Aliénés et asiles en aof et au sénégal de 1895 aux années 1990

La santé mentale à l’image de la maladie mentale, apparaît comme une notion fort complexe, dont la compréhension varie selon les milieux sociaux, les écoles de penser, les époques…Par ailleurs, la santé mentale est souvent réduite dans sa définition à la maladie mentale, elle-même réduite à la folie. La folie selon le Dictionnaire de psychiatrie et de psychopathologie clinique est une maladie de l’esprit. Elle renvoie aussi à la déraison ou absence de raison et à ce qui échappe au contrôle de celle-ci. Peu usitée de nos jours, la folie désigne d’une manière générale l’aliénation mentale.

Cette dernière est le « terme général par lequel on désigne toute altération mentale mettant le sujet dans l’impossibilité de mener une vie normale et de participer à la vie collective en société » . C’est du moins ce point de vue social qu’indique l’étymologie du mot alienus : étranger. Le sujet est un étranger dans son milieu, il est un aliéné. Par extension, l’usage à donner à ce terme d’aliénation, sur le plan médical, une signification plus large. Il a servi longtemps à désigner l’ensemble des maladies de l’esprit, quelles qu’en soient les conséquences. Les médecins qui se consacraient à l’étude et au traitement des malades de ce domaine de la pathologie , étaient dits médecins « aliénistes ». Progressivement s’est substituée la dénomination de Psychiatrie pour le secteur des maladies mentales et celle de psychiatre tend à remplacer celle d’aliéniste. Mais les mots « aliénation mentale » et « aliéné » n’ont pas disparu. Ils ont gardé un sens plus restrictif et plus particulier. Ils sont restés des termes légaux sur le terrain administratif et judiciaire et s’emploient dans les cas ou des mesures d’internement, de protection ou d’assistance spéciale s’imposent.

En effet, les études historiques sur les conceptions que les hommes se sont fait de la maladie mentale au cours du temps, en font une des catégories du sacré, soit du sacré religieux, soit du sacré démoniaque. Encore dans le nouveau Testament, la folie est considérée comme une possession par de mauvais esprits qu’il faut chasser du corps du malade pour le guérir. C’est avec les Grecs que la médecine devient une science. Mais alors que la médecine donne des explications rationnelles des maladies somatiques et que ces explications sont acceptées unanimement, il y avait une résistance opposée pour les maladies de l’esprit. Ces dernières semblaient échapper à une appréhension scientifique et retenir la vieille conception mystique.

Aussi, le triomphe du christianisme ne pouvait que systématiser encore plus fortement la conception archaïque en fournissant aux médecins (comme aux théologiens) un schéma manichéen des délires et des actes insolites, qui sont le fruit du péché, du côté de l’homme, de la lutte de Satan contre Dieu pour la domination du monde. À partir de la Renaissance, les fous sont alors considérés seulement comme des personnes dangereuses, au même titre que les criminels, que les débauchés et les miséreux vivant de mendicités. À ce titre ils sont exclus de la société et « internés » au même titre que les autres catégories d’asociaux, et souvent dans les même locaux.

D’ailleurs, en France, apparaissaient de grandes maisons d’internements, qui n’étaient pas simplement destinées à recevoir les fous, mais tous ceux qui, par rapport à l’ordre de la raison, de la morale et de la société, donnaient des signes de « dérangement ». Ces maisons n’avaient aucune vocation médicale. « Les fous y sont pas admis pour y être soignés, mais ils y entrent parce qu’ils ne peuvent plus ou parce qu’ils ne doivent plus faire partie de la société » . Sous la pression d’une société qui exclut de plus en plus l’aliéné, l’isolement devient le principe même de l’exclusion dont l’asile sera progressivement l’institution.

SYSTÈMES DE REPRÉSENTATIONS TRADITIONNELLES DE L’ALIÉNATIO N MENTALE 

Malgré la diversité ethnique et culturelle nous retrouvons en AOF, et de manière plus globale en Afrique noire les mêmes formes de perception traditionnelle de la maladie mentale à raison de quelques rares différences. En effet, quels que soient les groupes ethniques et les systèmes religieux, la maladie mentale est considérée comme étant le résultat d’une agression dirigée contre l’individu malade ou contre le groupe auquel il appartient. Les changements sociaux apportés par les religions importées n’ont pas affecté sérieusement ce modèle primaire existant avant et après même la colonisation. L’étude des représentations va nous permettre de mieux comprendre les conceptions traditionnelles de la maladie mentale. En fait, c’est de ces conceptions que dépend particulièrement le recours à des thérapies traditionnelles.

