Conception d’expériences transmédia pour l’engagement en formation

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Ritualisation, nécessité participative et construction de méthodes

Ainsi, depuis le premier essai de définition, l’engagement a soulevé quelques questionnements dont ceux concernant sa ritualisation. Pour ce faire, certains chercheurs en Communication proposent d’associer l’acte préparatoire d’engagement à de nouvelles pratiques de médiation. Ajoutées à la ritualisation, les questions sur la relation entre les théories d’influence sociale et les théories d’autonomie du social taraudent également les chercheurs en Sciences Humaines et Sociales (Bernard, 2012).
Par ailleurs, les interrogations sur le rôle d’acteur des bénéficiaires dans les nouvelles transactions sont également assimilées à l’engagement. Face à cette dernière problématique, tous les acteurs s’accordent avec la nécessité participative des bénéficiaires comme moyen de développement de l’engagement. Malheureusement le véritable obstacle à ce déploiement, demeure la construction des méthodes qui provoquent la participation des agents bénéficiaires (Galibert, 2012).

Unité de mesure, résistance et compétence

Un autre obstacle à cette démarche est la définition d’unités de mesure d’engagement cocréatif et les influences potentielles du processus d’investissement du consommateur (Magne & Lemoine, s. d.) en Sciences de Gestion. Les chercheurs perçoivent quelques fois une inconscience de participation de la part des utilisateurs à telle enseigne qu’ils se demandent s’ils mesurent eux-mêmes la portée de leurs actes sur la société (Benoît-Moreau et al., 2011).
Une autre inquiétude à cette dynamique de cocréation est l’ensemble des retombées d’une implication grandissante de l’usager dans le quotidien de l’organisation (Mencarelli & Rivière, 2014). De plus, les critiques, les résistances (Herrmann, 1993) et autres réactions des utilisateurs dont les idées ont été écartées, sont également à prévoir (Magne & Lemoine, s. d.). Sachant que ces derniers ne possèdent pas toujours les compétences ou ressources opérantes (Bonnemaizon et al., 2012) attendues dans les projets, le risque d’appauvrissement de ces projets par le recrutement d’usagers inexpérimentés s’ajoute au lot d’appréhensions (B. Cova, Louyot-Gallicher, & Bonnemaizon, 2010).

Reconnaissance, choix de participation et conditionnement sur la durée

Joint aux éléments susmentionnés, il s’est également posé le problème de rétribution, auquel il faut trouver des formes de reconnaissance, mais également les conditions d’éligibilité qui satisfont toutes les parties prenantes. Ce postulat est justifié par de nombreuses études ayant montré que les usagers s’attendent à une quelconque reconnaissance ayant un impact sur leur investissement futur (Magne & Lemoine, s. d.).
D’autres théoriciens ne s’accordent pas avec l’idée de gratification du consommateur qui apparaît plus comme un employé qu’un utilisateur (Rouquet, Reniou, & Goudarzi, 2013). C’est ainsi qu’ils proposent :
– D’améliorer l’action des usagers engagés et engager ceux qui ne le sont pas,
– De segmenter les usagers performants,
– D’évaluer cette performance.
En d’autres termes, l’injonction participative qui signifie vulgairement faire agir est difficile à mettre en œuvre. D’un autre côté, la participation apparaît comme une condition de socialisation à l’ère du numérique. Le lien communautaire se révèle central dans les problématiques sur la participation (Galibert, 2012). Ceci explique le fait que désormais les notions de participation et d’engagement cheminent ensemble.
Ce conditionnement sur la durée devient quelque peu risqué car les usagers sursollicités ont tendance à se décourager face aux pratiques économiques valorisantes appliquées à leur insu. Il convient donc de rééquilibrer les processus car l’économie actuelle soutien la théorie du don de Mauss par la gratification ou la reconnaissance de l’expertise du donateur de cette information, entre autres. Cette théorie associe également la participation au don d’information dans le but d’instaurer la confiance et consolider le rapport social (Caillé, 2004). Cependant certains usagers demeurent réfractaires face à cette théorie de don et développent une résistance (Roux, 2007) au processus de cocréation jugé intrusif. Pour suivre les conseils de (Benoit-Moreau et al., 2013), il convient donc de réfléchir sur le moyen de les rassurer, surtout lorsque le choix de participation n’est pas encore bien défini.

