Analyse morphologique de la microstructure 3D de réfractaires électrofondus à très haute teneur en zircone

Morphologie du THTZ

Les THTZ électrofondus ont une microstructure très particulière. K. Madi [MAD 06] a utilisé la diffraction des rayons X par synchrotron à l’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) pour obtenir des images tomographiques tridimensionnelles des THTZ. Le zirconium possédant un fort numéro atomique par rapport aux éléments constituant la phase vitreuse, ceci le rend beaucoup plus absorbant des rayons X, ce qui permet d’obtenir des images avec un fort contraste entre le verre et la zircone. Avec les images tomographiques et les images MEB obtenues, il a réalisé plusieurs analyses morphologiques sur les THTZ en 2D et en 3D : la taille de dendrite, la covariance, la percolation et la tortuosité ont ainsi été étudiées. Ces propriétés morphologiques ont également été comparées pour des réfractaires ayant des teneurs différentes en phase vitreuse. Un des résultats les plus importants a été la mise en évidence du caractère percolant du squelette de zircone en 3D : les dendrites sont interconnectées entre elles. Pour une image 3D du THTZ avec une section de 336µm x 310µm, la quasi-totalité de la zircone (99,5%) est interconnectée dès que l’épaisseur atteint 44,8µm. Le même effet est observé pour la phase vitreuse pour une épaisseur de 118,3µm . Cette interconnexion du squelette de zircone, très différente de la structure des milieux granulaires, permet d’expliquer trois propriétés originales des THTZ :
La résistance à la transformation martensitique au refroidissement. Contrairement aux matériaux frittés granulaires qui ne conservent pas leur intégrité mécanique s’ils ne sont pas stabilisés, les matériaux électrofondus résistent au gonflement grâce à l’enchevêtrement dendritique qui les caractérise.
La résistance à la corrosion. La corrosion de la phase vitreuse au contact du verre fondu ne permet plus le déchaussement des grains car les dendrites restent solidaires du squelette de zircone.
La résistance au fluage. Même avec des pourcentages de phase vitreuse plus élevés que ceux observés dans les matériaux frittés et une viscosité de celle-ci faible, le glissement aux joints de grains observé lorsque ceux-ci sont individualisés n’est plus possible en raison de l’imbrication tridimensionnelle des dendrites.

Transformation de phase de la zircone

La zircone possède un point de fusion d’environ 2700°C [OHT 94] et est souvent employée pour son caractère réfractaire. Elle se présente essentiellement sous trois formes : monoclinique m, quadratique q et cubique c. Elle a une haute résistance à l’abrasion, à la corrosion et une faible conductivité thermique. Au refroidissement, à environ 2350°C, elle se transforme en phase quadratique et, à environ 1163°C, en phase monoclinique. Lors du refroidissement, la transition de phase de quadratique vers monoclinique, de type martensitique, s’accompagne d’une forte augmentation de volume d’environ 4,5%. Ce gonflement peut être très endommageant pour le matériau et peut aller jusqu’à provoquer une pulvérisation de la zircone frittée, si cette dernière n’est pas stabilisée. Notons tout d’abord l’existence d’une hystérésis thermique de la transformation : la transformation de phase se produit à des températures plus élevées au chauffage qu’au refroidissement. Selon les méthodes de caractérisation utilisées, les températures de début et de fin de transformation diffèrent légèrement .Les variétés cristallographiques de la zircone peuvent être définies par des paramètres de maille (a, b, c, α, β,γ ) et des groupes d’espace qui différent suivant le polytype de la zircone. Les structures quadratique et monoclinique étant très proches de la structure cubique, il est possible d’obtenir une phase cubique à température ambiante par dissolution d’oxydes cristallisants dans le système. Les ajouts les plus utilisés sont la chaux, la magnésie et l’oxyde d’yttrium [DOU 86]. La phase quadratique à température ambiante peut être obtenue par refroidissement rapide (trempe) d’un échantillon. L’ajout d’yttrine, par exemple, permet d’éviter la déstabilisation de la zircone durant le refroidissement post-frittage et de conserver sous forme métastable la phase quadratique lors du refroidissement.

