Aspects évolutifs des endocardites infectieuses

L’endocardite infectieuse (EI) est un état septicémique, que constitue la greffe d’un agent pathogène, sur un endocarde sain ou préalablement lésé ou sur une prothèse valvulaire. Cette greffe peut se localiser sur une valve, une prothèse valvulaire; exceptionnellement sur l’endocarde pariétal et par extension sur une cardiopathie congénitale ou sur une sonde de stimulation intra cardiaque. Il s’agit d’une affection complexe où s’associent au processus septicémique, des anomalies hémodynamiques et une imprégnation antigénique à l’origine d’un processus immunologique [13].

Il s’agit d’une atteinte infectieuse de l’endocarde, responsable de lésions essentiellement valvulaires, avec un risque important d’insuffisance cardiaque et d’embolies septiques. La valve la plus fréquemment concernée est la valve mitrale dans 41 %, suivie de la valve aortique dans 38 % [98].

Classiquement, on distingue deux formes d’endocardites infectieuses:
● La forme subaiguë ou endocardite maligne lente d’OSLER, d’évolution lente (sur des semaines ou des mois), survenant sur cardiopathie préexistante et due à des germes moins virulents (Streptococcus viridans, Enterocoque, Staphylococcus epidermidis…).
● La forme aiguë ou maladie de SENHOUSE KIRKES dont l’évolution est rapide (durant quelques jours à 2 semaines), mutilante, pouvant survenir sur un endocarde sain et due à des germes très virulents (Staphylococcus aureus, Pneumocoque…).

Cette classification permet une meilleure définition du pronostic et des indications thérapeutiques [57, 78]. Malgré les progrès acquis en matière d’antibiothérapie et de chirurgie cardiaque, l’EI reste une maladie grave, d’une mortalité globale de 20 à 30% et avec une incidence qui est stable [54]; ce qui justifie une amélioration de la prise en charge à travers une prophylaxie adéquate pour les patients en situations à risque [52]. Cette stabilité apparente masque en réalité la diminution de certaines entités sous-jacentes prédisposantes, telles que les cardiopathies rhumatismales, l’apparition de nouvelles formes d’endocardite liées aux valves prothétiques, aux toxicomanies par voie intraveineuse et une augmentation croissante des cardiopathies dégénératives liées à l’âge [15, 59]. Dans les pays développés, l’incidence globale de l’endocardite infectieuse se situe entre 2 et 6 pour 100000 habitants, représentant 0,16 à 5,4 cas pour 1000 hospitalisations [59].

En France cette incidence est de 30 cas pour 1 million d’habitants par an, selon l’enquête multirégionale de 1999 [54, 55]. Au Sénégal la prévalence hospitalière était de 2,14 % à la clinique cardiologique du CHU Le Dantec, selon BA [7] entre 1986 et 1991, elle était passée à 7,24 % selon SOSSOUMIHEN en 1999 [94] et 4,48 % selon Sene en 2010 [90].

L’EI survient sur cœur sain dans 47 % des cas, sur valvulopathie native dans 31% des cas, avec une prédominance des valvulopathies rhumatismales qui sont cependant en régression, sur prothèse valvulaire dans 16 % des cas [53, 55]. Les 6% restants incluent des endocardites sur sondes de pacemaker, cardiomyopathies, ou cardiopathies congénitales, d’où la notion de cardiopathies à risque qui suggère une prophylaxie en cas de situations à risque. Ainsi la notion de cardiopathie à risque a été définie, en tenant compte non seulement de l’incidence de l’EI sur cette cardiopathie mais aussi de sa gravité [53]. Les principaux germes responsables sont le streptocoque dans 50 % des cas, le staphylocoque dans 30 % des cas ; les 20 % restants représentent les entérocoques, les bacilles à gram négatif (BGN), les bacilles à gram positif (BGP), les germes à croissance intracellulaire et les champignons. Il a été mis l’accent sur les EI dues aux germes HACEK (Haemophilus, Actinobacillus, Cardiobacterium, Eikenella, Kingella), qui sont des BGN de croissance lente et les EI dues aux germes intracellulaires, en particulier à Coxiella Burnetii responsable de la fièvre Q [40]. Les EI mycosiques sont rares, graves et souvent retrouvées chez les immunodéprimés. Une porte d’entrée est retrouvée dans plus de la moitié des cas et détermine souvent l’agent causal. Par contre dans environ 20 % des cas aucune porte d’entrée n’est mise en évidence [34]. Le diagnostic d’EI repose essentiellement sur les hémocultures et l’échographie cardiaque, avec l’échographie transœsophagienne qui a apporté de grands progrès dans ce diagnostic. Seulement il est important de préciser qu’il existe des E.I. à hémocultures négatives, dans 5 à 10 % de cas [55]. Les manifestations cliniques de l’endocardite sont multiples et diffèrent selon l’agent étiologique et les facteurs de risque sous-jacents, mais aucune n’est suffisamment spécifique et sensible pour permettre de poser le diagnostic [33]. Son traitement est basé sur l’antibiothérapie de même que la chirurgie qui a considérablement amélioré le pronostic. La prophylaxie est de mise devant toute situation à risque.

