Aperçu des pratiques enseignantes relatives à la presse dans les écoles professionnelles vaudoises

Le réel (ou presque): Aperçu des pratiques enseignantes relatives à la presse dans les écoles professionnelles vaudoises

L’examen des prescriptions fédérales et locales fournit de précieuses informations, mais ne nous apprend rien de ce que les enseignant-e-s font de la presse dans leurs cours ni des objectifs qu’ils assignent à cet outil. En effet, le propre de toute règle – qu’elle soit juridique ou autre – est que, du simple fait de son existence, elle permet un jeu sur la règle, c’est-à-dire une variété d’usages et de rapports à la règle, de telle sorte que de la règle à la pratique il y a nécessairement un écart. Les prescriptions sont ainsi appliquées de diverses manières, parfois même de façon contradictoire, voire pas appliquées du tout. Il ne s’agit pas ici de rendre compte de la variété – a priori infinie – des pratiques enseignantes relatives à la presse, mais seulement de tenter de percevoir comment les prescriptions susmentionnées se traduisent dans la réalité de l’ECG dans les établissements retenus.
L’étude des pratiques se heurtent à plusieurs obstacles, dont le principal réside sans doute dans le décalage entre le discours et la pratique. Il ne s’agit pas là d’une spécificité de la profession d’enseignant-e : la sociologie a montré de longue date que, placé devant un questionnaire ou en situation d’entretien, tout individu a tendance à redéfinir les frontières entre ce qu’il fait et ce qu’il dit qu’il fait, en fonction notamment de ce qu’il estime obligatoire, légitime, possible ou souhaitable de faire et de dire, eu égard au récepteur et à ses attentes présumées. Aussi, de nombreux facteurs interviennent et tendent à brouiller la communication sur les pratiques individuelles. Les sociologues ont développé toutes sortes d’outils méthodologiques pour surmonter cet obstacle, mais ces derniers sont d’un usage excessivement coûteux par rapport aux enjeux et à la portée du présent travail. Nous avons donc exclu de procéder à une enquête sociologique rigoureuse auprès de nos pairs et des cheffe-s de file de culture générale de la vingtaine d’écoles professionnelles du canton et nous nous satisferons d’un aperçu reposant d’une part sur un certain nombre d’observations.
Nous avons adressé cinq questions à nos interlocuteurs. La première visait à vérifier notre compréhension du PEE de l’école considérée. La deuxième portait sur les supports et moyens à disposition pour enseigner la presse. La troisième portait plus généralement sur l’utilisation de la presse dans les cours et les examens d’ECG. Quant à la quatrième, elle avait trait à l’état des discussions au sein de la file sur la presse à la fois comme thème et comme moyen d’enseignement. Enfin, la cinquième question visait à éclairer le lien entre prescriptions et pratiques individuelles. Nous avons ainsi demandé à nos interlocuteurs si les thèmes relatifs à la presse faisaient partie du champ d’épreuve des examens intermédiaire et finaux de culture générale. La réponse devait nous permettre d’estimer la probabilité que les enseignant-e-s de culture générale enseignent effectivement ces thèmes : si ces thèmes et les objectifs correspondants figurent au champ d’épreuve, alors la probabilité est forte que les enseignante- s les traitent avec leurs classes. Dans le cas contraire, il est probable que ces thèmes seront relégués au second plan, voire purement et simplement exclus du programme. Par ailleurs, nous avons consulté les supports de cours du CEPM et de l’EPSIC pour voir comment la presse y est traitée10.