Simulation du refroidissement

L’influence de facteurs tels que la température, la vitesse de refroidissement, la composition chimique des phases et la topologie microstructurale sur les contraintes internes créées pendant le refroidissement post-coulée peut être estimée par simulation numérique. Les calculs par éléments finis constituent une méthode efficace pour analyser les mécanismes physiques de création des contraintes internes et un outil efficace pour orienter le développement de nouveaux matériaux. K.Madi [MAD 06] a utilisé la simulation par éléments finis pour réaliser des calculs de contraintes dans la microstructure du THTZ. Il a pour ce faire utilisé le code Zebulon, développé par MINES-ParisTech en collaboration avec l’ONERA et Northwest Numerics (Seattle, USA). Il est programmé en C++ et présente une structure modulaire orientée objet, qui comprend principalement un solveur séquentiel (Z-solve), un solveur parallèle Z-psolve, une interface utilisateur (Z-master) pour les pré- et post-traitements graphiques, un post-processeur (Z-post), un simulateur (Z-sim), un optimiseur (Z-optim) et une librairie de lois de comportement (Z-mat) interfacée par ZebFront.
K. Madi a premièrement sélectionné un VER (volume élémentaire représentatif) du matériau dans l’image tomographique obtenue à ESRF. Il a segmenté ensuite ce VER pour différencier la zircone du verre, puis l’a maillé . Pour certains calculs de grande taille, la méthode de calcul parallèle par un cluster a été utilisée. Pour ce faire, le maillage a été découpé en plusieurs sous-domaines  pour pouvoir attribuer à chaque processeur son propre maillage. A partir des résultats bruts du calcul, un post-processing permet de mener une étude statistique des types de contrainte pertinents. K. Madi a également analysé les distributions de contraintes locales . Il a associé la contrainte principale jp1 de traction à l’endommagement dans le matériau. Cette méthode a permis de rendre compte de l’évolution de l’endommagement de la phase vitreuse pendant le refroidissement.

Percolation du squelette de zircone et du verre

Des premières mesures de percolation ont été réalisées sur des clichés obtenus par MEB. Ces images ont été prises avec un grandissement de 100, soit une taille de 1024 pixels x 701 pixels (résolution d’image de 1,1µm). Seule la percolation de la zircone a été analysée. Cette analyse demeure approximative car la résolution n’est pas suffisante pour considérer les fines lames de phase vitreuse et parce qu’une image 2D ne peut pas traduire, à elle seule, la complexité morphologique tridimensionnelle des THTZ. Après segmentation de la phase vitreuse et de la zircone, un calcul du taux de percolation a été effectué en ajoutant successivement des rangées de pixels de la gauche vers la droite. On constate que le ZS, le ZB et le ZBY7 commencent à percoler partiellement autour de 300µm.
Le ZS et le ZBY7 atteignent quant à eux très vite un taux proche de 100%. Sur une distance de 1,1mm, le ZB n’est pas totalement percolant. Le ZBY1 percole très tardivement et son taux n’atteint pas non plus 100%. Ces résultats semblent indiquer que les squelettes de zircone du ZB et du ZBY1 sont “moins connectés”que ceux du ZS et du ZBY7.
Pour calculer le taux de percolation d’une image 3D qui est composée de plusieurs couches d’image 2D, on procède par empilement successif de ces couches.  pour la phase vitreuse. Cette comparaison est réalisée pour les trois directions : X, Y et Z. On constate que les deux phases de tous les matériaux atteignent très vite un taux de percolation de 100%. Ces résultats sont en bon accord avec ceux obtenus par K.Madi. Les THTZ sont des réfractaires très percolants en volume. Dans la direction Z, la zircone percole dès la première couche d’image 2D. Dans les directions X et Y, les quatre THTZ percolent également très vite. Le ZB et le ZBY1 affichent un léger retard par rapport au ZS et au ZBY7, surtout pendant la première quinzaine de microns. Ceci est conforme au résultat obtenu lors de l’analyse des images 2D. La différence demeure toutefois très réduite, sans doute en raison de la taille et de la résolution limitées des images tomographiques.
Dans la phase vitreuse, le ZBY7 percole plus tard que les autres matériaux dans la direction X et Y. Les courbes du ZB révèlent une périodicité entre 30 et 45µm. Cette périodicité correspond à l’échelle de longueur caractéristique obtenue par l’analyse de la covariance.

