Approche opérationnelle pour une gestion durable des sédiments de dragage dans des filières de génie civil

Afin de maintenir les activités maritimes et fluviales, les ports et les chenaux sont régulièrement dragués pour assurer une hauteur minimale de navigation. En France, plus de 50 Mm3 de sédiments sont dragués chaque année et la gestion à terre de ces derniers devient de plus en plus contraignante. En effet, la saturation des espaces de stockage et surtout la présence de contaminants tels que les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et les métaux lourds dans les matériaux dragués font que les sédiments nécessitent des traitements conséquents avant leur mise en dépôt. La gestion de ces quantités importantes de sédiments constitue un enjeu technique, économique et environnemental majeur. Pour pallier à cette problématique, trouver des alternatives qui s’inscrivent dans une optique de développement durable devient une nécessité. À la lumière de ce qui précède, plusieurs filières de valorisation ont été développées, notamment dans le secteur du génie civil. Elles permettent d’absorber chaque année des quantités très importantes de sédiments. Une identification physico-chimique préalable des sédiments permet d’adapter le traitement en fonction des applications visées. Contrairement aux matériaux naturels, les sédiments sont de nature très hétérogène et contiennent généralement de la matière organique et des éléments polluants ayant une influence notable sur leurs utilisations. Dans cette thèse nous aborderons les différents aspects de caractérisation, de formulation et de modélisation de ces contraintes spécifiques liées au matériau sédiment.

Les sédiments de dragage

Définition et origine

Les sédiments de dragage sont des particules fines issues principalement de l’érosion des continents et des rejets provenant de l’activité humaine. Ces particules sont transportées le plus souvent par le vent, les cours d’eau ou la gravité, et finissent par se déposer dans les fonds marins et les rivières : on distingue alors les sédiments marins et les sédiments fluviaux. Selon SCHNEIDER [1], les sédiments ont principalement deux origines : endogène ou exogène (Figure I.1). On entend par endogène les sédiments dont l’origine est autochtone au milieu, telle que la décomposition des débris animaux et des macrophytes (végétaux). Par exogène, on désigne les apports externes par précipitation des poussières atmosphériques ou par ruissellement des eaux ; ils peuvent être d’origine naturelle (érosion des sols, décomposition de la matière végétale) ou issus de l’activité humaine (rejets industriels, domestiques et agricoles).

Composition des sédiments 

Le sédiment est un matériau très hétérogène. La nature et la composition d’un sédiment dépendent de son origine ; selon SCHNEIDER [1], il est caractérisé essentiellement par :
• Sa granulométrie ;
• Sa composition minérale ;
• Ses teneurs en eau, en matière organique et en polluants.

En effet, on verra dans la suite de ce travail que ces trois caractéristiques constituent les éléments dominants qui prédéfinissent le comportement des sédiments.

Composition granulométrique des sédiments
La distribution granulométrique des grains solides d’un sédiment – ou de quelconque matériau en général – est une caractéristique physique qui permet de classer le matériau selon la taille de ses particules élémentaires. Elle définit la classe du matériau indépendamment de sa nature chimique. Chaque catégorie se distingue par des propriétés physiques et géotechniques qui lui sont propres .

D’autres classifications basées sur la granulométrie permettent d’attribuer des dénominations conventionnelles dans le but de regrouper les sols en familles présentant des caractéristiques géotechniques très voisines. Parmi les classifications couramment utilisées, il y a la classification triangulaire de Taylor qui prend la forme d’un triangle dont chaque côté représente les pourcentages d’argile, de limon et de sable contenus dans le sol étudié .