La presse, un thème secondaire, rarement enseigné, exceptionnellement évalué Des quatre établissements où la presse – pour elle-même ou parmi d’autres médias – constitue un thème d’enseignement, seule l’ERACOM fait figurer le thème concerné dans le champ d’épreuve des examens intermédiaire et final d’ECG. Dans les trois autres écoles, ces thèmes ne sont donc pas absolument obligatoires, puisque les élèves ne seront pas évalués sur les objectifs correspondants. Leur traitement dépendra donc des « affinités » des enseignant-e-s – pour reprendre le terme employé par Cyril Curchod – et du temps à disposition, étant entendu que dans ces trois établissements le programme de deuxième année, respectivement de première année (à l’EPSIC), est réputé très chargé en comparaison avec celui des autres années. Concernant l’ERACOM, on relèvera toutefois que le nouveau PEE, qui entrera probablement en force au 1er août 2015, s’accompagnera d’une exclusion de la presse du champ d’épreuve de l’établissement. Nous en déduisons que la presse occupe une place clairement subordonnée dans la hiérarchie des thèmes de formation des quatre établissements sous revue. Plusieurs raisons ont été avancées par nos interlocuteurs, mais une seule est revenue constamment, toutes écoles confondues : les thèmes figurant aux champs d’épreuve sont si nombreux et volumineux que les autres thèmes ne sont traités que marginalement, voire purement et simplement exclus du programme.
Ceci étant, ces thèmes n’en deviennent pas pour autant facultatifs. Donc, on peut tout de même se demander dans quelle mesure les enseignant-e-s y accordent de l’importance et les enseignent. À cet égard, les supports de cours peuvent fournir des indications intéressantes.
En effet, si un support de cours comporte des fiches d’activité sur les thèmes concernant la presse, on peut penser que l’incitation à enseigner ces thèmes sera plus forte que si l’enseignant-e doit tout créer ex nihilo.
Dans le support de cours du CEPM, la séquence thématique consacrée aux « Médias » consiste en cinq fiches d’activité, dont trois traitent de la « presse écrite », et met l’accent sur le traitement de l’information (techniques d’analyse de la « titraille », de l’organisation en rubriques et d’articles de presse). Quant au support de cours de l’EPSIC, deux séquences abordent la presse en première année. L’une est dédiée à la recherche d’informations sur Internet et comporte notamment une présentation des sites Internet des journaux, ainsi que quelques conseils d’utilisation (Support EPSIC 2014a, p. 131-142). L’autre traite des « médias » et, si elle se focalise sur l’image comme support d’information et moyen de manipulation, elle s’attache également à définir les notions d’information, de censure et d’autocensure et comporte une brève activité sur un journal ainsi que des extraits de la « Déclaration des devoirs et des droits des journalistes » (Support EPSIC 2014a, p. 183-192).
Par contre, nous n’avons rien trouvé concernant le thème « Ouverture à la culture » dans le support de cours de troisième année en 4 ans (EPSIC 2014d). Cela laisse supposer qu’il revient aux enseignant-e-s de concevoir la séquence et les activités censées permettre la réalisation de ces objectifs.
Il ressort des échanges avec nos collègues du CEPM, d’une part, que la brève séquence sur les  médias figurant dans le support de cours n’est que très rarement enseignée et, d’autre part, qu’elle sert essentiellement de transition entre les thèmes « Marketing » et « Publicité », qui eux figurent constamment au champ d’épreuve de l’examen final. Ceci étant, les enseignante- s de culture générale du Département Arts et métiers verts ont conçu un guide méthodique pour la réalisation par les élèves de deuxième année (voie CFC) d’un « dossier de presse ».
Utilisé au sein dudit département depuis l’année 2013-2014, il a été intégré au support de cours institutionnel en début d’année 2015 et semble susciter l’intérêt d’un certain nombre de collègues.
Sous réserve de ces ultimes observations, le constat semble clair : en règle générale, les enseignant-e-s font l’impasse sur les thèmes relatifs à la presse à moins d’y investir un intérêt personnel. La coprésence de plusieurs enseignant-e-s cultivant un tel intérêt peut toutefois déboucher sur une revalorisation de la presse et un renouvellement de la manière de l’enseigner, quoique dans une mesure encore incertaine.