Les représentations ou encore interprétations traditionnelles de la maladie mentale s’identifient généralement à travers quatre grands registres, avec des idées de persécutions que sont : L’attaque par les génies, la persécution par les esprits ancestraux, le maraboutage et, la persécution par les sorciers anthropophagies.

L’attaque par les génies 

Les génies sont des êtres surnaturels bons ou mauvais. Leurs actions peuvent être très polymorphes et se confondent ou s’associent parfois aux méfaits des sorciers. Ils sont incorporés dans les croyances avec l’arrivée de l’islam. L’attaque par les génies se manifeste en général par une crise confusionnelle (sidération visuelle), par des crises d’angoisse aiguë avec hallucinations visuelles et auditives ou, parfois, par des crises convulsives. Le plus souvent ces êtres invisibles se manifestent à l’instar des esprits ancestraux par des attaques ponctuées de possessions dont l’individu serait victime. Ce sont des êtres solitaires qui peuvent se métamorphoser sous divers aspects. Ils sont en général inoffensifs, tant qu’ils ne sont pas dérangés. Dans le cas contraire, ils peuvent se fâcher et attaquer l’intrus. Les génies peuvent se métamorphoser sous divers aspects, des plus effroyables aux plus insolites possibles en passant par des apparences humaines. Pour les représentations traditionnelles, la peur sidérante qui saisit celui qui les aperçoit entraîne immanquablement la maladie mentale. « Au Sénégal, les seytaane « complice de Satan » et les jinne sont des génies maléfiques qui peuvent attaquer et chercher à faire mal par leur simple volonté ou quand ils sont sollicités par des guérisseurs animés de mauvaises intentions »  .

De même, chez les moosés de la Haute Volta actuel Burkina Faso, les « Kinkirsi » (génies familiaux chez les moosés) peuvent provoquer la folie chez leurs parents géniteurs. Ce concept de la causalité de la maladie mentale répond chez les moosés à la croyance à l’existence de deux mondes : « Le monde visible, logé entre la terre et le ciel ou vivent les hommes et les animaux aux services desquels Dieu a mis l’eau, le feu, les plantes, la terre et l’air ; le monde invisible d’où viennent chaque être et chaque chose et vers où ils devront repartir ».

Aussi, dans la société Baoulé (au centre de la Côte-d’Ivoire), deux groupes principaux d’interprétations distinctes de la maladie sont repérés. Le premier groupe attribue l’évènement pathologique à la transgression d’un des interdits familiaux ou tribaux. La maladie signe d’une divinité familiale ou villageoise, cherche à communiquer quelque chose au groupe. La « maladie est un avertissement, un rappel à l’ordre et une injonction. Un avertissement qui laisse supposer qu’une infraction est commise. Le second groupe d’interprétation relie la maladie à l’action délibérément agressive d’un Bayéfoué » .

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
PREMIÈRE PARTIE : PERCEPTION ET GESTION TRADITIONNELLE DE L’ALIÉNATION MENTALE EN AOF
CHAPITRE I : SYSTÈMES DE REPRÉSENTATIONS TRADITIONNELLES DE L’ALIÉNATIO N MENTALE
CHAPITRE II : THÉRAPIES TRADITIONNELLES DE L’ALIÉNATION MENTALE
CHAPITRE III : RÉACTIONS DES AFRICAINS FACE À LA RENCONTRE DE DEUX SYSTÈMES THÉRAPEUTIQUES
DEUXIÈME PARTIE : L’ADMINISTRATION COLONIALE ET LA GESTION DE L’ALIÉNATION MENTALE
CHAPITRE I : CONCEPTIONS MÉTROPOLITAINES DE L’ALIÉNATION MENTALE EN AOF
CHAPITRE II : POLITIQUES ET DISPOSITIFS DE PRISE EN CHARGE DANS LES COLONIES DU GROUPE
CHAPITRE III : L’ÉVACUATION DES ALIÉNÉS VERS LA MÉTROPOLE
TROISIÈME PARTIE : LÉGISLATION ET ASSISTANCE AUX ALIÉNÉS MENTAUX DANS LA RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL
CHAPITRE I : LES STRUCTURES DE PRISE EN CHARGE
CHAPITRE II : LA LÉGISLATION EN MATIÈRE D’ASSISTANCE AUX ALIÉNÉS
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *