Analyse qualitative en regard avec les référentiels de compétences 

Présentation du travail effectué

Question de recherche

Au cours de ma formation en pédagogie spécialisée à la Haute école pédagogique du canton de Vaud, une question m’a suivie à de nombreuses reprises, à travers différentes facettes, en fonction des apports ou des rencontres opérés. Il s’agit de comprendre la spécificité de l’enjeu de l’enseignant spécialisé au sein de l’enseignement ordinaire. Afin de saisir cette caractéristique, il m’importe de saisir les profils d’une enseignante ordinaire et d’une enseignante spécialisée agissant dans un dispositif défini et contrôlé.
Etant donné que les enseignants ordinaires et les enseignants spécialisés travaillant dans l’ordinaire ont des objectifs différents dans la dispense de leur enseignement, ces différences devraient se voir dans l’accompagnement d’un petit groupe d’élèves ayant des difficultés scolaires et développementales dans la résolution d’un problème en mathématiques. Nous devrions observer plus de rythme et de guidage dans la résolution, dans l’enseignement ordinaire, alors que nous devrions suivre un accompagnement plus individuel et proche de l’élève dans la résolution du problème accompagné par un enseignant spécialisé. Ainsi, la prise de parole devrait être plus importante chez l’enseignante ordinaire et dirigée sur l’élève pour le stimuler (EM et EC) et sur la tâche, dans le but de résoudre ce problème (TT). Alors que du côté de l’enseignante spécialisé, nous serions plus sur le maintien de l’attention et un encouragement de l’élève (EM et ER) et sur une structuration et une représentation du problème (TS et TR).
Etant donné que la population d’élèves sur laquelle se focalise cette recherche a accès au langage et à l’écriture, la méfiance de Good et Brophy, vue plus haut, à l’encontre de l’étayage opéré dans des situations d’enseignement spécialisé n’est pas d’actualité.

Description de la situation

Le Département de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC) du canton de Vaud désire favoriser l’intégration scolaire dans une visée inclusive.
Cette perspective inclusive répond à « une réalité plus large que ne le suggérait son objet initial concernant la façon la plus appropriée d’enseigner aux élèves handicapés dans les établissements ordinaires. La définition actuelle se réfère à une réforme holistique de l’éducation qui vise à soutenir et accueillir la diversité chez les apprenants. » (Mäkinen & Mäkinen, 2011, p. 41-42).
C’est dans ce contexte que l’Ecole Cantonale pour Enfants Sourds propose des postes d’enseignants spécialisés de renfort pédagogique dont le but est de construire avec les enseignants ordinaires un projet pédagogique pour les élèves ayant des besoins éducatifs spécialisés afin de leur permettre une meilleure intégration. Cette demande d’intégration a des conséquences sur la collaboration et la coopération des enseignants ordinaires et des enseignants spécialisés intervenant dans les classes ordinaires. Ainsi, l’enseignant de renfort pédagogique se doit de travailler, non seulement sur l’élève lui-même et ses capacités, mais également sur l’environnement global, afin de permettre de meilleurs apprentissages et une meilleure participation à la vie scolaire.
C’est dans ce cadre de renfort pédagogique que j’ai choisi de réaliser les vidéos étudiées dans ce travail.
Travaillant actuellement dans un établissement secondaire de la région lausannoise avec des élèves scolarisés en 7H et 9VG, j’ai choisi cinq élèves d’une classe 7H dans laquelle j’interviens six périodes par semaine. Deux des élèves sont suivis par du renfort pédagogique, et les trois autres montrent des difficultés d’apprentissage et de concentration.
Un des élèves que je suis souffre d’une dyspraxie lourde et de troubles envahissant du développement avec des traits autistiques. L’autre montre un léger retard mental et cognitif, et une probable dyslexie (bilan logopédique demandé pour cet élève).
Pour des raisons éthiques, les élèves suivis par du renfort ne seront pas spécifiés, et tous les élèves seront appelés par leurs initiales de prénom, à savoir : A., E., K., H. et S.
Les enseignantes seront citées en tant que Mme S., l’enseignante régulière et Mme G., l’enseignante spécialisée.
J’ai choisi ce petit groupe de cinq élèves pour filmer deux situations de problèmes, une fois avec moi, Mme G., leur enseignante spécialisée, et une fois avec leur enseignante titulaire, Mme S. leur enseignant les mathématiques.
Après avoir reçu l’aval de la direction de l’établissement, j’ai demandé l’accord des parents par un courrier avec un coupon à retourner signé (annexe), pour réaliser ce travail. Tous les parents de la classe ont accepté de laisser leur enfant participer à cette recherche.
Afin de préparer les élèves au dispositif, nous avions convenu de faire une séance d’essai de résolution de problèmes, un peu plus courte, avec la présence de la caméra, mais qui ne filmait pas.
Les deux vidéos retenues ont été réalisées à l’automne 2014 avec ces 5 élèves, une fois avec Mme G. et une fois avec Mme S. Pendant que l’une était en train d’accompagner ce petit groupe de cinq élèves dans la résolution d’un problème, devant la caméra, l’autre faisait la même chose avec le reste de la classe, dans une autre salle, mais sans caméra.
Chacune des vidéos dure environ trente minutes.
Une fois ces vidéos recueillies, je les ai retranscrites. La retranscription s’est focalisée sur les paroles, quelques accentuations du langage et j’ai également relevé quelques gestes utiles à la compréhension globale des paroles ou du déroulement de l’interaction. C’est à partir de ces retranscriptions que j’ai travaillé les vidéos. Je les ai codées d’abord avec la grille originale proposée par Dias et Sermier (2014), puis avec une nouvelle grille que je vais présenter. C’est l’analyse de ces codages qui fera l’objet de cette recherche.

