Apports de la psycholinguistique à la recherche sur la compréhension en lecture

Épreuve de compréhension en lecture en L2

CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE

Dans ce chapitre, nous présenterons le cadre conceptuel dans lequel s ‘,inscrit notre recherche. Nous tenterons de cerner le processus de compréhension en lecture tel qu’ il a été décrit par les psycholinguistes. Étant donné que les premières recherches en compréhension en lecture en langue seconde ou étrangère se sont appuyées sur les travaux réalisés en langue première (Bernhardt, 2005), nous allons, en premier lieu, faire une synthèse des apports de la psycholinguistique à la compréhension de l’ apprentissage de la lecture en LI et, en deuxième lieu, en L2. Plus précisément , dans le cadre de la présente étude , nous nous intéresserons , tout particulièrement, à ce qui se passe en ‘langue seconde.

Apports de la psycholinguistique à la recherche sur la compréhension en lecture en LI

Entre les années 1970 et 1990, la recherche en lecture en langue seconde ou étrangère a été fortement influencée par la Théorie des schémas et la Psycholinguistique (Bernhardt, 2005).Plusieurs auteurs ont essayé de mettre en lumière le fonctionnement de la compréhension dans le processus de lecture en langue seconde (L2) ou langue étrangère (LE). Avant de procéder à la recension d’études ayant examiné ce processus complexe de traitement de l’information, il importe de se pencher sur la signification de cette notion. Selon le Dictionnaire actuel de l ‘Éducation de Legendre (2005), dans les modèles psycholinguistiques contemporains, le lecteur possède un rôle actif dans l’ interaction avec le texte et le contexte. Dans son ouvrage, Legendre met en évidence que la compréhension devient alors une opération dans laquelle un lecteur utilise les informations syntaxiques, sémantiques, rhétoriques et pragmatiques contenues dans un texte, pour appréhender le message proposé par l’auteur et, au-delà des faits et de l’ information, pour construire ses propres significations, dans un contexte.En d’ autres termes, le lecteur, le texte et le contexte constituent les trois composantes fondamentales du processus de compréhension. Lors de cette opération interactive, le lecteur interprète le texte à partir de ses connaissances, de ses sentiments, de ses opinions, de sa personnalité et de son intention de lecture (Legendre, 2005). De cette façon , non seulement lacompétence linguistique en L2/LE et les connaissances antérieures sont nécessaires , voire ~ndispensables, pour qu’ il y ait compréhension, mais aussi interviennent des facteurs affectifs comme l’ attitude, les émotions ainsi que des fac~eurs liés aux intentions de lecture comme l’ intérêt.
Dans la perspective de la psycholinguistique textuelle, Fayol (1992) considère que la compréhension d’ un texte résulte de l’ interaction entre le traitement de l’ information du texte et la mise en œuvre des connaissances conceptuelles et linguistiques préalables du lecteur. Or, cette compréhension est contrainte par une limite de la capacité de traitement de l’ information. Ces connaissances conceptuelles, appelées schémas , correspondent à des réseaux sém’:lntiques organisés hiérarchiquement et dont les éléments peuvent être activés plus ou moins automatiquement en fonction de la nature de leurs relations. En ce sens, il a été démontré que la co~aissance préalable dont dispose le sujet conditionne la compréhension. Prouvé par Birkmire
(1985) et rapporté par Fayol (1992) dans le chapitre intitulé «Comprendre ce qu’ on lit: de
l’ automatisme au contrôle» dans Psychologie cognitive de la lecture: « la connaissance
antérieure concernant le domaine évoqué par le texte est un déterminant essentiel de la compréhension de ce texte, y compris au cours même de la prise d’information » ~. 77). De même, les résultats des recherches ont permis de démontrer que l’ organisation et l’ ordre de présentation de l’ information jouent également un rôle facilitateur dans la compréhension, alors que le manque de connaissances aurait des effets négatifs sur la compréhension.
En résumé , « la connaIssance conceptuelle antérieure et son organisation conditionnent la compréhension de textes, notamment la prise d’ informations et l’ intégration en une représentation globale cohérente» (Fayol, 1992, p. 77). Cet auteur signale que l’ activation de ces concepts et des schémas se fait directement ou indirectement à partir des éléments linguistiques présents dans le texte. Toutefois, les connaissances lexicales et syntaxiques que le lecteur possède de la langue véhiculée par le texte à lire vont activer sa compréhension laquelle sera facilitée ou complexifiée en fonction de ses connaissances linguistiques tant sur le pl~n lexical que sur le plan morphologique, grammatical, syntaxique et fonctionnel.
D’ après Coirier, Gaonac’ h et Passerault (1996), la psycholinguistique textuelle considère la compréhension comme un ensemble d’ activités s’ inscrivant toujours dans une situation
langagière donnée et faisant intervenir des interlocuteurs particuliers avec leurs intentions de communication, leurs buts et leurs connaissances. «Dans une perspective de psychologie cognitive, la différenciation de types de textes doit se faire en référence à la variété des activités en jeu dans le traitement des textes» (Coirier et al. , 1996, p. 39). Selon ces chercheurs:
