L’outil d’analyse de Dias et Sermier

L’outil d’analyse de Dias et Sermier

Dias et Sermier (2013) s’intéressent à la démarche de résolution de problèmes auprès d’élèves ayant des difficultés d’apprentissages ou une déficience intellectuelle. En effet, auprès de ces populations d’élèves, la déstabilisation cognitive causée par la confrontation à des problèmes a souvent besoin d’être compensée par des étayages, en particulier sous la forme d’échanges langagiers. Cependant, fournir un étayage adapté et utile aux élèves se révèle particulièrement complexe pour les enseignants.
Leur recherche exploratoire « a pour but d’analyser les interactions langagières entre des enseignant-e-s spécialisé-e-s et leurs élèves durant la résolution de problèmes mathématiques en utilisant la notion d’étayage » (Dias & Sermier, 2013, p.1). Nous avons défini l’étayage précédemment dans la partie théorique avec les travaux de Bruner (1983) notamment et des autres auteurs qui ont repris cette notion.
La finalité de leur recherche est d’élaborer un modèle théorique permettant une meilleure compréhension des phénomènes didactiques et pédagogiques auprès des populations d’élèves mentionnées plus haut, ainsi que d’élaborer des outils d’analyse et de perfectionnement en vue d’améliorer la formation des enseignants spécialisés et d’enrichir leur pratique en leur permettant de mieux comprendre leur façon d’étayer.
Plusieurs étapes d’élaboration ont été nécessaires avant d’obtenir la grille d’analyse permettant de catégoriser les étayages proposés par les enseignants spécialisés dans le cadre d’une résolution de problèmes mathématiques (cf. annexe p.112).
La recherche s’est d’abord appuyée sur les travaux de Bruner (1983). Toutefois, le transfert des six catégories s’est révélé difficilement opérationnel à l’environnement scolaire. En effet, Dias et Tièche-Christinat (2011) ont montré la limite de l’utilisation de ces seules 6 fonctions de tutelle. Ils relèvent que de nombreux actes de langage échappent à l’analyse, tout en étant très importants dans les étayages fournis aux élèves. Ils proposent de différencier les étayages à orientation didactique de ceux à orientation pédagogique. La frontière entre ces deux domaines étant difficile à mettre en évidence, de nouvelles catégorisations plus adaptées au contexte de la recherche ont été proposées.
A présent, l’outil d’analyse distingue 2 types d’étayage : les étayages centrés sur l’élève et son investissement dans la tâche (E), et les étayages centrés sur la tâche : le problème et son processus de résolution (T). Il y a aussi le type X, comprenant les énoncés non-étayants.
C’est cet outil que nous avons utilisé pour analyser nos transcriptions, il se trouve en annexe (p. 112).

Proposition de nouveaux indicateurs pour la grille de cotation

Une fois nos vidéos et transcriptions réalisées, nous avons coté nos étayages à l’aide de la grille élaborée par Mme Sermier et M. Dias. Cette tâche ne s’est pas révélée si évidente que cela. En confrontant nos questionnements avec Meryem Garaude, étudiante qui a aussi utilisé la grille pour son mémoire de Master, nous avons réalisé que nous avions les mêmes interrogations quant aux classements de certains de nos étayages. C’est pourquoi nous proposons de rajouter à la grille originale quelques indicateurs, qui, nous le pensons, pourront être utiles aux futurs utilisateurs de la grille.
Le lecteur trouvera ces nouveaux indicateurs dans notre proposition de grille (voir annexe p.113), avec des exemples tirés de nos transcriptions.
Dans les étayages centrés sur l’élève, nous proposons de rajouter un indicateur à la catégorie ER (Relâcher), il s’agit de « Interpeller les élèves pour valider ou invalider une proposition d’élève ».
Nous avons remarqué que nous interpellions nos élèves pour valider ou invalider une proposition d’un autre élève, afin de rendre les échanges plus dynamiques. De plus, cet étayage permet de les rendre attentifs à ce que leurs pairs ont dit ou fait, cela les ramène dans la tâche et donne de l’importance à leur avis et commentaires.
Parmi les étayages centrés sur la tâche, nous proposons de rajouter trois indicateurs et un prolongement pour un indicateur.
Dans la catégorie TS (Structurer la résolution du problème), nous avons rajouté deux indicateurs :
– Le premier est « Synthèse de la démarche des élèves ». Nous avons remarqué que nous reformulions souvent une proposition ou une démarche d’un élève, afin que le groupe et l’élève lui-même puissent poursuivre sur cette voie, ou au contraire en prendre une autre si cela s’avère nécessaire.
– Le second est « Relancer l’élève par le questionnement sur sa démarche de résolution ». Cet indicateur nous apparaît très important, car lorsque nous posions une question à notre ou nos élèves en lien avec la tâche, nous ne savions pas comment le coter. Au départ, nous avions coté « EM » en lien avec l’indicateur « Relancer l’élève par le questionnement ». Cependant, dans certains cas, il nous semblait que notre questionnement était orienté sur la tâche et permettait l’avancée de la démarche de résolution, c’est pourquoi nous proposons de le rajouter dans la catégorie TS.
Dans la catégorie TM (Activer la métacognition), nous proposons de rajouter à l’indicateur « Amener les élèves à verbaliser leurs démarches ou leur raisonnement », le prolongement suivant : et/ou celles ou celui des autres. En effet, nous avons remarqué que ces étayages peuvent aussi porter sur les démarches et raisonnement des autres.
Nous avons ensuite rajouté l’indicateur suivant « Tester l’assurance de l’élève en déstabilisant son raisonnement ». Nous ne savions en effet pas où classer les étayages qui permettent une déstabilisation cognitive, pour tester à quel point le raisonnement de l’élève est solide.