Analyse a priori Le Cerisier

Dans Le Cerisier, il est important de comprendre la notion de milieu, déterminante pour la résolution du problème. De plus, comprendre ce que signifie au-dessus de ou au-dessous de, ainsi que les notions mathématiques de base, telle que dénombrer jusqu’à 15, faire le lien entre monter et ajouter des barreaux, et descendre et soustraire sont essentielles à la résolution de ce problème.
Les savoirs mathématiques en jeu dans cette tâche sont le tri, l’organisation des informations, la mise en oeuvre d’une démarche de résolution, l’ajustement d’essais successifs, la déduction d’une information à partir de celles qui sont connues et la vérification.
Cela correspond à l’objectif du plan d’Etude Romand (CIIP, 2010) MSN 12 : Poser et résoudre des problèmes pour construire et structurer des représentations des nombres naturels.
Les prérequis pour résoudre ce problème consistent en la connaissance de la notion de « milieu », soit qu’il y ait le même nombre de barreaux de chaque côté du milieu de l’échelle, mais également de savoir ce que signifie « au-dessus de » et « au-dessous de ». Il faut également être capable de pouvoir dénombrer jusqu’à 15 et de représenter une échelle en la dessinant.

Description des problèmes

Les problèmes mathématiques choisis pour la réalisation de ces vidéos sont des problèmes ouverts de type énigme. Ils demandent des capacités de compréhension et de réflexion, mais leur résolution ne demande pas forcément de grandes connaissances au niveau de la technique opérationnelle mathématique. Ainsi, c’est plutôt le travail en groupe, l’appui sur des outils tels que le croquis et l’étayage proposé par l’enseignante qui va aider les élèves à résoudre ces énigmes.