… chaque type de texte est susceptible de déclencher d’ emblée des schémas de traitement différents: mobiliser les connaissances préétablies du domaine, mettre en œuvre des compétences d’ ordre logique, activer des scripts, des structures motivationnelles, ou même se préparer à ne traiter dans le texte que ce qui est strictement nécessaire à la réalisation d’un objectif donné.
À l’ instar de Fayol (1992), Coirier et al. considèrent que lors du processus de compréhension, une partie des connaissances qui composent la mémoire à long terme serait activée, comme dans le cadre d ‘ un modèle en réseau (modèle de Kintsch, 1988) où les différents nœuds qui le composent seraient interconnectés. Ainsi, lorsqu’ on lit un mot, non seulement la forme graphique et/ou phonologique est activée , mais aussi l’ ensemble des significations qui lui sont associées. Cette activation se propage dans le réseau, ce qui fait qu’un élément peut être activé soit directement, soit indirectement par le biais d’ autres nœuds. Selon ces auteurs, le sens d’ un mot ou d’une phrase est « conçu comme la partie momentanément activée du réseau sémantique et la signification doit alors être considérée comme toujours incomplète et provisoire». Ainsi, tel que mentionné par Coirier et al. (1996), les recherches montrent que lorsqu’ on lit un mot ambigu, situé à la fin d’une phrase qui lève l’ambiguïté, les différents sens possibles du mot sont, dans un premier temps, simultanément activés (processus de construction) et ce n ‘ est qu’ après quelques secondes que le sens conforme au contexte reste seul activé (processus d’ intégration
sémantique) à la suite de l’ élimination des éléments non pertinents. Le mérite de cette approche d’ inspiration connexionniste repose sur le fait de considérer la construction de la représentation du sens de l’ énoncé comme uniquement contrainte par la nature et la force des liens unissant les différents éléments du réseau de connaissances activées en mémoire à long terme, ce qui permet
d’ expliquer un certain nombre de phénomènes tels l’élaboration automatique de certaines inférences au cours de la lecture ou l’ accessibilité accrue d ‘unités appartenant au même réseau de connaissances que les unités directement activées (Coirier et al. , 1996).
Pour Coirier et al. , le processus d’ intégration sémantique comprend donc deux composantes interreliées: a) une composante « horizontale» à partir de laquelle chaque élément nouveau du
texte est intégré aux éléments déjà traités ; et b) une composante « verticale », fortement liée aux
connaissances du sujet (schémas , scripts) et à ses objectifs. Ces auteurs (Colrier et al. , 1996)
conviennent que :
Construire la signification du texte suppose de procéder à l ‘ articulation des propositions élémentaires présentes dans la base de texte, puis d’ élaborer progressivement la macrostructqre hiérarchisée définissant l’ organisation globale du texte. Ces opérations ne suffisent toutefois pas à rendre compte complètement de la représentation qui sera finalement établie. À des degrés divers, tout texte comporte en effet une quantité importante d’ informations implicites. Le lecteur doit alors reconstruire ces dernières en faisant intervenir dans le traitement sa connaIssance générale du monde.En conséquence , pour comprendre un texte il est nécessaire de mettre en œuvre toute une série de traitements cognitifs permettant de : 1) « rétablir les informations implicites» et 2) « gérer la
construction macrostructurale » grâce à l ‘ intervention de différents types de schémas existants
dans les représentations préalables du lecteur tels le~ connaissances générales sur l’ organisation
du monde, les relations logiques, les séquences chronologiques stables dans la vie quotidienne,
les normes socioculturelles relatives à la structure plus ou moins spécifique de différents types de
discours ou de textes. Ainsi, Coirier et al. (1996) concluent que « la représentation du texte est
donc construite dans le cadre d’ une interaction complexe entre les caractéristiques du texte, les ‘
connaissances du lecteur et les éléments pertinents de la situation de lecture» .Pour Gaonac’ h et Golder (1998), dans leur ouvrage Lire et comprendre: psychologie de lalecture, lire c’ est interpréter, inférer, intégrer. Ils considèrent que: La compréhension est une interprétation: nous interprétons en permanence l’ information que nous lisons. En d ‘ autres termes, la signification du texte ne peut pas être extraite de ce dernier; elle doit nécessairement être construite par un lecteur actif qui, pour cela, fait intervenir ses connaissances afin d’ élaborer des inférences.Décrite par Gaonac ‘ h et Golder dans le même ouvrage, selon un modèle componentiel de la lecture/compréhension, la compréhension peut être conçue comme une activité cognitive composée d’un ensemble de processus. Quand le lecteur rencontre un mot, simultanément il le reconnaît (accès lexical) et active les caractéristiques sémantiques correspondantes (codage’ sémantique) , ce qui correspond à des traitements lexicaux. Ensuite, il regroupe les mots selon leur
organisation syntaxique (découpage syntaxique), assemblage qui conduit à la formation de propositions (intégration sémantique) et qui satisfait aux traitements syntaxiques. Finalement, l’assemblage des propositions conduit à la constitution d’une représentation du texte, c’ est-à-dire
à des traitements textuels. Ce processus de lecture/compréhension comporte alors deux composantes étroitement liées: le texte – qui peut varier quant à sa forme et à son contenu – et le lecteur – qui peut varier quant à ses connaissances et aux opérations cognitives mises enjeu. De façon générale , d’ après Gaonac’h et Golder (1998) :