Dispositif et déroulement

Le dispositif était le même pour les deux enseignantes et pour les deux problèmes.
– pour Sarah : un groupe de 4 élèves.
– pour Céline : un groupe de 3 élèves.
La particularité de nos élèves est décrite dans la partie traitant de la population.
Les élèves étaient assis autour d’une table. Nous avons procédé par une lecture collective de la donnée du problème, en s’arrêtant et en expliquant les termes spécifiques ou non-compris par les élèves. Puis nous avons placé une feuille au centre et proposé aux élèves de résoudre ce problème ensemble. Ils avaient donc bien entendu le droit de parler, d’échanger leurs idées et de faire des propositions. La présence et le rôle actif de l’enseignant par ses étayages ont permis de soutenir les élèves dans leur démarche de raisonnement.

Résultats

Analyses quantitatives sur les problèmes du Cerisier et des Verres de Justine (chez Céline et Sarah)

Tout d’abord, avant de passer à l’analyse à proprement parler, nous pouvons relever qu’il y a eu, chez Sarah, 232 énoncés prononcés par l’enseignante (sur un total de 384) dans le problème du Cerisier, dont 99% sont des étayages, et 234 énoncés de l’enseignante (sur un total de 406) dans le problème des Verres de Justine, dont 98% sont des étayages.
Chez Céline, on trouve 209 énoncés prononcés par l’enseignante dans le problème du Cerisier (sur un total de 461), 98% sont des étayages, et 240 énoncés de l’enseignante dans le problème des Verres de Justine (sur un total de 568), dont 95% sont des étayages.
Nous voyons donc qu’il y a suffisamment d’énoncés pour que cela ait du sens de faire des analyses quantitatives sur ces données, analyses que nous ferons en termes de pourcentages uniquement.
Nous avons procédé de la manière suivante. Tout d’abord, nous avons différencié la proportion d’étayages de type E (centrés sur l’élève) et d’étayages de type T (centrés sur la tâche) pour chaque problème. Ensuite, nous avons relevé les pourcentages propres à chaque type d’étayage (EC, EM, EA, ER, et TS, TR, TT, TM).
Ces pourcentages sont commentés et analysés pour chaque problème (le Cerisier et les Verres de Justine chez Céline, le Cerisier et les Verres de Justine chez Sarah). Ensuite, nous avons comparé les problèmes entre nous, d’abord le Cerisier, puis les Verres de Justine, avant de passer à une conclusion générale de cette partie quantitative.

Problème du Cerisier (Céline)

Le pourcentage des étayages orientés sur l’élève est de 33% et celui des étayages orientés sur la tâche est de 65%.
Cette différence pourrait peut-être s’expliquer du fait que mes élèves n’ont pas de troubles du comportement. Ils entrent dans le problème et s’y impliquent, ce qui permet de se concentrer sur la tâche en soi, soit le problème à résoudre.
La part des étayages « non-étayants » (X) est très faible (2%), elle est surtout composée de réponses en lien avec le dispositif (caméra et dictaphone).