Modalités de contrôle, modalités juridiques et modélisation

Le consommateur subit toujours les démarches pensées par les théoriciens ou les praticiens. Il a été prouvé que l’approche du pouvoir et de la dépendance contribue à réduire l’engagement dans différentes disciplines notamment en marketing (Donada & Nogatchewsky, 2005).
Nous rajoutons à ces questionnements, le rôle de l’usager dans le choix des modalités de contrôle. La participation semble être libre mais nous percevons toujours une limitation de choix proposés par les organisations. En Sciences de l’Éducation, certains chercheurs s’accordent à l’idée selon laquelle cette pratique enferme généralement le degré d’implication du bénéficiaire (Chachkine, 2012).
Une autre préoccupation intervient sur le plan juridique car la cocréation est perçue comme une externalisation du travail de l’entreprise par des tiers non rémunérés. Les dispositions législatives ne sont pas clairement définies. Certaines questions liées au droit de propriété intellectuelle ou à la confidentialité des échanges persistent (Magne & Lemoine, s. d.). Une argumentation autour de la propriété intellectuelle nous éclaire sur les difficultés rencontrées (Cardon, 2006). En effet, il est laborieux de répertorier toutes les productions car le coût des brevets n’est pas accessible à tous. Dans le cas où les propositions sont considérées comme des innovations, la procédure est quelque peu floue. L’innovation est considérée comme « un processus d’apprentissage par l’usage » (Cardon, 2006:18) qu’il est judicieux de partager pour obtenir une meilleure qualité.
Ajouté au lot de questionnements sur l’engagement, nous intégrons son association avec la notion de motivation qui a du mal à s’éloigner de la sphère psychologique dans les pays francophones selon (Fenouillet, 2011). Ce qui soulève également des difficultés pour la modélisation de l’engagement. La pertinence de l’exploitation des ressources des consommateurs est donc importante. La participation pourrait être à la fois source de création de valeur et une source de destruction de cette dernière si elle n’est pas bien cernée (Magne & Lemoine, s. d.).
À la suite de tous ces questionnements, certains en ont fini par conclure que l’engagement ne peut être qu’un argument marketing (Schmitt, 2015). Il importe donc de proposer une acceptation qui éloigne de ces déclarations.

De l’engagement à la participation, un cycle perpétuel

Chaque niveau de participation renvoie à un niveau d’engagement différent (Galibert, 2012). Cela s’explique par le fait que les communautés « documédiatisées » trouvent de nombreuses opportunités de contribution et d’échanges à travers les formes d’interaction présentielle et virtuelle. Chaque dispositif offre des opportunités d’engagement distinctes qui convergent ou divergent avec les programmes transactionnels définis par les communautés (Zacklad, 2012a). De plus, l’adoption de l’innovation ascendante évolutive se généralise de plus en plus dans les systèmes et facilite les usages (Merzeau, 2010). Dans cette forme d’innovation, l’agent bénéficiaire « s’engage plus profondément, en participant directement à la confection d’innovations à partir des technologies et des services à sa disposition » (Cardon, 2006:14).

Acception info communicationnelle majoritairement communicationnelle

Ainsi en SIC, la communication engageante apparaît comme un carrefour giratoire pour la question de participation (Bernard, 2007). Selon Fabien Girandola (2003) repris par Galibert (2012), l’engagement est une manipulation qui renvoie à quatre (4) facteurs principaux à savoir :
– Le caractère public de l’acte qui conserve la confidentialité et la légitimité de la situation ;
– Les répercussions de l’acte,
– La valeur de l’acte,
– Le contexte de liberté.
Ces facteurs sont appuyés par les théories de l’engagement qui s’attachent particulièrement à la crédibilité du réalisateur du message dans un tel échange (Galibert, 2012). Zacklad (2012) renforce l’idée sur la crédibilité du réalisateur à travers le développement d’une communication transformative. Comme son nom l’indique, cette communication a pour but de transformer le sujet engagé et l’artefact sémiologique qui sont utilisés comme instruments, afin de développer la transaction (Zacklad, 2012a). Pour l’auteur, la communication transformative se subdivise en deux (2) formes :
– La communication performante dont la transformation en tant que performance, intervient sur les artefacts sémiologiques tels que le service immatériel, les productions culturelles ;
– La communication de cadrage qui transforme plutôt les organisations.
Avec le web 2.0, ces communications apparaissent comme des projets qui font ressortir des tensions quant à l’acception plus ou moins forte de la participation. L’acception faible consiste à intervenir dans un projet défini à l’avance par un tiers. C’est ce que Zacklad (2010) considère comme étant la coréalisation. Ce type de pratiques nécessite en général un accompagnement des utilisateurs. Sur les designs de supports techniques, elles contraignent l’usager à s’attarder sur l’objet (Merzeau, 2010). Par contre, l’acception forte laisse une marge de manoeuvre dans le processus de cadrage du projet. Elle s’apparente à la notion de codécision définie par Zacklad (2010).
Ainsi pour l’auteur, la plupart des dispositifs de médiation tels que les réseaux sociaux peuvent être considérés comme des services de coréalisation car les usagers enrichissent un concept établi par les développeurs. Les formes de participation qui leur sont permises sont de trois (3) niveaux d’écriture :
– La production de contenu par les usagers et leur structuration avec l’accord de l’administrateur du réseau social numérique. Cette structuration tient lieu d’organisation des connaissances. Elle interpelle tous les contributeurs et établit des liens communautaires entre eux. Le cadrage se fait plus ressentir dans cette forme de participation à travers la mise en oeuvre des contenus ;
– La programmation des espaces de saisie libre par l’administrateur pour les usagers ;
– Le développement de langages de programmation par les techniciens grâce aux usagers.
Ces derniers sont conçus dans le but d’améliorer les fonctionnalités de la plateforme.
Les deux derniers niveaux représentent un cadrage plus centré sur le support matériel. Nous percevons dans ces formes, une certaine exclusion d’amateurs au profit d’une sélectivité d’usagers plus expérimentés en informatique.