…comprendre un texte consiste à construire un « modèle mental de situation» dans lequel l’ information du texte est élaborée ,• interprétée à partir des connaissances préalables des lecteurs, et intégrée dans celles-ci. Ces connaissances préalables facilitent la mise en œuvre d’un certain nombre de processus essentiels à la compréhension du texte: inférences pour rétablir l’ implicite, mise ~n relation des différentes informations du texte pour construire une représentation cohérente
De façon schématique, le lecteur décode les mots tout en ayant recours à un ensemble de traitements cognitifs de haut niveau afin de rétablir les informations implicites et construire ainsi une représentation cohérente à partir de ses connaissances préalables, soit ses connaissances générales sur l’ organisation du monde, sur les relations logiques entre les événements , sur la structure des textes, etc. En ce sens, les auteurs nous font savoir qu’un domaine familier, dans la mesure où il permet l’ activation de connaissances spécifiques, facilite l’activation des processus inférentiels lesquels facilitent, à leur tour, l’intégration des éléments de la phrase (p. 82). Tout
n’ est pas dit dans un texte et le lecteur doit inférer des renseignements lors de la lecture afin de
rétablir la cohérence du texte initial. Gaonac’h et Golder distinguent donc deux types d’ inférences: 1) les inférences logiques, permettant l’intégration de l’information concemant,les relations de condition, de conjonction, de disjonction, etc. ; 2) les inférences pragmatiques, fondées sur des enchaînements probables en fonction des buts du lecteur, de la situation de lecture, etc. Également , les inférences peuvent être nécessaires , sinon la compréhension échoue, ou élaboratives , c’est-à-dire, non indispensables à la cohérence. L’ ensemble de ces processus inférentiels dépend, d’une part, de l’âge des sujets et, d’ autre part, du contenu des textes. D’après le modèle de Kintsch (1978) repris par Gaonac ‘h et Golder (1998), lors de la phase d’ interprétation, le lecteur devra sélectionner l’ information importante. Lorsqu’ il lit, l’information est décomposée en éléments microstructurels (des blocs de propositions) et, ensuite, en éléments macro structurel s (plus ou moins un résumé du texte). Au niveau micro structurel , la forme littérale du message est conservée en mémoire à court terme, ce qui correspond à l ‘ intégration intra-phrastique. Quand le lecteur arrive à la fin d’ une proposition, il relie l’ information lue avec celle retenue dans sa mémoire à court terme . S’ il ne parvient pas à établir des relations, si cette information n’ est pas recouverte par celle de sa mémoire à court terme, alors il devra établir des inférences, ce qui signifie qu’ il devra chercher dans sa mémoire à long terme « les informations nécessaires pour accrocher les informations actuellement lues aux informations précédemment lues» et construire ainsi la continuité du texte. Parallèlement, le lecteur réalise un traitement macro structurel des informations textuelles en établissant l’ information importante du texte par généralisation , suppression, etc. Ceci ressemblerait approximativement à un résumé du texte.En bref, «la lecture implique la réalisation d’ une série de traitements de différents niveaux» (signification des mots, interprétation des groupes de mots, intégration des informations nouvelles aux informations anciennes) que le lecteur doit réaliser au fur et à mesure qu’ il lit, tout en gardant en «mémoire permanente» l’information qu’il juge importante et en mémoire de travail (MT) l’ information qui va lui permettre d’ intégrer les informations suivantes (Gaonac’ h & Golder, 1998, p. 86). Or, ce processus suppose une négociation entre le coût cognitif du traitement et la capacité de stockage de la mémoire de travail. En fait, pour comprendre il faut mettre en œuvre plusieurs activités simultanées qui représentent une charge cognitive importante pour la capacité fonctionnelle de la MT, ce qui alourdit la tâche et rend difficile la compréhension laquelle se révèle alors insatisfaisante. Cependant, en allégeant la charge qui pèse sur l’ activité de lecture, soit en simplifiant le vocabulaire, la syntaxe, en rendant certaines informations plus saillantes, le lecteur écoJ?omiserait les ressources cognitives qu’ il aurait normalement dû consacrer à ces traitements de bas niveau et le niveau de compréhension serait meilleur. On sait également que certains facteurs ‘ textuels tels la familiarité du domaine et le type de texte « permettent de réduire le coût global de l’ activité en rendant certaines opérations plus faciles ». De ce point de vue, plus certains processus seront automatisés (par exemple, le décodage) , plus le lecteur disposera d’autres ressources cognitives pour les autres opérations , lui permettant de réaliser efficacement l’ ensemble de son activité. Toutefois, l’ automatisation du décodage n’ est pas un facteur suffisant et déterminant d’ une bonne compréhension. Gaonac’ h et Golder précisent que «le niveau de compréhension des textes écrits dépend du décodage et des facultés de compréhension en général, en relation avec le coût cognitif de l’ activité de lecture. Ce coût cognitif dépend d’ un certain nombre de facteurs textuels» tels que les connaissances conceptuelles (les types textuels et les connaissances du domaine évoqué par le texte) qui interviennent fortement dans l’ activité de compréhension. Évidemment , lire c’ est comprendre, mais pour cela il faut exercer les mécanismes qui permettent la compréhension, les traitements de bas et de haut niveau.

