Approche territoriale de la valorisation des déchets

Les déchets sont indissociables des activités humaines et leur production ne peut être complètement évitée. Dans le cas des déchets municipaux, les villes sont tenues de collecter, transporter et traiter ou disposer les déchets générés sur le territoire, ce qui représente un défi économique important. Au Québec, à titre d’exemple, sur le territoire de la région métropolitaine du Grand Montréal, c’est ainsi près de 2 millions de tonnes de déchets municipaux qui ont été récupérés en 2012 pour un coût global de collecte et de gestion de 300 millions de dollars (Communauté Métropolitaine de Montréal, 2015). Entre 2006 et 2012, bien que le production de déchets municipaux soit restée relativement stable (+ 0,6%), les coûts ont augmenté de 47% (CMM, 2015). En France, la gestion des déchets représente le premier pôle de dépense dans le secteur de protection de l’environnement avec 8,4 milliards d’euros déboursés par les collectivités locales en 2012 (ADEME, 2015). La gestion des déchets est également une source d’impacts environnementaux. En 2011, les activités de collecte et de traitement représentaient 5,6% et 4% des émissions totales des gaz à effet de serre du Québec et de la France respectivement (Institut de la Statistique du Québec, 2015; Ministère de l’Environnement de l’Énergie et de la Mer, 2015).

Néanmoins, les pratiques actuelles, tournées vers le recyclage et la valorisation, ont graduellement transformé la gestion des déchets, dite en « bout de tuyau », vers une gestion de ressources, à l’origine de coûts mais aussi de bénéfices potentiels pour la société (Hultman & Corvellec, 2012). Ainsi, les déchets traités peuvent se substituer à certaines ressources fossiles, dont l’extraction et la transformation sont une cause majeure de pollutions (Behrens, Giljum, Kovanda, & Niza, 2007). C’est ainsi le cas des déchets organiques, ou biodéchets, dont la valorisation par digestion anaérobie, par exemple, permet de fournir de l’énergie et du compost, qui peut être utilisé en complément des produits traditionnels comme engrais et amendement pour les terres agricoles (Boldrin, Andersen, Moller, & Christensen, 2009). La production de ces nouvelles ressources, renouvelables, nécessite néanmoins des investissements de la part des collectivités locales, avec la mise en place d’une logistique de récupération et de traitement des déchets. Au sein de cette logistique, plusieurs choix s’offrent aux décideurs en termes de modes de collecte (Larsen, Merrild, Moller, & Christensen, 2010), de position et tailles de sites de traitement (Eiselt & Marianov, 2015; Pantaleo, Gennaro, & Shah, 2013) ou encore de types de technologies (Rojo, 2009). En plus de devoir répondre à des objectifs de rentabilité économique, les filières mises en place doivent également satisfaire à des critères de réduction d’impacts environnementaux.

La gestion des déchets

La pensée et l’implémentation d’une gestion linéaire des déchets a longtemps prévalu (Wilson, 2007). Cependant, face au problème de raréfaction des ressources fossiles et aux coûts importants de leur gestion, les déchets sont perçus, depuis le début des années 1990, comme une ressource qu’il faut valoriser. La section suivante présente dans un premier temps les définitions de la notion de déchets ainsi que les principes actuels qui encadrent leur gestion. Elle terminera par une revue des différentes filières de traitement existantes et de leurs éléments constitutifs.

La notion de déchets

Historiquement, la définition d’un déchet est celle d’un bien dont son propriétaire ne veut plus et qui est destiné au rebus. Ainsi, la loi du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux en France et la loi sur la qualité de l’environnement au Québec définissent un déchet comme « tout résidu d’un processus de production, de transformation ou d’utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l’abandon. » (France, 1975, Loi n°75- 633; Québec, 1979, Loi L.Q.E., chapitre Q-2). En France, cette loi a donné lieu à 27 articles du Code de l’environnement qui ont pour objectifs les deux principaux facteurs favorisant l’établissement d’une règlementation sur les déchets à cette époque: la protection de la santé publique et celle de l’environnement. Au début des années 1990, un changement de paradigme se produit et le caractère exploitable du déchet apparait dans la règlementation. En France, c’est l’adoption de la loi n°92-646 du 13 juillet 1992 relative à l’élimination des déchets ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l’environnement qui amorce le changement en renforçant la loi de 1975 par l’ajout d’alinéas relatifs à la valorisation éventuelle des déchets (France, Loi n° 92-646, 1992). Au Québec, cette qualité de ressource est introduite de la même manière dans la Loi sur la qualité de l’environnement en 1999 (Québec, Loi L.Q.E., chapitre Q-2, 1999).