Distribution des étayages par catégories (Cerisier Céline)

Il s’agit d’un problème qui nécessite de revenir à la donnée (au texte) pour bien comprendre quel est l’objectif et de pouvoir procéder par étapes et tenir compte de tous les éléments.
Il comporte également des notions essentielles à connaître ou à expliquer : le milieu, au-dessus de, le sommet.
Pour que le problème suscite de l’intérêt, il faut au préalable réussir à visualiser la scène, c’est ce que je leur demande de faire à mesure que nous lisons la consigne. J’ai dû reprendre la donnée de nombreuses fois et y revenir. Ces allers retours sont essentiels dans la résolution de problème. Pour mes élèves, ce n’est pas habituel puisque très vite, ils se lancent dans des calculs. C’est d’ailleurs ce qu’ils ont voulu rapidement faire. Lorsque je pose la question:
« Toi tu as une idée de comment on pourrait résoudre le problème ? » Un élève répond « On fait 5+9 ».
Ils ont pris cette habitude d’essayer de mettre les nombres présents dans la donnée ensemble, en se disant que cela donnera sûrement quelque chose. Cette habitude vient aussi peut-être du fait qu’ils ont beaucoup résolu par le passé des problèmes qui demandent d’effectuer une addition ou une soustraction, mais sans forcément y mettre de sens. Le sens, c’est bien là que nous pouvons intervenir dans nos étayages. En effet, au départ je vérifie qu’ils aient bien compris de quoi il s’agit dans ce problème. Cela peut paraître évident, mais qu’est-ce qu’une échelle, des barreaux, le sommet ? Si on loupe cette étape de compréhension, la suite est perdue d’avance.
Ces types d’étayage sont les TR (15%), il s’agit d’aider les élèves à se représenter le problème. Par exemple : « Quand il arrive au 3ème barreau au-dessus de celui qui marque le milieu de l’échelle » L’enseignante insiste sur le mot milieu pour indiquer qu’il s’agit d’une caractéristique déterminante.
Nous pouvons voir dans le camembert représentant la distribution de mes étayages, une large proportion de TS (36%) qui explique ainsi la proportion plus importante d’étayages centrés sur la tâche. Ce nombre élevé indique que j’ai beaucoup aidé mes élèves à structurer le problème. En effet, je leur demande de revenir au texte, je leur dis que nous allons procéder par étapes. En somme, par quoi on commence concrètement et comment on avance dans la résolution. Cet étayage comporte aussi toutes les relances en lien avec le problème et sur leur démarche de résolution.
Nous trouvons par exemple : « Je donne une feuille à chacun, on va lire le problème d’abord », « A la fin du problème, on a une question, tu nous lis R. », « Tu sais combien tu dois faire de barreaux ? ».
Mes élèves ayant un trouble de l’attention, ils ont tendance à se disperser, c’est pourquoi la proportion de EM est de 20%. On trouve des interventions du type : « L. arrête voir avec le stylo, tu peux le poser » ou « Vous écoutez les deux là ». Ma présence leur permet d’éviter de décrocher et favorise une meilleure implication de leur part.
La proportion des autres étayages centrés sur l’élève est assez faible : EC (6%), EA (3%) et ER (4%). Les étayages de type EC sont en lien avec l’enrôlement, la dévolution, ils sont surtout présent au départ de la résolution. Les EA sont peu présents car mes élèves interagissent de façon équilibrée, dans le sens qu’ils se respectent. En conséquence, l’enseignant doit peu intervenir.
Les ER visent à encourager les élèves dans leur démarche de résolution et dans leurs idées.
Etant donné que l’enseignante a dû souvent beaucoup intervenir et les mettre sur la piste, leur proportion est faible. Le lecteur trouvera des exemples de ces types d’étayage dans notre proposition de grille (annexe p.113).
La proportion de TT (9%) est à considérer. En tant qu’enseignant, on arrive à un moment qui semble sans autre issue et on donne une partie de la solution, par exemple: « Le milieu il ne va pas changer, le milieu reste notre milieu » ou on impose une démarche aux élèves, par exemple « tu comptes les barreaux là et tu comptes les barreaux là ».
Les étayages de type TM (5%) sont peu présents, ils sont pourtant très importants dans l’idée du transfert des connaissances et pour voir si les élèves ont pu avoir accès (et ainsi prendre conscience) de leur propre fonctionnement cognitif. En bref, ce qu’ils retirent et retiennent de cette résolution collective. Nous verrons dans la partie consacrée à cette catégorie, comment ils sont formulés, comment nous pourrions les développer et en tirer un bénéfice pour nos élèves.