L’ETIOPATHOGENIE

L’endocardite infectieuse est due à la contamination par un agent pathogène de l’endocarde le plus souvent préalablement lésé. Plusieurs facteurs étiologiques expliquent la diversité séméiologique : le terrain de survenue, la porte d’entrée et le germe responsable.

Le terrain

L’endocardite survient à tout âge et fréquemment sur un cœur préalablement lésé. Elle survient sur cœur sain dans la moitié des cas, sur valvulopathie native dans un tiers des cas avec une prédominance des valvulopathies rhumatismales [55]. L’endocardite sur prothèse valvulaire est en nette augmentation, de même que celle sur sondes de pacemaker et sur cardiopathies dégénératives [53]. Les cardiopathies congénitales (bicuspidie aortique en nette augmentation) et les cardiomyopathies sont également des terrains où peut se développer une endocardite infectieuse, surtout en occident [53]. C’est ainsi que la notion de cardiopathie à risque a été établie. Par ailleurs, de nos jours, les endocardites infectieuses surviennent souvent sur terrain immunodéprimé surtout si ces patients présentent une porte d’entrée.

La porte d’entrée (PE) 

Elle détermine le germe causal et n’est identifiée que dans la moitié des cas. Il peut s’agir d’un foyer infectieux patent ou latent, d’une situation ou d’un geste susceptibles d’entraîner une bactériémie. Cependant dans 20 % des cas aucune PE n’est retrouvée [34]. On distingue : la PE bucco-dentaire, la PE cutanée, les PE iatrogènes et les autres PE;

✓ La PE bucco-dentaire
Elle est la plus fréquente, retrouvée dans 20 % des cas [34]. Un mauvais état bucco-dentaire ou des soins dentaires, effectués sans couverture antibiotique, sont souvent responsables d’EI à streptocoque [12].
✓ La PE cutanée [34, 61]
Elles sont plus rares et surviennent à la suite d’un furoncle, d’un abcès, d’une brûlure, d’une plaie. Le staphylocoque est le germe le plus souvent retrouvé.
✓ Les autres PE [34]
Elles sont :
● ORL dans 5 % des cas (EI à streptocoques);
● urologiques dans 11 % des cas (EI à entérocoque ou BGN, lors de manœuvres instrumentales ou d’une infection urinaire);
● digestives dans 15 % des cas (surtout chez les personnes âgées, EI à entérocoque ou streptocoque bovis);
● gynéco-obstétricales (lors d’un avortement ou d’un accouchement).

✓ Les PE iatrogènes [34]
Elles sont de plus en plus fréquentes, on distingue : le cathétérisme veineux ou cardiaque, la chirurgie abdominale ou cardiaque, les pacemakers, la fibroscopie haute, la coloscopie, la cystoscopie.

Les situations à risque d’endocardite justifiant une prophylaxie sont les suivantes:
● Extractions dentaires, détartrage, soins dentaires accompagnés de saignement gingival;
● Dilatations œsophagiennes, scléroses de varices œsophagiennes;
● Coloscopie avec biopsies;
● Intubation naso-trachéale;
● Interventions sur les voies urinaires.