Nouvelle grille d’analyse

Lorsque le moment d’analyser les vidéos est arrivé, nous nous sommes rendus compte, avec mes collègues travaillant sur le même sujet dans leur mémoire professionnel, que la grille présentée par Dias et Sermier ne correspondait pas entièrement à nos besoins pour que nous l’utilisions telle quelle. Ainsi, nous avons décidé de la compléter avec des exemples tirés de nos protocoles et de l’agrémenter de trois indicateurs supplémentaires. Nous pensons que ces ajouts pourront être utiles aux prochains utilisateurs de la grille.
Dans les étayages centrés sur l’élève, nous proposons d’ajouter un indicateur à la catégorie ER (Relâcher), il s’agit de « Interpeller les élèves pour valider ou invalider une proposition d’élève ».
Nous avons remarqué que nous interpellions nos élèves pour valider ou invalider une proposition d’un autre élève, afin de rendre les échanges entre élèves plus dynamiques. De plus, cet étayage permet de les rendre attentifs à ce que leurs pairs ont dit ou fait. Cela les recentre sur la tâche et donne de l’importance à leurs avis et commentaires. Par exemple, « Alors est-ce que quelqu’un est d’accord avec H. ? »

Analyse qualitative en regard avec les référentiels de compétences

La question de recherche de ce travail se basant sur les différences entre les enseignants spécialisés et les enseignants ordinaires dans le déroulement d’une résolution de problèmes en petit groupe d’élèves hétérogènes, j’ai choisi de mettre en regard quelques compétences des référentiels de compétences de chacune des professions proposés par la Haute école pédagogique du canton de Vaud et les types de codage repérés chez l’une ou l’autre des enseignantes.
L’enseignante ordinaire devrait, selon mon hypothèse de recherche, garder un rythme soutenu dans la réflexion et opérer un guidage serré vers la résolution du problème. Ainsi, dans le référentiel de compétences professionnelles de l’enseignant ordinaire, nous trouvons certaines caractéristiques se déclinant en onze gestes professionnels.
1. Agir en tant que professionnel critique et porteur de connaissances et de culture.
2. S’engager dans une démarche individuelle et collective de développement professionnel.
3. Agir de façon éthique et responsable dans l’exercice de ses fonctions.
4. Concevoir et animer des situations d’enseignement et d’apprentissage en fonction des élèves et du plan d’études.
5. Evaluer la progression des apprentissages et le degré d’acquisition des connaissances et des compétences des élèves.
6. Planifier, organiser et assurer un mode de fonctionnement de la classe favorisant l’apprentissage et la socialisation des élèves.
7. Adapter ses interventions aux besoins et aux caractéristiques des élèves présentant des difficultés d’apprentissage, d’adaptation ou un handicap.
8. Intégrer les technologies de l’information et de la communication aux fins de préparation et de pilotage d’activités d’enseignement et d’apprentissage, de gestion de l’enseignement et de développement professionnel.
9. Travailler à la réalisation des objectifs éducatifs de l’école avec tous les partenaires concernés.
10. Coopérer avec les membres de l’équipe pédagogique à la réalisation de tâches favorisant le développement et l’évaluation des compétences visées.
11. Communiquer de manière claire et appropriée dans les divers contextes liés à la profession enseignante.