Problème du Cerisier (Sarah)

Dans le problème du cerisier, on peut constater que la répartition des étayages entre les étayages centrés sur la tâche et les étayages centrés sur l’élève est n’est clairement pas équilibrée. Il y a beaucoup plus d’étayages centrés sur la tâche que sur l’élève (81% vs 17%).
Un exemple d’étayage centré sur l’élève est le suivant : « Vous pensez ça ?», pour relancer les élèves. Un exemple typique d’étayage centré sur la tâche est le suivant : « Donc le milieu, c’est quoi ? »
La proportion d’étayages cotés X est négligeable (2%). Ce sont des énoncés qui concernent essentiellement le fonctionnement de la caméra.
On peut expliquer cette différence importante entre la proportion des étayages centrés sur l’élève et sur la tâche par le fait que mes élèves n’ont pas de difficultés liées à leur comportement. Ils ont par contre des difficultés cognitives (une déficience intellectuelle) marquées. Donc je n’ai pas vraiment besoin de les cadrer, de les recentrer sur la tâche. Ils ont envie de bien faire, et s’investissent dans la tâche. Par contre, la tâche est trop difficile pour qu’ils soient en mesure de l’effectuer seuls, sans aide. C’est ce qui explique la grande proportion d’étayages centrés sur la tâche.

Distribution des étayages par catégories (Le Cerisier Sarah)

Ici nous pouvons constater que parmi les étayages centrés sur l’élève (E), qui constituent une proportion de 17% de mes étayages totaux, je fais surtout de l’étayage EM (10%), qui vise à maintenir l’attention des élèves sur la tâche. Il s’agit surtout de valider des réponses par de brèves paroles d’encouragement à continuer (par exemple : « Mmmh, ouais, d’accord. »
Je ne fais que très peu d’étayages visant à apaiser les relations, (EA 4%) à enrôler les élèves (EC 2%) dans la tâche, et je ne fais carrément pas d’étayage encourageant l’appui sur l’erreur(ER).
On peut expliquer ceci par le fait que, comme je l’ai dit plus haut, mes élèves n’ont pas de troubles du comportement, réaliser une tâche ensemble ne leur pose pas particulièrement problème, et il n’y a pas beaucoup besoin d’intervenir pour régler des problèmes relationnels.
De plus, ils ont envie de bien faire, donc ils s’engagent sans problème dans la tâche. Les élèves que j’ai choisis pour faire la tâche sont plutôt collaborants, et ne questionnent pas beaucoup le sens de ce qu’ils font. Regardons maintenant la répartition des étayages centrés sur la tâche dans le même problème (T). Il y a beaucoup de TR (33%) et de TS (28%), à parts à peu près égales. Il y a également 17% de TT, et 6% de TM.
Les étayages TR sont les étayages qui visent à aider les élèves à se représenter le problème.
J’en fait beaucoup (33%) parce que le problème du cerisier est un problème où il est important de bien se représenter la scène, avec l’arbre, l’échelle, le fait de descendre puis de remonter. Tout ceci nécessite des étayages de type TR, par exemple : « Est-ce qu’on arrive à se représenter ça ? ».
Les étayages TS sont aussi très présents (28%). Ce sont des étayages qui permettent de bien structurer le problème, de montrer aux élèves comment avancer en découpant le problème et à poser des questions directement liées à la démarche de résolution. Cette manière d’étayer est aussi très importante pour ce genre de problème, dont la lecture n’indique pas aux élèves spontanément comment ils doivent s’y prendre pour le résoudre, quelles sont les étapes nécessaires. Ce genre d’organisation est difficile pour les élèves qui présentent une déficience intellectuelle. Un exemple d’étayage de ce type : « Oui, il est sur celui-là. Qu’est-ce qui se passe après ? ».
Il y a également une bonne proportion d’étayages TT (17%), qui consistent à transmettre aux élèves la réponse, ou à leur imposer une démarche. Ce type d’étayage correspond à une manière de faire que les enseignants essaient ordinairement d’éviter, puisque le but est que les élèves eux-mêmes trouvent des ressources pour faire la tâche, avec l’aide de l’enseignant. Si la proportion de TT est aussi élevée, c’est que le problème est difficile à comprendre pour des élèves qui présentent une déficience intellectuelle. Au bout d’un moment, je me vois parfois contrainte de donner certaines réponses, d’indiquer des chemins de résolution, tout simplement parce que les élèves n’y arrivent plus autrement. Exemple : « Alors maintenant il va falloir compter les barreaux sur le dessin qu’on a fait. »
Il y a aussi une petite proportion d’étayages de type TM (activer la métacognition), à raison de 6%. Ces étayages sont souvent des questions qui visent à faire prendre conscience et verbaliser des raisonnements. Exemple : « Toi, tu dis que c’est trop. Pourquoi c’est trop ? »
Ces étayages sont en faible proportion, par rapport aux autres T. Il faut dire qu’il est difficile de faire de la métacognition avec des élèves qui présentent une déficience intellectuelle. Ces étayages seront analysés plus en détails dans la 2e partie de notre analyse.
Nous allons passer maintenant à l’analyse de l’autre problème, à savoir les verres de Justine, selon le même déroulement que pour le cerisier, à savoir d’abord une analyse générale T/E, puis une analyse plus dans le détail.