Attention, présence et valeur expérientielle de la participation

La participation quant à elle, prend des formes physiques, intellectuelles ou affectives mais résout le problème d’engagement comme un cycle ou un processus évolutif. En d’autres termes, la participation à un projet fait ressortir une forme d’engagement spécifique qui ne trouve pas d’explication dans un autre contexte (Schmitt, 2015). Ainsi, pour consolider le degré d’engagement, les chercheurs proposent à chaque fois une nouvelle forme de participation et le cycle reprend. Les propositions à la participation s’ouvrent à la diversité et sont de plus en plus ancrées dans les générations (Maillet & Lemoine, 2007). C’est ce que les psychologues appellent les mutations attentionnelles dues à la diversité d’interprétations, de perception, de volonté et d’émotion (Husserl, 2009; Vermersch, 2004). Ces différences d’attentionnalité construisent des expériences multiples et variées (Breyer, 2010).
Ce qui fait que l’expérience vécue par les participants n’est plus perçue « comme un processus linéaire mais comme un processus en boucle qui se transforme en fonction des espaces parcourus, mais aussi de la culture médiatique, des perceptions et des actions sous différentes formes de corporéités du sujet » (Bonfils, 2014:28).
L’approche par l’expérience nécessite donc de présenter les perspectives discursives et les perspectives narratives autour de la conception des territoires. Elle interpelle également des dimensions cognitives et sensorielles chez les participants (Bonfils, 2014). La valeur expérientielle se mesure de manière significative à travers la satisfaction d’un point de vue symbolique, hédonique et esthétique (Holbrook & Hirschman, 1982). La description de cette expérience intègre désormais l’émotionnalité des participants (M. Hassenzahl, Diefenbach, & Göritz, 2010). Elle s’enrichit par le développement d’un contexte polysensoriel et la proposition de formes de participation active (Laurichesse, 2013). Les différentes interactions entre les objets, les dispositifs ou les processus recentrent l’expérience utilisateur (UX) autour de l’individu (Law, Roto, Hassenzahl, Vermeeren, & Kort, 2009). Cette expérience est perçue comme étant mémorable, partageable lors des interactions sociales sur une durée spécifique (Karapanos, 2013). Il s’agit également d’un sentiment momentané, principalement évaluatif (bon ou mauvais) lors de l’interaction avec un produit ou un service (Hassenzahl, 2008).
Il faudrait tout de même noter que la participation se présente généralement sous deux (2) formes distinctes présentées par (Magne & Lemoine, s. d.) :
– La forme consciente où les usagers apportent des solutions ;
– La forme inconsciente où les échanges spontanés font l’objet de collecte d’information.
Ces échanges sont interpellés pour une forme de participation et servent à l’activité prospective. La participation apparaît comme une forme de cadrage de l’engagement qui donne néanmoins la possibilité aux communautés d’interpréter et de s’approprier les conditions de participation. Comme d’autres, nous rejoignons Zacklad (2012a) quant à l’idée selon laquelle la participation devrait s’appliquer à toutes les phases du processus d’intégration afin que les participants soient les réels créateurs du cadre participatif.
Nous constatons qu’à ce niveau, les chercheurs en SIC, Sciences de Gestion et Sciences de l’Éducation sont unanimes. La participation n’intervient pas uniquement sur l’objet mais contribue également à modifier les comportements humains (Akrich, 1998). Pour les psychologues, cette participation apparaît finalement comme une expérience consciente ou inconsciente modulée en fonction de la perception, la volonté, l’affect et l’intelligence des agents (Breyer, 2010; Husserl, 2009). Les sémiotiques de cette expérience sont formées et instituées par l’attentionnalité explorée au sens du phénoménologue Husserl (2009). Ainsi, l’attention primaire rejette l’anticipation et s’observe sur des actions inédites telles que le visuel. L’attention secondaire quant à elle, est observée sur des situations particulières et permet de faire appel à des compétences ancrées (Breyer, 2010) telle que la créativité (Dacheux, 2016) ou le design.
La participation se matérialise par la présence des parties prenantes soumises à des formes d’engagement et captivées par des formes d’attention (Moutte, 2016). La présence se définit comme étant le fait de manifester son talent, sa personnalité à un moment donné et dans un espace précis (Larousse, 2008). En d’autres termes, la participation à une activité marque une forme de présence pour un individu. Cette présence effective passe d’abord par le processus d’attention et fait ressortir des formes nouvelles d’engagement spécifiques au contexte d’usage (Moutte, 2016). Il ne s’agit plus uniquement de la présence physique mais également de la présence sociale (Bonfils, 2014) qui fait état des potentielles interactions sociales. L’attention module la réflexion, la volonté, l’affect et la perception et développe une intelligence plus ou moins consciente chez l’individu (Husserl, 2009). Elle permet de former et d’instituer du sens à l’expérience (Breyer, 2010). Au sens husserlien, l’attention à travers la diversité d’interprétations, renvoie à des mutations qu’il faut reconsidérer à chaque observation (Vermersch, 2004). Elle n’est pas considérée comme un phénomène statique. Elle tire ses sources de l’observation des actions quotidiennes des usagers (Merzeau, 2010).
En fonction du contexte et des moyens déployés, les formes de participation s’apparentent à des productions plus ou moins créatives ou transformatives qui relèvent de l’ordre du design (de Mozota, 2006). Ce design intègre donc les dimensions formelles, fonctionnelles, structurelles et symboliques de l’usage (V. Cova, 2004).

