Action de groupe et convention d’arbitrage

La garantie de l’effectivité de l’action de groupe, cheval de bataille du législateur

L’action de groupe en droit français a été introduite par la loi du 17 mars 2014, dite loi Hamon. S’inspirant des pays européens, l’action de groupe en droit français présente des spécificités. Le législateur a souhaité éviter le plus possible de tomber dans les écueils du droit américain de la class action. La volonté affichée du législateur de garantir le droit au consommateur de participer à une action de groupe s’est traduite par l’introduction dans le Code de la consommation de l’article L.423-25. Cet article répute nulles toutes les clauses qui par leur objet ou leur effet interdisent au consommateur de participer à une action de groupe. L’article L.423-25 visant ainsi les clauses d’arbitrage, il conviendra de voir quelles sont les implications de l’insertion d’un tel article sur le droit de la consommation, interne et international .

L’exemple de la class action américaine : la némésis du législateur français

Les class actions sont nées aux Etats-Unis dès le milieu du XIXe siècle, quand des Etats ont permis aux citoyens d’intenter une action groupée s’ils pouvaient démontrer un intérêt commun au regard de la loi ou des faits. Les premières lois fédérales ont été prises en 1938, pour permettre aux citoyens d’intenter une class action au niveau fédéral. Une réforme a eu lieu en 1966, faisant passer la class action du système d’opt-in au système d’opt-out. A partir de cette réforme, tous les consommateurs qui se trouvent dans des conditions similaires à celles des personnes formant la class sont considérées comme faisant partie du groupe. La sortie du groupe doit faire l’objet d’une demande expresse. C’est à partir de ce moment que se sont développées les class actions de grande envergure .
Aux Etats-Unis, les class actions sont menées par des avocats, appliquant le principe du « no win, no fees », comparable au pacte de quota litis interdit en droit français : les avocats ne seront payés que s’ils gagnent la class action, en prélevant un pourcentage souvent important des dommages-intérêts octroyés aux consommateurs membres de la class action. Ce pourcentage peut monter jusqu’à 30% du total des sommes allouées aux membres de la class action. Comme le souligne Laurie Weberman, en droit américain, les avocats avancent tous les frais : expertises, enquêtes, déplacements, pour la class action. Voulant rentrer dans leurs frais, ceux-ci n’hésitent pas à fixer des honoraires de résultats indécents, diminuant de beaucoup les indemnisations allouées aux membres du groupe.

L’introduction de l’article L.423-25 du Code de la consommation : la volonté du législateur d’éviter les écueils de la class action américaine

L’article L.423-25 du Code de la consommation dispose qu’ « Est réputée non écrite toute clause ayant pour objet ou effet d’interdire à un consommateur de participer à une action de groupe ».Cet article consacre ainsi l’inarbitrabilité de l’action de groupe : qu’est ce que l’inarbitrabilité ? L’inarbitrabilité c’est l’impossibilité de soumettre un litige d’une certaine matière, comme le droit des brevets, à l’arbitrage. Cela signifie qu’une action de groupe au sens du droit français ne peut être présentée et réglée par un arbitre. Il existe une compétence réservée aux juges étatiques. Cette inarbitrabilité s’exprime par plusieurs dispositions : l’article L.423-1 « peut agir devant une juridiction civile »., L.423 et suivants ne font référence qu’au juge (donner des exemples d’articles ». Tous les modes alternatifs de règlement des litiges ne sont cependant pas exclus : la médiation est prévue aux articles L.423-15 et 16. L’existence d’un mode alternatif de règlement des litiges prévu au cœur même du texte permet également d’en déduire que le législateur a volontairement évicté toute possibilité de voir une action de groupe se dérouler devant un arbitre.
L’on pourrait être tenté de penser que l’article L.423-25 du Code de la consommation entraine également une inarbitrabilité plus large du droit de la consommation. Ce n’est pourtant pas le cas, qu’il s’agisse du droit interne de la consommation, ou du droit international.

