Analyse morphologique de la microstructure 3D de réfractaires électrofondus à très haute teneur en zircone

Matériaux étudiés : les THTZ

Les réfractaires électrofondus sont utilisés pour la construction des fours de verrerie. L’avantage essentiel de ce type de matériaux est leur haute résistance à la corrosion due en partie à une porosité quasi-nulle qui limite la pénétration du verre. Ils sont obtenus par une technique analogue à la fonderie (fusion au four électrique à arc, coulée, moulage et usinage). Ils sont généralement proposés sous forme de pièces de grandes dimensions ; il est possible d’obtenir des pièces de dimensions très précises avec un très bon état de surface permettant un montage « à sec », sans ciment de jointoiement [FOU 00] .

Le choix des réfractaires dépend des exigences du verre fabriqué. Pour les réfractaires situés au contact du verre, il faut tenir compte de la corrosion, des niveaux de température, des seuils de défauts (bulles, pierres,…) tolérés par le verrier, de la conductivité thermique, … Plusieurs types de réfractaires électrofondus existent : les HA (haute teneur en alumine) qui contiennent principalement l’alumine sous forme alpha (corindon) ou bêta, les AZS, essentiellement composés d’alumine, de zircone et de silice, qui sont les plus utilisés. Il existe différentes qualités d’AZS différenciées par la teneur en zircone. L’augmentation de la teneur en cet élément améliore les performances du réfractaire mais en augmente le coût. L’ajout d’oxyde de chrome dans les AZS améliore la résistance à la corrosion mais peut s’avérer incompatible avec certains verres (risque de coloration). Les THTZ constituent une gamme de réfractaires électrofondus possédant une très haute teneur en zircone. Ils ont connu un réel essor dans les années 1990 et contribué à augmenter la résistance à la corrosion dans certains verres spéciaux (vitrocéramique, borosilicate, cristal au plomb, verre d’écrans plats, etc.). Ils peuvent être utilisés dans certaines parties sensibles des fours de fusion des verres et dans les fours, notamment électriques, de fusion de verres spéciaux (figure I.1) [MAS 05, PAT 05].

La fabrication du THTZ consiste premièrement à fondre les premières matières à très haute température (2400°C) dans un four à arc, puis à les couler dans un moule (figure I.2). Le matériau est ensuite solidifié et refroidi dans le moule. Les dendrites de zircone formées lors de la solidification subissent deux transformations de phase pendant le refroidissement, d’une structure cubique à une structure quadratique, puis de la structure quadratique à une structure monoclinique. La transformation de quadratique à monoclinique s’opère aux alentours de 1000°C : c’est une transformation de type martensitique qui provoque un gonflement volumique de 4,5% du matériau. Ce phénomène confère au refroidissement une importance particulière pour la qualité des produits.

L’observation de la microstructure du THTZ, présentée en figure I.3, révèle un matériau biphasé dense constitué de cristaux de zircone primaire (gris clair) entourés par une phase vitreuse (gris sombre). La zircone représente à peu près 88% en volume du réfractaire et la phase vitreuse les 12% restants. La zircone peut être pure ou contenir des éléments d’addition, comme Y, Ce, etc. Le verre, à base de silice, peut également contenir d’autres oxydes, comme Na2O, Al2O3, B2O3… Une observation par MEB d’une zone où la solidification a été perturbée prouve que ce qui apparaît en coupe polie comme semblant être des “grains de zircone” sont en réalité des sections de branches de dendrites primaires et secondaires (Fig. I.4).

Morphologie du THTZ

Les THTZ électrofondus ont une microstructure très particulière. K. Madi [MAD 06] a utilisé la diffraction des rayons X par synchrotron à l’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) pour obtenir des images tomographiques tridimensionnelles des THTZ. Le zirconium possédant un fort numéro atomique par rapport aux éléments constituant la phase vitreuse, ceci le rend beaucoup plus absorbant des rayons X, ce qui permet d’obtenir des images avec un fort contraste entre le verre et la zircone (figure I.5).