Chacun de ces gestes professionnels se spécifie en plusieurs composantes. Nous allons maintenant choisir quelques-uns de ces gestes professionnels et de ces composantes qui sont particulièrement en lien avec l’étayage et la résolution de problèmes.
Mais avant tout, je vais lister rapidement les treize compétences professionnelles dans le champ de la pédagogie spécialisée, ce qui nous permettra ensuite de mettre en regard à la foi les gestes professionnels de l’enseignant ordinaire, les types d’étayage présentés plus haut dans la grille retravaillée, et enfin les compétences professionnelles de l’enseignant spécialisé.
1. Développer ses connaissances de l’élève de l’enseignement spécialisé et les intégrer dans sa pratique.
2. Intégrer les connaissances spécifiques à ce champ dans sa pratique d’enseignant spécialisé.
3. Penser sa pratique d’enseignant spécialisé en lien avec le cadre légal, le contexte institutionnel et le contexte social.
4. Reconnaître les problèmes de société et en tenir compte dans son activité professionnelle d’enseignant spécialisé.
5. Inscrire sa pratique d’enseignant spécialisé dans un cadre éthique défini.
6. Concevoir des situations d’enseignement-apprentissage et différencier ses choix didactiques en fonction des besoins spécifiques des élèves en difficultés ou en situation de handicap.
7. Piloter et réguler des situations d’enseignement-apprentissage en enseignement spécialisé.
8. Articuler différents types d’évaluation dans le cadre de l’enseignement spécialisé.
9. Instaurer un climat propice aux apprentissages des élèves en difficultés ou en situation de handicap.
10. Développer chez tous les élèves le sens des responsabilités, la citoyenneté et le respect des différences.
11. Prendre sa pratique d’enseignant spécialisé comme objet d’analyse, d’auto-formation et de construction de son identité professionnelle.
12. Utiliser les ressources nécessaires pour enrichir sa réflexion et favoriser l’évolution de ses pratiques en pédagogie spécialisée.
13. Travailler en équipes pluridisciplinaires dans un esprit de partenariat, en plaçant l’élève et son développement au centre des préoccupations.
Ainsi, dans le premier geste professionnel de l’enseignant ordinaire, deux composantes me semblent pertinentes à mentionner :
1.1 Situer les points de repère fondamentaux (concepts, postulats, méthodes) des savoirs de sa discipline afin de rendre possible des apprentissages significatifs et pertinents chez les élèves.
Un savoir structuré et des connaissances approfondies incombent à l’enseignant ordinaire qui se doit alors de jouer le rôle d’expert dans la relation de tutelle qu’il peut développer avec ses élèves. Cette expertise de connaissances lui permet de mettre en évidence des caractéristiques déterminantes et de les distinguer de celles qui ne sont pas pertinentes. C’est ce qui est présent dans le troisième indicateur de la catégorie TR, aider à la représentation du problème. Par exemple, dans le protocole de Mme G. « Il y a un mot qui est très important, c’est milieu (…)
Qu’est-ce que ça veut dire milieu ? ça veut dire qu’il y en a (…) la moitié et la moitié ».
L’enseignante signale l’importance du mot milieu et l’explique, à l’aide de gestes. L’analyse a priori du problème a permis de savoir que la notion du milieu était essentielle à la résolution de ce dernier et c’est cette connaissance préliminaire que l’enseignante transmet ici aux élèves, ce qui va permettre au processus de résolution de prendre un nouveau souffle et d’aboutir rapidement.

