Airbnb un outil de commercialisation des lits touristiques valaisans

Depuis son arrivée sur le marché, l’économie collaborative bouleverse petit à petit tous les secteurs économiques. En réponse à un mouvement sociétal privilégiant la fonctionnalité à la propriété, le succès des plates-formes collaboratives est au rendez-vous. Le tourisme, qui est un terreau fertile pour un tel phénomène, voit des plates-formes telles qu’Airbnb se développer de manière fulgurante. Valorisée à plus de 25 milliards de dollars en 2016, la start-up Airbnb vaut plus que certains groupes hôteliers (Lexpress.fr, 2016). Non seulement un nombre conséquent de voyageurs optent pour ce mode d’hébergement, mais des particuliers à travers le monde entier décident également de mettre en location leur bien sur cette plate-forme. Du côté suisse, la récente étude de l’Observatoire Valaisan du Tourisme a mis en exergue le développement fulgurant d’Airbnb en termes de logement en Suisse et plus particulièrement en Valais, d’où l’intérêt d’étudier Airbnb comme outil de commercialisation des lits touristiques valaisans. Ce travail a ainsi pour but d’analyser les facteurs clés qui persuadent les loueurs à utiliser cette interface pour mettre en location leur bien en Valais.

Problématique

Le tourisme valaisan doit continuellement innover et faire face à des défis à relever. Dès l’arrivée du web 2.0 , l’économie collaborative a pu se développer à grande échelle dans le secteur du tourisme et des plates-formes telles qu’Airbnb, qui permet des locations de vacances entre particuliers, ont ainsi vu le jour. L’auteure elle-même utilise cette plateforme pour séjourner lors de ses voyages depuis plus de trois ans. Au niveau du marché suisse, l’analyse réalisée par l’Observatoire Valaisan du Tourisme (OVT) en novembre dernier met en exergue la croissance que poursuit Airbnb en Valais. Sujet sensible, cette plate-forme communautaire est fréquemment pointée du doigt et critiquée pour plusieurs motifs : elle engendrerait de la concurrence déloyale, de l’inflation immobilière ou encore des injustices concernant le non-règlement de la taxe de séjour. Cependant, l’auteure aimerait explorer un autre aspect d’Airbnb : sa capacité à réchauffer les lits froids valaisans en favorisant la mise sur le marché des biens parahôteliers et plus globalement des lits touristiques.

Les lits froids, également dénommés lits non marchands ou non commercialisés, sont des lits de résidences secondaires non proposés en location. Ils sont par conséquent occupés seulement quelques jours, voire quelques semaines par année par leur propriétaire. Selon l’Office fédéral du développement territorial ARE, ces lits sont généralement « occupés en moyenne 30 à 40 jours par année » (2010, p. 34). Cette situation a pour conséquence une sous-utilisation des infrastructures et une sous-occupation des lits disponibles dans la station avec un manque à gagner en termes de taxes de séjour et de dépenses touristiques.

Dès les années 1960, la majorité des stations de sports d’hiver suisses se sont développées en construisant des résidences secondaires (Clivaz, 2012). Ce modèle a provoqué l’apparition de lits froids avec les impacts conséquents décrits ci-dessus. Selon le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication, le dernier recensement réalisé en 2000 dénombrait, en Suisse, près de 420’000 résidences secondaires correspondant à 12% du parc immobilier total (2012, p. 1). A ce jour, des spécialistes estiment que ce chiffre avoisine les 500’000 (Office fédéral du développement territorial ARE, 2010, p. 37). En Valais, cette part se montait, en 2000, à plus de 35%, soit 61’000 logements habités temporairement (Département fédéral de l’environnement, 2012, p. 2). La récente étude réalisée par l’OVT recense, en 2015, près de 100’000 unités ce qui correspond à 41% des logements valaisans (Observatoire Valaisan du Tourisme, 2016). En comparaison, moins de 33’000 lits hôteliers valaisans étaient disponibles à cette date (Observatoire Valaisan du Tourisme, 2015, p. 21). Pour endiguer la construction de nouvelles résidences secondaires, le peuple suisse a donc accepté l’initiative populaire « pour en finir avec les constructions envahissantes de résidences secondaires » en 2012 (Perrin, 2012).