Relations entre la connectivité et le comportement mécanique du squelette de zircone

Nous nous intéresserons ici au comportement du squelette de zircone. Celui-ci peut être observé de deux manières : soit en éliminant le verre par une attaque à l’acide fluorhydrique, soit en élevant suffisamment la température pour que le verre ne joue plus aucun rôle mécanique.

Flexibilité du THTZ après enlèvement du verre par attaque HF

Un changement drastique de propriétés mécaniques a été observé lorsque l’on élimine la phase vitreuse. Après immersion pendant plusieurs jours dans la solution HF, certaines éprouvettes sont devenues flexibles au point de fléchir sous leur propre poids. Ce phénomène est spectaculaire pour le ZB, mais est également observé pour le ZS et le ZBY1. Cet essai n’a pu être réalisé sur le ZBY7 par manque d’éprouvette de taille suffisante. Une série d’essais a été menée pour caractériser le changement de comportement mécanique induit par une attaque HF de longue durée. La taille des éprouvettes est 150mm x 25mm x 3mm. La mesure de la flèche sous son poids propre a été réalisée en plaçant l’éprouvette sur deux rouleaux en alumine de 10mm en diamètre. L’entraxe entre les deux rouleaux était de 110mm. La flèche mesurée est le déplacement du milieu de l’éprouvette par rapport à sa position initiale . Cette mesure de distance a
été effectuée sans contact grâce à un extensomètre à ombrage laser Mitutoyo’s Laser Scan Micrometer model LSM-506S. Après séjour dans la solution HF, les éprouvettes ont été séchées, leur flèche mesurée, puis immergées à nouveau dans le bain acide. Les éprouvettes deviennent de plus en plus souples lorsque l’intensité de l’attaque HF augmente. La durée maximale d’attaque HF a été de 33 jours pour le ZS et de 15 jours pour le ZB et le ZBY1 qui étaient devenus extrêmement fragiles et ont été cassés lors de leur manipulation.

Flexibilité du THTZ à haute température

Le ZB-HF est rendu flexible par l’élimination du verre par attaque acide. Nous avons voulu vérifier que le même phénomène était observable quand le verre est très fluide à très haute température. La mesure de la flèche  de l’éprouvette a été réalisée en continu en utilisant un extensomètre à ombrage laser. L’éprouvette était positionnée dans un four sur deux cylindres parallèles de diamètre de 10mm d’entraxe 110mm. La taille des éprouvettes de ZB, ZS et ZBY1 était 125mm x 12mm x 3mm. La température a été montée jusqu’à 1450°C à une vitesse de 80°C/h, maintenue à cette température durant une heure, puis redescendue à température ambiante à la même vitesse que la montée.
Le ZB est plus déformé que le ZS et que le ZBY1. Les courbes présentent du bruit qui est dû à la fluctuation du système de mesure mais qui n’affecte pas la mesure de la flèche. Tant que le verre est rigide, la flèche des éprouvettes n’évolue quasiment pas. Pendant la montée de température, la flèche commence à augmenter à partir d’environ 1100°C pour le ZB et le ZS et d’environ 1020°C pour le ZBY1. Ce sont les moments où la zircone commence à se transformer de monoclinique à quadratique. Ceci peut être expliqué par une augmentation du jeu entre les dendrites en raison de la contraction de la zircone pendant la transformation monoclique – quadratique. Cette diminution soudaine du volume de zircone déclenche l’augmentation de la flèche. Ensuite, la flèche du ZB ne cesse d’augmenter jusqu’à 1450°C, alors que celle du ZBY1 n’a quasiment pas bougé et celle du ZS n’a que légèrement augmenté. Pendant cette période, la structure de la zircone est sous sa forme quadratique et l’éprouvette soumise à son seul poids propre. La seule évolution opérant dans le matériau est la baisse de viscosité du verre, qui laisse les dendrites de zircone bouger de plus en plus librement. Ce mouvement va se poursuivre jusqu’à ce que le jeu entre les dendrites soit totalement rattrapé.
Pendant la descente de température, comme le squelette de zircone a atteint son plus haut niveau de déformation à 1450°C, l’augmentation de viscosité du verre a tendance à le figer dans sa position déformée. On observe effectivement que les flèches des éprouvettes sont assez stables, sauf pendant la transformation quadratique-monoclinique de la zircone où il y a une légère hausse.