Problème des verres de Justine (Sarah)

Distribution des étayages centrés sur l’élève et sur la tâche

Pour ce problème des verres de Justine, on peut constater que la répartition des étayages entre les étayages centrés sur la tâche et les étayages centrés sur l’élève n’est clairement pas équilibrée, comme dans le problème du cerisier. Il y a beaucoup plus d’étayages centrés sur la tâche que sur l’élève (84% vs 15%).
Un exemple d’étayage centré sur l’élève est le suivant : « D’accord, OK.», pour valider une réponse et encourager l’élève. Un exemple typique d’étayage centré sur la tâche est le suivant : « Est-ce que c’est clair pour vous, ce que c’est qu’un rayon ? »
La proportion d’étayages cotés X est négligeable (1%). A nouveau, ce sont des énoncés qui concernent essentiellement le fonctionnement de la caméra.
De nouveau, pour expliquer cette différence, je reprends le raisonnement que j’ai effectué pour le problème du Cerisier. On peut expliquer cette différence importante entre la proportion des étayages centrés sur l’élève et sur la tâche par le fait que mes élèves n’ont pas de difficultés liées à leur comportement. Ils ont par contre des difficultés cognitives (une déficience intellectuelle) marquées. Donc je n’ai pas vraiment besoin de les cadrer, de les recentrer sur la tâche. Ils ont envie de bien faire, et s’investissent dans la tâche. Par contre, la tâche des verres de Justine est trop difficile pour qu’ils soient en mesure de l’effectuer seuls, sans aide. C’est ce qui explique la grande proportion d’étayages centrés sur la tâche.
Nous allons maintenant regarder la proportion de chaque type d’étayage, comme nous les avons décrits plus haut dans la méthodologie.
Pour terminer cette partie d’analyse, nous allons comparer les 2 problèmes effectués par Sarah pour mettre en évidence et expliquer les différences et les points communs dans la manière d’étayer entre les 2 problèmes.
Ce qui est frappant, au premier abord, c’est que la répartition des étayages entre les étayages centrés sur l’élève (T) et sur la tâche (E) est très similaire entre les 2 problèmes. Ceci peut être expliqué par le fait que ce sont les mêmes élèves qui participent aux 2 problèmes de maths, et qu’ils présentent donc grosso modo les mêmes difficultés d’une fois à l’autre, qui appellent la même manière d’étayer.
On pourrait aussi interpréter ces résultats autrement, en faisant une autre hypothèse, à savoir que le style d’étayage d’un enseignant est une dimension stable dans le temps, qui varie peu.
Cet étayage plutôt centré sur la tâche que sur l’élève serait donc le fait, non pas de mes élèves qui ne changent pas, mais de ma manière d’étayer, propre à moi. Pour vérifier cette hypothèse, il aurait fallu faire un croisement entre mes élèves et ceux de Céline, pour voir si mon style d’étayage demeure à ce point stable quand je prends les élèves de Céline.
Pour ce qui concerne les types d’étayage dans le détail, nous pouvons voir que la proportion d’étayage de type EM, EA, ER et EC, soit les étayages centrés sur l’élève restent fixes d’un problème à l’autre.
Par contre, dans le deuxième problème, celui des verres de Justine, la proportion d’étayages de type T, soit la distribution des étayages TR, TS, et TT, change.
Dans les verres de Justine, je fais plus d’étayage TS, donc de structuration, et moins d’étayage TR, donc d’aide à la représentation, et également moins d’étayage TT, de type transmission.
Ceci peut s’expliquer par le fait que mes élèves ont eu plus de facilité à comprendre ce qu’ils devaient faire dans le 2e problème. Ainsi, j’ai eu moins besoin de faire de l’aide à la représentation (TR) puisque mes élèves avaient bien compris ce dont il s’agissait. De même j’ai eu moins besoin de transmettre des solutions ou des démarches de résolution (TT), parce que les élèves étaient capables de les élaborer eux-mêmes. L’essentiel de mon étayage s’est donc concentré sur le type TS, pour aider les élèves à structurer leurs démarches et les relancer.