La presse, un moyen d’enseignement omniprésent

Qu’en est-il plus largement de l’usage de la presse comme moyen d’enseignement ?
Constatons tout d’abord que, dans toutes les écoles retenues, il est fait un recours intensif à la presse dans les cours d’ECG. Les enseignant-e-s y font fréquemment lire à leurs élèves des articles de journaux portant sur les thèmes du cours. Sur la base de cette lecture, les élèves ont alors à réaliser divers types de tâches conçues en référence aux objectifs du PEC et du PEE pour les domaines « Langue et communication » et « Société ».
Le support de cours du CEPM comporte, pour chaque séquence thématique, au minimum une activité portant sur un article de journal. Celui de l’EPSIC en contient nettement moins en raison du coût élevé que représentent les droits d’auteur, mais les enseignant-e-s, de leur propre chef, en utilisent très fréquemment11. Dans les écoles qui n’ont pas de support de cours, les articles de presse constituent le complément ordinaire des apports théoriques de l’enseignant-e, qu’il y ait (comme à l’ERACOM) ou non (ainsi, à l’ETML) un manuel de référence.
Il est également fréquent que des tâches en rapport avec un article de presse fassent l’objet d’une évaluation sommative. Au CEPM, à l’EPM et à l’ERACOM, les épreuves d’examens intermédiaire et final d’ECG comportent systématiquement de telles tâches. En revanche, à l’ETML et à l’EPSIC, lors de l’examen de CFC, les compétences linguistiques sont évaluées au moyen de tâches en rapport avec une oeuvre littéraire commune à toutes les classes terminales, respectivement avec des extraits de diverses oeuvres littéraires.
Ces quelques éléments empiriques tendent à confirmer le constat initial fondé sur notre expérience au CEPM : globalement, les enseignant-e-s de culture générale n’enseignent pas la presse. Ce même lorsque des thèmes s’y rapportant figurent au programme – mais pas au champ d’épreuve ! Par contre, on observe un recours généralisé et très fréquent à la presse pour aborder les autres thèmes du PEE, en cours comme lors des examens, au point que la presse constitue le genre littéraire le plus pratiqué par les apprenti-e-s vaudois-es en cours d’ECG13.

Enjeux et objectifs

Quels sont les enjeux d’un enseignement sur la presse ? L’enjeu principal transparaît des considérations critiques qui précèdent. L’école a pour mission expresse de permettre aux élèves d’être autonomes et d’affronter seul-e-s la vie adulte dans ses diverses dimensions(personnelle, professionnelle et sociale, selon le PEC). Or, elle ne peut pas tout leur apprendre, seulement les rendre capables d’apprendre par eux-mêmes. Cela signifie que l’école doit leur apprendre à apprendre tout seuls, c’est-à-dire à s’approprier les connaissances et les compétences dont ils et elles auront besoin pour résoudre les problèmes au fur et à mesure que ceux-ci se présenteront sur leur chemin.
L’enseignement de la presse a pour objectif général de permettre aux élèves de développer une compréhension autonome du monde dans lequel ils vivent à travers l’acquisition de stratégies et de savoir-faire en matière de recherche, de sélection, de traitement et d’évaluation de l’information. On s’inscrit là dans la droite ligne des postulats rationalistes des concepteurs de l’instruction publique obligatoire, gratuite et laïque. Pour faire sens du monde et de tout ce qui leur arrive, les humains peuvent s’appuyer sur des croyances – tout ce qu’ils croient vrai – et sur des connaissances – tout ce qu’ils tiennent pour vrai en vertu de principes et d’exigences épistémologiques et méthodologiques fondés en raison, consacrés par la communauté scientifique et évolutifs. L’instruction publique est fondée sur la primauté des connaissances sur les croyances, ces dernières étant reléguées dans la sphère privée. Mais l’école ne peut pas se contenter d’enseigner des connaissances, d’abord parce qu’il faudrait allonger le cursus d’au moins dix ans pour couvrir l’essentiel des connaissances disponibles.
Surtout, parce que les individus devraient retourner ensuite à l’école plusieurs fois au cours de leur vie pour réactualiser leurs connaissances en fonction des progrès scientifiques. Donc, elle doit enseigner à ses élèves comment ils peuvent apprendre et développer leur compréhension du monde par eux-mêmes.
Evidemment, il existe d’autres moyens d’information que la presse. Pire : la presse est moins facile d’usage que la plupart de ses concurrents, en raison notamment de sa matérialité. Lire un article exige de surcroît de la concentration, alors qu’écouter les informations à la radio ou regarder la télévision n’empêche aucunement de réaliser d’autres activités simultanément.
Surtout, de nos jours, lorsqu’on a besoin d’une information, on n’ouvre pas un journal, on fait une recherche sur Internet, avec son téléphone supposément intelligent ou son ordinateur. Du reste, les élèves ne lisent pas la presse pour s’informer. D’après le sondage par questionnaire auquel nous procédons systématiquement dans nos classes d’ECG, aucun-e élève ne lit fréquemment un journal papier, même gratuit. La plupart feuillette distraitement 20 Minutes une à deux fois par semaine, principalement pour regarder les photos et éventuellement se divertir à la lecture d’un fait-divers ou de news people. Dont acte. Il est tout aussi indéniable que les élèves actuel-le-s du postobligatoire ont grandi avec les nouvelles technologies et en usent quotidiennement.