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Table des matières

1 CONTEXTE DE LA RECHERCHE
2 PROBLÉMATIQUE DE LA RECHERCHE
3 CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE
3.1 Apports de la psycholinguistique à la recherche sur la compréhension en lecture en LI
3.2 Apports de la psycholinguistique à la recherche sur la compréhension en lecture en L2
3.3 Synthèse
4 ÉTAT DE LA QUESTION
4.1 Études en langue seconde
4.1.1 Études portant sur les connaissances antérieures
4.1.2 Étude portant sur l’intérêt
4.1.3 Études portant sur l’intérêt et sur les connaissances antérieures
4.2 Étude de Carrell et Wise (1998)
4.3 Synthèse
5 MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
5.1 Modèle de recherche retenu
5.2 Population
5.3 Instruments de mesure
5.3.1 Questionnaire d’intérêt
5.3.2 Questionnaire des connaissances antérieures
5.3.3 Épreuve de compréhension en lecture en L2
5.4 Déroulement des passations
5.5 Modalités de traitement des données
6 PRÉSENTATION ET ANALYSE DES RÉSULTATS
6.1 Description générale des résultats
6.2 Synthèse des résultats
7 INTERPRÉTATION ET DISCUSSION
7.1 Discussion des résultats obtenus
7.2 Limites de la recherche et recherches à venir
7.3 Retombées pédagogiques
8 CONCLUSION

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