Prendre en compte la diversité culturelle et linguistique des élèves

Dans cette seconde composante, l’enseignant ordinaire doit être attentif à la multiplicité des origines culturelles et linguistiques auxquelles il est confronté lors de son enseignement. Il doit préparer son enseignement pour permettre aux élèves appartenant à ce groupe hétérogène d’accéder aux savoirs des disciplines qu’il enseigne et de faire des liens significatifs pour eux.
Il doit donc parfois faire des adaptations langagières permettant une compréhension du vocabulaire employé, second indicateur de la catégorie d’étayage TR, aider à la représentation du problème. Par exemple, dans le protocole de Mme S. « Cette vitrine a 7 rayons. [- C’est quoi des rayons ?- Les rayons, c’est des étagères. – ] Exactement.- [ Non, mais parce que les rayons, c’est une sorte de lumière. ] – Ah, alors ça peut être des rayons laser, mais là, c’est pas ça. Les rayons, c’est simplement des étagères, vous avez vu là, y a combien de rayons dans la première étagère ? » (L’enseignante montre une étagère dans la classe). Ici, l’enseignante explique le mot rayon qui n’avait pas été compris par tous les élèves comme étant les tablards d’une étagère.
Ce premier geste professionnel du référentiel de compétences de l’enseignant ordinaire influencerait donc l’aide à la représentation. Ainsi, dans le référentiel de compétences de l’enseignant spécialisé, ce geste professionnel de l’enseignant ordinaire se rapprocherait de la sixième compétence, concevoir des situations d’enseignement-apprentissage et différencier ses choix didactiques en fonction des besoins spécifiques des élèves en difficultés ou en situation de handicap. Il serait proche, principalement des descripteurs 6.1 prendre en compte l’hétérogénéité des élèves dans l’organisation de son enseignement, et 6.2 connaître, définir, adapter les savoirs disciplinaires en fonction des besoins des élèves et des compétences scolaires/professionnelles attendues ; les traduire en objectifs d’apprentissages formulés en termes opérationnels. L’enseignant spécialisé, faisant face à des élèves de capacités langagières et cognitives très hétérogènes doit pouvoir transmettre les savoirs à enseigner avec des mots qui soient compréhensibles pour ses élèves. Ainsi, une bonne connaissance de la matière lui permettra plus facilement d’illustrer ses propos avec un vocabulaire plus riche et plus adapté.
La quatrième compétence du référentiel de l’enseignant ordinaire est la suivante : concevoir et animer des situations d’enseignement et d’apprentissage en fonction des élèves et du plan d’étude. Elle comprend onze composantes, mais j’aimerai m’attarder sur la composante 3 et la composante 8 :