Le réalisable:Esquisse de séquence sur le thème de la presse

Dans les pages suivantes, nous proposons une séquence que l’on a voulu adaptable à différents contextes institutionnels. Elle a été conçue en référence au PEE du CEPM. Mais nous avons déjà relevé que les PEE des écoles professionnelles vaudoises présentent de grandes similitudes et que les nuances tiennent pour beaucoup à l’ordonnancement et l’articulation des thèmes.
Nous l’avons élaborée sur la base d’expériences réalisées au cours de l’année 2014-2015 avec une classe de 2ème année en voie CFC sur 4 ans. Selon la catégorisation plus ou moins implicite qui prévaut parmi les enseignant-e-s en école professionnelle, les candidat-e-s au CFC sur 4 ans sont principalement issus de la voie secondaire générale de l’école obligatoire vaudoise, tandis que le CFC en 3 ans serait essentiellement l’apanage d’élèves issus de la voie secondaire à option. Cela se traduit concrètement par un étiquetage distinguant les classes selon qu’elles sont composées d’élèves plus ou moins « scolarisés ». Ceci étant, ce procédé de classement est informel et ne repose sur aucune donnée objective. En effet, aucune information sur l’origine scolaire des apprenti-e-s n’est enregistrée lors de leur inscription en école professionnelle. La validité de cette distinction est donc pour le moins discutable.
Surtout, c’est son caractère performatif contre lequel il convient de se prémunir. On associe couramment à ces deux étiquettes des représentations relatives aux aptitudes supposées des élèves. Ainsi, on attend d’élèves « peu scolarisés » un niveau de performance moindre que des élèves « plus scolarisés ». Or, notre modeste expérience nous a montré à plusieurs reprises déjà que des apprenti-e-s ayant connu une scolarité obligatoire fastidieuse, sinon chaotique, peuvent tout à fait développer des aptitudes intellectuelles remarquables et réaliser des performances de grande qualité pour autant que des conditions favorables soient garanties.
L’une de ces conditions consiste assurément à ce que l’enseignant-e s’affranchisse autant que possible du schème de perception dichotomique, réifiant et stigmatisant susmentionné et ose proposer à ses élèves, d’où qu’ils viennent, des tâches exigeantes en prenant soin de mettre en oeuvre des modalités didactiques ajustées et ajustables en cours de séquence.
Par conséquent, nous avons conçu cette séquence pour des élèves en voie CFC sur 3 et 4 ans, avec des objectifs identiques, mais des moyens didactiques différenciés. De plus, son niveau de difficulté relativement élevé nous a incité à privilégier des activités de groupe. Nous avons exclu les classes de la voie AFP pour des raisons essentiellement pratiques. La formation conduisant à une AFP ne dure que deux ans et le troisième semestre est presqu’intégralement dédié à la réalisation du TPA. Cela laisse trop peu de temps pour enseigner correctement la presse. Il nous semble préférable, pour ces classes, de proposer une séquence dédiée globalement à la recherche, la sélection et le traitement d’information tous supports confondus en fin de première année au titre de propédeutique au TPA. Notons par ailleurs que le programme d’ECG spécifique à la voie AFP au CEPM ne permettrait pas de viser les mêmes objectifs relatifs au domaine « Société » que pour les classes de CFC.

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Table des matières

Enseigner la presse en école professionnelle dans le cadre de l’ECG :pourquoi et comment ? 
Chapitre 1
Le prescrit et le possible
L’ECG et la presse comme thème et comme moyen d’enseignement
Chapitre 2
Le réel (ou presque)
Aperçu des pratiques enseignantes relatives à la presse dans les écoles
professionnelles vaudoises
Chapitre 3
Le souhaitable
Des enjeux aux objectifs pédagogiques
Chapitre 4
Le réalisable
Esquisse de séquence sur le thème de la presse
Conclusion 
Bibliographie 
Annexes

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