Bases génétiques des troubles du contrôle des impulsions dans la maladie de Parkinson

La maladie de Parkinson est une pathologie neurodégénérative caractérisée par des symptômes moteurs, akinésie, rigidité et tremblement, secondaires à la dégénérescence des neurones dopaminergiques situés dans la substance noire. Cette perte neuronale induit progressivement une diminution de l’innervation en dopamine du striatum et du circuit des ganglions de la base impliqué notamment dans le contrôle des fonctions motrices.

Ces symptômes sont nettement améliorés par le traitement de remplacement dopaminergique dont la L-DOPA, le précurseur de la dopamine, reste le traitement de référence. D’autres médicaments dopaminergiques sont également utilisés, notamment des agonistes des récepteurs de la dopamine (agonistes dopaminergiques), ou des inhibiteurs du métabolisme de la L-DOPA comme les inhibiteurs de monoamine oxidase B (iMAOB) ou de la C-O-méthyltransférase (iCOMT).

Cependant, ces traitements s’accompagnent de complications et d’effets indésirables fréquents. L’évolution de la MP est en effet quasi systématiquement marquée par l’apparition de complications motrices, fluctuations et mouvements anormaux (dyskinésies), qui touchent 90% des patients après 10 ans d’évolution associés au traitement par la L-DOPA et à la sévérité de la dénervation. Par ailleurs, les agonistes dopaminergiques, et à un moindre degré la L-DOPA, entraine chez certains patients des nausées, une somnolence, des troubles cognitifs et comportementaux. Ces derniers sont de description plus récente. Rassemblés sous le terme de troubles du contrôle des impulsions (TCI), ils comprennent entre autre le jeu pathologique, l’hypersexualité, des troubles compulsifs de l’alimentation, des achats compulsifs.

Ces troubles sont observés chez environ 15 % des sujets atteints de MP traités par les agonistes dopaminergiques dans les études transversales et peuvent entrainer des problèmes médicaux, sociaux et juridiques (endettement, conflits conjugaux, divorces, licenciements etc.). Bien que l’hypothèse principale qui sous-tend la physiopathologie de ces troubles dans le contexte d’un traitement par agoniste dopaminergique soit en rapport avec le rôle joué par la dopamine dans les phénomènes de récompense, les mécanismes responsables de leur apparition sont mal connus et n’excluent pas l’implication d’autres systèmes de neurotransmetteurs. Dans la population générale, les études chez les jumeaux et des études d’association génétiques ont suggéré un rôle important des facteurs génétiques dans la susceptibilité aux TCI. Dans la MP, les études épidémiologiques ont montré que des antécédents familiaux d’addiction ou de troubles du comportement sont un facteur de risque indépendant de développer des TCI sous traitement dopaminergique.

Compte tenu de la prévalence de ces troubles et des complications médicales, sociales et juridiques qu’ils sont susceptibles d’engendrer pour le patient et son entourage, la compréhension des mécanismes à l’origine des TCI nous semble être capitale. Si de nombreux arguments plaident en faveur d’une susceptibilité génétique aux addictions en population générale, les facteurs environnementaux, sociaux, culturels ou familiaux sont probablement aussi importants mais difficiles à contrôler. Dans la population générale, l’addiction aux drogues ou le jeu pathologique nécessitent une exposition à la drogue ou au jeu, souvent dépendante de facteurs environnementaux (sociaux par exemple). A l’inverse, l’ensemble des individus atteints par la maladie de Parkinson est exposé aux traitements dopaminergiques mais seulement une partie présente de tels troubles. Les facteurs environnementaux qui participent à la susceptibilité de développer des TCI sont donc en partie contrôlables ou du moins ajustables (prise, doses, durées) par rapport aux troubles observés dans la population générale, laissant supposer qu’il doit être plus aisé de mettre en évidence les facteurs de susceptibilité individuels, d’ordre génétique.

La maladie de Parkinson

La maladie de Parkinson (MP) est une maladie neurodégénérative fréquente décrite pour la première fois en 1817, dans « An essay on the shaking palsy », à Londres, par James Parkinson. Dans cet essai majeur, le docteur Parkinson y décrivait déjà une pathologie progressive, à prédominance motrice associant troubles posturaux, tremblements de repos et une certaine difficulté à initier des mouvements volontaires. Le terme « maladie de Parkinson » sera introduit quelques décennies plus tard, par Jean-Martin Charcot dont les travaux menés à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, à Paris, permettront d’affiner encore les symptômes cardinaux de la maladie et d’introduire des notions d’altération de l’état d’esprit, constatée chez ses patients.