Le germe

Les germes responsables de l’endocardite peuvent être identifiés dans le sang par les hémocultures, au niveau de foyers primitifs ou secondaires, au niveau de la porte d’entrée, ou par culture de matériel valvulaire ou prothétique prélevé lors d’une intervention. Dans 10 à 20 % des cas, aucun germe n’est identifié, malgré une endocardite certaine ; ce sont les endocardites dites « à hémocultures négatives » [24, 61].

Les streptocoques
Les streptocoques oraux sont en cause dans 25 % des cas, les streptocoques d’origine digestive dans 20 % des cas [12]. Les streptocoques déficients, à croissance difficile et les streptocoques bétahémolytiques sont plus rares. Le pneumocoque est quant à lui responsable d’endocardites aiguës et mutilantes [12, 51, 61].

Les staphylocoques
Ils sont responsables de 15 à 30 % des EI et sont les plus graves [17,51, 61]. Il s’agit le plus souvent d’EI à Staphylococcus aureus survenant chez des patients porteurs d’une prothèse valvulaire ou d’une sonde de pacemaker, et chez les toxicomanes. Les endocardites à staphylocoques coagulase négative sont plus rares et surviennent préférentiellement sur prothèse valvulaire. La porte d’entrée de ces endocardites est surtout cutanée ou iatrogène [12, 61].

Les bactéries à développement intracellulaire
Elles sont présentes dans 5 % des cas : Bartonella, Brucella, Legionella, Listeria, Chlamydia mais surtout Coxiella Burnetii [24, 61]. Les hémocultures sont négatives et le diagnostic est porté par la sérologie ou la culture cellulaire [24, 61].

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Table des matières

INTRODUCTION
I. L’ETIOPATHOGENIE
I.1. Le terrain
I.2. La porte d’entrée (PE)
I.3. Le germe
I.3.1. Les streptocoques
I.3.2. Les staphylocoques
I.3.3. Les bactéries à développement intracellulaire
I.3.4. Les bactéries du groupe HACEK
I.3.5. Les autres germes
I.4. Les endocardites à hémocultures négatives
II. LA PHYSIOPATHOLOGIE
II.1. La pathologie de l’endocardite
II.2. Les conséquences
II.2.1. Au niveau cardiaque
II.2.2.Les manifestations extra-cardiaques
III. LE DIAGNOSTIC DE L’ENDOCARDITE INFECTIEUSE
III.1. Type de description : Endocardite infectieuse subaiguë et lente ou maladie d’Osler
III.1.1.Les signes cliniques
III.1.2. Les signes paracliniques
III.2. Les formes cliniques
III.2.1. L’endocardite infectieuse aiguë
III.2.2. Les endocardites infectieuses sur prothèse valvulaire
III.2.3. Les endocardites infectieuses du cœur droit
III.2.4. Les endocardites sur sonde de pacemaker
III.2.5. Les endocardites à hémocultures négatives
IV. LES CRITERES DIAGNOSTIQUES
V. L’EVOLUTION – LES COMPLICATIONS
V.1. L’évolution favorable
V.2. Les complications
V.2.1. Les complications infectieuses
V.2.2. Les complications cardiaques
V.2.3. Les complications vasculaires
V.2.4. Les complications neurologiques
V.2.5. Les complications rénales
V.2.6. Les complications articulaires
V.3. Les rechutes
VI. LE DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
VII. LE TRAITEMENT
VII.1. Les buts du traitement
VII.2. Le traitement médical
VII.2.1. L’antibiothérapie
VII.2.2. Le traitement adjuvant
VII.3. Le traitement chirurgical
VII.3.1. Les indications absolues
VII.3.2. Les indications relatives
VIII. LA PREVENTION
VIII.1. Les cardiopathies à risque
VIII.2. Les gestes justifiant une prophylaxie
VIII.3. Les gestes justifiant une prophylaxie
VIII.4. Les modalités de l’antibioprophylaxie
CONCLUSION

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