Avec les images tomographiques et les images MEB obtenues, il a réalisé plusieurs analyses morphologiques sur les THTZ en 2D et en 3D : la taille de dendrite, la covariance, la percolation et la tortuosité ont ainsi été étudiées. Ces concepts de morphologie mathématique seront présentés plus en détails dans le chapitre II. Ces propriétés morphologiques ont également été comparées pour des réfractaires ayant des teneurs différentes en phase vitreuse. Un des résultats les plus importants a été la mise en évidence du caractère percolant du squelette de zircone en 3D : les dendrites sont interconnectées entre elles. Pour une image 3D du THTZ (figure I.6) avec une section de 336µm x 310µm, la quasi-totalité de la zircone (99,5%) est interconnectée dès que l’épaisseur atteint 44,8µm. Le même effet est observé pour la phase vitreuse pour une épaisseur de 118,3µm (figure I.7). Cette interconnexion du squelette de zircone, très différente de la structure des milieux granulaires, permet d’expliquer trois propriétés originales des THTZ :
➤ La résistance à la transformation martensitique au refroidissement. Contrairement aux matériaux frittés granulaires qui ne conservent pas leur intégrité mécanique s’ils ne sont pas stabilisés, les matériaux électrofondus résistent au gonflement grâce à l’enchevêtrement dendritique qui les caractérise.
➤ La résistance à la corrosion. La corrosion de la phase vitreuse au contact du verre fondu ne permet plus le déchaussement des grains car les dendrites restent solidaires du squelette de zircone.
➤ La résistance au fluage. Même avec des pourcentages de phase vitreuse plus élevés que ceux observés dans les matériaux frittés et une viscosité de celle-ci faible, le glissement aux joints de grains observé lorsque ceux-ci sont individualisés n’est plus possible en raison de l’imbrication tridimensionnelle des dendrites.

Transformation de phase de la zircone 

La zircone possède un point de fusion d’environ 2700°C [OHT 94] et est souvent employée pour son caractère réfractaire. Elle se présente essentiellement sous trois formes : monoclinique m, quadratique q et cubique c. Elle a une haute résistance à l’abrasion, à la corrosion et une faible conductivité thermique. Au refroidissement, à environ 2350°C, elle se transforme en phase quadratique et, à environ 1163°C, en phase monoclinique (figure I.8). Lors du refroidissement, la transition de phase de quadratique vers monoclinique, de type martensitique, s’accompagne d’une forte augmentation de volume d’environ 4,5%. Ce gonflement peut être très endommageant pour le matériau et peut aller jusqu’à provoquer une pulvérisation de la zircone frittée, si cette dernière n’est pas stabilisée.

Les structures quadratique et monoclinique étant très proches de la structure cubique, il est possible d’obtenir une phase cubique à température ambiante par dissolution d’oxydes cristallisants dans le système. Les ajouts les plus utilisés sont la chaux, la magnésie et l’oxyde d’yttrium [DOU 86]. La phase quadratique à température ambiante peut être obtenue par refroidissement rapide (trempe) d’un échantillon. L’ajout d’yttrine, par exemple, permet d’éviter la déstabilisation de la zircone durant le refroidissement post-frittage et de conserver sous forme métastable la phase quadratique lors du refroidissement. Le diagramme de phases ZrO2-Y2O3 ci-dessous (figure I.10) illustre l’existence des trois phases en fonction de la température.

L’yttrine permet la stabilisation de la phase quadratique de la zircone par substitution par l’ion yttrium Y3+ de l’ion zirconium Zr4+. L’équilibre des charges est rétabli par la présence de lacunes anioniques conduisant à une sous stœchiométrie en oxygène Zr1-XYXO2-X/2. Si x est suffisamment grand, la forme haute température (cubique) est favorisée : on peut ainsi avoir affaire à une zircone dite totalement stabilisée dont toute transformation de phase est très limitée (voire empêchée) en dessous de 1400°C. Pour x moindre, on parle de zircone partiellement stabilisée (PSZ) sous forme quadratique où seule la transformation en phase monoclinique est empêchée. Par ailleurs, l’ajout d’yttrine permet d’abaisser vers 600°C la température de début de transformation de la phase quadratique vers la monoclinique avec des cinétiques qui deviennent très lentes. Ceci permet par refroidissement rapide d’obtenir des poudres quadratiques à température ambiante [MEU 02].

