Analyse statistique de la pertinence d’un deuxième passage lors de la pêche électrique

Depuis les années 80 et suite à leur déclin, l’intérêt pour la préservation des espèces piscicoles migratrices a augmenté entrainant leur préservation et leur suivi pour mieux les sauvegarder. Sur les bassins de la Charente et de la Seudre un réseau de suivi dédié pour ces espèces a été mis en place. Il est géré par le partenariat de la Cellule Migrateurs Charente Seudre (CMCS). C’est dans ce cadre, que pour les anguilles, le suivi de leur colonisation a commencé en 2009 sur le bassin de la Charente et en 2010 pour le bassin de la Seudre. Espèce classée en danger critique d’extinction, le réseau s’intéresse aux anguilles de moins de 15 cm car elles sont en phase de colonisation et sont donc le reflet de l’état récent des remontées fluviales. Ce suivi est réalisé en parallèle de mesures de gestion pour l’espèce dont notamment la restauration de la continuité écologique car de nombreux obstacles rendaient difficile la colonisation. Ce réseau de suivi sur les bassins de la Charente et de la Seudre est réalisé tous les 2 ans et permet d’alimenter des indicateurs du tableau de bord afin de vérifier les états et les tendances de la population d’anguilles.

En 2021, il s’agit de la 8ème année de suivi du front de colonisation des anguilles sur le bassin de la Charente et la 7ème sur le bassin de la Seudre. Le suivi des limites de colonisation est réalisé par une campagne de pêche électrique en pied d’ouvrage sur les affluents de la Charente et directement sur l’axe Seudre. Cette campagne est complétée par la pose de flottangs, un dispositif flottant passif qui sert d’abris aux anguilles, afin de densifier le réseau de pêche et d’être le plus précis possible pour localiser la limite de répartition des petites anguilles.

Le suivi réalisé depuis 2009 nécessite la création d’une base de données précise et homogène, regroupant l’ensemble des campagnes. Ainsi, les données annuelles ont été formalisées et saisies dans des tableurs exportables dans une base ACCESS. Cette base a été créée dans le cadre de l’étude des potentialités des poissons migrateurs menée en 2020  (SCIMABIO Interface et FISH-PASS, 2021) afin de bancariser l’ensemble des données de la CMCS. Le protocole de suivi par pêches électriques ayant peu évolué depuis 2009 et les flottangs étant en phase de test avant 2021, il était nécessaire d’étudier comment combiner ces outils et d’adapter voire d’améliorer le réseau. Les flottangs vont être complétement incorporé à la phase de suivi du front de colonisation des anguilles en fonction des objectifs suivis. La recherche de la simplification du protocole de pêche électrique se concentre sur la nécessité d’un deuxième passage, comme c’est actuellement réalisé sur la Dordogne et la Garonne par l’association MIGADO. Les résultats de la pertinence d’un deuxième passage et de la redéfinition des objectifs du suivi vont permettre de proposer un certain nombre de modifications possibles à partir du protocole actuel.

Présentation de la structure d’accueil et cadre de réalisation de ses missions

L’association MIGADO et ses missions 

L’association Migrateurs Garonne Dordogne Charente Seudre (MIGADO) (MIGADO,2021) a été créée en 1989, à la demande du Ministère de l’Environnement. C’est une association loi 1901 issue du regroupement associatif, sur les bassins de la Garonne et de la Dordogne, des fédérations de pêches et des associations de pêcheurs professionnels. En 2018, l’association reprend les missions « migrateurs » du Groupement des fédérations de pêche du Poitou Charentes et agrandit son territoire d’actions en intégrant les bassins de la Charente et de la Seudre. Le Comité de Gestion des Poissons Migrateurs (COGEPOMI) créé en 1994 par décret ministériel, a chargé MIGADO de mettre en place les actions élaborées dans le Plan de Gestion des Poissons Migrateurs (PLAGEPOMI) sur les bassins de la Dordogne, de la Garonne, de la Charente, de la Seudre et de la Leyre. Le PLAGEPOMI est un plan de gestion (Comité de Gestion des Poissons Migrateurs du bassin, 2015) sur 5 ans concernant des mesures pour la reproduction, le développement, la conservation et la circulation des saumons atlantiques, des truites de mer, des grandes aloses, des aloses feintes, des lamproies marines, des  lamproiesfluviatiles et des anguilles européennes. MIGADO s’occupe également de la gestion, la restauration et le soutien à la dernière population française historiquement présente d’esturgeon, encadré par un Pan National d’Actions. L’association est déclarée d’intérêt général et agréée association de protection de l’environnement. Elle est ainsi, l’une des plus importantes associations françaises qui développe des actions techniques en faveur des poissons migrateurs. Les principaux domaines d’actions de MIGADO sont le suivi et la gestion des populations, la production piscicole, la conservation et la réintroduction d’espèces, le suivi des milieux aquatiques, l’animation de programmes, l’éducation à l’environnement, ainsi que l’animation de sites Natura 2000.