Avec ces différents textes, le déchet revêt donc un potentiel exploitable. Pour autant, sa définition ne change pas. Il est toujours assimilé à un bien dont le détenteur n’en perçoit plus l’utilité immédiate ou qui n’assure plus la fonction pour laquelle il était destiné. Aussi, est qualifiée de déchet toute matière qui aurait été mal utilisée. Un exemple est cité par Pongrácz and Pohjola (2004) en agriculture et en aquaculture, où des substances (nutriments, nourriture) terminent en déchets parce qu’ils sont utilisés en trop grandes quantités et n’atteignent pas leurs cibles (plantes, poissons). Seadon (2010) suggère ainsi que le concept de déchet est le résultat d’un mode de pensée inadéquat, dit « en bout de tuyau ». Cette vision ne se focalise pas sur le véritable problème qui serait une utilisation inefficiente des ressources, aussi bien en amont qu’en aval de la production du déchet. En outre, il apparait inapproprié de qualifier de déchet un bien qui présente des caractéristiques ayant encore une valeur pour une entité, quelle qu’elle soit (Pongrácz & Pohjola, 2004). Par ailleurs, l’expression « le déchet des uns fait la fortune des autres », avancée par Gérard Bertolini, directeur de recherche au CNRS, reflète la complexité de la notion de déchets, qui est à la fois un élément dont on souhaite se défaire et une ressource potentielle (Bertolini, 2002).

Les principes de gestion des déchets

« Le meilleur déchet est celui qui n’existe pas ». Cette expression populaire traduit le premier principe (Réduction) de la hiérarchie des 3RV-E (Réduction, Réemploi, Recyclage, Valorisation et Élimination), cadre théorique fondateur de la gestion des déchets moderne. Au Québec, la démarche des 3RV-E est apparue dans la première Politique de gestion intégrée des déchets solides en 1989. Il y est alors mentionné que « la réduction, le réemploi, le recyclage, la valorisation et l’élimination doivent, dans cet ordre, devenir les assises d’une gestion intégrée des déchets solides au Québec » (Ministère du Développement Durable de l’Environnement et des Parcs, 2010, p. 2) sans pour autant préciser une définition des termes composant la hiérarchie. Elle sera donnée plus tard dans le rapport « Déchets d’hier, ressources de demain » rédigé par le Bureau d’Audiences Publiques sur l’Environnement (BAPE) en 1997. Ce rapport, prélude à la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles 1998-2008, reprend en effet la hiérarchie des 3RV-E, en précisant toutefois qu’elle doit être validée par des « études d’opportunité écologique et, le cas échéant, des analyses du cycle de vie » (BAPE, 1997, p. 50). En France, la notion de hiérarchie des voies de traitement apparait explicitement pour la première fois dans l’alinéa II de l’article L541-1 du Code de l’environnement où il est préciser de « mettre en oeuvre une hiérarchie des modes de traitement des déchets consistant à privilégier, dans l’ordre: a) la préparation en vie de la réutilisation, b) le recyclage, c) toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique, d) l’élimination » (France, Article L541-1, Alinéa II, 2010).