Comparaison entre le Cerisier chez Sarah et chez Céline

Nous pouvons faire le constat que la proportion d’étayages centrés sur la tâche est plus importante que la proportion d’étayages centrés sur l’élève aussi bien chez Céline que chez Sarah (65% vs 33% chez Céline, et 81% vs 17% chez Sarah). Néanmoins, la distribution est plus déséquilibrée chez Sarah que chez Céline.
On peut interpréter ces résultats en faisant l’hypothèse qu’il en est ainsi à cause du fait que nos élèves présentent des troubles différents. Les élèves de Céline souffrant plus de troubles de l’attention, il est plus nécessaire de les recentrer que les élèves de Sarah, qui souffrent de déficience intellectuelle.
Si l’on regarde la répartition des étayages plus dans le détail, on peut voir que ce qui diffère surtout, c’est la proportion de TR beaucoup plus importante chez Sarah que chez Céline, la proportion de TT également plus importante chez Sarah, et la proportion de TS plus importante chez Céline.
Les élèves de Sarah ayant eu beaucoup plus de mal à rentrer dans la résolution de ce problème que les élèves de Céline, Sarah a eu besoin de faire plus de TT, soit de transmettre la réponse directement, et de TR, pour que les élèves soient en mesure de se représenter le problème. Par contre, Céline a fait plus de TS, elle a dû guider les élèves dans leur résolution, pour les aider à avancer.

Comparaison entre les Verres de Justine chez Sarah et chez Céline

Pour les verres de Justine, nous constatons le même « déséquilibre » entre les étayages centrés sur la tâche, et les étayages centrés sur l’élève, les premiers étant plus nombreux (56% vs 39% chez Céline, et 84% vs 15% chez Sarah). Nous remarquons également que le « déséquilibre » est plus marqué chez Sarah. Ici donc, nous voyons notre hypothèse sur les problématiques des élèves se confirmer.
Ensuite, quand nous analysons les distributions plus en détails, nous voyons que chez Céline, si elle fait toujours autant d’étayages de type TS, la proportion d’étayages de type TR et TT s’équilibre. Tandis que chez Sarah, la proportion d’étayages de type TS représente plus de la moitié de tous les étayages, au détriment des étayages de type TT et TR. Certainement, c’est le cas parce que les élèves de Sarah se sont mieux approprié le problème la deuxième fois, que pour le problème du Cerisier. Ainsi, il y a eu moins besoin de faire des étayages TT, qui indiquent une démarche ou une réponse. Il a fallu plus structurer le problème. Chez Céline, les élèves ont eu autant de difficultés à résoudre le deuxième problème, ce qui se traduit par une distribution de TS, TT et de TR assez similaire au premier problème du Cerisier.