Points de vue conceptuels

Dispositif

Le dispositif tel que défini par Foucault (2001, p. 299) suivant l’observation de (Lafleur, 2015 : 25), est « un ensemble résolument hétérogène comportant des discours, des institutions, des aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures administratives, des énoncés scientifiques, des propositions philosophiques, morales, philanthropiques ; en résumé du dit aussi bien que du non-dit ». Dans le prolongement de cette définition, Lafleur (2015 : 26) fait ressortir une perception de Deleuze (2003, p. 316) qui 67 identifie les dispositifs comme « des machines à faire voir et à faire parler ». Pour le dictionnaire (Larousse, s. d.), le dispositif peut être défini comme étant « un ensemble de mesures prises, de moyens mis en oeuvre pour une intervention précise ». Nous pouvons le voir à partir de ces définitions, cette notion possède de nombreux qualificatifs qui complexifient son acceptation. Ainsi, en Éducation un dispositif hybride pour paraphraser Burton et al. (2011) cités par (Cottier & Person, 2018), est constitué de dimensions innovantes articulant présence et distance à travers un environnement techno pédagogique. Ce dernier intègre des formes complexes de médiatisation et de médiation (Peraya, 2013). La médiation fait référence aux mises en relation transformative des différentes entités (Akrich, 1992). Tandis que la médiatisation fait ressortir l’aspect diffusionnel des artefacts médiateurs. En SIC, on parle de dispositif médiatique pour désigner l’ensemble des supports matériels de la communication (Larroche, 2018). Le dispositif participe à la révélation et l’organisation de l’action sociale (Linard, 2002) car représentant un phénomène d’assemblages d’éléments hétérogènes technique tels que les procédures, les règles. Il intègre également une considération sociale telle que les représentations. La caractéristique technique d’un dispositif demeure plus facile à lire et à formaliser de manière à cristalliser le dispositif social. Ce qui se justifie certainement par le fait que le terme dispositif soit originaire du champ de la technique (Peraya, 2000). Tandis que le dispositif social intègre dans ses pratiques de fonctionnement la souplesse et l’interconnexion de la technique (Paquienséguy, 2007). Limiter l’acception du dispositif au champ de la technique, revient donc à le considérer uniquement comme instrument. Certes l’instrument à la différence de l’outil, autorise un détournement des usages (Larroche, 2018) mais, le dispositif doit être considéré dans son ensemble. D’un point de vue de la technicité des dispositifs de médiation, Rabardel et Samurçay (2001) cités par (Charlier, Deschryver, & Peraya, 2006) distinguent quatre (4) médiations instrumentales. Il s’agit notamment de :
– La médiation épistémique orientée vers la connaissance de l’objet ;
– La médiation praxéologique orientée vers l’action ;
– La médiation réflexive orientée vers le sujet lui-même ;
– Et la médiation relationnelle qui se réalise entre les sujets. C’est le caractère social à travers la médiation qui marque la profondeur de l’instrument, sa performance, son progrès (Akrich, 1992). Lorsque l’exploitation d’un dispositif est centrée sur 68 les objets, on parle d’un paradigme rationnel objectif et lorsqu’elle est centrée sur les acteurs de l’action, il s’agit d’un paradigme expérientielle subjectif (Linard, 2002). L’usage varié de la notion de dispositif suppose un résultat qui fait l’unanimité au niveau de sa fixation (Meunier, 1999; Zittoun, 2013). La complexité de ce concept amène de nombreux chercheurs que nous suivons dans ce raisonnement, à se limiter à un terme générique (Paquienséguy, 2007; Peraya, 2000; Peraya & Bonfils, 2012). Le qualificatif du dispositif n’est précisé que lorsqu’il fait référence à une fonction spécifique (Peraya, 2000; Peraya & Bonfils, 2012). On parlera de dispositif technique, de dispositif social, de dispositif sociotechnique, hybride ou médiatique en fonction des contextes.