La Cellule Migrateurs Charente Seudre, un travail en partenariat 

La Cellule Migrateurs Charente Seudre (CMCS) (CMCS, 2021) est créée en 2009, par le rapprochement de plusieurs structures autour de l’enjeu des poissons migrateurs. Actuellement, le partenariat de la CMCS est formé par l’EPTB Charente (Etablissement Public Territorial de Bassin), MIGADO et CAPENA (Centre pour l’Aquaculture, la Pêche et l’Environnement en Nouvelle Aquitaine). Ce partenariat permet la mise en place d’un programme d’action unique et commun pour le territoire de la Charente et de la Seudre, pour la préservation des populations des poissons migrateurs. Les espèces concernées sont l’anguille européenne, les lamproies marines et fluviatiles, la grande alose, l’alose feinte, la truite de mer et le saumon  atlantique. Le programme pluriannuel (CMCS, 2020) comporte 5 grandes actions : le suivi et l’état des migrations, l’état et la compréhension des espèces, le tableau de bord, la communication et le pilotage du programme. Le partenariat de la CMCS est financé par l’Agence de l’Eau Adour Garonne, par l’Union Européenne à travers le Fond Européen de Développement Régional (FEDER) et la Région Nouvelle Aquitaine.

Présentation de la zone d’étude 

Localisation des bassins versants 

La zone d’étude est composée de deux bassins versants, celui de la Seudre et celui de la Charente. Ces deux bassins se situent sur la façade Atlantique, et l’embouchure des deux fleuves se trouve en Charente-Maritime, ainsi que la source de la Seudre. La Charente prend sa source en Haute-Vienne et traverse 6 départements (Charente, Charente-Maritime, Deux-Sèvres, Vienne, Haute-Vienne et Dordogne) pour une longueur de 360 Km.

Caractéristiques du bassin de la Charente

La Charente a un bassin versant de 10 100 Km² pour une longueur totale de cours d’eau de plus de 6 500 Km (CMCS, 2021). Le bassin est composé d’environ 40 000 Ha de marais, dont la majorité sont doux, proche de son estuaire d’environ 50 Km entre Port-des-Barques et Fouras. Il s’agit d’un bassin sédimentaire avec en majorité un substrat calcaire et à faible pente avec une altitude maximale de 310 m au niveau de la source. Son substrat permet des échanges importants entre eaux superficielles et souterraines, ce qui apporte un débit  minimum lors de l’étiage. L’objectif de débit à l’étiage étant de 15 m³/s à Saintes, et le débit moyen annuel de 75 m³/s (CMCS, 2021). Il s’agit d’un enjeu important du bassin versant, car la région à forte activité agricole, a besoin d’irrigation en été. Deux grands barrages se trouvent sur la partie la plus amont de la Charente, les barrages de Lavaud et Mas-Chaban, et permettent de soutenir le débit d’étiage. La Charente est un fleuve navigable de son estuaire jusqu’à Angoulême, soit sur environ 180 Km, grâce à de nombreuses écluses et aux chemins de halage. Il s’agissait d’une voie de commercialisation importante pour le sel et la viticulture. Cette forte activité a impliqué la création de nombreux ouvrages tout le long du fleuve, qui pour la plupart ont été aménagés pour la libre circulation des espèces piscicoles et plus particulièrement pour les migrateurs.

Caractéristiques du bassin de la Seudre 

La Seudre est longue de 71 Km et a un bassin versant de 780 Km² pour 540 Km de cours d’eau total. Il est composé d’un estuaire de 21 Km de long, de 9 050 Ha de marais salé et 5 570 Ha de marais doux (CMCS, 2021). Elle prend sa source à St-Genis-de-Saintonge, à 36 m d’altitude, ce qui en fait un cours de faible pente. Deplus, sa relation directe avec le Pertuis Charentais en fait un lieu idéal pour l’élevage d’huitres qui est l’activité principale sur la partie maritime. Cette activité est dépendante de l’arrivée d’eau douce, sachant que le débit moyen de la Seudre est de 0,91 m³/s à St-André-de-Lidon et le débit d’objectif d’étiage est de 0,10 m³/s. Cependant, son hydrographie n’est pas naturelle car le cours d’eau est modifié par environ 127 ouvrages sur sa partie continentale. Cela en fait un enjeu sur la continuité écologique et sédimentaire.

L’anguille en Europe et en France 

L’anguille 

L’Anguille Européenne, Anguilla anguilla est de l’ordre des Anguilliformes et de l’infraclasse des Téléostéens (DORIS, 2021). Il existe 11 espèces d’anguilles dans le monde. Elle est apparue sur Terre il y a environ 100 millions d’années et son aire de répartition est composée de la partie supérieure à l’équateur de l’océan Atlantique et de l’Europe. Son cycle de vie est partagé entre le milieu marin et fluvial ce qui en fait une espèce amphihaline et plus précisément thalassotoque. Elle est également caractérisée par une morphologie particulière.