L’économie collaborative et Airbnb

Au cours des dernières années, le phénomène de l’économie collaborative, également dénommée économie de partage, a émergé et s’est considérablement développé dans le secteur touristique. Alors que le concept de partage a toujours existé, le phénomène d’économie collaborative est né avec internet selon Belk (2014). Dans son article You are what you can access: Sharing and collaborative consumption online, il décrit l’économie de partage comme des particuliers qui coordonnent l’acquisition et la distribution d’une ressource contre une rémunération ou une autre compensation. Il précise qu’internet et particulièrement le Web 2.0 ont apporté de nouvelles façons de partager et ont ainsi développé les anciennes formes de partage sur une plus grande échelle. En revanche, Bardhi et Eckhardt avec leur article Access-Based Consumption: The Case of Car Sharing (2012) se réfèrent à l’économie de partage comme la consommation basée sur l’accès et définissent ce phénomène par les consommateurs obtenant accès à des biens et services en payant pour les utiliser temporairement et par ce fait, aucun transfert de propriété n’est réalisé. Selon ces auteurs, la démarche ne serait donc pas aussi altruiste que Belk le suggère. Les plates-formes de l’économie collaborative sont souvent présentées comme les protagonistes de conflits entre la réglementation en vigueur et la zone grise où elles opèrent. Toutefois, selon Cohen et Sundararajan dans leur article Self-Regulation and Innovation in the Peer-to-Peer Sharing Economy (2015), ces plates-formes devraient être considérées comme faisant partie de la solution, plutôt que la source du problème et elles devraient être incluses comme des acteurs clés dans un régime d’autoréglementation. Pour sa part, Guttentag avec Airbnb: disruptive innovation and the rise of an informal tourism accommodation sector (2015) oriente sa recherche sur les questions juridiques s’y relatant et soulève deux problèmes majeurs auxquels Airbnb doit faire face : les sous-locations illégales et les obligations fiscales. Le développement futur de la start-up peut être menacé par ces questions juridiques. Guttentag analyse également Airbnb en tant qu’une innovation de rupture dans son article disruptive innovation and the rise of an informal tourism accomodation sector (2015). Malgré le fait que plusieurs critères de sélection d’un hébergement par les touristes tels que la qualité du service, la réputation de la marque et la sécurité peuvent faire défaut à Airbnb, l’innovation de rupture réside dans le fait qu’un logement Airbnb est souvent moins onéreux qu’un hôtel et offre de nouveaux avantages tels que l’accès à une cuisine et à une machine à laver ou simplement le fait de se sentir à la maison. En outre, Airbnb tente continuellement d’améliorer ses points faibles. Le développement de la start-up s’est déroulé, comme le décrit la théorie de l’innovation de rupture, avec une popularité limitée à ses débuts pour finalement faire sa place dans les marchés traditionnels. Airbnb pourrait ainsi prendre une part considérable du marché de l’hébergement touristique et permettre également d’étendre les dépenses des touristes à de nouveaux quartiers où aucune offre hôtelière n’est disponible.

Tussyadiah et Pesonen ont quant à eux identifié les éléments de motivation et les obstacles à l’hébergement collaboratif dans leur article drivers and barriers of peer-to-peer accomodation stay – an exploratory study with American and Finnish travellers (2016) : les motivations telles que la dimension sociale (attrait de l’aspect communautaire et du développement durable) et économique (économie de coûts) à l’opposé des obstacles tels que la confiance, l’efficacité et la connaissance de la plate-forme. Botsman et Roger soutiennent également que la consommation collaborative est conduite par des motivations qui vont au-delà des économies de coûts. Dans leur ouvrage What’s mine is yours : The rise of collaborative consumption (2010), la consommation collaborative est censée diminuer les impacts négatifs sur l’environnement car elle réduit la création de nouveaux produits impliquant la consommation de matières premières. De leur côté, Zekanovic-Korona et Grzunov soulignent que la recherche d’un hébergement à moindre prix est un objectif fréquent des touristes (Evaluation of shared digital economy adoption : Case of Airbnb, 2014). Pour répondre à cette demande, une multitude de plates-formes informatiques basées sur le concept d’économie collaborative, telles qu’Airbnb et HomeAway, se sont ainsi développées durant ces dernières années. Tel que Gansky le mentionne dans son ouvrage The mesh : Why the future of business is sharing (2010), l’économie collaborative découle également d’un changement d’attitude des consommateurs à l’égard de leur mode de consommation : ces derniers essayent de nouvelles marques et sont ouverts à de nouveaux modes de consommation. Le papier de Sigala, collaborative commerce in tourism : Implications for research and industry (2015), souligne que l’économie collaborative va continuer à se développer et va à terme perturber les commerces traditionnels et menacer les entreprises qui n’auront pas pris en compte le changement des modes de consommation de leurs clients.

Tussyadiah et Pesonen approfondissent le sujet dans leur article Impacts of Peer-to-Peer Accommodation Use on Travel Patterns (2015) en analysant les changements de comportement de voyage suite à l’utilisation d’hébergement dit « collaboratif ». L’attrait social et économique de ce mode de logement permet un choix plus large de destinations qui n’auraient pas été accessibles financièrement en séjournant dans un hébergement traditionnel. Avec les mêmes moyens financiers, la fréquence de voyage, la durée de séjour ou encore la quantité d’activités réalisées sur place peuvent être optimalisées. Toutefois, les motivations à réserver son logement sur des plates-formes telles qu’Airbnb peuvent varier selon le type de logement souhaité. Tussyadiah soulève cette fois-ci que les hôtes à la recherche d’interactions sociales logent dans une chambre au contraire des touristes séjournant dans un appartement entier (Factors of satisfaction and intention to use peer-to-peer accomodation, 2016).