Typologies de dispositifs transmédia

Transmédia narratif ou transmédia storytelling

Définitions et questionnements

D’après la définition de Jenkins (2007) partagée par (Kalinov, 2017:64) et traduite littéralement par nos soins, « le transmédia storytelling représente un processus où les éléments intégraux d’une fiction sont systématiquement dispersés sur plusieurs canaux de diffusion dans le but de créer une expérience de divertissement unifiée et coordonnée ». Chaque médium apporte une contribution unique au déroulement de l’histoire.
Il existe plusieurs acceptations du transmédia narratif sur lesquels les chercheurs n’arrivent pas à s’accorder (Jenkins, 2013). Il est considéré comme un label promotionnel par les praticiens (Schmitt, 2015). Au sens narratif, le transmédia est jugé par les chercheurs comme étant trop romantique et idéalisé (O’brien & Toms, 2 008). Pour eux, il nécessite d’être exemplifié par des pratiques complexes et une critique de la définition pour une meilleure compréhension (Bourdaa, 2013b). La narration permet d’établir une relation entre la causalité, l’effet, l’espace et le temps (Lugmayr et al., 2017). Autrement dit, elle permet de créer de la connaissance dans un contexte particulier.
Les différentes définitions données autour du transmédia narratif ont amené certains à se demander s’il ne fallait pas laisser cette notion aux journalistes et aux industriels de la culture. Pourtant il peut s’appliquer en management, en éducation, en médecine, en psychologie, en marketing et même dans la recherche sur l’expérience utilisateur pour faire référence à la définition donnée par Jenkins en 2007. Ainsi, la question de l’intérêt heuristique s’est posée à un moment (Jullier, 2014) car étant également un dispositif, de par son caractère heuristique il s’intéresse aux changements en termes de contextes ou de procédures selon l’appréciation de Jeanneret (2005 : 50), reprise par (Larroche, 2018). Le transmédia est donc une vieille notion qui ne cesse d’évoluer (Hoffman & Novak, 1996) et qui offre des opportunités multitâches aux parties prenantes (Renaud, 2014). La forme narrative modifie les usages sans toutefois modifier les médiums sur lesquels l’immersion est proposée. Cette immersion replace le bénéficiaire au centre du dispositif (Bourdaa, 2013b). Il convient de mettre en avant les éléments qui constituent la narration transmédiatique. Concepts et défauts du transmédia narratif
A cet effet, (Bourgeon, Petr, & Jarrier, 2015) font ressortir dix (10) concepts clés de la narration transmédia de Jenkins (2003) à savoir :
– La synergie entre supports médiatiques,
– Les nuances de l’univers narratif fictionnel,
– La possibilité de l’étendre de manière multiple,
– La diversité des points d’entrées,
– La forte coordination entre acteurs,
– L’intelligence collective,
– Le caractère immersif de l’univers narratif,
– Et enfin son caractère encyclopédique en permanence co-alimenté.
L’étiquette « transmédia » possède trois (3) défauts : elle n’apporte rien de conceptuellement neuf car moins utilisée par l’industrie, d’« intermédia ». Elle est imprécise en ce qui concerne le type de relations entre les oeuvres reliées à un univers unique. Enfin, n’étant appliquée qu’à des oeuvres conçues initialement pour des médias récents, comme les jeux vidéo, le web et la téléphonie mobile, elle masque l’ancienneté du phénomène transmédia. Le fait que ces trois défauts ne l’empêchent pas d’avoir beaucoup de succès à l’université est peut-être lié à l’hyperspécialisation qui règne dans les Sciences Humaines. Ce qui amène les chercheurs à se concentrer sur des objets de plus en plus précis au détriment de la recherche des points communs entre les disciplines.
Par ailleurs, le terme lui-même et ses applications sont relativement nouveaux pour l’investigation académique. Ainsi, l’ensemble de la littérature y relative est limité. La toute première thèse (Dena, 2009) rédigée autour de ce thème est récente. Par conséquent, il serait bénéfique pour les chercheurs de s’entendre sur une définition harmonisée pour favoriser des recherches plus approfondies à l’avenir.