La distribution granulométrique joue un rôle important dans le comportement mécanique et géotechnique des sédiments. En effet, plus la distribution granulométrique est étalée1 et plus la capacité portante du matériau formulé est élevée [3]. Selon DUBOIS [4], la fraction fine contenue dans le sédiment et correspondant aux particules dont le diamètre est inférieur à 80 µm, provoque des comportements complexes. En effet, les particules fines – et notamment les argiles – sont de nature cohésive et se caractérisent par une surface de contact importante et chargée positivement, ce qui leur donne un grand pouvoir d’adsorption des contaminants. Plusieurs études ont montré qu’environ 70 % des contaminants sont fixés sur la fraction fine (< 45 µm), tandis que la contamination est quasi nulle sur les autres fractions [5][6].

L’eau dans les sédiments

La teneur en eau W exprimée en pourcentage (%), est définie comme étant le rapport entre la masse d’eau présente dans un matériau et la masse de sa fraction solide. Pour les sédiments, elle est très variable et dépend principalement du type de drague et de la nature du sédiment [7]. L’eau contenue dans le sédiment peut se présenter sous plusieurs formes selon son degré de liaison avec les particules :
• L’eau libre : elle n’est pas liée aux particules et circule librement à travers les grains. Elle peut être éliminée par une simple décantation ;
• L’eau capillaire : elle représente l’eau qui est liée aux particules fines par des forces capillaires ;
• L’eau colloïdale : c’est l’eau qui forme les hydrates de colloïdes, elle peut être éliminée par de simples procédés de séparation solide-liquide ;
• L’eau intercellulaire : c’est l’eau qui est chimiquement liée aux particules et qui entre dans la composition chimique du matériau, elle ne peut être éliminée que par des procédés thermiques.

La matière organique (MO)

L’origine de la matière organique dans les sédiments est très variée, elle provient souvent de débris végétaux et de la décomposition de différents micro-organismes (bactéries, champignons…) [8][9]. D’après COLIN [10], la fraction organique d’un sol peut être classée en deux catégories :
➤ Les substances non humiques : cela regroupe les éléments dont la structure simple est connue dans la chimie classique (acides organiques, acides aminés, protéines, lipides, etc.) ;
➤ Les substances humiques : elles représentent entre 85 et 90 % de la matière organique totale d’un sol et n’appartiennent à aucun groupe de la chimie ou la biochimie, ce qui rend leur définition difficile. Les acides humiques ont une structure très variée, hétérogène et complexe. Cependant, ils ont un élément en commun : une molécule hydrophile. En effet, la capacité de rétention de ces molécules peut atteindre 20 fois leur poids, et elles sont également ioniques .

Les substances humiques peuvent être classées en fonction de leur solubilité et du pH en trois fractions :
• Les acides humiques, insolubles dans l’acide mais solubles en milieu basique ;
• Les acides fulviques, solubles dans les milieux basiques et acides ;
• Les humines : contrairement aux acides fulviques, elles sont insolubles dans les acides et les bases.

Selon DUCHAUFOUR [11], il n’existe pas de différence évidente entre ces trois fractions mais une évolution continue dans le sens suivant :

Acides fulviques → Acides humiques → Humines

Les substances humiques présentes dans la matière organique peuvent se regrouper avec des composés minéraux et former des associations organo minérales. Des liaisons peuvent alors s’établir entre l’ion métallique de la particule minérale et le composé organique pour former des complexes très stables. Si l’ion métallique fait partie de la structure cohésive de la particule minérale, par exemple dans le cas des argiles, alors il résulte une dissolution de celle-ci [6][12]. Pour les sédiments, la quantité de matière organique est moins importante comparée à la phase minérale. Selon SCHNEIDER [1] elle représente entre 2 et 10 % de la masse totale pour les sédiments issus de cours d’eau vive. Néanmoins, elle a un impact non négligeable sur les propriétés physiques, chimiques et géotechniques du sédiment et perturbe les traitements aux liants hydrauliques [13][14][15]. Plusieurs études ont été réalisées dans ce sens et ont mis en évidence une relation forte entre la teneur en MO, la limite de liquidité (WL) et la limite de plasticité(WP) [15][16][17]. En effet, le travail réalisé par HAMOUCHE et al. [16] sur un sédiment du port de Dunkerque a confirmé ce rapport. Les auteurs de cette étude s’appuient sur une méthodologie qui consiste à comparer les caractéristiques physiques (masse volumique des grains solides, limites d’Atterberg, surface spécifique BET , valeur au bleu de méthylène (VBS)) d’un même sédiment avec des teneurs en MO différentes. La teneur en MO du sédiment a été variée de 5 à 15 % avec des pas de 2,5 %. Pour obtenir ces valeurs, ils ont réalisé un traitement, d’une part avec du peroxyde d’hydrogène pour diminuer la teneur en MO, et d’autre part avec ajout d’un compost à plus de 40 % de MO pour produire l’effet inverse.