L’anguille a une morphologie serpentiforme composée de 2 nageoires pectorales et d’une nageoire caudale ayant fusionnée avec les nageoires dorsales et anales (DORIS, 2021). Le corps d’un adulte est couvert de petites écailles d’environ 3 mm et entouré d’un abondant mucus, ce qui permet une respiration aux ¾ percutanée, qui est complété par une respiration branchiale classique. Les fentes branchiales se retrouvent à la base des nageoires pectorales. Les caractéristiques hydrodynamiques du mucus leur permettent de coloniser et de se déplacer dans des milieux humides particuliers. La couleur et la taille varie en fonction du sexe et du stade de vie de l’anguille qui possède un cycle de vie particulier.

Le cycle de vie de l’anguille n’est pas encore parfaitement connu pour sa partie marine. Les dernières études laissent à penser que les anguilles se reproduisent et naissent soit dans la mer des Sargasses soit au niveau de la dorsale Atlantique au printemps (Chang et al., 2020). Les modalités de la reproduction, l’apparence des œufs et leurs éclosions ne sont que très peu connus car trop peu observés. Le premier stade vraiment connu est celui sous forme de petite larve transparente et aplati transversalement, appelé leptocéphale (« en forme de feuille de saule »). Les leptocéphales se nourrissent de planctons. Elles vont ensuite rejoindre les côtes européennes grâce au courant nord atlantique Gulf Stream, pour un trajet d’entre 6 mois à 1 ans.

L’approche du plateau continental donne lieu à la métamorphose des larves en civelles (aussi appelé localement pibales). Les civelles ont une morphologie serpentiforme plus proche des anguilles adultes tout en conservant l’aspect translucide des leptocéphales. Elles mesurent alors moins de 10 cm et le développement des nageoires a eu lieu. En atteignant les estuaires, elles vont se pigmenter de plus en plus pour devenir des anguillettes (DORIS, 2021). Elle se nourrira alors d’invertébrés. Les stades civelles et anguillettes correspondent à une phase importante pour l’espèce. C’est la phase de colonisation des habitats juste après l’arrivée en rivière. Les anguillettes ont alors moins de 3 ans et mesurent au maximum environ 15 cm. La migration des anguillettes étant densité dépendante, plus l’arrivée de civelles et d’anguillettes est importante, plus elles iront coloniser des habitats en amont du bassin versant. Cette caractéristique permet d’évaluer la qualité du recrutement. Les anguillettes continuent leur migration et croissance en eau douce pour devenir des anguilles jaunes. Elles tiennent leur nom de leur ventre jaune et de leur dos vert à brun olive. C’est sous cette forme que l’anguille va passer la plupart de son cycle de vie. Cette période varie en fonction du sexe de l’individu mais également des caractéristiques physico-chimiques du milieu. En prenant en compte ces paramètres, il semblerait que les femelles se retrouvent plus longtemps en rivière et plus en amont que les mâles. Sachant qu’il n’est pas obligatoire que cette phase de croissance se fasse entièrement en eau douce, elle peut également avoir lieu dans de l’eau saumâtre ou en alternance eau douce – eau salée. Ainsi la période de grossissement varie entre 3 et 15 ans, pour une taille pouvant aller à plus d’un mètre. Une fois leur croissance achevée, une dernière métamorphose a lieu, elles deviennent argentées (Durif et al., 2020). Leur pigmentation évolue en un dos gris foncé et un ventre gris argentée, alors que les nageoires pectorales s’allongent et que les yeux augmentent de volume, tout en développant un pigment rétinien plus adapté aux grandes profondeurs. Suite à cette dernière métamorphose, elles cessent de s’alimenter tout en dévalant les fleuves pour retourner en milieu marin, puis vers leur lieu de reproduction ce qui leur prendra plus de 6 mois. Les simulations de reproduction montrent une dépense énergétique très importante et ne se nourrissant pas en milieu marin, il est fort probable que la reproduction entraine une mortalité des reproducteurs.

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Table des matières

Table des figures
Table des tableaux
Introduction
1. Contexte du stage
1.1. Présentation de la structure d’accueil et cadre de réalisation de ses missions
1.2. Présentation de la zone d’étude
1.3. L’anguille en Europe et en France
2. Matériel et méthode
2.1. Suivis des fronts de colonisation
2.2. Utilisation des flottangs pour compléter le front de colonisation
2.3. Présentation des données historiques et base de données ACCESS
2.4. Etude de la pertinence d’un deuxième passage lors de pêche électrique : objectif de densité ou de front de colonisation
3. Résultats
3.1. Etat de colonisation de la Charente en 2021
3.2. Les flottangs et le front de colonisation
3.3. Analyse statistique de la pertinence d’un deuxième passage lors de la pêche électrique
4. Interprétations et discussions
4.1. Etat de colonisation 2021
4.2. L’utilisation des flottangs en complément des pêches électriques
4.3. Pertinence d’un deuxième passage lors de pêche électrique
4.4. Bilan sur le protocole de suivi
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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