Interprétations de la narration transmédiatique
Avant tout, il est intéressant de faire ressortir les différentes interprétations du transmédia narratif. C’est ainsi que Kalinov et Markova (2016) cités par (Kalinov, 2017:66) mais traduits par nos soins, considèrent le transmédia narratif comme « un produit multimédia qui communique son récit à travers une multitude de canaux médiatiques intégrés ». Cette définition nécessite de s’interroger sur les acceptions du terme « multitude » associé au transmédia. Aux États Unis le nombre de médiations associées suit le code de la PGA entendue Producers Guild of America qui prévoit un minimum de trois (3) médias pour prétendre à un transmédia narratif. Pour une acceptation francophone, cela repositionne la question des possibles. Pour rester dans cette convergence de culture, le nombre ou le type de supports ou expressivités possibles dans un univers transmédia devrait être plus englobant dans sa spécification.
Ces définitions échappent aux pièges du non-engagement mais demeurent imprécises. En même temps, elles sont tellement larges qu’elles ne limitent pas suffisamment la portée du récit transmédia et ses applications. Les éléments idéalistes et la focalisation sur le public sont implicites, mais ne peuvent pas faire partie d’une définition académique claire. De plus, le transmédia narratif résout certains des débats concernant la nature même de ce qui constitue un récit (Kalinov, 2017). Par ailleurs ce paradigme semble s’appliquer facilement sur un public déjà acquis. Il demeure toutefois un moyen de faire participer et/ou d’impliquer les bénéficiaires potentiels.
Nous l’avons vu, le transmédia traduit une convergence de récits et donc de culture. Ce qui suppose une rencontre potentielle entre médias classiques et médias numériques d’une part, les industries de la communication, du design et du divertissement et les communautés bénéficiaires d’autre part. Cette rencontre oblige à repenser les stratégies et les tactiques. Le transmédia traduit une expérience de consommation qui ne relève pas toujours de la fiction. Le projet transmédia est difficile à faire vivre sur une longue période compte tenu des moyens nécessaires à mettre en oeuvre pour le déployer.
Dans ce prolongement, (Bourgeon-Renault, Derbaix, Jarrier, & Petr, 2016) soumettent quatre (4) composantes dites fondamentales du transmédia. Il s’agit notamment de :
– L’univers narratif (décor, histoire, personnages, etc.),
– Les points d’entrées dans cet univers,
– La temporalité de l’immersion,
– La participation et l’engagement des usagers.
À partir des références citées jusque-là, nul doute quant aux avis divergeant sur la définition du transmédia. Experts comme académiciens s’attachent à le définir soit comme un processus, soit comme une stratégie ou comme une expérience. Ils s’accordent au moins avec l’idée de construction d’un univers narratif étalé de façon cohérente et organisée sur plusieurs médias. Ce qui soulève une problématique autour du terme « narratif ».
Hoguet (2015) cité par (Bourgeon-Renault et al., 2016) propose d’apprécier la narration par la qualification « interactive ». La conception d’un dispositif transmédia narratif selon lui, est fortement rattachée aux interactions entre les acteurs. Il s’agit d’une proposition intéressante qui complexifie davantage la compréhension du transmédia narratif. Les extensions narratives ne doivent pas être des adaptations d’une même histoire sur chaque média. La narration transmédiatique doit proposer une certaine immersion et un attachement chez les participants (Denoual, 2017). Jenkins s’attardent plus sur le côté fictionnel que sur l’aspect documentaire du transmédia narratif, pourtant les professionnels l’assimilent à une pluralité de pratiques d’écriture (Schmitt, 2015). Ces pratiques s’inspirent de techniques audiovisuelles et multimédiales. L’expression transmédia se substitue à celle qui la précède et marque une évolution. La construction de dispositif transmédia laisse place à une coopération de différents corps de métiers.