Planifier des séquences d’enseignement et d’évaluation qui tiennent compte de la logique des contenus et de la progression des apprentissages.

Dans ce cas, l’enseignant doit organiser son enseignement et structurer ses séquences, de manière à ce que les nouveaux apprentissages se fixent sur des apprentissages déjà connus.
Ainsi, la programmation prévoit des étapes permettant une évaluation de l’acquisition des nouvelles stratégies.
Donc l’enseignant se doit d’imposer une certaine démarche d’apprentissage aux élèves, afin de leur transmettre les savoirs à enseigner. Ceci correspond à la catégorie TT, transmettre, et en particulier à l’indicateur imposer une démarche. Par exemple, Mme G. dit « non, non, on est pas encore là, y a d’abord une première étape. » ou alors « ça compte pas celui [le barreau de l’échelle] où on est, hein ! ». Et Mme S. « En bas, elle, attention, hein, en bas, y en aura plus et à chaque fois, elle en met un de moins, un de moins, un de moins », ou alors « voilà ! des petits traits ![pour représenter les verres] alors allez-y ! ».

La composante 8 est la suivante

Encadrer les apprentissages des élèves par des stratégies, des démarches, des questions et des rétroactions de manière à favoriser l’intégration des apprentissages.
Par des interactions actives, l’enseignant vise à consolider les apprentissages des élèves. Il fait des liens avec le monde et cherche à ancrer les connaissances dans un contexte qui leur est familier. Par exemple « Quand on joue au jeu de l’oie (…), ça compte pas celui [la case] où on est, hein !»
Il leur demande également d’expliciter leurs démarches de raisonnement. Il active donc la métacognition des élèves, ce qui correspond à la catégorie d’étayage TM. Par exemple, chez Mme S. « Alors pourquoi t’aimerais faire 7×7, explique-nous ? » ou chez Mme G. « Là, tu fais quoi, H. ? – Là, tu utilises un peu les chiffres qui sont donnés dans le problème pis t’essaies de les mettre ensemble pour essayer de deviner la réponse. C’est ça, hein ? », ou alors « Ok, est-ce que quelqu’un peut me réexpliquer un peu ce qu’on a fait là ? »
Ce deuxième geste professionnel de l’enseignant ordinaire présenté ici qui consiste à concevoir et animer des situations d’enseignement et d’apprentissage en fonction des élèves et du plan d’études, peut être mis en lien avec la septième compétence du référentiel de compétences de l’enseignant spécialisé : piloter et réguler des situations d’enseignement apprentissage en enseignement spécialisé. Et en particulier les descripteurs 4, 7 et 8.
Le point 7.4 ajuster son enseignement à l’évolution des connaissances et des compétences de l’élève et adapter l’environnement en conséquence (différenciation) marque la différence principale entre l’enseignement ordinaire et l’enseignement spécialisé, selon Pelgrims (2001), car d’un côté, il y a la visée de l’enseignement au groupe classe, où les apprentissages sont organisés en programme visant une accumulation des savoirs se basant sur l’acquisition des savoirs précédents. Et d’un autre côté, il y a une perspective d’ajustement à l’élève et d’adaptation de l’environnement.
Les points 7.7 construire avec l’élève le sens de ses apprentissages, mettre en place les moyens de percevoir ce sens (mise en projet ) et 7.8 intégrer à son enseignement des outils didactiques spécifiques favorisant la prise de conscience par l’élève de ses propres stratégies d’apprentissage, montrent l’intérêt que devrait avoir l’enseignant spécialisé pour le suivi particulier d’un élève, dans son développement et ses apprentissages.
La huitième compétence articuler différents types d’évaluation dans le cadre de l’enseignement spécialisé comprend un descripteur prônant la pratique de l’auto-évaluation par les élèves (8.6). L’auto-évaluation demande une réflexion sur son raisonnement et un retour sur la démarche entreprise, ce qui s’apparente à un travail métacognitif sur la tâche effectuée.
La cinquième compétence du référentiel de compétences professionnelles de l’enseignant ordinaire est également intéressante à relever. Evaluer la progression des apprentissages et le degré d’acquisition des connaissances et des compétences des élèves. L’enseignant est tenu d’évaluer les performances des élèves. Ainsi, il obtient un indice sur le degré d’acquisition des connaissances des élèves. J’ai retenu trois composantes de cette compétence.
La première précise qu’une compétence de l’enseignant est de repérer les moments propices où offrir une aide adéquate, afin de permettre aux élèves de poursuivre leurs apprentissages, et les moments où il faut leur permettre d’avancer seul, plus vite, plus loin.

Repérer, en situation d’apprentissage, les forces et les difficultés des élèves afin d’adapter l’enseignement et de favoriser la progression des apprentissages.