L’article Shareadox: -The paradox of service quality assurance in Sharing Economy businesses écrit par Appelquist, Johansson et Törnlöf révèle que les entreprises de l’économie collaborative utilisent différents outils pour assurer une certaine qualité de service : des systèmes de réservation et paiement standardisés, des instruments de notations et la création d’attributs identitaires et communautaires. Dans leur ouvrage What’s mine is yours : The rise of collaborative consumption (2010), Botsman et Roger traitent également de ce sujet et présentent des obstacles auxquels l’économie collaborative doit faire face : la sécurité et la confiance qui sont primordiales dans un écosystème dont les participants ne se connaissent pas au préalable. Les entreprises de l’économie collaborative ont surmonté ces difficultés grâce à différents moyens tels que l’intégration d’assurance, l’utilisation de caution et par-dessus tout un système de notation et commentaires qui permet à la communauté de s’autoréguler. Grâce à ces innovations, une note positive équivaut, d’une certaine manière, à une référence d’un ami pour une prise de décision. Comme Lauterbach et al. (2009) le déclare également, les mécanismes de réputation sont cruciaux pour les transactions en ligne lorsque les personnes ne se connaissent pas. Abramova,Shavanova, Fuhrer, Krasnoa et Buxmann étudient pour leur part l’impact des différentes réponses envisageables du loueur aux commentaires négatifs (Understanding the Sharing Economy : The Role of Response to Negative Review in the Peer-to-peer Accomodation Sharing Network, 2015). En tant que loueur, il serait préférable de s’excuser ou d’avouer la faute afin  davantage confiance aux yeux des voyageurs. Tout en étant un élément primordial, le système de notation peut toutefois être partiellement biaisé comme le soulignent Zervas, Proserpio et Byers dans leur article A First Look at Online Reputation on Airbnb, Where Every Stay is Above Average (2016). En effet, ils ont découvert que des biens référencés à la fois sur la plate-forme Airbnb et TripAdvisor sont mieux notés sur la première. Edelman et Geradin abondent également dans ce sens avec leur article Efficiencies and regulatory shortcuts : How should we regulate compagnies like Airbnb and Uber ? (2015) révélant que peu de clients osent noter négativement leur séjour. En outre, la rédaction d’un commentaire n’étant pas obligatoire sur la plate-forme Airbnb, il s’est révélé que les voyageurs ayant vécu une mauvaise expérience tendent à ne pas laisser de feedback. Finalement, Ert, Fleischer et Magen soulignent dans leur papier Trust and Reputation in the Sharing Economy: The Role of Personal Photos on Airbnb (2016) l’importance de la photo de profil du loueur. En effet, lors de la prise de décision par le voyageur de louer un logement, il va accorder une certaine importance à l’image que reflète le loueur : plus il est perçu comme fiable, plus haute est la probabilité que son bien soit sélectionné.

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Table des matières

Introduction
1 Contexte du travail
1.1 Problématique
1.2 Revue de la littérature
1.2.1 L’économie collaborative et Airbnb
1.2.2 Les résidences secondaires en Suisse
1.3 Objectifs et méthodologie du travail
2 Économie collaborative
2.1 Définition et développement
2.2 Polémique autour du terme « économie collaborative »
2.3 Le secteur de l’hébergement touristique
2.3.1 Modèles commerciaux
2.3.2 Hybridation de l’hébergement
3 Airbnb
3.1 Histoire
3.2 Développement
3.2.1 En Suisse et dans le canton du Valais
3.2.2 Stratégie
3.3 Avantages et inconvénients
3.4 La communauté Airbnb
4 La plate-forme
4.1 Conception
4.2 Inscription facilitée
4.3 Outil de gestion
4.4 Paiement sécurisé
4.5 Confiance
4.5.1 Vérification d’identité
4.5.2 Doubles commentaires
4.5.3 Messagerie directe
4.6 Modèle de commissionnement
4.7 Assurances
4.8 Invitation à devenir hôte
5 De l’authenticité à la professionnalisation
5.1 Situation en Valais
5.2 Les conditions de services d’Airbnb
5.3 Prestataires de services et gérances 2.0
6 Analyse des enquêtes
6.1 Les agences immobilières du Valais francophone
6.1.1 Le profil des répondantes
6.1.2 Airbnb
6.1.3 Les canaux de distribution
6.1.4 Les gérances 2.0
6.1.5 Rentalp
6.2 Les offices du tourisme du Valais germanophone
6.3 Airbnb : une chance ou une menace
7 Conclusion

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