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Table des matières

Introduction Générale
Chapitre I Introduction 
I. 1 Matériaux étudiés : les THTZ
I. 2 Morphologie du THTZ
I. 3 Transformation de phase de la zircone
I. 4 Propriété du verre constitutif et formation de zircon
I. 5 Simulation du refroidissement
Chapitre II Méthodes expérimentales et analytiques
II. 1 Méthodes d’observation microstructurale
II. 1. 1 Observation MEB
II. 1. 2 Préparation des éprouvettes pour observation en microscopie électronique à balayage
II. 1. 3 Obtention des images tomographiques
II. 2 Sélection et maillage des volumes 3D
II. 2. 1 Artefacts et seuillage des volumes
II. 2. 2 Création et amélioration du maillage 3D
II. 3 Méthodes d’analyse morphologique
II. 3. 1 Opérateurs de base
II. 3. 1. 1 Erosion et érosion ultime
II. 3. 1. 2 Dilatation et reconstruction géodésique
II. 3. 2 Paramètres analysés
II. 3. 2. 1 Percolation
II. 3. 2. 2 Covariance
II. 3. 2. 3 Tortuosité
II. 3. 2. 4 Densité de surface
II. 3. 3 Segmentation des dendrites par la méthode des bassins versants (watershed)
II. 3. 3. 1 Calcul de la fonction distance
II. 3. 3. 2 Calcul des minima locaux (marqueurs)
II. 3. 3. 3 Etablissement de la surface de partage des eaux (LPE)
II. 4 Obtention des propriétés mécaniques et chimiques
II. 4. 1 Microdureté
II. 4. 2 Essai d’attaque par HF
II. 4. 3 Mesures dilatométriques
Chapitre III Topologie du THTZ et ses influences directes
III. 1 Covariance et périodicité de la morphologie
III. 2 Relation entre la densité de surface et la vitesse d’attaque
III. 3 Relation entre la tortuosité du verre et la netteté du front d’attaque
III. 4 Conclusion
Chapitre IV Connectivité du squelette de zircone et ses influences 
IV. 1 Percolation du squelette de zircone et du verre
IV. 2 Segmentation du squelette de zircone et analyse de la connectivité
IV. 3 Module d’Young obtenu par simulation numérique et lien avec la connectivité
IV. 4 Relations entre la connectivité et le comportement mécanique du squelette de zircone
IV. 4. 1 Flexibilité du THTZ après enlèvement du verre par attaque HF
IV. 4. 2 Flexibilité du THTZ à haute température
IV. 5 Conclusion
Chapitre V Transformation quadratique-monoclinique de la zircone 
V. 1 Dilatation thermique du THTZ
V. 1. 1 Essais dilatométriques
V. 1. 2 Observation du changement volumique par tomographie
V. 2 Fissuration du THTZ pendant la transformation quadratique monoclinique de la zircone
V. 2. 1 Essai sur les matériaux bruts
V. 2. 2 Essai sur les matériaux sans phase vitreuse
V. 2. 3 Observation de la fissuration par tomographie
V. 3 Essai de compression monotone avant et après la transformation quadratique-monoclinique de la zircone
V. 4 Simulation numérique de la transformation quadratique-monoclinique de la zircone
V. 4. 1 Présentation de la loi de comportement et des conditions aux limites
V. 4. 2 Analyse des résultats
V. 4. 2. 1 Evolution et distribution locale des contraintes
V. 4. 2. 2 Influence des paramètres des matériaux
V. 4. 2. 3 Influence d’une contrainte externe
V. 5 Conclusion
Résumé et perspectives 
Références bibliographiques

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