Problématiques liées à la gestion des sédiments de dragage

Les polluants dans les sédiments

Les rejets industriels, urbains et agricoles représentent la principale source de contamination des sédiments de dragage. En effet, ces activités sont à l’origine d’un grand nombre d’apports de substances à caractère toxique avéré : métaux lourds, hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), organochlorés , organostanniques, pesticides et biocides divers [22]. De par la nature fine des sédiments, ces derniers constituent le refuge final des différents polluants : il a été prouvé que les substances toxiques se concentrent majoritairement dans la partie fine (< 45 µm) [5][23] et dans la MO qui parvient à immobiliser les polluants organiques et les métaux lourds [22 [24]. Le problème de la mobilité des éléments toxiques et leurs effets sur les organismes vivants est posé dès lors qu’une perturbation de leur l’environnement physico-chimique est provoquée, notamment par des opérations de dragage, d’immersion ou de mise en dépôt. Selon ALZIEU [22], les principales caractéristiques physico-chimiques des matériaux dragués, qui gouvernent les interactions entre le sédiment et les substances toxiques sont :
• La quantité et le type de particules fines (pélites) ;
• Le pH ;
• Le potentiel redox : mesure de la réactivité entre les espèces chimiques ;
• La quantité et la nature des cations et anions présents ;
• Le contenu en MO (spécialement les acides humiques) ;
• Le degré de salinité.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I Revue bibliographique
1. Les sédiments de dragage
2. Problématiques liées à la gestion des sédiments de dragage
3. Valorisation des sédiments de dragage dans le génie civil
4. Utilisation des liants hydrauliques, des additions minérales et des sous-produits industriels dans le génie civil
5. Outils d’aide à la décision pour la gestion et la valorisation des sédiments de dragage
6. Conclusion du chapitre
Références
Chapitre II Optimisation opérationnelle de la valorisation des sédiments de dragage
1. Introduction
2. Applications ciblées dans le logiciel
3. Aspect économique de la gestion des sédiments de dragage
4. Présentation du logiciel
5. Validation du modèle mathématique de l’outil
6. Conclusion du chapitre
Références
Chapitre III Caractérisation des sédiments de dragage
1. Introduction
2. Site de prélèvement
3. Caractérisation physique des sédiments utilisés
4. Caractérisation minéralogique des sédiments utilisés
5. Évaluation environnementale des sédiments
6. Conclusion
Références
Chapitre IV Optimisation du squelette granulaire des bétons
1. Objectif du chapitre
2. Introduction générale sur les enrochements artificiels
3. Cahier des charges
4. Optimisation des formulations
5. Conclusion
Références
Chapitre V Élaboration d’éco-liants ternaires à base d’additions minérales issues de sous-produits industriels
1. Introduction
2. Introduction aux plans d’expériences
3. Plans de mélange
2. Définition du plan de mélange utilisé
3. Réalisation du plan expérimental
4. Conclusion
Références
Chapitre VI Durabilité des bétons à base de sédiments et de liants ternaires
1. Introduction
2. Récapitulatif des formulations étudiées
3. Caractérisation des formulations de bétons à base de liant ternaire
4. Vers une évaluation de la durabilité des formulations étudiées
5. Conclusion
Références
Conclusion générale

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