La mise en exergue de la dégénérescence d’une population spécifique de neurones localisés dans la substance noire par Brissaud puis Trétiakoff au début des années 1900 et de l’implication majeure de la dopamine dans la physiopathologie du trouble par Hornykiewicz et Ehringer ont permis d’amorcer l’introduction de substituts dopaminergiques en tant que traitement symptomatique dès les années 1960 . Plus de 200 ans après la publication de l’essai de James Parkinson, si l’expression motrice reste centrale dans notre acception de la MP, celle-ci est désormais perçue comme une pathologie hétérogène et complexe affectant plusieurs structures anatomiques et dont la progression aura des répercutions motrices et non-motrices affectant considérablement la qualité de vie des patients.

Épidémiologie

La MP est la seconde maladie neurodégénérative la plus fréquente après la maladie d’Alzheimer et la seconde cause de handicap d’origine moteur chez le sujet âgé . La prévalence de la MP en France est évaluée à 827,5 pour 100 000 habitants , 1% de la population des plus de 65 ans des pays industrialisés serait concernée par cette maladie . Les premiers symptômes de la maladie apparaissent entre 50 et 69 ans chez deux tiers des patients et plus rarement avant 40 ans chez environ 10% des malades. Avec l’allongement constant de la durée de vie moyenne, la prévalence mondiale estimée à 6,2 millions de cas en 2015 devrait selon certaines projections doubler d’ici 2040 pour atteindre environ 13 millions de cas en l’absence de stratégie préventive efficace . La distribution de cette prévalence est hétérogène chez les hommes et les femmes avec un sexe ratio de 3 hommes atteints pour 2 femmes. Des disparités ethniques sont également observées avec une prévalence particulièrement accrue chez les individus d’origine hispanique.

Bien que l’évolution de la maladie ne soit pas la cause directe d’une mortalité plus précoce, la MP est associée à une diminution de l’espérance de vie de 5 à 10 ans comparé à la population générale. Cette diminution est principalement corrélée à l’âge à l’apparition des premiers symptômes. Aux États-Unis, on estime le coût de la prise en charge annuelle globale des patients atteints de MP à 51.9 milliards de dollars. Tous ces facteurs contribuent à faire de la MP un problème majeur en termes de Santé Publique . Si l’âge est le facteur de risque principal, les recherches menées sur le thématique depuis plus de 2 siècles ont permis d’identifier d’autres facteurs, environnementaux et génétiques, associés à un risque accru de développer la MP.

Facteurs de risque environnementaux

L’observation de syndromes parkinsoniens dans des populations toxicomanes après consommation de 1-methyl-4-phenyl-4-propionoxypiperidine (MPPP), un opioïde de synthèse, a ouvert le vaste champ des contributions des expositions environnementales au risque de MP . En effet, une production accidentelle de 1- methyl-4-phenyl-1,2,3,6-tetrahydropyridine (MTPT) peut avoir lieu lors de la synthèse artisanale de MPPP. Le MPTP ayant la capacité de franchir la barrière hématoencéphalique sera transformé dans le cerveau par une enzyme gliale, la monoamine oxydase B (MAO-B), en 1-methyl-4-phenylpyridinium (MPP+), un neurotoxique interférant avec le complexe I de la chaine respiratoire mitochondriale et conduisant à une mort cellulaire. L’affinité du MPP aux transporteurs utilisés pour la recapture de la dopamine entraine une dégénérescence sélective des neurones dopaminergiques. Cette dégénérescence est responsable des symptômes que l’on retrouve dans la MP. De ces observations découle donc l’hypothèse de l’implication de facteurs environnementaux exogènes à la susceptibilité de développer une MP ainsi que l’implication du métabolisme mitochondrial dans la physiopathologie de trouble. Le MTPT est d’ailleurs utilisé couramment dans des modèles expérimentaux pour induire des lésions ou des phénotypes de type parkinsoniens chez l’animal .

Parmi les autres facteurs de risques environnementaux, on retrouve l’exposition aux pesticides avec une relation durée d’exposition/risque , la vie rurale, le travail dans l’agriculture, la proximité avec la présence de vignobles, la consommation d’eau de  puits, l’exposition aux métaux lourds ou encore le traitement par bétabloquants et les antécédents de traumatismes crâniens .

De façon intéressante, certains pesticides d’utilisation courante en agriculture comme le paraquat et le roténone, associés individuellement a un risque accru de MP, interfèrent eux aussi avec le complexe I de la chaine respiratoire mitochondriale. D’autres facteurs sont associés de manière inverse à la MP. Parmi eux figurent la consommation de café, le tabagisme actif , la consommation modérée d’alcool, l’activité physique modérée régulière, la prise d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens et la prise d’inhibiteurs calciques. Le caractère « protecteur » de ces associations  n’est cependant pas consensuel.

Enfin, en plus des facteurs environnementaux, les antécédents familiaux de MP ou de syndromes parkinsoniens sont associés à un risque plus élevé de survenue de MP, suggérant une implication du patrimoine génétique individuel dans la susceptibilité à la MP.