Autres transmédia : documentaire, extra-documentaire, hybride

Zacklad (2015b) fait ressortir trois (3) typologies du transmédia qui négocient plus facilement l’acceptation de cette notion en SIC. Il s’agit du transmédia documentaire, du transmédia extra-documentaire ou documentaire ancré et du transmédia hybride.

Transmédia documentaire

Le transmédia documentaire s’étale vers deux (2) possibilités : l’adaptation de la narration en plusieurs genres distincts texte, vidéo, images… Suivant un transmédia et l’extension ou transposition de la narration à la transmédialité. La transmédialité fait référence au processus de production et de consommation de la description. Plus précisément, on parle d’une adaptation d’un même contenu sur différents supports et d’une extension de contenus complémentaires sur des supports variés. Ceci soulève un aspect pervasif du contenu dans l’organisation des connaissances qu’il importe de canaliser par des méthodes praxéologiques (Sosinska-Kalata, 2012). Autrement dit, l’efficacité de cette action dépend non seulement de la compatibilité du type de connaissances partagées avec le domaine d’application, mais également de la facilité de transmission du message. Selon (Zacklad, 2015a: 29), « la documentalité transmédia consiste à créer de nouveaux documents granulaires et interactifs à partir du rassemblement d’une diversité de documents existants et de fragments documentaires répartis dans des environnements hétérogènes ». L’objectif de ce procédé est de définir les moyens de maximisation du rendement des SOC3 (Beau, 2012) d’un point de vue pratique. Le processus de transmédialité documentaire suppose une architecture des connaissances autour du document.
En SIC, sur le plan de la forme, « le document est vu comme un objet de communication régi par des règles de mise en forme plus ou moins explicites qui matérialisent un contrat de lecture entre producteur et lecteur » (Pédauque, 2003:4). Zacklad (2014:2) complète cette définition en désignant le document comme « tout support d’écriture ou d’enregistrement qui a fait l’objet d’un travail de documentarisation, d’une mise en forme spécifique visant à permettre la circulation du support dans l’espace et le temps, c’est-à-dire à le constituer en support de mémoire et en médium pour la coopération à distance ». L’Union Française des Organismes de Documentation (UFOD) citée par (Buckland, 1997:805), a défini le document comme « toute base de connaissance, fixée matériellement, susceptible d’être utilisée pour consultation, étude ou preuve ». Ce qui ne limite plus le document à sa simple matérialisation sous format papier depuis plusieurs années.
Avec les NTIC, les informaticiens lui préfèrent le nom de ressource d’où l’indécision dans la conceptualisation du document. Certains chercheurs affirment qu’il doit son nom du simple fait de son existence et d’autres pensent que sa valeur ne peut être définie qu’à travers sa publication. Cette dernière beaucoup plus appréciée, laisse libre cours à l’avis social et ajoute légitimité et notoriété à l’équation du document selon (Pédauque, 2003). La digitalisation offre de nouveaux usages autour du document. Autrement dit, les NTIC ramifient de plus en plus ces procédés. L’objet documentaire intervient à deux (2) moments : lors de sa construction ou de son intentionnalité et au moment de sa diffusion ou son utilisation (Courbières, 2012). Lors de la diffusion, il s’opère des transformations (désignées par Zacklad comme effets potentiels des artefacts médiateurs) au niveau de la perception du document. L’information tirée de ces artefacts constitue une connaissance du point de vue de l’expérience et un savoir du point de vue de l’instrument. Il s’effectue une appropriation qui facilite l’exploitation ultérieure et donne les moyens de transférer les connaissances dans la mesure où la référence (auteur ou instant de restitution) du savoir est citée. Cette référence procure à l’information son statut de savoir, celui de connaissance et par conséquent, sa capacité à être diffusée, capitalisée et partagée (Beau, 2012).