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Table des matières

Introduction Générale
Chapitre I Introduction
I. 1 Matériaux étudiés : les THTZ
I. 2 Morphologie du THTZ
I. 3 Transformation de phase de la zircone
I. 4 Propriété du verre constitutif et formation de zircon
I. 5 Simulation du refroidissement
Chapitre II Méthodes expérimentales et analytiques
II. 1 Méthodes d’observation microstructurale
II. 1. 1 Observation MEB
II. 1. 2 Préparation des éprouvettes pour observation en microscopie électronique à balayage
II. 1. 3 Obtention des images tomographiques
II. 2 Sélection et maillage des volumes 3D
II. 2. 1 Artefacts et seuillage des volumes
II. 2. 2 Création et amélioration du maillage 3D
II. 3 Méthodes d’analyse morphologique
II. 3. 1 Opérateurs de base
II. 3. 1. 1 Erosion et érosion ultime
II. 3. 1. 2 Dilatation et reconstruction géodésique
II. 3. 2 Paramètres analysés
II. 3. 2. 1 Percolation
II. 3. 2. 2 Covariance
II. 3. 2. 3 Tortuosité
II. 3. 2. 4 Densité de surface
II. 3. 3 Segmentation des dendrites par la méthode des bassins versants (watershed)
II. 3. 3. 1 Calcul de la fonction distance
II. 3. 3. 2 Calcul des minima locaux (marqueurs)
II. 3. 3. 3 Etablissement de la surface de partage des eaux (LPE)
II. 4 Obtention des propriétés mécaniques et chimiques
II. 4. 1 Microdureté
II. 4. 2 Essai d’attaque par HF
II. 4. 3 Mesures dilatométriques
Chapitre III Topologie du THTZ et ses influences directes
III. 1 Covariance et périodicité de la morphologie
III. 2 Relation entre la densité de surface et la vitesse d’attaque
III. 3 Relation entre la tortuosité du verre et la netteté du front d’attaque
III. 4 Conclusion
Chapitre IV Connectivité du squelette de zircone et ses influences
IV. 1 Percolation du squelette de zircone et du verre
IV. 2 Segmentation du squelette de zircone et analyse de la connectivité
IV. 3 Module d’Young obtenu par simulation numérique et lien avec la connectivité
IV. 4 Relations entre la connectivité et le comportement mécanique du squelette de zircone
IV. 4. 1 Flexibilité du THTZ après enlèvement du verre par attaque HF
IV. 4. 2 Flexibilité du THTZ à haute température
IV. 5 Conclusion
Chapitre V Transformation quadratique-monoclinique de la zircone
V. 1 Dilatation thermique du THTZ
V. 1. 1 Essais dilatométriques
V. 1. 2 Observation du changement volumique par tomographie
V. 2 Fissuration du THTZ pendant la transformation quadratique monoclinique de la zircone
V. 2. 1 Essai sur les matériaux bruts
V. 2. 2 Essai sur les matériaux sans phase vitreuse
V. 2. 3 Observation de la fissuration par tomographie
V. 3 Essai de compression monotone avant et après la transformation quadratiquemonoclinique de la zircone
V. 4 Simulation numérique de la transformation quadratique-monoclinique de la zircone
V. 4. 1 Présentation de la loi de comportement et des conditions aux limites
V. 4. 2 Analyse des résultats
V. 4. 2. 1 Evolution et distribution locale des contraintes
V. 4. 2. 2 Influence des paramètres des matériaux
V. 4. 2. 3 Influence d’une contrainte externe
V. 5 Conclusion
Conclusion Générale

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