En dehors de la notion de réduction à la source, cette hiérarchie, appliquée telle qu’elle, présente cependant certaines limites, comme l’avait pressenti le BAPE. D’une part, ce classement ne tient pas compte des besoins du marché. Un produit recyclé, ou valorisé, n’est vraiment une ressource (utile) que s’il a un débouché et que les consommateurs sont prêts à l’acheter (Hamzaoui-Essoussi & Linton, 2010; Oyedele, Ajayi, & Kadiri, 2014). D’autre part, si cette condition est remplie, des objectifs de performance technique, au moins similaires à ceux du matériau qu’il remplace, doivent être atteints (Cox, 2015). Enfin, la hiérarchie n’intègre pas la question du transport, et du territoire en général, qui peut amputer en partie ou totalement les bénéfices économiques et/ou environnementaux d’un éventuel recyclage (Brambilla Pisoni et al. 2009; Larsen et al. 2010). Cette notion est toutefois abordée ailleurs dans la règlementation (France, Article L541-1, Alinéa I, 2000).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 La gestion des déchets
1.1.1 La notion de déchets
1.1.2 Les principes de gestion des déchets
1.1.3 Les filières actuelles de traitement des déchets municipaux
1.1.3.1 La collecte et le tri
1.1.3.2 Le transfert et le transport
1.1.3.3 Le traitement et la valorisation
1.2 Les outils d’aide à la conception des filières de traitement
1.2.1 Localisation des sites de traitement
1.2.2 Taille et nombre des sites de traitement
1.2.3 Niveaux de hiérarchisation du réseau de transport
1.3 La dimension territoriale dans la conception de filières de traitement
1.3.1 L’impact relatif des activités de transport
1.3.2 La prise en compte des spécificités territoriales
1.3.3 Les indicateurs de performance
CHAPITRE 2 PRÉSENTATION DU PROJET DE RECHERCHE
2.1 Problématique de recherche
2.2 Hypothèses de recherche
2.3 Objectifs de recherche
CHAPITRE 3 ARTICLE 1: UNE ANALYSE SPATIALE DE STRUCTURES DE TRANSPORT DES DÉCHETS HIÉRARCHISÉES SOUMISES À DES CONDITIONS TERRITORIALES CHANGEANTES
3.1 Abstract
3.2 Introduction
3.3 Methodology
3.3.1 The spatial distribution scenarios
3.3.2 The economic model
3.3.3 Creation and spatial analysis of the structures
3.3.3.1 Creation of the structures
3.3.3.2 Spatial analysis of the structures
3.4 Results
3.4.1 Comparison of the hierarchical and non-hierarchical waste transport structures
3.4.2 Sensitivity analysis on the payload (PL)
3.4.3 Spatial analysis of the structures
3.5 Discussion
3.6 Conclusion
CHAPITRE 4 ARTICLE 2: UNE APPROCHE TERRITORIALE POUR L’ÉVALUATION DE L’ÉCHELLE SPATIALE D’UNE FILIÈRE DE TRAITEMENT DES DÉCHETS
4.1 Abstract
4.2 Introduction
4.3 Methodology
4.3.1 Collection and transport model
4.3.2 Waste-to-biomethane recovery model
4.3.2.1 Biomethane production
4.3.2.2 Costs and embedded energy assessment
4.3.3 Performance indicators
4.3.3.1 Profitability assessment
4.3.3.2 District’s economic and energetic contribution to the supply chain’s global efficiency
4.4 Description of the case study: Montreal
4.5 Results and discussion
4.5.1 Districts contribution to the global efficiency
4.5.2 Districts contribution with other management strategies
4.5.2.1 Alternative facility location
4.5.2.2 Alternative treatment technology
4.5.3 Perspectives on the approach
4.6 Conclusion
CHAPITRE 5 ARTICLE 3: UNE APPROCHE TERRITORIALE DE LA VALORISATION DES DÉCHETS: L’EFFET À L’ÉCHELLE D’UNE UNITÉ TERRITORIALE D’UNE DÉCENTRALISATION DE LA FILIÈRE
5.1 Abstract
5.2 Introduction
5.3 Methodology
5.3.1 Territorial approach of a recovery chain’s design
5.3.1.1 Recovery potentials
5.3.1.2 Transport capacity
5.3.2 Description of the scenarios
5.3.2.1 Waste collection and transport
5.3.2.2 Waste recovery
5.3.3 Primary fossil energy assessment
5.4 Description of the case study: Montreal, Canada
5.5 Results and discussion
5.5.1 Recovery potentials for centralized systems
5.5.2 Recovery potentials for decentralized systems
5.5.3 Transport capacity
5.6 Conclusion
CONCLUSION

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