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Table des matières

Structure de la thèse
Contribution de la recherche
Première partie : conception d’expériences transmédia pour l’engagement en formation
1. Les enjeux de la théorie d’engagement : un dialogue entre plusieurs disciplines/chercheurs
Introduction du chapitre I
1.1 Approche pluri disciplinaire de l’engagement
Les écoles de pensée
1.1.1 Psychologie sociale
1.1.2 Sociologie interactionniste
Quelques disciplines concernées
1.1.3 Sciences de Gestion
1.1.4 Sciences de l’Éducation
1.1.5 Sciences de l’Information et de la Communication
1.2 Les questionnements autour de l’engagement
1.2.1 Ritualisation, nécessité participative et construction de méthodes
1.2.2 Unité de mesure, résistance et compétence
1.2.3 Reconnaissance, choix de participation et conditionnement sur la durée
1.2.4 Modalités de contrôle, modalités juridiques et modélisation
1.3 De l’engagement à la participation, un cycle perpétuel
1.3.1 Acception info communicationnelle majoritairement communicationnelle
1.3.2 Attention, présence et valeur expérientielle de la participation
1.3.3 Participation
Conclusion du chapitre I
2. État de l’art sur les dispositifs transmédia
Introduction du chapitre II
2.1 Points de vue conceptuels
2.1.1 Dispositif
2.1.2 Transmédia
2.2 Typologies de dispositifs transmédia
2.2.1 Transmédia narratif ou transmédia storytelling
2.2.2 Autres transmédia : documentaire, extra-documentaire, hybride
2.2.3 Dispositifs de médiation
Conclusion du chapitre II
Hypothèse de recherche
3. Modèles de conception d’expériences transmédia pour l’engagement
Introduction du chapitre III
3.1 Transmédia hybride de type praxéologique
3.1.1 Description de la simulation d’un projet web radio
3.1.2 Gestion du projet
3.1.3 Scénario et intentions
3.2 Transmédia hybride de type relationnel
3.2.1 Description de la classe socio numérique
3.2.2 Gestion du projet
3.2.3 Scénario et intentions
3.2.4 Apports du caractère transmédia
3.3 Transmédia hybride de type épistémique
3.3.1 Description de l’escape room
3.3.2 Contexte du jeu d’évasion
3.3.3 Gestion du projet
3.3.4 Scénario et intentions
3.4 Transmédia hybride de type réflexif
3.4.1 Description de l’évaluation multipoints de vue (EMV)
3.4.2 Gestion de projet
3.4.3 Scénario et intentions
Conclusion du chapitre III
Deuxième partie : observation et analyse du terrain pour l’engagement autour des modèles transmédia co construits
4. La formation pour adultes : un terrain propice à la créativité
Introduction du chapitre IV
4.1 Terrain de recherche
4.1.1 Unité d’observation
4.1.2 Négociation de l’intervention
4.1.3 Situation d’apprentissage avant l’intervention
4.1.4 Processus info communicationnels
4.1.5 Recueil de données d’analyse
4.2 L’observation : directe et indirecte
4.2.1 Auto-ethnographie
4.2.2 Retour d’expérience des participants
4.2.3 Groupe centré
4.2.4 Questionnaires
Conclusion du chapitre IV
5. Démarche de recherche-action : approche mixte, interprétations et analyse
Introduction du chapitre V
5.1 L’EMV, un transmédia hybride de type réflexif pour un engagement en finalité
Observations des participants : expérience EMV
5.1.1 Apprentis
5.1.2 Auditeurs
5.1.3 Autre intervenant
Résultats du questionnaire sur l’évaluation multipoints de vue
5.1.4 Analyse
5.2 La simulation de projet webradio, un transmédia hybride de type praxéologique pour un engagement en moyen situé.
5.2.1 Entretien de groupe
5.2.2 Résultats du questionnaire sur la simulation de projet webradio
5.2.3 Visualisation des données spécifiques au jeu
5.2.4 Analyse
5.3 La classe socio numérique, un transmédia hybride de type relationnel pour un engagement en relation située
5.3.1 Entretien sur la classe socio numérique (16 novembre 2017)
5.3.2 Résultats du questionnaire sur la classe socio numérique
5.3.3 Visualisation des données spécifiques à la classe socio numérique
5.3.4 Analyse
5.4 L’escape room, un transmédia hybride de type épistémique pour un engagement en moyen
5.4.1 Focus sur une expérience transmédiatique : point de vue de l’enseignante
5.4.2 Résultats du questionnaire sur le jeu d’évasion
5.4.3 Analyse
5.5 L’expérience transmédia, un engagement à travers le récit sur la durée de la formation
5.5.1 Description d’une matinée de cours
5.5.2 Résultats des questions concernant les dispositifs dans l’ensemble
5.5.3 Analyse
Conclusion du chapitre V
Conclusion générale
Références bibliographiques

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