Conclusion générale de la partie quantitative

Une première remarque que l’on peut faire, c’est que l’on parle beaucoup, et que l’on étaye beaucoup, toutes les deux. C’est bien, mais nous devons garder à l’esprit l’avertissement de Vannier (2006), qui dit que le sur-étayage est nocif, dans le sens qu’il empêche les élèves de réfléchir par eux-mêmes, et génère donc un sentiment d’incompétence. Il faut garder à l’esprit que l’objectif est l’autonomie cognitive de l’élève et non pas qu’il dépende des interventions de l’enseignant pour résoudre les problèmes.
Ensuite, nos étayages fonctionnent, puisque les élèves parviennent à résoudre les problèmes, à chaque fois, ce qui contredit par la pratique les propos de Stone (1998), qui dit que l’étayage n’est pas applicable à un groupe d’élèves, mais plutôt à des suivis individuels, surtout si les élèves présentent beaucoup de difficultés. Or, c’est le cas de nos élèves, et nous arrivons pourtant quand même à faire un étayage utile et qui porte ses fruits. Pour en tirer des conclusions plus générales, il faudrait répéter le dispositif à plusieures reprises.
Nos résultats ne vont pas dans le sens de Good et Brophy (1994, in Biemiller & Meichenbaum, 1998), qui relevaient qu’il est plus difficile de réaliser un étayage efficace auprès des élèves de l’enseignement spécialisé.
Ce qui est très frappant dans nos analyses, c’est la grande stabilité des distributions entre les deux problèmes, que ce soit dans la répartition générale ou dans les détails, à la fois chez Céline et chez Sarah. Cette stabilité ne dépend pas d’un biais de codage (ce qui signifierait que ces résultats sont obtenus parce que Sarah code d’une certaine manière et Céline d’une autre), parce que nous avons repris ensemble les cotations, pour que nous parvenions à un accord inter-juges.

Analyses qualitatives des étayages de type « TM » sur les problèmes du Cerisier et des Verres de Justine

Pour entreprendre cette analyse détaillée, nous avons tout d’abord repris toutes nos interventions de type « TM », c’est-à-dire visant à activer la métacognition. Rappelons ici que le but de l’étayage selon Holton et Clarke (2006), c’est l’auto-étayage de l’élève, soit son autonomie cognitive.
Pour essayer de mieux comprendre en quoi consistent les étayages de type TM, nous les avons mis en évidence, et nous avons ensuite essayé de les classer. Pour le faire, nous avons établi 3 catégories :
1. Les questions incitatives de type « comment on va faire ? ». Ces questions apparaissent souvent au début de la résolution, ainsi que tout au long du problème, dès que l’élève semble à cours d’idée.
2. Les questions de confrontation à sa propre activité ou à celles des autres, de type « qu’est-ce que tu as fait ?, Comment tu sais ? », « Alors qui peut expliquer ce qu’elle a fait? ». Ce type de questions se retrouve tout au long de la résolution.
3. Les questions de restitution du processus de réalisation de l’activité, qui résume les étapes de la résolution. Ce genre de question apparaît en particulier à la fin de la résolution.
Dans les tableaux suivants, nous avons classé les énoncés selon ces 3 catégories, en notant les énoncés de l’enseignante de type « TM » et les réponses des élèves.

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Table des matières

1. Introduction
2. Cadre théorique
2.1 L’étayage
2.1.1 Définitions et catégorisations de l’étayage
2.1.1.1 Bruner
2.1.1.2 Dias et Tièche Christinat
2.1.1.3. Anghileri
2.1.1.4 Vannier
2.1.1.5 Rittle-Johnson et Koedinger
2.1.2 Et l’étayage dans l’enseignement spécialisé ?
2.1.3 Les limites de l’étayage
2.2 L’étayage et la métacognition
2.2.1 Fonctions de l’étayage et métacognition
2.2.2 Définition de la métacognition
2.2.3 A chacun son style d’étayage ? Catégorisation des styles d’étayage et lien avec la métacognition
2.3 La résolution de problèmes
2.3.1 Didactique et résolution de problèmes
2.3.1 Etayage et résolution de problèmes
3. Méthodologie
3.1 Devis de recherche : la recherche exploratoire
3.2 Population
3.3 Analyse a priori des problèmes proposés
3.3.1 Le Cerisier
3.3.2 Les Verres de Justine
3.4 L’outil d’analyse de Dias et Sermier
3.5 Proposition de nouveaux indicateurs pour la grille de cotation
3.6 Dispositif et déroulement
4. Résultats4.1 Analyses quantitatives sur les problèmes du Cerisier et des Verres de Justine (chez Céline et Sarah)
4.1.1 Comparaison entre le Cerisier chez Sarah et Céline
4.1.2 Comparaison entre les Verres de Justine chez Sarah et Céline
4.1.3 Conclusion générale de la partie quantitative
4.2 Analyses qualitatives des étayages de type « TM » sur les problèmes du Cerisier et des Verres de Justine
5. Conclusion
6. Bibliographie
7. Annexes
7.1 Transcriptions
7.2 Grilles de cotation
7.3 Lettres d’autorisation de filmer

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