Par l’observation, l’enseignant analyse les processus et les stratégies d’apprentissage des élèves. S’il considère qu’il y a mécompréhension, il se doit alors de reprendre l’enseignement proposé et d’approfondir les apprentissages à consolider.
Il s’agit bien là du but même de l’étayage. Rappelons que l’étayage est une aide offerte à un apprenant de sorte que celui-ci parvienne à réaliser une tâche qu’il n’arriverait pas à faire seul.
Si l’on veut faire de l’étayage, il doit d’abord y avoir, auparavant, une analyse des lacunes et des besoins de l’apprenti, afin que l’aide soit appropriée. C’est là que réside tout le savoir de l’enseignant.
Cette composante peut être mise en regard avec la compétence 8 du référentiel de compétences de l’enseignant spécialisé articuler différents types d’évaluation dans le cadre de l’enseignement spécialisé, et plus particulièrement les descripteurs 8.3 observer l’élève en action et tenter d’identifier les stratégies d’apprentissage mises en oeuvre et 8.5 utiliser les erreurs et les obstacles à l’apprentissage dans une perspective d’évaluation formative et de construction des savoirs. Dans les protocoles présentés plus haut, les deux enseignantes repèrent les difficultés des élèves, et leurs interventions leur permettent de cerner une information importante et d’avancer dans la résolution du problème.
Pour Mme G. « ok, y a un mot qui est très important dans ce problème (…) il y a un mot qui est très important, c’est milieu ». Cette intervention arrive après que les élèves ont discuté pendant quelques minutes pour essayer de trouver le nombre de barreaux de l’échelle, avec très peu d’intervention de l’enseignante. Le fait d’expliquer avec des gestes ce qu’est le milieu permet aux élèves de résoudre très rapidement le problème. C’est un moment-clé qui permet d’évoluer d’un coup vers l’issue du problème.
Dans le protocole de Mme S., l’enseignante précise les questions de vocabulaire au début de la séquence et guide les élèves dans leur réflexion. Il n’y a donc pas de moment-clé, mais un suivi régulier et serré de leurs stratégies de résolution.
Collaborer avec l’équipe pédagogique à la détermination du rythme et des étapes de progression souhaitées à l’intérieur du cycle de formation.
Contribuer avec l’équipe pédagogique à la décision de promotion, d’orientation ou de certification, en collaboration avec les parents lorsque la situation le requiert.
La sixième et la septième composantes s’attardent par contre sur la collaboration avec l’équipe pédagogique afin de réfléchir à la vitesse d’enseignement et aux programmes à suivre, ainsi qu’aux questions d’orientation des élèves, en cas de réussite ou d’échec. Ces deux dernières composantes de la compétence cinq font référence aux différences existant dans les buts des enseignants ordinaires en regard avec ceux des enseignants spécialisés, en terme d’objectifs d’enseignement.
Dans le référentiel de compétences de l’enseignant ordinaire, la compétence 6 planifier, organiser et assurer un mode de fonctionnement de la classe favorisant l’apprentissage et la socialisation des élèves précise que la gestion d’une classe fonctionnelle est essentielle dans la progression des apprentissages des élèves. C’est toute la question de la collectivité et du respect de la vie d’un groupe qui est en jeu dans cette compétence. L’enseignant se doit d’anticiper et de réguler les interactions apparaissant en classe. Plus précisément, la composante 2 est intéressante dans notre débat.
Communiquer aux élèves des exigences claires au sujet des comportements scolaires et sociaux appropriés et s’assurer de leur compréhension et de leur respect.
L’explicitation des règles et des attentes du point de vue comportemental est essentielle, mais pas suffisante. Le comportement et l’attitude de l’enseignant doivent également être en accord avec ses exigences. Il doit y avoir une cohérence entre ce qui est demandé aux élèves et l’exemple que donne l’enseignant. De plus, il est essentiel de vérifier que les élèves aient bien saisi ces attentes et qu’elles soient rappelées en cas de transgression.
Tout ceci est donc centré sur l’élève et son comportement. Ainsi, le type d’étayage utilisé dans ce genre de situation serait de l’ordre des catégories EC, enrôler/capter, EM, maintenir l’attention ou EA, apaiser les relations.
Dans la catégorie EC, le fait d’engager la responsabilité de l’élève permet de mobiliser l’élève dans la tâche proposée et de lui offrir la possibilité de participer au bon fonctionnement du groupe dans l’accomplissement de cette tâche.
Mme S. « j’aimerai que vous ouvriez grand vos oreilles, que tout le monde se concentre. » Dans la catégorie EM, le rôle de l’enseignant est plutôt de rappeler l’élève à l’ordre en l’interpellant, le sollicitant personnellement ou en le recentrant sur le travail qu’il est en train d’effectuer, sa place dans le groupe-classe.
Mme G. « E. ! ça va pas aller, hein ! Ok ? »
Et dans la catégorie EA, il s’agirait plutôt d’apaiser et de réguler les interactions entre les élèves, donc de gérer et anticiper les comportements de chacun dans l’interaction avec les autres et de réajuster, au besoin, les conditions de la situation d’apprentissage, de manière à assurer la poursuite des activités engagées.
Mme S. « ouais, ok, alors allez-y pour faire tous ensemble, dites à K. ce qu’il doit dessiner pour que vous soyez tous d’accord. »

