières

1. Introduction – Problématique 
2. La transition 1 dans le canton de Vaud
2.1 L’histoire de la transition 1
2.2 Système actuel de transition 1
2.3 But de la transition 1 et attentes du monde professionnel
3. Détermination des choix professionnels 
3.1 Les étapes nécessaires au choix professionnel
3.2 Soutien à disposition du jeune
4. L’OPTI 
4.1 L’OPTI-secteur
4.2 Résultats après une année
5. Questions de recherche 
6. Cadre méthodologique
6.1 Objectif de la recherche
6.2 Guide d’entretien
6.3 Récolte des données
7. Résultats et discussion
7.1 Profils des sujets
7.1.1 Alice
7.1.2 Lily
7.1.3 Vincent
7.1.4 Mehdi
7.1.5 Delphine
7.1.6 Claire
7.2 Avant l’OPTI
7.3 Pendant l’OPTI
7.2.1 Le cas de Lily
7.3 Après l’OPTI
7.4 Observations finales
8. Conclusion
9. Bibliographie 
Tables des annexes 

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