Susceptibilité génétique

Une étude récente sur l’héritabilité de la maladie de Parkinson, calculée par des approches familiales, a estimé que la part de variabilité phénotypique de la MP expliquée par la génétique est de 26%. On considère que la majorité des formes cliniques de MP sont des formes sporadiques et 10% sont des formes familiales ou monogéniques dont de rares formes à transmission génétique mendélienne autosomique dominante (notamment SNCA, LRRK2, GBA) ou récessive (notamment PARK2/Parkin, PINK1, DJ-1). Cependant, les progrès réalisés ces 20 dernières années dans la recherche sur les bases génétiques de la MP, tendent à faire apparaître cette dualité entre forme sporadique et monogénique comme une représentation trop simplifiée de l’architecture génétique qui caractérise la MP .

En effet, pour les formes dites monogéniques, la présence des variants incriminés, souvent rares et fonctionnellement bien caractérisés, ne suffit pas à prédire l’apparition du trouble. On parle alors de variants à pénétrance incomplète. A l’inverse, pour les formes dites sporadiques, les dernières études pangénomiques (genome-wide association studies, GWAS) ont permis de mettre en avant une susceptibilité polygénétique, avec la contribution de nombreux variants fréquents à effet individuel faible, qui pourrait contribuer à expliquer une part importante de la variabilité phénotypique .

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Table des matières

INTRODUCTION
OBJECTIFS DE LA THESE
Chapitre 1
1 La maladie de Parkinson
1.1 Épidémiologie
1.1.1 Facteurs de risque environnementaux
1.1.2 Susceptibilité génétique
1.2 Symptômes et diagnostic
1.2.1 Les symptômes moteurs cardinaux
1.2.2 Les symptômes non-moteurs
1.2.3 Symptômes précliniques ou prodromaux
1.2.4 Diagnostic
1.3 Physiopathologie
1.3.1 Le système des ganglions de la base
1.3.1.1 Description anatomique et fonctionnement
1.3.1.2 Rôle de la dopamine dans la modulation des ganglions de la base
1.3.1.3 Dénervation dopaminergique et agrégats protéiques
1.4 Traitements et complications
1.4.1 La L-DOPA
1.4.2 Les agonistes dopaminergiques
1.4.3 La stimulation cérébrale profonde
Chapitre 2
2 Les troubles du contrôle des impulsions
2.1 Définitions et caractérisation des troubles
2.1.1 Le jeu pathologique
2.1.2 L’hypersexualité
2.1.3 L’alimentation compulsive
2.1.4 Les achats compulsifs
2.2 Physiopathologie
2.2.1 Le rôle de la dégénérescence des neurones dopaminergiques
2.2.2 Le rôle des substituts dopaminergiques
2.3 Épidémiologie et comorbidités
2.3.1 En population générale
2.3.2 Dans la maladie de Parkinson
2.3.2.1 Chez les patients non-traités
2.3.2.2 Chez les patients sporadiques, avec ou sans traitement
2.4 Évolution des symptômes et prise en charge
2.5 Architecture génétique des troubles du contrôle des impulsions
2.5.1 Etat des lieux des connaissances
2.5.1.1 Susceptibilité génétique et troubles du contrôle des impulsions en population
générale
2.5.1.2 Susceptibilité génétique et troubles du contrôle des impulsions dans la maladie de Parkinson
2.5.2 Constat et hypothèses
Chapitre 3
3 Méthodes
3.1 Les études d’association pangénomiques
3.1.1 Contexte
3.1.2 Conception
3.1.2.1 Sélection de la population d’étude
3.1.2.2 Génotypage et contrôle qualité
3.1.2.3 Imputation
3.1.2.4 Analyse statistique
3.1.3 Limites
3.2 Perspectives récentes pour explorer la polygénicité des troubles du contrôle
des impulsions
3.2.1 Tests d’agrégation de variants par gène et circuits biologiques
3.2.2 Corrélations génétiques entre différents phénotypes
3.2.3 Scores de risque polygénique
3.3 Population d’étude et définition du phénotype
3.3.1 Populations étudiées
3.3.2 Critères généraux d’inclusion dans l’étude
3.3.3 Définition du phénotype et échelles utilisées
Chapitre 4
4 Résultats
4.1 Article 1 : Suggestive association between OPRM1 and impulse control
disorders in Parkinson’s disease
4.1.1 Résumé en français
4.1.2 Manuscrit 1
4.2 Article 2: Gene-level association between OPRM1 and impulse control
disorders in Parkinson’s disease 106
4.2.1 Résumé en français
4.2.2 Manuscrit 2
4.3 Article 3: Genome-wide association study on Impulse control disorders in
Parkinson’s disease
4.3.1 Résumé en français
4.3.2 Manuscrit 3
DISCUSSION
CONCLUSION

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