Conclusion

Les enseignants ordinaires et les enseignants spécialisés n’ont pas les mêmes buts pédagogiques. En effet, dans le cadre de ma profession, une coopération maître spécialisé – maître ordinaire est essentielle pour travailler sur le projet pédagogique d’un élève. Mais pour cela, il faut revoir la notion commune de classe, dans un élargissement du contexte cognitif permettant des adaptations et des aménagements nouveaux.
Ainsi, la classe ordinaire accueille des élèves ayant des difficultés plus marquées, que ce soit au niveau cognitif ou psychomoteur, et l’enseignant spécialisé doit se faire à un groupe d’élèves plus important, sous la responsabilité de l’enseignant ordinaire, et dépendant d’un temps didactique construit sous forme de programme. « Il [l’enseignant spécialisé] endosserait alors dans ce cas un rôle d’enseignant spécialisé comme ressource spécifique dans le cadre de l’aide à l’école. L’enseignant ordinaire approfondit sa connaissance d’outils didactiques relatifs à des notions-clés. » (Nédélec-Trohel, 2010, p.9)
Il s’agit bien là de deux perspectives différentes, d’une même profession. Les référentiels de compétences sont là pour nous rappeler comment un ensemble de tâches compose l’identité d’un enseignant ordinaire ou spécialisé. Ils ont des rôles différents à jouer auprès des élèves, souvent issus d’une population différente. Mais il est important de rappeler que l’étudiant en pédagogie est avant tout un enseignant, y compris ceux qui entrent dans la pédagogie spécialisée.
L’accompagnement qu’ils offrent à ces élèves leur permettent d’entrer dans des apprentissages de plus en plus complexes, suivant leur développement propre et la culture dans laquelle ils sont plongés. Ainsi, je reviens sur l’élément principal de la théorie sur l’apprentissage de Vygotski (1997) en la notion de zone proximale de développement. L’apprentissage est une action de notre pensée, naissant dans l’interaction avec la culture sous deux faces : le langage et les interactions sociales. L’étayage langagier comme étudié dans ce travail est au fond un échange s’opérant entre une personne experte, souvent l’enseignant dans le milieu scolaire, mais cela peut être un autre élève, et un apprenant.
Vous aurez peut-être remarqué qu’au cours des protocoles, nombreuses sont les interventions des enseignantes sous forme de question. Ceci est probablement du au fait que les élèves sont âgés d’une douzaine d’années et que leur fonctionnement cognitif le permet, mais il est curieux d’envisager que le fait de poser des questions soit de l’étayage. Et pourtant, si l’on considère que la prise de conscience et la réflexivité peuvent augmenter la motivation des élèves, en fonction de leurs attentes, alors ces questions peuvent bel et bien être étayantes.
Il faut toutefois garder à l’esprit que le but principal de l’enseignement est l’autonomie des élèves dans leur apprentissage, et ainsi, l’étayage doit être lié en priorité aux intérêts et aux besoins propres de ces élèves face à une tâche particulière.
Pour terminer, cette mini-recherche fait office d’exploration d’une comparaison entre l’enseignant ordinaire et l’enseignant spécialisé dans leur façon d’étayer le processus de résolution de problèmes en mathématiques fait par un petit groupe d’élèves. Il faut prendre ces résultats dans leur contexte et garder à l’esprit qu’il s’agit d’une photographie d’une partie de séquence d’enseignement et que cette question mériterait l’analyse de plusieurs extraits d’enseignements ordinaire et spécialisé pour établir véritablement des profils d’enseignement.

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Table des matières

Introduction
Partie 1 : Cadre théorique
L’étayage
L’étayage dans l’enseignement spécialisé
La résolution de problèmes
Les compétences professionnelles
Partie 2 : Approche méthodologique 
Insertion dans la recherche Dias et Sermier
Présentation de la grille d’analyse
Partie 3 : Présentation du travail effectué 
Question de recherche
Description de la situation
Nouvelle grille d’analyse
Description des problèmes
Partie 4 : Analyse
Analyse quantitative
EM : maintenir l’attention
TS : structurer la résolution (du problème)
TR : aider à la représentation (du problème)
TT : transmettre
X : autre
Analyse qualitative en regard avec les référentiels de compétences
Conclusion 
Bibliographie 
Annexes 
Annexe 1 : grille ETAYMATH 
Annexe 2 : Grille ETAYMATH révisée
Annexe 3 : protocole MG 
Annexe 4 : protocole LS 
Annexe 5 : Circulaire élèves

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