Une action de groupe au champ d’application trop limité, entrainant la nécessaire mise
en place d’un arbitrage de groupe

En introduisant l’action de groupe dans le système juridique français, le législateur a avancé à petits pas. Il a avant tout voulu une action très encadrée, avec un champ d’application restreint. Mais ces choix sont la raison même de l’échec des actions de groupe en France : sur cinq actions de groupe introduites depuis la loi Hamon, seule une a entrainé une indemnisation des consommateurs. Et encore, cette indemnisation n’est intervenue qu’en raison de la signature d’un accord transactionnel.
En voulant protéger au maximum les droits des consommateurs, le législateur a finalement créé une action de groupe qui n’a que peu d’effets, et dont les dispositions limitent elles-mêmes le droit du consommateur à participer à cette action. L’opportunité de créer un arbitrage de groupe est donc réelle pour pallier les inefficacités de l’action de groupe .

La class action à la française limitée par ses propres dispositions

Le législateur français, en introduisant l’article L.423-25, a pensé interdire l’arbitrabilité des actions de groupe afin de garantir le droit du consommateur de participer à une action de groupe. Cette inarbitrabilité est cependant contournable.
Par ailleurs, si l’insertion d’une clause compromissoire aurait pu empêcher le consommateur de participer à une action de groupe, il convient de remarquer que les dispositions de l’action de groupe elles-mêmes sont susceptibles de restreindre l’accès à l’action de groupe. On pourrait effectivement estimer que la rédaction de l’article L.423-25 du code de la consommation, réputant nulles uniquement les «clauses ayant pour objet ou effet d’interdire l’accès à une action de groupe», doit être interprétée restrictivement, en ce sens que seules les clauses compromissoires, insérées dans les contrats de consommation visés par le code de la consommation seraient concernées par cette sanction. Ainsi les conventions d’arbitrage, détachées du contrat de consommation principal, seraient considérées comme valables. Cette interprétation va dans le sens
de l’acceptation par la jurisprudence française des compromis d’arbitrage, ne reconnaissant pas à ces conventions le caractère de clause insérée dans le contrat24. De ce fait, à l’instar des compromis d’arbitrage, les conventions d’arbitrage détachées des contrats de consommation ne pourraient être soumises aux dispositions des articles L.132-1 et L.423-25 du code de la consommation.

De la possibilité et de l’intérêt de la création d’un arbitrage de groupe

Comme l’on a pu le voir, la licéité des clauses d’arbitrage dans les contrats de consommation dépend du caractère international ou interne de celui-ci. La validité des clauses d’arbitrage en droit de la consommation est établie depuis l’arrêt Jaguar rendu par la Cour de cassation en 1997. Cet arrêt, confirmé ensuite par l’arrêt Rado c. Painvewebber de 2004, a écarté l’application de l’article 2061 du Code civil en arbitrage international. L’arbitrabilité des litiges de consommation en droit international ne posant pas de problème particulier, l’on s’attachera donc dans cette étude à déterminer les possibilités de créer un arbitrage collectif en droit interne de la consommation.
En droit interne, l’article 2061 s’applique : les clauses d’arbitrage ne sont valables que dans les contrats conclus à raison d’une activité professionnelle. L’insertion d’une clause compromissoire dans un contrat de consommation de droit français est donc purement proscrite. Par ailleurs, afin de préserver le droit pour les consommateurs de participer à une action de groupe, le législateur a introduit l’article L.423-25 qui répute non-écrite toute clause qui, par son objet ou son effet, interdit à un consommateur de participer à une action de groupe. Se trouve ici le nœud du problème : il s’agit de s’interroger sur la possibilité de prévoir une clause d’arbitrage de groupe, alors même que les clauses d’arbitrage sont réputées nulles dans les contrats de consommation.
Autrement dit, il se pose la question de savoir s’il est possible de mettre en place une arbitrabilité de l’action de groupe alors que celle-ci a été exclue du domaine de l’arbitrage.

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Table des matières

Introduction
I. La garantie de l’effectivité de l’action de groupe, cheval de bataille du législateur
A. L’exemple de la class action américaine : la némésis du législateur français
B. L’introduction de l’article L.423-25 du Code de la consommation : la volonté du législateur d’éviter les écueils de la class action américaine
II. Une action de groupe au champ d’application trop limité, entrainant la nécessaire mise en place d’un arbitrage de groupe
A. La class action à la française limitée par ses propres dispositions
B. De la possibilité et de l’intérêt de la création d’un arbitrage de groupe
Bibliographie

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